Soigner la nuit : loin des yeux (du cadre de santé)
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Soigner la nuit : loin des yeux (du cadre de santé)
Institut de Formation de Professions de Santé Centre Hospitalier Régional Universitaire Besançon Formation Cadre de Santé Soigner la nuit : loin des yeux (du cadre de santé), près du cœur des soins Mémoire présenté en vue de l’obtention du Diplôme de Cadre de Santé Option Infirmière Marieke MOISSONNIER Promotion 2015/2016 Sous la direction de Mme Sylvie GUIGON Maître de conférences en Sociologie Université de Franche-Comté Institut de Formation de Professions de Santé Centre Hospitalier Régional Universitaire Besançon Formation Cadre de Santé Soigner la nuit : loin des yeux (du cadre de santé), près du cœur des soins Mémoire présenté en vue de l’obtention du Diplôme de Cadre de Santé Option Infirmière Marieke MOISSONNIER Promotion 2015/2016 Sous la direction de Mme Sylvie GUIGON Maître de conférences en Sociologie Université de Franche-Comté REMERCIEMENTS A ma directrice de mémoire, Madame Sylvie GUIGON, pour son accompagnement, son écoute et sa mise en confiance. A tous les professionnels audités, pour leur disponibilité et leur accueil lors des entretiens. A mes collègues de promotion, pour la richesse des échanges et leur soutien pendant cette année de formation. Et enfin à ma famille et mes amis, pour leur soutien, leur disponibilité et leur patience. SOMMAIRE SOMMAIRE 1 Introduction................................................................................................ 7 2 Cadre contextuel ....................................................................................... 9 2.1 Situation de départ ................................................................................ 9 2.2 Le travail de nuit .................................................................................. 11 2.2.1 Réglementation ............................................................................ 11 2.2.2 Une identité professionnelle nocturne .......................................... 12 2.2.3 Les relations professionnelles ...................................................... 13 2.3 3 Cadre conceptuel .................................................................................... 16 3.1 La communication ........................................................................ 17 3.1.2 L’autonomie .................................................................................. 19 Pouvoir, autorité et légitimité ............................................................... 21 3.2.1 Pouvoir ......................................................................................... 21 3.2.2 Autorité ......................................................................................... 22 3.2.3 Légitimité ...................................................................................... 24 3.3 5 Le management à distance ................................................................. 16 3.1.1 3.2 4 De la problématique à l’hypothèse ...................................................... 13 La relation de confiance ...................................................................... 25 3.3.1 Définitions..................................................................................... 25 3.3.2 Les dimensions de la confiance.................................................... 26 3.3.3 Confiance et management ........................................................... 27 Méthodologie de la recherche ................................................................ 31 4.1 Choix de l’outil..................................................................................... 31 4.2 Choix de la population......................................................................... 32 4.3 Elaboration des canevas d’entretien ................................................... 33 4.4 Lieu d’enquête .................................................................................... 33 4.5 Réalisation des entretiens ................................................................... 34 4.6 Limites, difficultés et intérêts ............................................................... 35 Analyse qualitative des entretiens ......................................................... 37 5.1 Les déterminants sociaux ................................................................... 37 5.2 Le management à distance ................................................................. 40 5.2.1 La cohésion d’équipe.................................................................... 41 5.2.2 Les moyens de communication .................................................... 42 5.2.3 Présence physique du cadre de santé ......................................... 43 5.2.4 L’évaluation .................................................................................. 45 5.2.5 Les projets .................................................................................... 47 5.2.6 L’autonomie .................................................................................. 48 5.2.7 Les relations ................................................................................. 50 5.3 5.3.1 Définition et missions.................................................................... 54 5.3.2 Relations ...................................................................................... 55 5.4 6 Le cadre de nuit .................................................................................. 53 Synthèse de l’analyse ......................................................................... 57 Enseignements tirés................................................................................ 61 6.1 Sur le plan méthodologique ................................................................ 61 6.2 Sur le plan professionnel et personnel ................................................ 62 Conclusion...................................................................................................... 64 Bibliographie .................................................................................................. 67 ANNEXE 1 .................................................................................................... 72 ANNEXE 2 .................................................................................................... 73 ANNEXE 3 .................................................................................................... 74 ANNEXE 4 .................................................................................................... 95 ANNEXE 5 .................................................................................................. 110 INTRODUCTION 1 Introduction Etudiante à l’Institut de Formation de Professions de Santé (IFPS) de Besançon, j’effectue un travail de recherche permettant la validation finale de mes études menant au diplôme de cadre de santé. Je suis placée sous la responsabilité d’une Directrice de mémoire, Madame Sylvie GUIGON, Maître de conférences en sociologie. Ce travail d’initiation à la recherche est un temps de réflexion et de questionnement des pratiques en lien avec ma future fonction d’encadrement. Par ailleurs, c’est une prise de recul permettant l’approfondissement de concepts, de théories dans le but d’améliorer la qualité de l’accompagnement des professionnels de santé. L’intégration en tant que faisant fonction cadre de santé est un moment crucial dans l’approche des équipes avec lesquelles on travaille. Cette situation nécessite une période d’observation afin de comprendre et de s’approprier tous les éléments du contexte, mais aussi de repérer les fonctionnements de chacun des acteurs. Cette expérience m’a amenée à me questionner sur la particularité de l’encadrement des équipes de nuit : des professionnels que l’on ne voit pas, qui travaillent dans l’ombre mais qui ont une place incontournable dans la prise en soins. Alors quels rôles, quelles missions pour le cadre de santé face à cette équipe ? Comment peut-il accompagner et encadrer ces soignants exerçant la nuit, autrement dit à distance de l’activité de jour et finalement du cadre ? Ce travail commence par le cheminement d’un questionnement de ma pratique, aboutissant à une problématique et à la formulation d’une hypothèse de recherche. Je développerai différents concepts tirés de mes recherches documentaires pour vous exposer ensuite la méthodologie utilisée pour la réalisation de mon enquête ainsi que l’analyse qualitative des résultats de mon étude. Ce travail permettra, in fine, de tirer des enseignements pour l’exercice de ma future fonction de cadre de santé. 7 CADRE CONTEXTUEL 2 Cadre contextuel 2.1 Situation de départ Infirmière diplômée d’Etat (IDE) depuis 2007, j’intègre, en qualité de faisant fonction cadre de santé, une unité de psychiatrie adulte en Septembre 2014. C’est une unité dite de réadmission et de réinsertion avec comme population principale des personnes atteintes de psychose. Mon arrivée se fait dans un contexte particulier puisque quelques semaines auparavant l’équipe soignante, médicale et d’encadrement se voyaient démêler et régler une situation conflictuelle au sein de l’unité. Le personnel soignant se compose d’une vingtaine d’agents, dont quatre personnels de nuit : deux infirmières et deux aide-soignantes travaillant en binôme. Ces derniers ne sont pas fixes, les aide-soignantes travaillant alternativement avec les deux infirmières. Le conflit implique les deux IDE de nuit, qui ne travaillent finalement jamais ensemble, mais qui ont des divergences de point de vue concernant la prise en charge des patients la nuit. D’un côté une infirmière accepte de donner des collations ou des cigarettes aux patients durant la nuit et l’autre leur refuse. L’équipe se scinde finalement en deux avec d’un côté et de l’autre les défenseurs de chaque pratique. La situation se règle avec l’ensemble de l’équipe pluridisciplinaire, le médecin, le Cadre et le Cadre de Pôle. A l’issu de cette situation, un changement de cadre de santé est programmé et c’est à ce moment précis que je prends mes fonctions. Ce conflit ayant été résolu avant mon arrivée, je n’ai pas ressenti le besoin de l’évoquer avec l’équipe à ma prise de poste. Peu de temps après mon intégration, je rencontre les agents un à un, incluant l’équipe de nuit, afin qu’ils se présentent mutuellement, ce qui me permet également de mieux les connaître. Je cerne en effet, lors de ces entretiens, que les pratiques des deux infirmières de nuit sont très différentes, chacune travaillant avec leurs expériences respectives, leur vécu d’infirmière, leurs connaissances et leurs craintes. Je ne donne raison ni à l’une ni à l’autre et leur rappelle simplement les missions du travail de nuit en m’appuyant sur la fiche de poste de l’unité. 9 Quelques mois plus tard, j’accueille une nouvelle aide-soignante de nuit dans le service. Peu de temps après son arrivée émerge un conflit avec l’une des deux infirmières qui a pour conséquence de relancer le clivage entre les deux agents de nuit avec un retentissement sur l’équipe de jour, qui régulièrement, remplace les agents de nuit pendant leurs absences. Dans ce centre hospitalier, la gestion managériale des équipes fixes de nuit est confiée au cadre de santé de l’unité. Le poste de cadre de nuit n’existe pas dans la structure et il n’y a pas de service de suppléance de nuit. Le remplacement des agents de nuit en cas d’absentéisme, prévu ou non, est réalisé par l’équipe de jour (autogestion dans chaque service de soins). C’est une organisation institutionnelle qui amène le personnel de jour à travailler ponctuellement la nuit lors de ces remplacements. Les deux situations évoquées ci-dessus m’amènent à me questionner : - D’une part, sur le travail de nuit : règlementation, organisation, responsabilités et autonomie des agents, - D’autre part, sur le rôle du cadre de santé face à cette équipe de nuit : Comment superviser le travail de nuit en étant présent le jour ? Comment fédérer les équipes jour/nuit ? Comment intégrer un nouveau soignant de nuit ? Comment assurer la continuité des soins ? Comment évaluer le personnel de nuit ? Je suis amenée, au cours de ce travail de recherche, à trouver des réponses à travers des concepts et dans le discours des différents professionnels interrogés sur le terrain. Dans un premier temps, je vais vous présenter, dans ses grandes lignes, le travail de nuit en milieu hospitalier. 10 2.2 Le travail de nuit 2.2.1 Réglementation De la « veilleuse » à l’infirmière du XXI siècle, assumant la responsabilité d’un service de nuit, le rôle infirmier nocturne a beaucoup évolué. Le personnel de nuit joue un rôle capital auprès des personnes soignées. De nombreux soignants se représentent le travail infirmier de nuit comme un poste comportant peu de responsabilités, avec un rythme de travail peu soutenu et des horaires non attractifs. Ces préjugés persistent en raison d’un décalage constant entre les acquis sociaux des équipes de jour et ceux des équipes de nuit. Avant 1881, il n’y avait pas de réglementation du travail de nuit, dû notamment au fait que le personnel était logé sur place à l’hôpital, effectuant des heures bien au-delà du service de veille. Ce n’est qu’en 1882 que le personnel de nuit obtient une réglementation du temps de travail de 14 heures par jour. Il faut ensuite attendre 1982, soit près d’un siècle plus tard, pour que la pénibilité du travail de nuit soit officiellement reconnue. Différents protocoles sont signés entre 1988 et 1991, concernant les conditions de travail du personnel hospitalier. Il s'agit des protocoles "Evin" du 20 octobre 1988, "Durafour" du 09 février 1990 et enfin du protocole "Durieux" du 15 novembre 1991. Ils donnent lieu à la circulaire du 23 décembre 1991 qui évoque les difficultés occasionnées par la charge psychique, la pénibilité de certaines situations de travail et l'isolement professionnel des équipes de nuit. Cette circulaire évoque également l'intérêt de faire évoluer les relations humaines entre les différents secteurs du milieu hospitalier. On reconnaît alors la charge et l’isolement du travail infirmier de nuit. On mentionne aussi, à l’époque, la nécessité de redéfinir l’organisation du travail et le mode de communication entre les équipes de jour et de nuit. C’est donc très tardivement que le travail d’infirmière de nuit est considéré comme une profession à part entière. De cette reconnaissance tardive découlent les clichés encore trop présents dans les représentations que se font de nombreux soignants à propos de cet exercice nocturne. 11 2.2.2 Une identité professionnelle nocturne « Toute la compétence de l’infirmière de nuit consiste dans l’art de prendre son temps avec chacun, tout en le partageant avec tous les autres » [1, p18]. Seule face aux angoisses des patients, elle est obligée de surmonter sa propre peur. « C’est dans cette intimité exceptionnelle avec chacune des personnes qu’elle « surveille » dans une solitude totale, qu’elle va construire ce rapport si particulier avec le patient » [1, p18]. C’est d’ailleurs lorsque cette intimité est possible que les patients osent aborder certains sujets sensibles, voire graves, ce que l’agitation du jour ne permet pas. Le travail de l’infirmière de nuit est-il plus difficile que celui de l’infirmière de jour ? Non, mais il a lieu la nuit et il semblerait que ce soit son principal inconvénient. L’infirmière de nuit n’est plus la veilleuse cantonnée au pot de tisane et au crachoir. Le rôle infirmier de nuit consiste, tout comme le jour, à prodiguer des soins infirmiers du rôle propre et délégués qui sont dévolus à sa profession : soins techniques, de confort et relationnels. L’infirmière assure la continuité des soins, des traitements et des surveillances. Elle accompagne le patient dans sa maladie tout en veillant aussi à son repos et son sommeil. Le patient, au regard de sa pathologie et des traitements administrés, n’est pas moins malade la nuit que le jour. Au fil des années, les infirmières de nuit contribuent à faire évoluer leur travail vers une certaine reconnaissance. La raréfaction des infirmières de nuit est un indicateur significatif des difficultés engendrées par ce poste. « Bien qu’étant un peu à l’écart de nombre de décisions concernant aussi bien le malade que le fonctionnement de l’établissement, il fait partie intégrante de l’activité hospitalière » [2, p22]. Le personnel de jour et de nuit partage les mêmes objectifs de continuité et de qualité des soins, c’est pourquoi les liens entre les équipes passent par la considération mutuelle, dont manquent parfois celles de nuit. « Tout comme le travail de jour, il comporte ses contraintes, ses responsabilités et requiert des compétences particulières. Cette face cachée de la nuit gagne à être connue et reconnue » [2, p22]. 12 2.2.3 Les relations professionnelles L’infirmière de nuit n’existe dans sa relation et son rôle, comme les autres professionnels d’ailleurs, que par la relation, les liens et les articulations qui le relient à l’équipe. Pourtant, « jamais présente au moment de la décision (…) l’infirmière de nuit n’existe dans l’unité de soins que par ses transmissions, ne « persiste » que par ses écrits » [3, p33]. Donc participer aux réunions dédiées au projet de service, aux réunions de synthèse clinique permet de prendre place dans le dispositif de soins. Savoir que sa parole sera entendue et prise en considération est primordial. La rencontre a lieu, les liens sont tissés, le cadre de soins et les organisations sont identifiés. De plus, « Les infirmières de nuit ont généralement une bonne vision des fonctionnements, sans doute du fait de leur « décentration » des évènements du jour. Leur contribution est très souvent constructive et dépend étroitement de la perception du cadre infirmier et des infirmières de jour de leur travail » [4, p25]. 2.3 De la problématique à l’hypothèse La qualité, la sécurité et la continuité des soins sont étroitement liées au travail d’équipe, alors comment le cadre peut-il favoriser la cohésion des équipes de jour et de nuit, afin de garantir la qualité et la sécurité des soins ? Les relations entre cadre de jour et infirmières de nuit semblent alors être primordiales. Il m’a été conseillé, lors de ma première rencontre avec ma directrice de mémoire, de réaliser des entretiens exploratoires auprès de professionnels de terrain. J’ai donc interviewé trois personnes : un soignant exerçant de jour, un soignant de nuit ainsi qu’un cadre de santé. Cette étape, préalable à la recherche, m’a permise : - D’échanger avec différents professionnels sur le sujet étudié, - De prendre du recul par rapport à mes propres expériences et représentations sur le thème, - De confronter le discours avec mes lectures, - De repérer les concepts à explorer, 13 - De compléter mes pistes de travail et ainsi d’affiner la problématique et l’hypothèse de recherche. Ces entretiens ont mis en exergue la place légitime qu’occupe l’équipe de nuit au sein de l’unité, ses missions de continuité des soins, le contexte particulier de ce travail nocturne et surtout la complexité d’encadrer ces équipes en lien avec la distance qui les sépare du cadre de santé. Au regard de ce contexte, ce dernier doit faire preuve d’adaptabilité et d’innovation dans l’accompagnement des équipes, particulièrement lorsque celles-ci travaillent en décalage (horaire). Ses qualités humaines et managériales doivent permettre de créer le lien entre les différents professionnels (de jour et de nuit). Dans le cadre de ce management à distance, il se doit de faciliter la communication, la réflexion, la coopération, les projets individuels et collectifs pour favoriser la cohésion d’équipe. Cette réflexion et ce questionnement m’amène à la problématique suivante : Comment le cadre de santé favorise-t-il le développement de l’autonomie des membres de l’équipe de nuit tout en restant légitime auprès de l’équipe autonome éloignée ? Dans ce contexte, l’hypothèse, qui sera le fil conducteur de ma recherche, est la suivante : Le management à distance nécessite d’instaurer des relations de qualité avec l’équipe éloignée et de développer des stratégies afin d’entretenir du lien et ainsi garantir la qualité et la sécurité des soins. Autrement dit, le cadre de santé, à l’aide d’outils managériaux, serait en capacité de maintenir une relation avec son équipe de nuit malgré l’absence d’interactions physiques. Cette réflexion oriente mon travail de recherche vers différents concepts que je vais vous définir à présent. 14 CADRE CONCEPTUEL 3 Cadre conceptuel 3.1 Le management à distance Le management à distance nécessite une approche particulière du pilotage et de l’animation. Ce n’est pas une nouveauté, mais il se développe aujourd’hui dans de nombreux secteurs, dont celui de la santé. Il est de plus en plus courant qu’un cadre de santé soit responsable de plusieurs services éloignés géographiquement. « Les évolutions du système de santé aboutissent au développement d’une prise en charge ambulatoire et donc à celui des services de soins organisés en unités périphériques » [5, p11]. Selon le Larousse en ligne [6], le management, nom commun d’origine angliciste (to manage, diriger) désigne « l’ensemble des techniques de direction, d’organisation et de gestion de l’entreprise ». Le manager est donc celui qui a des responsabilités, qui organise, anime, pilote un service. Dans la vision la plus courante, il est gestionnaire de son équipe, soit du personnel qui la compose. J’utiliserai donc ce terme comme synonyme du cadre de santé, ses missions de management étant au cœur de ce travail de recherche. La distance, quant à elle, se définit comme « l’intervalle ou l’espace qui sépare deux ou plusieurs personnes ». Notre vision du management est souvent guidée par le postulat suivant lequel manager et managé se trouve à proximité l’un de l’autre. Le management à distance se produit lorsque le manager est séparé physiquement de ses collaborateurs, rendant ainsi impossible tout suivi direct de leur travail. Si la distance géographique est la plus souvent évoquée quand on parle de management à distance, il ne faut cependant pas oublier l’impact des autres distances sur la relation entre le manager et le managé. Ainsi, Perlo et Hills [7, p88] estiment que les distances suivantes méritent d’être prise en considération. 16 Il s’agit de : - La distance linguistique, pouvant entraîner incompréhensions et malentendus. Ainsi une mauvaise interprétation des propos tenus peut conduire au conflit, - La distance culturelle, incarnée par des manières de penser, des pratiques professionnelles et des comportements différents, - La distance horaire, ce qui rend complexe la communication. « Ainsi les distances culturelles, linguistiques, temporelles, organisationnelles sont chacune en capacité de rendre encore plus complexe la gestion de la distance géographique, notamment par leur impact sur la communication » [8, p9]. Le contexte est similaire lorsqu’il s’agit de manager les équipes de nuit. La distance horaire implique les mêmes difficultés que la gestion d’une équipe distante géographiquement. L’interaction physique constante n’a pas lieu et les face à face sont rares voire inexistants. Quelles stratégies le cadre développe-t-il alors pour rester garant de la continuité, de la qualité et la sécurité des soins tout en entretenant un lien hiérarchique avec ces équipes évoluant à distance ? Autonomie, communication, confiance : serait-ce les clefs de la réussite ? Chacun doit trouver sa place et respecter sa position sur le terrain. Le management à distance repose sur la confiance et les responsabilités. La délégation est forte mais chacun doit apprendre à ne pas dépasser ses prérogatives. Optimiser l’utilisation des outils de communication et la diffusion de l’information mérite d’être un levier en tant que tel parce que la communication est, par définition, la matière première. 3.1.1 La communication « On ne peut pas ne pas communiquer » [9, p52]. 17 La communication est indispensable au bon fonctionnement d’une relation hiérarchique. C’est un outil indispensable dans le milieu du travail où il existe une collaboration. Communiquer, du latin communicare, c’est, selon le Larousse [6], « faire passer quelque chose à quelqu’un pour qu’il en prenne connaissance ». Il s’agit de faire savoir quelque chose à quelqu’un, le lui révéler, lui en donner connaissance, soit lui transmettre, lui divulguer l’information. Selon Jean-Yves AEBISCHER, psychopédagogue et consultant en communication, « Qui dit communiquer dit : faire connaître, faire partager, rendre commun » [10]. Le temps d’une définition, on passe de la notion d’information à celle de relation car, pour qu’il y ait partage, il faut qu’il y ait eu rencontre. Et c’est bien là toute la différence entre informer et communiquer. L’approche sociologique définit la communication comme « l’ensemble des phénomènes qui peuvent intervenir lorsqu’un individu transmet une information à un ou plusieurs autres individus à l’aide du langage articulé ou d’autres codes (ton de la voix, gestuelle, regard, respiration…) » [11]. Il est établi que le cadre de santé a pour mission de communiquer avec son équipe. Par son rôle de manager et d’animateur, il occupe une position qui lui confère une place centrale dans la communication et par conséquent le positionne au centre de l’information. Selon Alex MUCCHIELLI, « une stratégie de communication va permettre de motiver l’ensemble d’une équipe autour d’un projet commun » [12]. Le Cadre de santé a donc besoin d’une stratégie de communication afin de motiver, de rassembler ses collaborateurs et de dynamiser son équipe. La communication est pour le cadre de santé un outil de travail. En communiquant avec l’équipe, il envoie un message de reconnaissance et son aptitude à communiquer favorise l’identité professionnelle de chacun. Le premier acte de communication est la présence. Elle est considérée comme absente lorsque l’interaction n’est pas constatée. Or le management à distance, de par sa définition, est un management où les interactions physiques ne sont pas constantes. En effet, selon les personnes interviewées lors de la phase exploratoire de ma recherche, cadres de santé et infirmières sont 18 unanimes lorsqu’il s’agit des équipes de nuit : « les rencontres sont rares ou inexistantes ». Cependant, Claire LARVOR, cadre de santé, affirme que « le cadre doit rester proche de l’équipe alors même que la distance le sépare physiquement de celle-ci » [5, p13]. Selon elle, « la vigilance prend ses bases sur un système de communication varié et performant assurant le retour d’information au cadre » [5, p13]. Elle explique dans son article que le cadre doit veiller à se rendre disponible pour la communication verbale et à se déplacer. Ces moments privilégiés de rencontre peuvent permettre de se rendre compte de la réalité de l’activité et de percevoir les difficultés rencontrées au quotidien par les équipes de nuit. Ces entrevues représentent à la fois une opportunité pour transmettre les informations, pour valoriser leur travail et également entretenir le sentiment d’appartenance au collectif. Le cadre, par sa présence rassurante sur le terrain, contribuerait à donner du sens au travail et à créer du lien entre les différents acteurs. Outre la communication, l’auteur développe une autre stratégie pour mener à bien la gestion d’une équipe à distance. Selon elle, « la clé de voûte du management à distance semble être l’autonomie des soignants » [5, p13]. 3.1.2 L’autonomie L’autonomie est une quête perpétuelle dans l’histoire des infirmières. Du grec autonomia, autos (soi-même) et nomos (loi). Selon le Larousse [6], l’autonomie est « la capacité de quelqu’un à être autonome, à ne pas être dépendant d’autrui ». Etre autonome : « se dit de quelqu’un qui a une certaine indépendance, qui est capable d’agir sans avoir recours à autrui ». Comme l’explique M.A. HOFFMAN-GOSSET : « L’autonomie ne saurait se confondre avec liberté absolue, ni isolement ; être autonome, c’est choisir entre les valeurs et les courants d’opinions divers qui nous sont offerts et adhérer d’une manière lucide à telle ou telle de ces valeurs pour les faire siennes » [13, p ?]. 19 L’absence du cadre peut anéantir l’équilibre d’une équipe car celle-ci n’a plus de repères, de limites et est livrée à elle-même. L’autonomie des soignants n’est possible que si le cadre leur donne une place, s’il les reconnaît et s’il les respecte. Le manager a donc un rôle à jouer auprès des équipes pour leur permettre de se responsabiliser afin de s’investir et de s’épanouir dans leur travail quotidien. L’autonomie est, dans ce sens, fortement associée à l’idée de responsabilité. Selon Claude EVERAERE, « l’autonomie et la responsabilité sont indissociables car l’autonomie repose fondamentalement sur un acte de responsabilisation et d’identification, lequel valide en même temps le principe d’autonomie » [14, p24]. Plusieurs auteurs lient la notion d’autonomie à celle de compétence également. Pour Claude DUBAR, « la notion de compétence renvoie à l’intensité de la mobilisation personnelle, à l’engagement subjectif et aux capacités cognitives de l’individu pour comprendre, anticiper, résoudre des problèmes » [15]. L’autonomie est donc fonction de l’implication de l’individu et de ses aptitudes à mobiliser ses ressources pour affronter les situations et les difficultés. Elle se développe par l’acquisition de compétences : être compétent signifie ici être autonome et ainsi être responsable de ses actes. L’absence physique du cadre de santé induit une mobilisation de l’équipe, notamment dans la résolution de problème. Cette absence nécessite une autonomie et une cohésion des équipes de nuit. L’autonomie n’est pas envisagée dans le sens de l’abandon de l’équipe, mais dans celui de la responsabilisation des activités. « Pour mener à bien la mission qui lui est confiée, le cadre de santé doit s’entourer de collaborateurs compétents et autonomes » [5, p12]. Claire LARVOR évoque dans son article l’importance du recrutement, comme « étant le moment clé de la collaboration future du soignant exerçant à distance du cadre » [5, p13]. Il est donc incontournable de se baser sur les compétences professionnelles de l’agent lors du recrutement et en même temps de « détecter les aptitudes et traits de personnalité correspondant à l’autonomie indispensable dans le cadre d’un exercice à distance » [5, p12]. La réussite du management à distance est clairement identifiée à travers ces deux concepts que sont la communication entre le cadre et son équipe et 20 l’autonomie des soignants. Le rôle du cadre est essentiel au sein de l’organisation et il se doit d’être le chef d’orchestre du dispositif. 3.2 Pouvoir, autorité et légitimité Le cadre est défini selon Philippe BERNOUX comme étant : « L’acteur clé, le définissant provisoirement comme celui qui possède le pouvoir, une autorité ou une influence suffisants pour être en mesure de prendre des décisions importantes ou d’influer sur elles pour l’avenir du groupe dans lequel il est inséré » [16, p78]. Pour asseoir sa légitimité, le cadre de santé doit sans cesse adapter sa posture managériale en oscillant entre pouvoir et autorité. Alors qu’en est-il précisément de ces trois concepts ? 3.2.1 Pouvoir Le mot pouvoir vient du latin potere qui dérive du verbe classique posse signifiant avoir de l’importance, de l’influence, de l’efficacité mais aussi être capable de, être en puissance de. Ce mot est donc en lui-même indéterminé et moralement neutre. Le pouvoir se définit dans le Larousse [6] comme : - « Le droit pour quelqu’un de faire telle chose par son statut », - « Ascendant de quelqu’un ou de quelque chose sur quelqu’un », - « Autorité, puissance de droit ou de fait, situation de ceux qui gouverne, dirige ». Pour les sciences sociales, le pouvoir se caractérise par des processus d’interactions entre les individus au sein de la société. Le politologue américain Robert DAHL a fourni une définition devenue aujourd’hui classique : « Un individu (seul ou représentant d’une organisation, d’un Etat…) exerce un pouvoir sur un autre individu, dans la mesure où il obtient de ce dernier des comportements, des actions voire des conceptions que celui-ci n’aurait pas eu sans son intervention » [17]. 21 Selon Philippe Bernoux, « le pouvoir est la capacité pour certains individus ou groupes d’agir sur d’autres individus ou groupes » [18, p178]. Cette définition met en évidence le caractère relationnel du pouvoir. La vie quotidienne de toute organisation est constituée de conflits de pouvoir. Les individus sont différents, chacun détient une vision différente. Les acteurs jouent le jeu du pouvoir en mobilisant leurs ressources, utilisant les incertitudes et les contraintes pour créer un système de relation. Le pouvoir n’est pas lié automatiquement aux ressources de contrainte que peut donner une position hiérarchique supérieure en utilisant un rapport de force. Selon Michel Crozier et Erhard Friedberg [18, p184], les sources du pouvoir sont au nombre de quatre : - Celle qui tient à la possession d’une compétence, d’une expertise, - La maîtrise des relations avec l’environnement, - La maîtrise de la communication, - La connaissance des règles de fonctionnement. Elles renvoient toutes à la maîtrise de l’incertitude qui est l’une des conditions de l’existence du pouvoir. Selon Max WEBER, il n’y a ni attribution, ni possession : le pouvoir se déploie dans des interactions. Dominante, cette conception relationnelle s’illustre par la formule classique de l’auteur : « Le pouvoir est toute chance de faire triompher au sein d’une relation sociale, sa propre volonté, même contre des résistances ; peu importe sur quoi repose cette chance » [19, p95]. Dans beaucoup de situations, le supérieur obtient l’obéissance par sa seule autorité car il a su légitimer l’exercice de son pouvoir et instaurer une relation de confiance. 3.2.2 Autorité Le pouvoir a une mauvaise image, il est souvent associé à une forme de domination. En revanche, l’autorité est valorisée, beaucoup la trouve même insuffisante dans certains contextes. L’autorité, en tant que pouvoir de décider ou de commander, d’imposer ses volontés à autrui est un terme évidemment lié à l’activité de management. 22 Le mot « autorité » tire son étymologie de oya qui veut dire la force, ou ugra qui signifie fort. L’étymologie grecque indique oxo qui veut dire augmenter. L’étymologie latine a donné trois sens importants à ce terme : augere, accroître, bonne nouvelle ; augustus, celui qui entreprend sous des augures favorables ; auctor, celui qui fait croître. A partir de ce terme d’auctor, on aura auctoritas, la garantie, l’autorité. Il faut d’ailleurs différencier le terme auctoritas de celui de potestas qui signifie le pouvoir. Quelqu’un qui fait autorité est à la fois quelqu’un en qui on a confiance et qui peut être garant. Dans autorité, il y a aussi l’idée d’initiative, de volonté, de responsabilité. Selon le Larousse en ligne [6], « l’autorité est ce par quoi le pouvoir s’impose, ce qui produit la soumission sans recours à la contrainte physique ». C’est aussi « un type de pouvoir reconnu comme légitime par les différents acteurs de l’organisation » selon Michel CROZIER [20, p44]. L’autorité est un pouvoir que l’on accepte et devant lequel on s’incline, parce qu’on le considère comme légitime. Elle répond alors à des procédures et des valeurs qui sont connues, appliquées et respectées par tous. Selon Michel CROZIER et Erhard FRIEDBERG, l’autorité est liée à la confiance que l’on fait à quelqu’un, quelle que soit sa position dans l’organisation. Dans toutes ces définitions, l’autorité est une influence légitime reconnue qui peut s’articuler avec les concepts de pouvoir et de contrainte. Elle reste un terme difficile à distinguer du pouvoir, car elle y est souvent associée. Certaines fonctions, certains statuts vont allier la relation d’autorité et la délégation de pouvoir. « L’autorité est ce qui va donner vie à l’organisation, ce qui donne sens au pouvoir » [21, p23]. Le cadre de santé cherche à se positionner dans sa fonction d’encadrement. Il peut se retrouver confronté à un questionnement sur sa légitimité à occuper cette fonction, particulièrement quand il manage une équipe à distance. La qualification par le diplôme ne suffit généralement pas pour faire admettre son autorité. Le cadre est sans cesse observé et évalué sur sa manière de faire et sur le résultat de ses actions, c’est-à-dire sur son efficacité. Il s’agit donc pour le 23 cadre d’opter pour certaines stratégies dans le but de construire sa légitimité à exercer sa fonction. 3.2.3 Légitimité Selon la version en ligne du dictionnaire Larousse [6], la légitimité peut se définir de la manière suivante : - « État de ce qui est légitime ou considéré comme tel, par exemple la légitimité du pouvoir », - « Qualité de ce qui est juste, équitable ». De la même source, le terme légitime y est défini comme suit : - « Qui a les qualités requises par la loi, le droit (exemple, autorité légitime) ». La légitimité est donc associée à ce qui est juste, équitable et légal. Max WEBER définit la légitimité comme « la capacité pour le détenteur du pouvoir de faire admettre ses décisions » [18, p182]. Cette légitimité contribue à l’instauration d’une relation de confiance qui facilite l’application par le collaborateur des demandes faites par le supérieur hiérarchique. Par sa légitimité, celui-ci assoit son autorité. Il distingue trois types de légitimité [22, p32] : - « Le type traditionnel soutenu par une croyance en la validité majeure des coutumes immémoriales et par le respect des apports patrimoniaux de domination/dépendance (exemple : société monarchique) », - « Le type rationnel appuyé sur la logique de règles juridiques impersonnelles et abstraites et sur la compétence positive de celui qui exerce un pouvoir exécutif, administratif ou bureaucratique (exemple : le préfet). L’autorité est en lien avec la fonction de l’individu », - « Le type charismatique caractérisé par la confiance et le dévouement d’une communauté émotionnelle à l’égard d’une personne dont les dons exceptionnels ou les qualités éminentes sont reconnus (exemple : héros, prophète) ». 24 La place du cadre est en mouvance perpétuelle et c’est bien la question du positionnement et de la légitimité qui est au cœur de l’activité de management. Toute la complexité réside dans le fait de trouver le juste positionnement. Il s’agit là de proposer au professionnel un accompagnement pour permettre au cadre de bâtir, sur des bases solides, cette légitimité si importante accordée par l’équipe. Ainsi, que l’on soit confirmé ou débutant, quelques précautions s’imposent dans l’attitude à adopter dès la prise de poste afin d’asseoir sa légitimité. Le cadre de santé a donc tout intérêt à adapter son mode de communication en fonction du contexte. Par ses capacités d’argumentation, il est en mesure d’expliquer et de légitimer les décisions concernant l’unité. Lors de réorganisations, si le cadre montre aux soignants qu’il a une certaine maîtrise du sujet, il apparaît comme légitime dans sa fonction. De plus, sa hiérarchie peut reconnaître ses compétences managériales, s’il montre qu’il peut conduire les changements dans un climat de confiance. En effet, la relation de confiance est à la base de l’autorité légitime du cadre reconnue par les équipes. En ce sens, le manager a un rôle important dans l’instauration de ce climat de confiance dans l’équipe, concept que je vais vous définir à présent. 3.3 La relation de confiance « Tout au long de la vie personnelle et professionnelle, la confiance se construit, se partage et crée le fondement des relations humaines » [23, p15]. La confiance ne se décrète pas, elle se construit et se gagne progressivement. Elle résulte d’un apprentissage mais aussi de règles. Celles-ci ne la garantiront pas automatiquement mais multiplieront les chances de l’instaurer. 3.3.1 Définitions Le mot confiance vient du latin confidentia, qui signifie sécurité, foi et crédit. 25 Selon le Larousse [6], la confiance se définit comme « l’assurance, la hardiesse, le courage qui vient de la conscience qu’on a de sa valeur, de sa chance : faire face aux difficultés avec confiance ». Il s’agit également du « sentiment de quelqu’un qui se fie entièrement à quelqu’un d’autre, à quelque chose ». La relation de confiance évoquée ici implique au moins deux acteurs, avec une notion de réciprocité. Ou encore « la croyance spontanée ou acquise en la valeur morale, affective, professionnelle d’une autre personne, qui fait que l’on est incapable d’imaginer de sa part tromperie, trahison ou incompétence » [24]. Quand une personne fait confiance, elle s’appuie sur ce qu’elle connaît de l’autre, sur ses compétences par exemple, mais elle prend néanmoins un risque. Ce dernier est d’autant plus grand que cet autre est professionnellement éloigné. Dans ces conditions d’éloignement, faire confiance est à la fois un engagement et un acte. Plus la distance se réduit, plus l’espace se prête à la confidence. Confidentia signifiant également « confidence », « faire confiance », il s’agit « de permettre la confidence, soit autoriser l’autre à exprimer ses difficultés sans peur de la sanction » [6]. En sociologie : « (…) la confiance est une dimension de la sociabilité. Elle désigne une attitude positive à l’égard d’autrui. Elle repose sur l’idée que les acteurs avec lesquels on est en contact respecteront leurs engagements, n’adopteront pas d’attitudes menaçantes, respecteront les règles de civilité et de civisme » [25, p52]. 3.3.2 Les dimensions de la confiance L’adhésion à des valeurs communes va permettre de sceller une relation de confiance. C’est une mise en cohérence des intérêts individuels et collectifs, une harmonisation des comportements qui aura quatre effets selon Claude DUPUY et André TORRE [26, p69] : - Faciliter la circulation des idées, des savoirs faire et des connaissances, - Clarifier les objectifs communs et les problèmes collectifs à résoudre, - Systématiser la recherche de solutions alternatives en cas de difficultés, 26 - Favoriser l’adhésion des acteurs aux solutions élaborées en commun dans un principe de cohésion. « Se mettent ainsi en place des cercles virtueux qui instaurent un « climat de confiance » et un certain optimisme qui dynamise l’action » [26, p69]. On parle alors de climat de confiance, qui se définit comme « un sentiment de sécurité, d’harmonie existant entre différentes personnes, entre les membres d’une famille, d’un groupe quelconque » [6]. Le climat de confiance est déterminant dans la vie d’une équipe. Il s’agit de partager l’information et de faciliter l’accès de tous aux données importantes pour leur activité. La confiance n’est pas spontanée, elle se construit et s’acquiert à travers nos actions et le partage de nos expériences. Selon Alain FRONTEAU, c’est « un concept qui fonctionne comme un capital de normes et de règles de comportements, d’actions issues d’expériences et de l’histoire de l’entreprise » [27, p40]. Dans un contexte d’évolution des organisations, la performance repose aussi de plus en plus sur l’investissement personnel de chacun. Selon Michela MAZARO, « la clé de voûte de toute relation de confiance serait ainsi la confiance en soi » [28, p21]. Pour cet auteur, le manager, s’il doute de ses propres compétences, est dans l’incapacité d’établir des relations avec ses collaborateurs et d’instaurer un climat de confiance. Se savoir compétent augmente la confiance que l’on a en soi et contribue à la performance collective. Savoir un collaborateur compétent met en confiance dans la réalisation du travail quotidien. Dans son article, il cite Peter DRUCKER, le père du management, qui explique que le manager doit apprendre à devenir un « chef d’orchestre » capable d’inspirer confiance et de motiver ses salariés : « le management, pour être performant, doit devenir un exercice relationnel, une machine à fabriquer de la confiance » [28, p22]. 3.3.3 Confiance et management « Pour le manager ou le cadre de santé, faire confiance à ses collaborateurs, aux soignants, c’est avant tout leur confier des missions à réaliser, en se fiant à eux » [29, p27]. Afin de pouvoir estimer la confiance, le cadre de santé doit mettre en 27 œuvre un environnement de travail efficace basé sur des objectifs communs. Il doit être capable de fédérer et mobiliser son équipe et pour ce faire, il doit avoir confiance en elle. Selon une enquête mener par Ronny PIED, cadre de santé, il a été relevé que « la confiance (…) permettait d’obtenir la cohésion des équipes, leur autonomie, la reconnaissance et la valorisation de l’autre » en soulignant que « cela fait d’ailleurs partie de ce qui est attendu du cadre de santé en tant que responsable d’unité » [30, p400]. Les qualités humaines et managériales du cadre de santé permettent de créer du lien entre les différents professionnels, facilitant ainsi le travail en coopération autour d’un projet commun, ce dernier étant principalement d’assurer la prise en charge de la personne hospitalisée. Autour de cette culture commune, le manager va ainsi renforcer la dynamique de groupe et favoriser une réelle cohésion d’équipe dans un climat de confiance, définit ici comme fédérateur. La notion de confiance a donc un rôle prépondérant dans les relations humaines : « c’est l’essence même des liens sociaux entre les individus » [28, p21]. Etablir et entretenir une relation de confiance est donc une nécessité pour le cadre de santé, particulièrement dans un contexte de management à distance. Selon Anne LECLERC, cadre de santé, « la distance n’est pas un frein à une relation de confiance, tout est question d’objectifs communs et d’harmonisation » [31, p34]. Dans son article, l’auteur souligne que la proximité n’est pas forcément un atout managérial et ne garantit pas un climat de confiance stable et durable au sein d’une équipe. Alors que « plus le management est distant, plus la confiance est évolutive, plus les efforts de conciliation sont importants » [31, p34]. Le management à distance nécessite d’avantage d’instaurer un climat confiance. Le cadre de santé ne voit pas les agents travailler, il est donc dans l’obligation de leur accorder sa confiance. Le fait que la place de chacun soit bien définie au sein de l’équipe ainsi que les tâches à réaliser facilite la collaboration, rassure les agents et donne confiance en l’organisation. Le cadre de santé doit également disposer de qualités qui pourront susciter la confiance de ses collaborateurs : « Pour être capable de faire confiance, il faut du discernement, mais également disposer de qualités d’empathie et avoir une aptitude à porter un regard positif sur les autres » [31, p36]. Certaines valeurs se doivent d’être présentes au cœur 28 du management à distance, comme « le respect de l’autre et de ses différences, l’équité, la franchise et la transparence » [31, p36]. Dès lors, le cadre de santé a un rôle important d’information et de communication pour donner des repères, du sens, une orientation à son équipe éloignée ce qui implique qu’il soit à l’écoute, disponible et qu’il respecte ses engagements pour rester légitime. Néanmoins, la confiance se construit progressivement et a besoin d’être entretenue. 29 METHODOLOGIE 4 Méthodologie de la recherche Ce travail de recherche est basé sur le recueil de données à partir d’entretiens réalisés sur le terrain, suivant une méthodologie rigoureuse enseignée et imposée par l’IFPS, formation cadre de santé. La méthodologie de recherche repose successivement sur le choix de l’outil, de la population ciblée, de l’élaboration des canevas d’entretien, du lieu de l’enquête, de la réalisation des entretiens proprement dite puis des limites et des difficultés rencontrées au cours de cette démarche. Je vais maintenant vous en présenter les différentes étapes. 4.1 Choix de l’outil Mon choix, en accord avec ma directrice de mémoire, a été d’utiliser la méthode expérimentale qualitative. A ce stade de la recherche, les objectifs sont : - De construire un recueil de données qui mette en lien le cadre conceptuel et le terrain, - D’analyser les résultats en termes de validation ou d’invalidation de l’hypothèse de recherche, - De faire une synthèse des résultats, - De me positionner au regard de ma future fonction de cadre de santé. Pour ce faire, j’ai élaboré des canevas d’entretien servant de support lors des échanges avec les différents professionnels. Les personnes interrogées n’ont pas pris connaissance de ces outils avant la rencontre, amenant ainsi une certaine spontanéité dans le discours et une réflexion non préparée sur le thème abordé. L’enquête repose sur des entretiens semi-directifs qui ont pour avantage de permettre aux personnes interviewées de s’exprimer librement sur le thème ciblé. Avec l’entretien semi-directif : « S’instaure en principe un véritable échange au cours duquel l’interlocuteur du chercheur exprime ses perceptions d’un évènement ou d’une situation, ses interprétations ou ses expériences, tandis que, par ses questions ouvertes et ses réactions, le chercheur facilite cette expression, évite qu’elle s’éloigne des objectifs de la recherche et permet à son vis-à31 vis d’accéder à un degré maximum d’authenticité et de profondeur » [32, p174). 4.2 Choix de la population En lien avec l’hypothèse de recherche étudiée, l’échantillonnage de la population a été déterminé et validé par ma directrice de mémoire. Le thème portant sur le management à distance, je fais le choix d’interviewer des cadres de santé de jour et des soignants de nuit. Numéro Fonction entretien Secteur Ancienneté dans d’activité le service 1 CDS Nuit 4 ans 2 CDS Médecine 8 ans 3 CDS Médecine 5 ans 4 CDS EHPAD 4 ans 5 IDE nuit Médecine 4 ans 6 IDE nuit Médecine 9 ans 7 IDE nuit Psychiatrie 10 ans Les sept personnes interrogées sont issues de trois établissements différents, permettant ainsi de découvrir diverses gestions et organisations. Il paraissait judicieux et intéressant de confronter les points de vue des cadres de santé et des soignants, d’où mon choix de rencontrer ces deux catégories professionnelles. La spécificité du service n’a pas été un critère de choix, en revanche mes exigences étaient que les soignants soient des agents travaillant spécifiquement de nuit et que les cadres de santé aient la gestion de ce personnel fixe de nuit. 32 4.3 Elaboration des canevas d’entretien J’ai donc élaboré deux canevas d’entretien : le premier destiné aux cadres de santé [Annexe 1, p 72] et le second aux soignants exerçant de nuit [Annexe 2, p 73]. Ces trames ont été construites dans le but d’obtenir des réponses pertinentes en lien avec la problématique et l’hypothèse de départ. Chaque canevas s’articule autour de trois thèmes : - La place de l’équipe de nuit en unité de soins, - Le rôle du cadre de santé face à une équipe de nuit, - La relation entre le cadre de santé et les équipes de nuit. Ils sont accompagnés de questions de relance que j’utiliserai, ou non, en fonction des réponses données par l’interviewé. A la fin de chaque entretien, des déterminants sociaux sont demandés à chaque professionnel interrogé, qui sont : l’âge, le sexe, la situation familiale, le parcours professionnel et pour les soignants exerçant de nuit, les raisons ou leur choix de ce travail nocturne. Ces caractéristiques pourront être utilisées pour croiser les discours des différentes personnes interrogées et ainsi émettre des hypothèses si des écarts sont constatés. Ma directrice de mémoire m’a conseillé sur la formulation et l’ordre des questions de manière à ne pas induire les réponses. 4.4 Lieu d’enquête Mon premier choix a été d’enquêter au sein d’un grand centre hospitalier universitaire, dans le but de m’entretenir avec les différents professionnels ciblés en amont. Il faut savoir que dans les structures hospitalières, sanitaires ou médico-sociales, le poste d’encadrement de nuit peut ne pas exister. Il me fallait donc choisir un établissement de grande envergure où j’étais certaine de pouvoir m’entretenir avec un professionnel exerçant cette fonction. J’ai donc sollicité la Direction des Soins Infirmiers de cette structure en suivant rigoureusement la démarche imposée par l’IFPS. Cette dernière a été réalisée par mail où j’ai pris le soin de joindre le document fourni par mes formateurs rappelant : - Le motif de la démarche, - Le thème de la recherche, 33 - Les trames d’entretien. Il n’a pas été simple d’obtenir une réponse rapidement. J’ai donc décidé, une dizaine de jours suivant cette première demande, de solliciter un autre établissement. J’ai alors contacté, directement par téléphone, la direction d’un Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes (EHPAD), qui me donne d’emblée l’autorisation d’enquêter auprès de leur personnel. Après un échange par mail contenant les mêmes documents que lors de ma précédente demande, on m’oriente vers le cadre de santé ayant la gestion des équipes de nuit de la structure. Quelques jours après ce premier entretien, ma demande initiale est validée par le Directeur des Soins Infirmiers et je rencontre un des cadres de nuit de l’établissement ainsi que deux cadres de santé de jour. Je profite, lors de chaque face à face, pour demander l’autorisation de rencontrer et de m’entretenir avec des soignants de leurs équipes de nuit. 4.5 Réalisation des entretiens Les entretiens se sont déroulés sur une période de trois semaines environ. Ils ont duré de trente-cinq minutes à une heure vingt. J’ai pris soin de contacter les professionnels par téléphone afin de convenir d’un rendez-vous. Cinq de ces rencontres se sont déroulées sur le lieu de travail des professionnels et deux à leur domicile. A chaque rendez-vous, je débute en exposant : - Le but du travail à réaliser, - La thématique de recherche, - Les conditions de la réalisation de l’enquête. Les entretiens sont enregistrés avec l’aval de la personne interviewée et retranscrit par la suite. Ils sont anonymes et utilisés uniquement dans le cadre de mon travail de recherche, les règles de confidentialité étant ainsi respectées. Vous pouvez retrouver trois de ces retranscriptions dans cet ouvrage [Annexes 3, 4 et 5, pp 74-119]. Les professionnels se sont rendus disponibles et m’ont accueillie chaleureusement. Certains entretiens ont été entrecoupés, particulièrement ceux 34 réalisés sur les lieux de travail (appels téléphoniques par exemple), sans pour autant affecter la qualité des échanges et je n’ai pas eu à interrompre radicalement un entretien. Leurs enregistrements m’ont permis de garder la trace du discours et d’optimiser l’interactivité en étant libérée de la prise de note. 4.6 Limites, difficultés et intérêts Il a été difficile, en lien avec la population concernée par mon enquête, de prendre rendez-vous et de rencontrer les soignants de nuit. A ma grande surprise, malgré les sollicitations des cadres de santé, une seule IDE a répondu favorablement à ma requête. Face à cette difficulté, je décide de contacter personnellement deux soignantes de nuit afin de réaliser la totalité des entretiens prévus au préalable. L’une d’entre-elles exerce au sein de mon établissement d’origine. Je m’autorise alors cette démarche, sachant que ma directrice de mémoire n’était pas contre le fait que j’interroge le personnel de ma propre structure du moment que la totalité des entretiens n’était pas réalisée uniquement dans ce centre hospitalier. Il est vrai qu’il était très compliqué de rencontrer les professionnels de nuit sur leur lieu de travail, ne sachant pas à quel moment l’entretien pouvait se réaliser. La charge de travail et l’horaire nocturne ont été des freins à la concrétisation de ces rencontres. Les entretiens se sont déroulés dans une ambiance plutôt détendue, avec un temps de mise en confiance au préalable. Les échanges furent très ouverts et sans retenues de la part des professionnels interviewés. J’ai fait le choix de conclure les rencontres par les déterminants sociaux pour ne pas paraître d’emblée trop inquisitrice et ainsi fermer le débat. Il n’a pas toujours été simple de bien porter attention à tous les propos de l’informateur sans influencer et sans manifester d’opinion. La neutralité lors de ces échanges n’est pas chose facile, mais ces rencontres furent riches et fructueuses de par leur qualité. 35 ANALYSE 5 Analyse qualitative des entretiens Cette analyse s’effectue en plusieurs étapes. Après avoir retranscrit les différents entretiens, travail fastidieux mais au combien incontournable pour mener à bien cette phase de la recherche, j’ai élaboré, avec l’aide de ma directrice de mémoire, une grille d’analyse. Deux grandes thématiques sont mises en exergue, toutes deux en lien avec mon hypothèse de départ. Il s’agit : - Des outils/stratégies que le cadre de santé va utiliser ou mettre en œuvre pour favoriser l’encadrement des agents de nuit, - Du management à distance tel qu’il est vécu par le manager et le managé. Chaque axe est organisé en plusieurs sous-thèmes, le but étant ensuite de dégager de chaque entretien les mots ou phrases s’y rapportant pour enfin confronter les discours de chaque acteur. 5.1 Les déterminants sociaux Afin de faciliter la lecture des déterminants sociaux, voici une légende des abréviations utilisées dans le tableau ci-dessous : IDE : Infirmier Diplômé d’Etat CDS : Cadre De Santé ASH : Agent de Service Hospitalier AS : Aide-Soignant FF : Faisant-Fonction IFSI : Institut de Formation en Soins Infirmiers DU : Diplôme Universitaire 37 Cadre de nuit Cadre de jour 1 Sexe Age Situation familiale M 44 Divorcé Sans enfant F 50 Mariée 3 enfants Parcours professionnel IDE pendant 8 ans IDE coordinateur soins à domicile CDS diplômé en 2005 CDS soins à domicile CDS de nuit depuis 2012 ASH, AS puis IDE en 1992 IDE pendant 9 ans DU de gérontologie Cadre formateur FF en IFSI de 2001 à 2003 CDS diplômé en 2004 CDS formateur de 2004 à 2008 CDS en EHPAD depuis 2008 Encadrement d’un service de jour et des équipes de nuit depuis 2012 DU management des équipes en gérontologie IDE en 1987 IDE pendant 18 ans Cadre FF de 2005 à 2006 CDS diplômé en 2007 CDS cardiologie de 2007 à 2011 CDS SI cardiologie depuis 2011 Cadre de jour 2 F 50 Mariée 2 enfants Cadre de jour 3 F 43 Pacsée Sans enfants IDE 1 F 38 Divorcée 1 enfant AS en 2004 AS de jour pendant 6 ans IDE en 2012 IDE de nuit SI cardiologie depuis 2012 IDE 2 F 31 Divorcée 2 enfants IDE en 2007 IDE de nuit en Hématologie depuis 2007 IDE 3 F 35 Mariée 3 enfants IDE en 2005 IDE de jour en psychiatrie pendant 4 mois IDE de nuit en psychiatrie depuis 2005 IDE en 2000 IDE pendant 9 ans Cadre FF de 2009 à 2010 CDS diplômé en 2012 CDS cardiologie depuis 2012 Ancienneté dans le service 4 ans 8 ans 5 ans 4 ans 4 ans 9 ans 11 ans 38 Choix du travail de nuit : - - - Cadre de nuit : choix personnel du travail de nuit, mais souhaite à ce jour retrouver un poste de jour. Cadre de jour 1 : proposition par la direction de l’encadrement des équipes de nuit de l’établissement. Accepte la gestion d’une unité ainsi que les équipes de nuit. Souhait d’être détachée une nuit par semaine pour aller à la rencontre des agents. IDE 1 : choix personnel du travail de nuit. Gestion familiale, confort dans le travail, abord différent du patient et de la famille. IDE 2 : poste de nuit proposé par la structure à son embauche. Mais n’a jamais changer ensuite car apprécie le rythme et gestion familiale plus simple (actuellement de nuit à 75%). IDE 3 : choix personnel dès le diplôme d’infirmière, mais souhait de travaillé de jour quelques mois avant un poste de nuit. Apprécie le rythme, en retrait d’une grande équipe, solitaire et simplifie également la gestion familiale. Au regard de ce tableau, il apparaît que : Le sexe : La répartition entre sexe est représentative de la féminisation des professions paramédicales de santé. En effet, six femmes pour un seul homme ont répondu à mes entretiens. La moyenne d’âge : Les cadres interviewés ont entre 43 et 50 ans, soit une moyenne d’âge de 47 ans. Les soignantes, quant à elles, sont âgées de 31 à 38 ans, soit une moyenne d’âge de 35 ans. Situation familiale : Trois interviewés sur sept sont divorcés. Deux cadres sur quatre n’ont pas d’enfants, soit la moitié de l’échantillon. Parcours professionnel : Tous les cadres de santé sont issus de la filière infirmière. Deux d’entre eux ont une expérience dans deux secteurs différents : celui de la formation ou de la coordination de soins à domicile, avant de réintégrer un poste dans le secteur sanitaire, où ils exercent aujourd’hui depuis plus de quatre ans. Pour les deux 39 autres, le parcours pour devenir cadre de santé s’est déroulé au sein du pôle où ils travaillaient comme IDE et ont réintégré leur poste où ils exerçaient en tant que faisant-fonction cadre de santé. Concernant les soignantes interrogées, elles ont toutes les trois travaillées directement de nuit après leur diplôme (ou pratiquement). Elles exercent d’ailleurs aujourd’hui dans le même service depuis leur recrutement en tant qu’IDE, avec une moyenne d’ancienneté de huit ans dans leur unité respective. Le travail de nuit : Pour les professionnels interviewés exerçant de nuit, ils évoquent un choix personnel de ce travail nocturne. Ils mettent en avant le rythme des roulements de nuit, qui induit une plus grande disponibilité pour la vie de famille (plus de repos consécutifs par exemple). Ils soulignent également un certain confort dans le travail, de par une plus grande « liberté » d’organisation, une plus grande autonomie ainsi qu’une disponibilité relationnelle plus importante avec le patient et les familles. 5.2 Le management à distance Le terme de management à distance n’a été évoqué à aucun moment au cours des entretiens réalisés auprès des professionnels de terrain. Cependant, il est bien réel. La distance horaire est un frein à l’encadrement d’une équipe de nuit, tant pour le cadre de santé que le soignant : un frein aux rencontres, à la communication, à la reconnaissance, à l’élaboration de projet et à la relation. Malgré tout, le travail de nuit est défini par tous comme une continuité des soins. Le personnel de jour et de nuit partage le même objectif de qualité des soins et le cadre de santé se doit de jouer un rôle essentiel dans la cohésion du travail entre les équipes de jour et de nuit. 40 5.2.1 La cohésion d’équipe Le principal bénéficiaire de la continuité des soins entre équipes est le patient et son entourage, mais il ne faut pas oublier le soignant qui va trouver du sens à son action. Cette continuité jour/nuit doit permettre au patient de bénéficier des mêmes prestations (respect de sa personne, de sa liberté individuelle, de sa vie privée, de son autonomie…) et d’assurer une cohérence dans les soins. De ce fait, il est primordial pour les soignants de nuit de faire remonter auprès des personnes concernées, les collègues et plus particulièrement le cadre du service, les éléments de satisfaction et surtout d’insatisfaction manifestés par le patient et son entourage sur sa prise en charge. La continuité jour/nuit doit garantir au patient une sécurité des soins. Cette dernière est possible par la qualification et la compétence des professionnels qui interviennent dans la prise en charge. Le personnel hospitalier doit l’entourer de toute sa vigilance pour le protéger et garantir la sécurité de sa personne. Les établissements de santé sont tenus de démontrer que la prise en charge des patients permet d’assurer cette continuité des soins dans l’unité. Et qui en est le garant ? Le cadre de santé du service bien entendu : il reste garant de la qualité et de la sécurité des soins produits dans son unité par l’ensemble de l’équipe (de jour et de nuit). Les professionnels interrogés évoquent la nécessité d’une cohésion d’équipe jour/nuit et l’importance d’une réelle collaboration entre les différents acteurs de la prise en charge. Cependant, l’entente entre les soignants de jour et de nuit n’est pas toujours des plus cordiales. Le cadre de jour 3 insiste sur le fait qu’il existe depuis toujours un manque de considération mutuelle entre les deux parties. Ce discours est relayé par les trois infirmières de nuit qui ne se sentent pas toujours reconnues dans leur pratique par leurs collègues de jour, ces derniers méconnaissant ce travail nocturne. Les qualités humaines et managériales du cadre de santé doivent permettre de créer du lien entre les différents professionnels. Par un accompagnement et en facilitant le travail de coopération, le cadre se doit de prendre soins de son équipe, de créer une réelle dynamique de groupe, de privilégier le respect du travail de chacun et ainsi favoriser la qualité et la continuité des soins. 41 5.2.2 Les moyens de communication La communication entre le cadre de santé et ses équipes n’est pas sans fondement. C’est autour de cette dernière que le cadre construit du lien. Comme je l’ai développé dans la partie conceptuelle, la communication est un outil indispensable dans le milieu du travail. Les principales missions du manager et d’organiser, d’animer et de coordonner le travail d’équipe. Pour ce faire, la communication s’avère primordiale et elle est considérée comme absente lorsque l’interaction n’est pas constatée. Dans le management des équipes de nuit, la présence du cadre est rare. Pour pallier à cette interaction physique inexistante, le cadre met en place d’autres stratégies pour communiquer. A travers l’ensemble des discours, je constate que le premier moyen de communication utilisé reste le téléphone. Faute de face à face, les échanges verbaux sont présents via les télécommunications. Moyen de communication facile, il est utilisé par le manager et le managé quand une réponse rapide est souhaitée. Selon les trois cadres de jour interrogés, ils restent cependant vigilants aux horaires des appels émis, en lien avec le sommeil de leurs agents. Ils ne vont pas leur téléphoner tôt le matin par exemple quand ils savent que le soignant à travailler la nuit-même. Il existe un réel respect de la part des cadres envers leur personnel, particulièrement en ce qui concerne le rythme que leur impose les roulements de nuit. C’est aussi pour cette raison que certains utilisent les SMS (Short Message Service) pour les contacter. Une des infirmières interviewées (IDE 1) l’évoque dans son entretien : « ils ont pris le jeu malin de nous envoyer des SMS (…). En même temps c’est pratique ». Le cadre de nuit ainsi que le « cadre de jour 2 », soit la moitié de l’échantillon d’encadrement, utilisent ce moyen de communication avec leurs agents. Le cadre de nuit y a recours pour pallier à l’absentéisme et trouver rapidement des remplacements au pied levé. Il évoque l’aspect pratique des envois groupés, plutôt que de téléphoner à un grand nombre d’agents et perdre du temps. Le « cadre 2 » utilise les SMS comme moyen d’information : annonce de réunions, de formations ou d’informations diverses. D’autres utiliseront, dans le même but, un tableau de service, un cahier de transmissions propre à l’équipe de nuit ou encore l’outil informatique. Le « cadre 1 » évoque le dossier de soins informatisé pour communiquer avec ses 42 agents de nuit : « s’il y a des problèmes organisationnels ou avec des patients (…), on communique essentiellement à travers le PSI (Plan de Soins Informatisés). Pour terminer sur les moyens de communication, tous les professionnels interrogés, que ce soient les cadres ou les soignants, échangent régulièrement par le biais de « petits mots » laissés sur le bureau du cadre, évoquant le caractère rapide et efficace de cette démarche. Avec tous ces exemples cités précédemment, on peut conclure que la communication ne se solde pas toujours par un langage verbal. Finalement, l’essentiel des échanges se caractérise par une absence de face à face classique au profit de formats de communication d’une grande diversité. Le cadre utilise les nouvelles technologies de l’information et de la communication (informatique, télécommunications) dans le but de produire et de transmettre l’information sous toutes ces formes. Ces techniques peuvent être définies comme « virtuelles », cependant elles permettent de créer et maintenir du lien entre le manager et son équipe éloignée et ainsi de palier à l’absence de rencontres physiques. Malgré la rareté ou l’inexistence de contacts, le cadre communique avec son équipe et se rend disponible quand c’est nécessaire. La communication joue un rôle primordial dans l’efficacité du travail en équipe en favorisant la circulation de l’information et en permettant la liberté d’expression. Par ce moyen, le cadre de santé va renforcer la dynamique de groupe, accroître leur motivation et favoriser l’émergence de conduites collectives performantes. 5.2.3 Présence physique du cadre de santé Historiquement, le « surveillant », apparu en 1922, avait à charge un service et une équipe dont il était issu. En 1975, il a laissé la place au cadre infirmier puis, en 1995, au cadre de santé. On parle aujourd’hui de « cadre de proximité ». Arrêtons-nous sur cette notion quelques instants. Sur le plan étymologique, le terme proximité vient du latin proximitas dont le sens premier est « le voisinage d’une chose à l’égard d’une autre, soit avoir une chose à sa proximité » [6]. Le cadre dit de « proximité » renvoie à une notion d’espace 43 et peut être défini comme celui qui est disponible pour accompagner son équipe. Il est un référent, matériel, organisationnel et logistique, le « capitaine qui tient la barre » et entend les préoccupations et les difficultés des soignants. La proximité se caractérise alors comme un contenant rassurant pour les agents. Le cadre contribue ainsi à donner du sens au travail et à créer du lien entre les différents acteurs. Le rôle d’un manager de proximité est de créer une dynamique relationnelle propice à l’investissement de ses collaborateurs et à leur progression : développer leurs compétences, maintenir la motivation en mobilisant l’équipe et surtout mieux communiquer. Le cadre de santé est dit « de proximité » au sein d’un service alors que dans la situation qui nous intéresse, il n’est pas présent auprès de ses agents de nuit. Alors quelles sont les attentes des soignants par rapport à leur cadre ? Ont-ils réellement besoin de leur présence ? Les discours sont partagés sur le sujet. En ce qui concerne les cadres interrogés, ils évoquent de manière unanime le caractère primordial de rencontrer leurs collaborateurs et de les connaître. La proximité est cruciale dans l’encadrement des équipes, cependant les entrevues sont rares. Le Cadre de jour 1, détaché une nuit par semaine, se déplace, va à leur rencontre. Sa présence est souhaitée et vivement encouragée par les soignants de nuit, même si à l’instauration de ces temps d’échanges, les agents étaient en premier lieu méfiants : « ils pensaient que je venais les surveiller, pour contrôler leur travail ». Pour le manager, il a fallu un certain temps pour gagner leur confiance et débuter un réel travail en collaboration. La présence du cadre est ponctuelle mais régulière et aujourd’hui ce dernier est perçu comme leur représentant au niveau du service et de l’institution. Depuis la mise en place de cette organisation, « le personnel de nuit est reconnu, a sa place légitime, est écouté et représenté ». Les deux autres cadres de jour interviewés (2 et 3) semblent en adéquation avec le fait que la proximité est importante dans l’encadrement des équipes de nuit, en revanche ils évoquent toute la difficulté d’être présent à la fois le jour et la nuit et qu’il n’existe pas d’organisation institutionnelle pour favoriser ces rencontres. Les soignants émettent certaines réserves quant à la présence systématique du cadre de santé la nuit : « on a besoin de voir les gens, c’est certain », mais 44 parallèlement l’ensemble des infirmières interrogées sont unanimes, ne souhaitant pas une présence trop régulière. Ce qu’elles attendent de leur cadre d’unité, c’est qu’il soit disponible, à l’écoute (par téléphone principalement), capable de faire du lien avec l’équipe de jour, les médecins et surtout qu’il gère de manière efficiente leur planning. Dans le discours, on ressent que l’autonomie des soignants de nuit les dispenserait de cette présence : « on a parfois besoin de les voir, mais on gère le quotidien sans leur présence ». Le lien virtuel développé dans la partie précédente semble suffire pour les soignants. Le face à face est donc rare en réalité, à moins que le cadre de santé ne soit détaché de sa mission de jour pour les rencontrer. La plupart du temps, les soignants sont amenés à s’entretenir et à échanger avec eux une seule fois par an lors de l’évaluation annuelle. 5.2.4 L’évaluation Parmi les diverses missions du cadre de santé, il a, entre autres, un rôle d’évaluateur. Il doit déterminer les potentiels et favoriser le développement des compétences de ses agents. L’évaluation est un terme couramment utiliser dans le milieu hospitalier : l’évaluation des pratiques professionnelles, de protocoles de soins, des collaborateurs, des étudiants… Selon le Larousse [6], évaluer, c’est « déterminer, fixer, apprécier la valeur, le prix de quelque chose, d’un bien ». L’évaluation est une activité que le cadre de santé doit personnaliser, individualiser. Chaque collaborateur est singulier avec ses propres aptitudes, ses propres performances et expériences. La Haute Autorité de Santé demande, dans le cadre de la certification des établissements de santé, que durant l’évaluation des objectifs soient fixés pour l’année suivante et que les besoins individuels en formation soient identifiés. De ce fait, l’évaluation est une obligation légale pour tous les agents de la fonction publique hospitalière. Les objectifs à atteindre sont basés sur les connaissances, l’expérience, les comportements et les aptitudes. 45 Elle comporte deux aspects : - Un aspect d’appréciation des compétences professionnelles, - Un aspect chiffré : la notation. Cet entretien donne lieu à une appréciation générale portant sur les compétences du soignant et à des objectifs concernant la progression et la formation. Au vue de la finalité de cette évaluation, comment le cadre peut-il la réaliser de manière objective alors qu’il ne voit pas l’agent travailler ? Sur quels critères s’appuie-t-il, sachant que bien souvent cet entretien est un des rares, voir le seul, moment de rencontre entre le cadre et son agent ? Pour une des infirmières interrogées (IDE 1), l’évaluation est perçue comme « un temps privilégié ». Selon elle il n’y a aucune ambiguïté, le cadre a matière à évaluer les agents de nuit : « Il se base sur notre personnalité, le retour des équipes de jour, des médecins, sur notre savoir-être ». Les deux autres soignantes (IDE 2 et 3), quant à elles, sont plus sceptiques sur le sujet : « Finalement, sur quoi le cadre se base-t-il ? J’imagine qu’il se base sur le retour des médecins et des équipes de jour ». L’infirmière (IDE 3) travaillant en psychiatrie précise : «Jamais un cadre ne m’a demandé par exemple ce que je pensais de ma collègue, donc oui des fois je me dis je ne sais pas comment on est noté ». Ces deux infirmières (IDE 2 et 3) ont plus d’expérience que la première (IDE 1) et n’ont pas ou très peu exercer de jour. Ces deux caractéristiques peuvent donc influencer leur ressenti face à l’évaluation annuelle. Les trois cadres de jour interrogés parlent « d’indicateurs » sur lesquels ils s’appuient pour les évaluations, faute de voir évoluer leurs agents sur le terrain. Ils citent : - Les transmissions, - Le retour des équipes de jour, - Le retour des médecins, - Et le retour des patients. Pour les deux cadres de jour (2 et 3) exerçant dans une structure où le cadre de nuit existe, ils ne réalisent pas les entretiens d’évaluation en collaboration. Cette 46 mise en commun est trop compliquée à organiser de par la disponibilité de chacun. Il existe donc une différence notable dans l’objectivité des évaluations entre les agents de jour et ceux de nuit. En journée, le cadre est présent, il échange avec son équipe, il observe l’activité et les compétences de chaque acteur de soins. En ce qui concerne la nuit, il s’appuie sur d’autres critères, d’autres indicateurs indirects dont il se contente pour mener à bien les évaluations, qui, je le rappelle, sont la plupart du temps une des rares rencontres physiques de l’année entre lui et son agent de nuit. 5.2.5 Les projets Comme je l’explique ci-dessus, l’évaluation permet de poser des objectifs aux soignants, qui sont en lien avec l’amélioration des compétences, l’enrichissement des connaissances, mais ils doivent également être en corrélation avec les projets en cours. L’ensemble des établissements de santé, sur un plan légal et règlementaire, se doivent d’élaborer, de construire des projets. Il en existe de différents types : projet d’établissement, de pôle, de service… Ce sont des outils de travail devenus, au fil des années, incontournables et familiers aux équipes et aux dirigeants. Au sein de son unité de soins, le cadre est responsable de son élaboration, de sa formalisation et de son animation. L’intérêt ici étant de faire participer l’ensembles des acteurs à sa construction (soignants, médecin, cadre de pôle…), favorisant ainsi le respect et l’adhésion au projet. Les finalités sont les suivantes [33] : - Le projet est d’abord une dynamique, tant par le processus de production qui associe les parties prenantes que par sa mise en œuvre qui stimule les équipes, - Produit et diffusé, c’est un document de référence pour les équipes, - C’est un document évolutif, car suivi et révisé régulièrement. Même si le terme de projet est d’usage courant, la réalité est extrêmement contrastée, tant dans l’élaboration que dans la formalisation et l’usage qui en est 47 fait. En effet, lorsque l’on aborde la notion de projet avec les professionnels, les réponses sont : « il n’y a pas de projet », « on essaie d’en avoir mais on a beaucoup la tête dans le guidon », « les projets en ce moment, c’est la prise en charge du patient au mieux ». Dans le discours, les projets ne sont pas une mission prioritaire pour l’encadrement. Le seul cadre qui se base sur la mise en place de projets, c’est celui qui se détache du jour et qui va à la rencontre des agents de nuit (Cadre de jour 1). Dans cet EHPAD, le projet de service existe et il est utilisé. Les soignants sont impliqués dans sa mise en œuvre et y adhèrent. Selon le cadre interrogé, les projets facilitent le lien entre les équipes de jour et de nuit et favorisent le travail en collaboration ainsi que la communication : « le projet induit une implication du personnel de nuit dans la vie de l’établissement et il est important qu’il soit relayé entre l’équipe de jour et l’équipe de nuit ». Le management par projet est important dans la cohésion des équipes, cependant les contraintes quotidiennes, la charge de travail font que les projets ne sont pas toujours existants. Dans les différents discours, c’est le seul cadre qui travaille sur la base de projets. Les autres professionnels encadrants interviewés évoquent la continuité des soins comme base de travail et donc, dans ce sens, l’optimisation de la prise en charge du patient. Avec ou sans projet, assurer la qualité, la sécurité et la continuité des soins sont les objectifs que les cadres de santé placent au centre des réalisations des équipes soignantes de jour comme de nuit. 5.2.6 L’autonomie Le choix des professionnels de santé d’exercer de nuit est souvent motivé par l’autonomie dans le travail. En dehors de ceux relevant d’une prescription médicale, les soins, la nuit, diffèrent de ceux du jour du fait par exemple : - De l’absence de repas, - De la diminution des soins d’hygiène, - De l’absence de rencontre avec d’autres professionnels comme les kinésithérapeutes, les assistantes sociales, les diététiciennes… 48 En revanche, la nuit contribue à l’apparition d’une certaine inquiétude chez les patients, voire une angoisse qui va générer des difficultés d’endormissement, une majoration de l’inconfort entraînant des appels fréquents. Les soignants ont un rôle majeur dans l’écoute du patient et la réponse à ses besoins. Ainsi, les soins de nuit peuvent permettre un certain épanouissement professionnel. Qui plus est, le seul fait que le soignant de nuit soit un responsable isolé d’unités de soins, confronté aux angoisses des malades, positionne celui-ci comme un « sujet central ». Cette idée, développée par Anne PERRAUT SOLIVERES, montre combien pour l’infirmière, « la nécessité de réaliser des actes isolés, de répondre à des problèmes imprévisibles, d’attendre la mort parfois, rend caduques toutes les distinctions et hiérarchisations des rôles propres et prescrits » [3, p58]. Bien plus, le face à face du soignant avec lui-même l’oblige « à puiser dans ses propres ressources, le plus souvent inconnues », à faire preuve de « libre-arbitre » et d’une liberté de jugement dont sont souvent privées les infirmières de jour. Autonomie, liberté, initiatives et responsabilités sont les maîtres mots du travail de nuit. Les soignants interrogés évoquent de manière unanime une grande autonomie dans leur travail. Ils la caractérisent et la définissent en lien avec leur isolement : « on se débrouille, on ne va pas forcément appeler le médecin pour tout », « on est plus autonome que le jour car il y a moins de relais la nuit », « on apprend à être autonome, on le devient ». La nuit, les infirmières s’organisent plus librement que le jour, avec une plus grande marge de manœuvre. Le travail n’est pas toujours palpable et il diffère d’une nuit à l’autre. Bien entendu, l’activité est inégale en fonction du service de soins : le travail de nuit en réanimation n’est pas le même qu’en gériatrie ou en psychiatrie, mais l’objectif premier reste le sommeil réparateur du patient. Les soignantes mentionnent leur autonomie dans la gestion de leur planning également. C’est évidemment le cadre qui le réalise, le valide, mais les désidératas des agents sont planifiés, organisés avec l’ensemble de leurs collègues afin que leurs congés puissent être accepter par l’encadrement : « on s’arrange entre nous », « on a généralement une bonne gestion de la planification de nos congés ». Très solidaires, les équipes de nuit sont toujours bienveillantes entre elles. 49 Leur autonomie est confirmée par les cadres de santé pour des raisons identiques à celles présentées précédemment. Ils soulignent une grande solidarité dans les équipes. Ces dernières sont majoritairement revendicatrices également, en lien avec leur besoin de reconnaissance, de recherche d’identité et de légitimité aux yeux des autres. Un cadre pointe l’importance et le besoin de porter ses équipes par des projets et que la présence de l’encadrement, les relations entretenues avec les différents acteurs de la nuit favorisent une cohésion d’équipe, le travail en collaboration, le tout au service du patient. 5.2.7 Les relations Les travaux d’Yvan SAINSAULIEU révèlent l’incontournable nécessité d’une force relationnelle du cadre de santé qui justifie d’être « juste, à l’écoute, actif et disponible avec l’équipe, sorte de capitaine ou de chef d’orchestre, à la fois discret et présent » [34, p124]. Selon le Larousse en ligne [6], la relation se définit comme suit : - « Caractère, état de deux ou plusieurs choses entre lesquelles existe un rapport », - « Personne qu’on connaît, avec laquelle on a des rapports mondains, professionnels », - « Ensemble des rapports et des liens existants entre personne qui se rencontrent, se fréquentent, communiquent entre elles ». L’encadrement ne peut être dissocié de la relation qui s’opère entre le manager et le managé. Le cadre est ainsi amené « à délimiter et à animer un espace collectif, à prendre en compte la place de chacun au sein de l’équipe dans une fonction d’accompagnement » [34, p125]. Cependant il se doit d’être reconnu et légitimé par son équipe : c’est là que prend sens la relation. Selon Henry MINTZBERG, au travers des dix rôles du manager, les rôles interpersonnels sont très présents pour le cadre de santé. Comme le souligne Philippe BERNOUX, le pouvoir est lié également à la qualité de la communication. Alors, le cadre doit être attentif, développer des capacités 50 d’écoute, de disponibilité, d’accompagnement, avec un rôle majeur d’interlocuteur privilégié dans un sentiment de confiance partagée. Le cadre de santé, entre l’accompagnement et le contrôle, doit trouver le juste milieu, entre la confiance et la liberté qu’il accorde aux professionnels. L’autonomie de chacun doit être possible où le cadre reste le garant des principales règles. A travers ces auteurs, on peut dire qu’il est en relation avec le reste de l’équipe du service dans lequel il travaille, personnel de nuit y compris. Dans un souci de qualité et de continuité des soins, d’organisation, les agents de nuit sont logiquement en rapport avec : - Le cadre de santé, - L’équipe de jour, - Le corps médical, - L’institution. Les relations avec la structure dans laquelle l’agent de nuit travaille sont difficiles du fait des horaires. « La perception dévalorisée du travail de nuit par les hôpitaux est renforcée par le nouveau principe de financement à l’acte, dans la mesure où d’avantage de soins techniques sont prodigués durant la journée » [35, p26]. Cependant des efforts sont faits et sont appréciés du personnel de nuit, comme l’existence d’un encadrement, de gardes médicales, d’astreintes de direction ou techniques. Les gardes médicales sont principalement confiées aux internes sous la responsabilité d’un médecin « senior » du service. Concernant les EHPAD, ces médecins sont souvent externes à l’établissement et interviennent uniquement en cas d’urgence. La présence médicale, la nuit, dépend de la spécificité et de l’organisation de l’institution et des services de soins. Les trois IDE interrogées soulignent le manque de communication avec les médecins référents du service dans lequel elles travaillent : « On travaille avec les internes en fait », « Avec les médecins, aucune relation, ça se fait par l’intermédiaire des relèves (…), ils ne nous connaissent pas ». Le travail de nuit est bien souvent pointé du doigt par les équipes de jour. « Force est de constater que certains préjugés réciproques perdurent dans l’inconscient collectif, ce qui pénalise une multitude d’équipes » [35, p26]. De nombreux 51 soignants ont des idées bien reçues concernant leurs collègues de nuit et les raisons de ce choix du travail nocturne : fuite des responsabilités, de la hiérarchie, éviter la surcharge de travail, l’agitation du jour… Mais ceux qui travaillent le jour oublient la plupart du temps que les équipes de nuit doivent faire face à un isolement professionnel et social et qu’ils manquent souvent de reconnaissance. Il est important de rappeler que la prise en charge du patient nécessite une véritable continuité des soins, qui passe par une collaboration étroite entre les équipes. Les cadres interrogés évoquent ce clivage entre les deux équipes, les difficultés pour les agents de connaître et de respecter le travail de l’autre et le « cadre 3 » précise que : « Les rapports sont difficiles. Ça a toujours été, dans tous les services que j’ai pu connaître : l’équipe de nuit croit que l’équipe de jour n’a rien à faire et vice versa ». Parallèlement, le discours des infirmières est différent et va au-delà de ces préjugés. Les trois soignantes avec lesquelles je me suis entretenue se considèrent comme faisant partie intégrante de l’équipe. Elles évoquent une réelle collaboration, un respect mutuel et une reconnaissance de leurs pairs, assurant ainsi la qualité et la continuité des soins. En revanche, les soignants de nuit souffrent d’un manque de communication : avec les médecins, avec l’institution, le cadre de santé et avec les autres soignants. « C’est pourquoi la passation entre l’équipe de jour et l’équipe de nuit est un moment primordial et indispensable, qui permet de créer un lien » [35, p27]. Ces temps de parole sont caractérisés comme essentiels pour les IDE interviewées. En plus de la présentation de chaque patient, les relèves facilitent le passage de l’information. De par leur isolement « horaire », les soignants de nuit ne disposent pas des mêmes moyens d’information que les équipes de jour. Les différentes réunions, les staffs, les formations sont le plus souvent organisés en début d’après-midi. Il est donc rare que le personnel de nuit puisse y assister, quand il y est invité. L’ « IDE 2 » l’évoque comme un manque de reconnaissance : « Ils pensent pas forcément à nous. Ils font des réunions de service pour les protocoles ou même les formations, ils vont pas regarder l’heure. (…) Alors après du coup tu peux pas être acteur comme tu veux dans l’équipe ». Il est alors probable que cela renforce l’impression de ces personnels que ces réunions, ou formations, leur sont inaccessibles. Qui plus est, l’horaire des 52 réunions, ne tenant pas compte de leurs impératifs, les démotive à faire des efforts pour y assister. Le « cadre de jour 2 » y fait référence lors de l’entretien. Elle explique que pour les diverses réunions ou formation : « Je regarde les équipes de nuit afin qu’elles puissent venir, donc je fais attention à ça (…), mais c’est la chose la plus compliquée à organiser parce qu’il faut que les médecins soient disponibles. Il y va de la disponibilité de chacun ». Malgré cette prise en considération, les équipes de nuit ne sont pas une priorité dans les organisations de jour alors qu’il est primordial qu’elles soient informées et qu’elles participent aux décisions thérapeutiques pour assurer « une continuité « intelligente » des soins » [35, p27]. Elles ne doivent en aucun cas être exclues des réunions et des formations. Leur participation permet de créer du lien avec l’équipe pluridisciplinaire, entre des personnes qui ne font finalement que se croiser. « Cette collaboration jour/nuit est le fruit d’un long parcours jalonné de tâtonnements, de désaccords, de heurts, mais toujours orienté vers la qualité des soins » [35, p26]. Pour les IDE interrogées, l’organisation est au service de la qualité et la continuité des soins. L’esprit d’équipe, que ce soit pour répondre aux attentes du malade ou en cas d’urgence, est cité par le personnel de nuit comme primordial pour mener à bien leurs missions. 5.3 Le cadre de nuit Quel que soit le poste, travailler de nuit consiste à réaliser des missions similaires à celles de jour. Cependant, la transposition, dans un contexte et un environnement de nuit, n’est pas chose simple à réaliser. Dans deux cas sur trois il n’y a pas de cadre de santé affecté à un poste de nuit. En revanche, s’il y a des équipes fixes de nuit, un cadre de proximité, ou parfois un cadre supérieur, sont systématiquement affectés aux postes de nuit. 53 5.3.1 Définition et missions Le cadre de santé est défini par le référentiel d’activités et de compétences du Ministère des Affaires Sociales et de la Santé comme étant : « Un responsable de secteur d’activité de soin, un organisateur de l’activité de soin et des prestations associées, un manager d’équipe et un coordonnateur des moyens d’un service de soins, médicotechnique ou de rééducation, en veillant à l’efficacité des qualités de prestations » [36]. En poste de nuit, il doit mettre en œuvre ses missions sur plusieurs unités de soins, sans être nommé responsable direct. Carol SYLVESTRE, cadre supérieur de santé, évoque dans un article les diverses missions du cadre de nuit [23, p11]. Etre cadre de nuit, c’est : Répondre à l’urgence des situations de soins, Garantir le fonctionnement des services et des équipements, Coordonner les ressources humaines, Assurer la sécurité des professionnels, des patients, des soins et des biens, Véhiculer l’information et assurer la communication, Coordonner le flux des patients. « Le positionnement transversal du cadre de santé en poste de nuit est au cœur d’une réseau qu’il faut bien connaître pour éviter toute fracture de la cohésion managériale » [37, p12]. En effet, la continuité des soins sollicite l’ensemble des fonctions 24 heures sur 24 pour s’inscrire dans une efficience quotidienne. Le cadre en poste de nuit n’échappe pas à cette cohérence, sa dynamique d’encadrement doit s’adapter à deux faits spécifiques, la nuit et la transversalité. La responsabilité ne se limite pas à une, deux ou trois unités mais à une dimension globale de l’institution. Selon le cadre de nuit interrogé : « Notre mission, c’est déjà de gérer l’établissement la nuit ». Pour une structure hospitalière universitaire de 1200 lits, de 65 services sur deux sites distincts, les cadres de nuit sont au nombre de trois actuellement, sachant qu’un quatrième poste est à pourvoir depuis plus de six mois. Dans le discours, les diverses missions sont clairement identifiées et correspondent en tout point à celles précédemment citées. Cependant, certaines prennent l’ascendant sur d’autres. 54 Les cadres de nuit ont un rôle important dans l’accompagnement des agents dans leurs secteurs respectifs. Ils sont amenés à se déplacer dans les différents services, soit de leur propre initiative, soit sur sollicitation de l’encadrement de jour, soit à la demande des équipes de nuit ou lors d’une problématique à solutionner. Ces visites auprès des équipes, leur accompagnement, la proximité et les relations humaines qui en découlent sont les bases pour développer une vision globale de l’établissement. Cependant, l’activité principale du cadre de nuit est tout autre. Dans le but de garantir la continuité et la sécurité des soins, il se doit de coordonner les ressources humaines en gérant l’absentéisme de dernière minute. Il dispose pour ce faire d’une équipe spécifique d’infirmières et d’aidesoignantes au sein d’un service de suppléance de nuit. La gestion de l’absentéisme reste leur principale mission au quotidien, au détriment de l’encadrement de proximité : « je ne vais pas vous mentir, on n’est pas cadre de proximité ». Alors quelles relations le cadre de nuit entretient-il avec ses agents, ses pairs ou avec l’institution ? Est-il davantage présent que le cadre de jour ? C’est ce que je vais tenter d’exposer dans la partie ci-dessous. 5.3.2 Relations La responsabilité de cadre de nuit ne s’exerce pas au sein d’un service mais au cœur de l’institution. Pour mener à bien ses missions, il se doit d’être au centre du dispositif de continuité d’encadrement. Pour ce faire, il doit créer des liens avec tous les partenaires de jour comme de nuit. Avec l’institution : Il travaille en collaboration avec les différentes directions de l’établissement et la nuit sous la hiérarchie du directeur de garde. « Afin de ne pas s’isoler, de rester dans la dynamique de l’établissement, d’être en adéquation avec les enjeux qui se déroulent en journée, il s’investit de jour en participant à des groupes de travail, des commissions, des projets institutionnels, des formation » [38, p17]. 55 Le cadre de nuit interrogé explique qu’il intervient régulièrement en journée pour participer à des réunions ou des groupes de travail. Il y a un réel investissement institutionnel, de jour comme de nuit. Avec les cadres de jour : Il est en relation avec ses pairs qui exercent le jour. Le besoin de communiquer s’opère dans les deux sens : soit il est sollicité, soit c’est lui qui contacte les cadres des services quand il a besoin de transmettre certaines informations. « L’objectif est de leur signaler tout problème dans leur service (…), comme ça ils sont au courant ». Le décalage horaire fait que le système de communication est contraint, c’est donc principalement par mail que les cadres communiquent entre eux : « Essentiellement par mail puisque moi quand j’arrive ils ne sont jamais là ». Il souligne le caractère primordial de cette collaboration afin d’entretenir du lien avec les cadres de jour et ainsi favoriser et maintenir la qualité et la continuité de l’encadrement. Avec les agents de nuit : Comme je l’ai développé en amont, l’encadrement de nuit ne se limite pas à une ou deux unités, mais à l’ensemble des services de la structure dans laquelle il exerce. En ce qui concerne l’établissement du cadre de nuit interviewé, il s’agit de 65 services et la gestion d’environ 450 agents. Il assure, avec ses collègues, l’encadrement et l’accompagnement de l’ensemble de ces professionnels dans leurs secteurs de soins respectifs. Le management n’est plus à distance dans ce cas puisqu’il est présent sur la même plage horaire que le personnel de nuit, cependant, en lien avec son grand nombre de missions, il les rencontre rarement : « la nuit, on les rencontre un petit peu, mais pour l’instant insuffisamment ». Ils communiquent essentiellement par téléphone et le cadre de nuit ne se déplace que si la situation l’exige. Pour régler les problèmes d’absentéisme, il a, lui aussi, recours aux SMS avec l’aide d’un programme permettant les envois groupés : « c’est un bon système qui permet d’éviter d’appeler 100 ou 150 agents (…), après ceux qui sont disponibles nous rappellent. En général ça marche bien ». Toutefois, malgré le manque de présence au sein des unités, le cadre de nuit connaît chaque professionnel qu’il encadre : « je les connais tous, tout le monde me connait ». Les infirmières 56 interrogées exerçant dans cette même structure confirment et souligne le caractère rassurant de la présence d’un encadrement la nuit. Le cadre de nuit devient alors une personne de confiance vers qui se tourner. Comme le souligne Cédrick LEMERCIER dans son article : « Le cadre de nuit est engagé dans une logique de valorisation et de reconnaissance du travail des personnels. Ce management bienveillant permet de renforcer la coopération professionnelle des différents acteurs et de développer un bien-être au travail » [38, p16]. 5.4 Synthèse de l’analyse J’ai, au cours de l’élaboration de ce travail, cherché à comprendre comment le cadre de santé tente de construire et de maintenir une relation avec son équipe de nuit malgré la distance temporelle et l’absence d’interactions physiques avec ses agents. L’hypothèse de départ de cette recherche était : « Le management à distance nécessite d’instaurer des relations de qualité avec l’équipe éloignée et de développer des stratégies afin d’entretenir du lien et ainsi garantir la qualité et la sécurité des soins ». Après avoir développé le concept du management à distance, j’ai observé les outils utilisés par le cadre de santé afin de manager au mieux les équipes de nuit et ainsi maintenir du lien avec ce personnel. Manager à distance signifie tenir compte de l’éloignement, quel qu’il soit. A travers des stratégies de communication, le cadre de santé a pour missions d’instaurer une cohésion d’équipe et un climat de confiance au sein de son unité et ainsi favoriser la continuité de soins. La communication entre le cadre et son équipe n’est pas sans fondement : c’est autour de cette dernière que le manager construit du lien. La communication ouvre sur des échanges dont la qualité revêt un caractère essentiel pour que chacun soit acteur dans la prise en charge de la personne soignée. Les face à face sont rares, alors le cadre s’appuie sur d’autres stratégies pour communiquer : le téléphone, le SMS, l’informatique ou encore l’affichage. Il construit finalement des formes de présence qui sont différentes d’un encadrement de proximité et auxquelles les agents adhèrent. Ces derniers attendent de leur cadre de l’écoute, de la disponibilité lorsqu’ils en ont besoin, 57 favorisant ainsi la reconnaissance de leur travail et de leur place au sein de l’équipe. Ceci nécessite, pour le cadre de santé, de travailler l’ambiance et les relations dans le service. Il est ainsi amené à animer un espace collectif, à prendre en compte la place de chacun et d’instaurer un climat de confiance, ce dernier étant déterminant pour la vie du groupe. Le management à distance est basé sur la confiance réciproque qui lie le cadre de santé et le personnel de nuit : établir et entretenir une relation de confiance est une condition sine qua non de la coopération, de la collaboration et de la réalisation d’objectifs communs. La confiance permet ainsi des relations de travail sereines favorisant une qualité de vie au travail. La distance impose une forme d’autonomie chez les soignants qui permet aux acteurs d’organiser l’activité nocturne dans le respect des règles de bonnes pratiques. Ces dernières sont déterminées par les protocoles, les projets de soins et se doivent d’être contrôler par le cadre de santé, garantissant ainsi la qualité et la sécurité des soins. La distance n’est donc pas un frein à une relation de confiance, ce qui change c’est la nature du contact. Comme j’ai pu le constater lors des entretiens avec les infirmières de nuit, leurs besoins de relations avec le manager restent modérés. Ce sont des soignants indépendants qui ont pour habitude de gérer leur travail en toute autonomie et l’initiative du contact avec le cadre de santé est pensée sur la base du besoin. Le management à distance nécessite une relation de confiance, c’est indéniable, et les professionnels, managers et managés, sont unanimes sur le sujet : ils se font confiance. Cependant, il n’est pas question pour le cadre d’accorder sa confiance aveuglément, la vigilance restant de mise. En effet, s’il fait confiance aux professionnels compétents, il n’en reste pas moins le garant de la qualité et la sécurité des soins et il se doit de pouvoir assumer cette responsabilité. Ainsi, une meilleure connaissance des agents lui permet de porter sa confiance. Il utilisera pour cela la traçabilité dans les dossiers de soins, les retours positifs et/ou négatifs émanant de l’équipe de jour, des médecins ou du patient lui-même. Ces indicateurs lui serviront de base afin d’objectiver l’entretien annuel d’évaluation. Les compétences des professionnels peuvent aussi être évaluées lors des réunions, des formations ou lors de groupes de travail. Il est donc primordial de solliciter les équipes de nuit à ces divers temps d’échanges et de permettre leur 58 participation en tenant compte des contraintes inhérentes au travail de nuit (temps de repos et de sommeil par exemple). Le cadre de santé pourra ainsi apprécier, de par la présence des agents de nuit, leurs connaissances, leurs compétences et leurs pratiques professionnelles. Au vue de cette analyse, les cadres de santé attachent une grande importance à la communication dans l’encadrement de leur équipe de nuit. Cette notion reste une valeur essentielle dans leurs pratiques malgré la distance horaire qui les sépare. Pour communiquer, pour maintenir du lien avec les soignants de nuit, les cadres audités développent de véritables stratégies et mettent en place des outils auxquels adhèrent leurs agents. L’hypothèse de départ est donc validée. Cependant, cela suffit-il ? On se rend compte, à travers cette réflexion, que des différences subsistent entre l’encadrement des équipes de jour et celles de nuit. Manager des équipes de nuit requiert la plus grande vigilance et de nombreux paramètres sont à prendre en compte. La qualité des soins dépend des bonnes conditions de travail des professionnels, de leur qualité de vie et de l’attention qui leur est portée. Trop souvent perçu comme des « veilleurs », les soignants de nuit doivent sortir de l’ombre et se positionner comme de véritables partenaires, exerçant dans un espace-temps difficile mais garantissant la continuité des soins. « Vaincre le cloisonnement jour/nuit demeure un vaste projet » [39, p22] et le cadre de santé y joue un rôle essentiel. 59 ENSEIGNEMENT TIRES 6 Enseignements tirés La finalité de ce mémoire est de s’initier à un travail, à une démarche de recherche appliquée au domaine professionnel qui est le mien, soit l’encadrement de professionnels de santé. Il a été le fruit d’une réflexion personnelle. Ce fut long et parfois déstabilisant, néanmoins cela a été source de divers apprentissages. 6.1 Sur le plan méthodologique Pour me permettre d’appréhender et d’approfondir le sujet, il a fallu suivre un cheminement et respecter certaines étapes. Je me suis confrontée à une méthodologie imposée par l’institut de formation et par ma directrice de mémoire, mais qui a inéluctablement, je peux le confirmer aujourd’hui, faciliter sa conception. Cette étude m’a permis d’élargir mes champs de connaissances à travers mes lectures, certes, mais également à travers les rencontres avec les différents professionnels lors des entretiens. Ce fut un réel plaisir de rencontrer et d’échanger avec des personnes de terrain. Pour mener à bien les entretiens, j’ai pu mesurer l’importance de l’élaboration des canevas : le choix des questions et leur formulation sont des points déterminants au bon déroulement de ces rencontres. J’ai dû mettre en œuvre mes capacités d’écoute active en me gardant de tout jugement, permettant ainsi une liberté d’expression. Cette posture demande une grande concentration, des capacités de reformulation, témoignant ainsi de l’attention particulière portée à son interlocuteur. Ce travail m’a demandé un investissement important. C’est en quelque sorte le fil rouge de la formation, qui demande de la rigueur ainsi qu’une bonne gestion du temps. Enfin, l’accompagnement par ma directrice de mémoire, qui a su me guider et me soutenir tout au long de ce cheminement. J’ai pu apprécier sa clairvoyance et ses bons conseils, évitant ainsi les mauvaises directions ou les chemins dispersés. 61 6.2 Sur le plan professionnel et personnel Pour ma pratique professionnelle, ce travail de recherche m’offre des outils, des stratégies de management sur lesquels je ne m’appuyais pas de manière évidente durant mon expérience de faisant fonction dans l’encadrement. En menant cette réflexion, en parcourant la littérature mais aussi et surtout en échangeant avec les divers professionnels (cadres et soignants), j’ai pu analyser ma propre pratique dans le but de la réajuster et ainsi donner du sens à mes actions. Cette étude devrait permettre au futur cadre de santé que je serai, d’aborder l’encadrement des agents de nuit de manière plus objective. C’est donc pour moi un élément de compétence supplémentaire que cette année de formation m’aura apportée. Qui plus est, ce travail de recherche pourra éventuellement servir à d’autres professionnels en quête de réponses face au thème traité. A titre personnel, l’élaboration de ce travail m’a permis de découvrir certaines de mes capacités sur lesquelles je doutais jusqu’alors. J’éprouvais une réelle appréhension de mener à bien ce projet, particulièrement sa rédaction. Ce fut un travail de longue haleine, entrecoupé de doutes, de stress, mais à ce jour je peux dire que j’ai su gérer ces moments compliqués, « l’abandon » familial parfois, de longues soirées à écrire, des loisirs sacrifiés… Son aboutissement fut douloureux, après une période de gestation de plusieurs mois, mais aujourd’hui, j’éprouve une grande fierté d’avoir pu mener ce projet à terme. 62 CONCLUSION Conclusion Certains préjugés sur les soignants travaillant la nuit sont tenaces. Soit on estime ces soignants, dont la vocation est, par définition, d’apporter de bons soins, soit on ferme les yeux sur le monde des « veilleuses » parce que la nuit « tous les chats sont gris ». Les organisations de travail imposées aux soignants de nuit ne tiennent souvent pas compte de la spécificité de cet espace-temps particulier. Travailler de nuit, c’est accepter d’exercer dans un environnement restreint, dans une équipe réduite, de ne pas participer aux temps forts de la vie de l’unité et de ne pas être impliqué de près dans l’élaboration des projets de soins. Le choix du travail de nuit dans la carrière des professionnels de santé n’est que rarement lié à un projet professionnel. Il est souvent, comme j’ai pu le découvrir lors des entretiens, une réponse organisationnelle personnelle. Malgré la présence d’un interlocuteur privilégié, qu’est le cadre de santé, la relation avec ce dernier est, dans la plupart des cas, quasi inexistante ou considérée comme telle par les soignants. Peu de cadres prennent le soin d’assurer des nocturnes pour rencontrer leur équipe de nuit et il en est de même avec les cadres de nuit, lorsque ce poste existe dans les structures. Leurs multitudes de missions, la charge de travail et la distance horaire sont des freins à l’encadrement des agents de nuit, particulièrement aux rencontres physiques. A travers ce travail de recherche, j’ai pu éclairer mon questionnement de départ. L’exploration documentaire et l’enquête de terrain m’ont apporté une nouvelle vision et des réponses. Les interactions physiques entre le cadre de santé et les équipes de nuit sont rares, voire inexistantes. Néanmoins, cette situation n’est pas toujours vécue de manière négative par les soignants. Ce qu’ils attendent finalement du cadre de l’unité c’est de l’écoute, de la disponibilité, des plannings cohérents, gages de reconnaissance suffisante dans l’exercice de leur fonction. Pour ce faire, les managers développent d’autres formes de présence passant par une communication sans face à face, mais tout aussi efficace puisque cette relation suffit aux professionnels de nuit. Je réalise, après cette longue réflexion sur le sujet, que la place du cadre de santé dans la communication a un impact important dans l’encadrement et l’accompagnement des équipes de nuit, sans compter que les outils modernes de communication facilitent la gestion des 64 équipes à distance. Le manager se doit d’avoir confiance en son personnel, mais celle-ci n’exclut pas la vigilance. Il doit pouvoir s’appuyer sur une équipe compétente, autonome et doit se positionner en tant que chef d’orchestre, comme acteur clé au sein de son unité, garantissant ainsi la qualité et la continuité des soins. 65 BIBLIOGRAPHIE Bibliographie [1] PERRAUT SOLIVERES Anne. La nuit, les infirmières soignent autrement. Revue de l’infirmière, Septembre 2007, n° 133, pp 17-18. [2] BERRUET Christine. Une nuit en service de cancérologie. Revue de l’infirmière, Septembre 2007, n°133, pp 19-22. [3] PERRAUT SOLIVERES Anne. Infirmières, le savoir de la nuit. Paris : PUF, 2012, 291p. [4] CANCELLIER Daniel. 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Soins Gérontologie, Juillet/Aout 2011, n°90, pp 20-22. 70 ANNEXES ANNEXE 1 QUESTIONNAIRE Cadre de santé Age : Sexe : Situation familiale : Parcours professionnel : Quelle place à l’équipe de nuit dans votre unité de soins ? - Missions - Spécificités - Cohésion d’équipe, relation avec l’équipe de jour, avec l’équipe médicale - Comment le CDS se voit-il au milieu de ces 2 équipes ? Quelles sont vos missions en tant que CDS face à une équipe de nuit ? - Quelles attentes pour les agents ? - Comment communiquez-vous ? - Comment se fait le passage des informations ? - Evaluation annuelle Pouvez-vous parler de « relation » avec votre équipe de nuit ? - Sous quelle forme ? Fréquence ? - Sollicitation de la part de l’équipe ou de vous-même ? - Transmissions - Recrutement - Gestion des conflits ANNEXE 2 QUESTIONNAIRE Soignant de nuit Age : Sexe : Situation familiale : Parcours professionnel : Choix personnel de travailler la nuit ? Quelle place pour l’équipe de nuit dans votre unité de soins ? - Quelles spécificités du travail de nuit ? - Cohésion d’équipe, objectif commun - Quelle reconnaissance du travail de nuit ? - Quelle autonomie ? - Quelle relation avec l’équipe de jour ? L’équipe médicale ? Le CDS ? Comment l’absence du CDS est-elle vécue ? - Quelle communication entre vous et le CDS ? - A quelle fréquence le rencontrez-vous ? - A quel moment ? - Se rend-il disponible ? - Evaluation annuelle Quel est, pour vous, le rôle du CDS face à une équipe de nuit ? - Qu’attendez-vous du CDS ? - Pour vous, qu’est-ce qu’un bon CDS ? ANNEXE 3 Entretien CDS de Nuit Actuellement à l'école des cadres de Besançon, je fais mon mémoire sur le cadre de jour face à son équipe de nuit, mais voilà il est intéressant de rencontrer un cadre de nuit dans la gestion de ses équipes c'est pourquoi je vous ai sollicité. Je vais essayer de comprendre vos missions en tant que cadre de nuit. Quelle place à pour vous l'équipe de nuit au sein de l'hôpital, d'une manière générale ? J'avais déjà vous expliquer le fonctionnement actuellement, euh vous êtes du CHU de Besançon ? Euh non, je suis du CHS de Novillars. De l'accord, parce que là en début d'année, il y a deux grands changements chez nous. Il y a déjà un passage en petites et grandes semaines, parce que maintenant, on suit Novillars suite à un sondage. Nous depuis février, il y a un passage en petites et grandes semaines, donc en trois doubles trois et au 1er avril 2016 les pôles vont gérer leurs agents de nuit. Moi, je suis là depuis 4 ans en poste, et c'est, depuis je ne sais pas combien d'années, c'est le service de nuit : 4 cadres théoriquement (on est 3 actuellement) qui gèrent les 500 agents de nuit à l'époque, maintenant il y en a moins parce que y a déjà eu depuis 2 ans le pôle PACT pour la médecine adulte en autogestion, il y a les urgences et la réa, le pôle mère-femme ; mais tous les autres pôles vont passer au 1er Avril. Donc là c'est un peu ce qu'on organise, donc c'est ce qui va un peu modifier tout ça. Les cadres de jour auront vraiment une mission d'encadrement des équipes de nuit, que nous avions en partie actuellement. Sachant que nous, nous gérions 150 agents de pool de nuit en général... et... Nous même faisions les plannings de tous les fixes et donc du pool et des affectations ; par contre, les cadres de jour faisaient les entretiens d'évaluation, les entretiens de formation euh... ces choses-là. Et c'est nous qui faisions les plannings jusqu'à maintenant de toute façon Et c'est à votre demande ? Le changement ? C'était institutionnel, j'imagine ? Ça fait depuis plusieurs années qu'il y a un groupe de travail, et que ça a échoué le décret ; mais là, ça s'est fait, ça se met en place, c'est sûr maintenant, au 1er Avril, donc euh... Nous à notre demande ? Non pas spécialement, euh on l'a suivi, voilà... Et qu'est-ce que ça va changer pour vous du coup ? Nous, euh, on n'aura plus de congé à faire, enfin très peu ; parce qu'on aura un pôle de nuit, par rapport aux 150 agents que nous avions, on aura une vingtaine... Ce qui servira à remplacer les arrêts de travail & les congés-maternités euh... les jours d'enfants malades puis les formations en gros. Donc voilà, il sera minime puisque tout le pôle de remplacement des congés sera attribué par pôle. Donc nous on aura cette partie-là en moins, et uniquement cette partie-là. On aura toujours la recherche, comme vous avez pu le voir, des remplacements, euh... puisque la nuit, c'est partout : effectif minimum, on est obligé de remplacer à chaque absence quasiment, sauf quand on peut dédoubler des services, mais... c'est pas tout le temps. Euh... donc... on aura toujours les mêmes missions, simplement qu'on fera pas les plannings. Mais ça va nous enlever quand même euh... même dans la relation avec les agents, puisque... je pense que vous le savez : dès qu'on parle de congé avec un agent, voilà... soit il a quelque chose à se plaindre, soit il est content, mais euh... jusqu'au jour où... C'est source de conflit ? Voilà, c'est plus souvent source de conflit, donc on aura plus ces conflits-là. Donc nous, la différence, c'est qu'on fera le lien avec les cadres de jour, parce qu'il va pas être demandé au cadre de jour de venir rencontrer leurs équipes. Euh, ce qu'on ne fait plus actuellement, c'est les passages réguliers dans les services ; on n'a pas le temps avec nos sous-effectif, toute la charge de travail qu'il y a, on n'a malheureusement pas le temps, ce qu'on pourra reprendre après, à partir d'avril, ce sera vraiment un passage régulier dans les équipes, pour faire vraiment un encadrement de proximité, ce qu'on ne fait pas. Euh, éventuellement l'accueil des nouveaux infirmiers/aides-soignants, un peu d'encadrement s'il y a.… soit pour des nouveaux, soit des protocoles et autres, et éventuellement des anciens, si il y avait eu des soucis de relever, voilà, alors là on va pas rester vers des agents, à les regarder forcément travailler, mais si il y a des objectifs précis dans un pôle, on pourra éventuellement nous, faire ce travail. C'est un peu ce qu'on voudrait voilà... plus se rapprocher de nos missions de cadre. Et quelles sont-elles, ces missions ? Hormis le planning, est-ce qu'il y a des projets par rapport à l'équipe de nuit ? Est-ce que... Alors, déjà nous les cadres de nuit, notre mission principale, c'est déjà de gérer l'établissement la nuit. Donc un établissement avec 1 200 lits, avec une activité aux urgences, donc il y a des placements de patients, il peut y avoir des pannes informatiques, des pannes électriques, une fuite d'eau, un début d'incendie euh... voilà... voire même une absence d'un agent de jour qui prévient à 5 heures du matin... voilà... on a tous des missions qu'on ne peut pas vraiment cataloguer mais qui... tout ce qui arrive la nuit. Et après, ben le... la fiche de poste des cadres de nuit a été refaite, mais euh, voilà l'objectif principal : c'est un passage dans les services en encadrement, rencontrer les agents mais sans que ce soit préciser ce qu'on droit vraiment faire.... Y'a pas de précision... ...une présence quand même auprès de vos agents de nuit... ...c'est une présence, voilà, qui ne semble plus.... Parce que c'est vrai qu'on fait 5-6 services la nuit, mais on peut pas, on a 65 services sur le CHU, plus st Jacques, mais ça fait 1 ans que je ne suis pas allé à St Jacques. La dernière fois que j'y suis allé, c'est parce qu'il y avait un problème, voilà, s'il n'y avait pas de problème, on irait pas. Donc, euh bon, on y descendra pas forcément beaucoup plus parce que c'est un... il y a que 4 services... ...oui y'a plus que la psychiatrie... Y a plus que la psychiatrie, la nuit y'a que 4 services qui fonctionnent de nuit. Mais notre objectif c'est de, voilà maintenant on a 4 bâtiments sur Minjoz, mais c'est de pouvoir aller dans les bâtiments rencontrer les équipes euh... et puis voilà... Puis je pense, essentiellement le lien avec les cadres, s'il y a des problèmes que l'on constate et qu'on leur fasse remonte et vice versa : si eux ont un problème avec un agent, qu'il nous le dise, et que nous éventuellement, on rencontre l'agent, voilà. Que le cadre de jour n'ait quand même pas à venir... même s'ils garderont, ils pourront rencontrer les agents et ils peuvent venir... il y a des cadres qui, sur le pôle de médecine adulte, parfois, ils viennent la nuit pour rencontrer leurs agents, il y a des cadres qui le feront peut-être, d'autres qui ne le feront pas, mais euh voilà... Vous êtes seul comme cadre de nuit ? Oui oui, sur un roulement, là ce soir... Donc normalement vous êtes 4 et vous tournez... Voilà, on est 4 donc un dans chaque roulement. Donc 2 vraiment de nuit, 1 qui est en journée pour gérer l'absentéisme puis un quatrième qui remplace quand on est absent. Et ben, qui est... ben...déjà rien que dans les remplacements : ça fait déjà plus d'un mi-temps. Et puis le reste du temps, c'est euh... voilà c'est un second en journée pour dépanner. Bon, c'est là il est remplacé par des aidesaux-cadres : euh des infirmières qui nous aident, mais qui ne peuvent pas prendre spécialement des décisions. Et vous faites quels horaires du coup ? 20h30-6h30 sauf que parfois on est d'astreinte : s’il n'y a pas de cadre en journée, faut qu'on soit d'astreinte à 18h s'il y a un problème pour épauler l'aide-auxcadres quand nos cadres supérieurs sont partis. Donc voilà, là je suis venu parce la... habituellement il y a quelqu’un qui est là à 17h, mais elle est... 17h-20h30, enfin 21h même.... Mais qui... là elle est en vacances, donc elle est pas là. La personne qui est là d'après-midi habituellement part donc là, je viens parce que... sinon, il n'y a personne au bureau, et puis vous voyez... gérer les absences depuis chez soi... oui oui on est mieux ici et puis voilà... Et puis le week-end, là je travaille tout le week-end, je suis d'astreinte à domicile, 16h-20h30 pour gérer tout l'absentéisme des équipes de nuits. Il y a un cadre la journée, mais nous on garde toute la gestion de la nuit, même le week-end. Et vous arrivez à faire ça depuis votre domicile où généralement vous venez là à 16h ? Non, je ne suis jamais venu. On a nos plannings, on a tout, bientôt, on devra même avoir le logiciel informatique à domicile. Ils ont accepté qu'on l'ait, donc voilà on pourra... on peut tout gérer depuis le domicile avec nos plannings. On gère que de l'absentéisme, donc après, avec les plannings, on arrive à s'en sortir, on a tous les téléphones, on a tout ce qu'il faut. Et la relation avec vos collègues cadres de jour ? C'est régulier ? C'est par mail essentiellement... ...puis en cas de problème j'imagine ? Alors, moi chaque nuit, quand il y a un problème dans un service, je leur fait euh... enfin, on fait un rapport, chaque nuit, il y a un rapport que les cadres peuvent consulter. L'objectif c'est de leur signaler tout problème dans leur service, donc moi je copie la partie du rapport et je leur envoie Par mail, comme ça ils sont au courant. Euh... donc c'est essentiellement ça... Après, eux nous font aussi des mails, des fois quand il y a des problèmes particuliers, ça peut être même des blocs opératoires parce qu'il doit y avoir une astreinte parce qu'il y a un absentéisme euh.... Qu'on soit au courant des problèmes ! Voilà. Après je regrette, c'est dans l'idéale, il y a beaucoup de fois où on est oublié des fois dans les informations, mais voilà, l'objectif, c'est quand même qu'il y ait un lien avec les cadres... euh... aller-retour hein. Essentiellement par mail, puisque moi quand j'arrive, ils ne sont jamais là. Après il y a la journée, mes collègues de journée, c'est vrai qu’eux ils ont un autre travail... euh... ils peuvent les appeler... ...ils font le lien aussi avec vous ? Ils font le lien... eux ils font un lien plus euh... comme là, ils ont appelé, pour savoir, un service qui a une plus faible activité, est-ce qu'on peut dédoubler, enlever une infirmière... ...pour la mettre ailleurs ? Pour la mettre ailleurs voilà...quand ça arrive, quand les cadres sont là, on leur demande. Et ça arrive souvent finalement que des infirmières ou des aides-soignantes en poste aillent travailler dans d'autres services, vous les sollicitez régulièrement comme ça ? Oui, en sachant que celles en poste fixe peuvent travailler sur le même pôle, même si elles sont en fixe dans leur service, mais on a toujours quelqu'un du POOL qu'on pourra éventuellement changer de pôle. C'est l'avantage d'avoir un POOL général, donc voilà, c'est ce qu'on fait. Ce qu'il faut toujours, c'est qu'elles soient 2 dans les services, aux moins une inf, une aide-soignante ou une AP (Auxiliaire de Puériculture). Parfois on a aussi des étudiants en médecine... ou infirmier, il y en a peu, ben qui peuvent faire des nuits aussi voilà... pour faire le nombre. Ça arrive toutes les semaines, faut pas se cacher. Surtout le week-end, il y a des activités plus faibles... chirurgie, la pédiatrie... on arrive souvent à.… quand on a besoin à.… jongler... faut toujours trouver une solution. Donc voilà, nos solutions, elles sont limitées... c'est déjà... euh parce que on doit faire attention financièrement aussi... déjà s’il y a une baisse d'activité, on s'en sert ; ça après éventuellement de l'intérim ou des nuits supplémentaires rémunérées. Vous faites encore ça, faire appel à l'intérim ou les nuits sup' ? Oui oui, ça n'a jamais été arrêté. Pour les gens de jour, ça a été arrêté il y a plus de 2 ans maintenant... pour les gens de jours. Parce que les cadres de jour, ils avaient raison : ils se plaignaient que leurs agents faisaient des nuits sup' et qu'ils n'étaient plus disponibles pour remplacer en journée quand il y avait des arrêts, ou parfois ils n'avaient pas leur 48h consécutives de repos, voilà, donc nous on ne pouvait pas contrôler si on n'a pas leur planning... donc, ça ça a été arrêté. Mais les gens de nuit en font toujours. On a juste arrêté en fin d'année parce qu'on avait dépassé le budget. Donc en fin d'année, il a fallu limiter, voilà le budget : il n'est pas extensible. Donc fin d'année, c'est toujours compliqué quand on a mangé tout l'argent en nuits supplémentaires et intérim... C'est assez confortable ou ?? non ? J'imagine que les budgets sont quand même limités aussi... Ils sont limités, non non, on n'en a jamais assez. Mais bon... on n'a jamais laissé un service... honnêtement, on laisse parfois des services dans la difficulté parce qu'on n'a pas les effectifs en nombre. Mais nous, notre but, c'est qu'il y ait les nombres partout. Notre gestion actuelle fait qu'il n'y a pas toujours les compétences, donc c'est un de nos problèmes mais la nouvelle organisation fait aussi qu'il y aura un POOL par pôle, donc il y aura toujours les compétences, les gens iront toujours dans les mêmes services ; pour les congés, voilà... après il y aura toujours les arrêts mais ça restera quand même plus limité. Donc on va quand même gagner en compétences, donc pour nous comme pour les cadres de jour, c'est beaucoup mieux. ...puis pour les agents et les patients... pour les agents, c'est rassurant... après, ils vont apprendre à travailler ensemble et s'arranger entre eux pour les congés, ce qui n'était pas le cas jusqu'à maintenant. Voilà, il y aura beaucoup de points positifs. Il y aura des cotés négatifs qu'ils nous trouveront... je pense que... Et... Comment les agents vivent ça ? Vous avez eu un peu des échos ? Vous avez pu un peu en discuter avec les équipes ? Ben, tant que c'est pas mis en place, c'est compliqué... parce que ce que les gens du POOL attendent pour le moment, c'est de connaître leurs affectations. Parce que là c'est pas.... On en a beaucoup là mais ils n'ont pas encore tous été informé. Ils font des souhaits ? Ils ont fait des souhaits et... bon ça a été essayé d'y respecter un maximum mais ça pouvait pas tomber pour tout le monde très bien. Donc il y a eu des personnes que j'ai eu en entretien parce que leur souhait ne pouvait pas être respecté et voir avec eux où les affecter. Dans l'ensemble, je pense qu'il y aura quand même une grande globalité de gens qui seront satisfaits de leur affectation. Puis après, les gens en poste fixe je pense qu'ils sont contents justement d'avoir toujours les mêmes personnes... et essentiellement le pôle PACTE de médecine adulte... un grand pôle quand même... qui est le deuxième plus grand pôle derrière la chirurgie... euh voilà ça fonctionne... mais il y a des agents qui sont mécontents voilà... mais … dans l'ensemble, ni les cadres, ni les agents n'ont voulu revenir en arrière. Ça leur a été posé la question, il y a maintenant... 6-8 mois. Ils voulaient continuer sur ce fonctionnement-là donc euh... c'est que voilà, malgré les points négatifs, il y a des points pour tout le monde. Alors, on va venir peut-être un peu sur vos missions : Comment vous percevez justement la place de l'équipe de nuit ? Les missions ? Les spécificités de ces équipes Alors le travail de nuit, déjà par le rythme est quand même différent de celui de jour. Le lien avec le cadre du service est forcément différent parce qu'il y a des cadres de nuit qui ne connaissent même pas le cadre de leur service. Ils les connaîtront mieux après, mais actuellement, il y a des cadres de nuits... euh des agents de nuit qui n'ont jamais vu leur cadre de service. Euh voilà... les organisations sont quand même souvent faites pour la journée, et pas pour la nuit. Il y a beaucoup de... de missions. Enfin de... ouais de... travails... de choses qui sont enlevées à la journée et données la nuit. Donc euh... après la nuit, il y a du temps. On va pas se le mentir... le travail de nuit il est essentiellement de... enfin on va dire, après la relève du soir jusqu'à minuit-1h selon les services, voire avant. Et après c'est le matin. Entre temps, il y a le travail mais il est quand même coupé de coupures, donc il y a du temps mais le... là où on en demande le plus aux gens de nuit, c'est vrai que c'est le soir et surtout le matin voilà... et que souvent, qu'il y a 20 prises de sang à faire le matin + le tour voilà... Il y a une très mauvaise organisation dans les services sur le tour du matin, voilà. Ça c'est la chose qu'il faudrait repenser mais qui est compliqué donc euh... voilà... la souffrance des gens de nuit vient souvent de ces tours du soir et du matin... où il y a beaucoup de choses qui leur sont demandés... alors après, je dis pas que ce n'est pas justifié que les gens de jour... qu'ils fassent plus de prises de sang voilà... ils ont aussi d'autres choses à faire mais... Ça, c'est propre à chaque service ? Non, c'est général... à part la pédia quand même qui... qui ne réveille pas les enfants... euh le problème actuellement au CHU c'est qu'on réveille les gens à 4h... 4h30... où les gens sont obligés de commencer leur tour... on leur demande de ne pas commencer avant 5h... je me verrais pas aller dans un service et leur dire : « non vous commencerez qu'à 5h ». Puisque, si je le fais, je sais très bien qu'ils n'auront pas le temps de tout faire. Après ça va se rapporter sur la journée voilà... donc on laisse... voilà... mais la consignes est toujours de ne pas commencer le tour du matin avant 5h. Mais il y a des services qui parfois... alors selon l'activité, le nombre de prises de sang et autres... peuvent commencer à 4h du matin. Donc ça voilà, c'est pas bien mais... Il n'y a pas le choix... voilà ! Nous la nuit, notre mission, c'est vrai qu'on gère la nuit, mais on gère pas les organisations du service, sauf s’il y a un problème, euh... Éventuellement, on va trancher, mais on va pas, nous, dire au service « non, vous ferez pas les prises de sang, ce sera les gens de jour qui feront ». Ça, c'est pas notre mission... Voilà, chaque service organise le travail de son service, le jour, la nuit... voilà... C'est notifié dans leur fiche de poste ou pas ? Il y a très peu de service de nuit qui ont une fiche de poste pour la nuit... Vous, vous en avez par contre ? Vous en avez travaillé ? On en a une générale, mais... voilà. Il faudrait la retravailler sûrement, parce qu'elle date de... des années et des années... ...S'ils repassent sur la gestion du cadre de jour, peut-être que ce sont des choses qui seront retravaillé dans les services ? Peut-être mais voilà, je pense que c'est chaque service... parce qu'après, on peut pas en faire une générale, je pense que chaque service amènera... Finalement, ça pourra peut-être un peu aussi délimiter les tâches et... euh... l'organisation des soins sur les 24h Voilà... Pis aussi, si le cadre de jour le fait, il ne sait pas ce que fait ses agents de nuit. Ce serait pas mal, parce que bien souvent, ils ne le savent pas... enfin ce n'est pas un reproche hein... Parce que... je serais de jour... je ne serais pas tout le temps-là la nuit... On ne peut pas... et après... on peut pas tout voir, tout savoir... et on est plus proche des gens qu'on côtoie, que des gens qu'on ne côtoie pas. Il y a, voilà, ce décalage qui restera, quoiqu'il en soit... et il y a des choses qui peuvent être améliorées certainement... heureusement ! Et quelles sont les attentes des agents ? Par rapport à vous... justement, dans quelles circonstances ils font appellent à vous ? ils vous appellent la nuit... Être magicien... c'est à dire euh... à 20h45, ils se rendent compte qu'il y a un service où il y a une forte activité : ils nous appellent « on a besoin de quelqu'un ». Donc... c'est très gentil, mais... Voilà, on n'a personne, on n'a personne quoi... Alors, éventuellement parfois, il peut arriver qu'on sache, là il y a une feuille d'activité... voilà... mais 9 fois sur 10, on a déjà utilisé ces moyens-là, donc... Comme ce soir : on est tributaire, alors c'est vrai que tous les renforts, il y a très rarement des aides-soignantes disponibles au POOL. Parfois il y a des demandes de renfort en journée, donc là, ça va être des étudiants. Là actuellement, il y a des vacances et des partiels, ils sont très peu disponibles... euh et c'est vrai qu'on est en manque d'étudiant en soins infirmiers, ils ne s'inscrivent pas... pourtant avant Noël, ils ont été relancés à l'IFSI et à l'IRTS et on en a quelques-uns, mais très peu qui viennent travailler : si on en a 3... voilà... Puis, c'est surtout le week-end... et encore, la nuit du vendredi-samedi euh... voilà, donc c'est très limité... Après, faut enchaîner aussi, après la semaine de cours, les stages, les nuits, c'est vrai que c'est compliqué mais bon... Voilà. Les étudiants, on sait que ce n'est pas l'idéal ; en tous cas, les étudiants en médecine, puisqu'ils viennent... Eux, leur objectif, c'est de se coucher... Pour eux ils croient qu'ils peuvent se coucher... et puis, il y en a déjà, qui sont tout le temps avec leur téléphone, soit ils dorment la nuit, soit ils sont avec leur téléphone alors là... non, c'est pas l'idéal, il y en a quelques-uns qui sont biens mais... c'est pas l'idéal, mais bon, c'est le seul moyen qu'a le CHU actuellement pour remplacer les arrêts aides-soignants ou... parfois des congés... ça arrive, parce qu'on manque d'aides-soignants au POOL, ça a été un choix. Et... pis qu'il y a toutes les demandes de renforts, c'est compliqué hein. Les agents de nuit, ce qu'ils attendent de nous, c'est... mais tout le monde c'est... tout problème... euh... voilà un cas qui est arrivé encore il y a pas longtemps, c'est le SAMU où il y a une forte activité : il n'y a plus de brancard... « on n'a plus de brancard, il faut nous trouver des brancards » voilà... comme si euh... j'allais moi... euh je savais où il y avait des brancards. Donc après mon rôle, voilà, c'est... je demande aux brancardiers d'y aller, voilà. Mais... c'est tous des... des choses comme ça. Alors après ils peuvent me questionner sur des problèmes techniques euh... tout voilà... une fois c'était un... un enfant, oui c'était le père qui était parti et qui avait laissé en service de pédiatrie sa fille mineur pour accompagner son fils. La fille avait 15 ans et le fils 12 ans, voilà.... Qu’est-ce qu'on fait dans ces cas-là... Là, j'ai appelé le père et je lui ai demandé de venir rechercher sa fille... voilà, il n'est pas de notre responsabilité voilà... donc c'est toutes ces choses-là... mais les... les agents de nuit attendent souvent de nous des... des miracles ! Donc on y arrive parfois... parfois on fait des miracles, puis parfois non... ils sont pas contents, ils sont pas contents mais... bon voilà, comme un cadre de jour de toute façon, on peut pas toujours avoir toutes les solutions... donc c'est pareil la nuit. Donc voilà, il y a plein de situations comme ça dans les rapports. Il y en a plusieurs par semaines où on gère euh... tous les aléas de la nuit. Mais ça peut même être les médecins qui nous appellent... Oui, c'est la question que j'allais vous poser aussi : c'est pas forcément les soignants ? Non non, c'est au bloc opératoire, s’il est 2h du matin et qu'il n'y a plus rien dans les distributeurs de repas et qu'ils veulent manger... euh voilà... nan mais... bon ben voilà, moi j'ai pas peur, je les envoie balader... enfin, si je les envoie balader : je les envoie balader, j'ai pas peur. Euh... donc voilà, après je leur dit euh... voilà... même avant de toute façon, même si c'est à 22h, là je leur dis d'appeler un... SOS Pizza, puis de commander des pizzas hein... quand les distributeurs de repas sont vides, je n'ai pas les moyens de les remplir... donc voilà, il y a des choses aussi... bêtes, pis voilà, la gestion entre médecin parfois, euh... je sais pas... ça arrive souvent entre la cardio euh... cardio qui ne veut pas s'occuper d'un patient et le SAMU qui considère que c'est un patient qui dépend de la cardiologie, donc voilà... après moi... je n'ai pas les compétences médicales pour imposer. Vous ne gérez pas les flux des patients la nuit quand même ? On gère, nous, les placements. Enfin, pas tous. Quand ça coince. Euh... le problème c'est souvent les patients de médecine, parce que souvent la médecine est pleine... ou complète, donc on met les patients essentiellement en chirurgie, voilà, en hébergement. Donc, parfois, les internes, ce sont généralement eux qui disent non. S'ils disent oui : bon, ça passe pas par moi. S'ils disent non : je suis appelé, et on me dit voilà : « on trouve pas de place pour untel » et moi, en fonction de la disponibilité des lits euh... j'impose dans un service. J'ai le dernier mot sous l'autorité du directeur de garde. Oui, j'allais dire : il y a une astreinte administrative ? Il y a un directeur de garde, voilà. Qu'on appelle s’il y a un gros souci... Après on les appelle très rarement. Mais... ben pas pour les hébergements... pour d'autres choses... après c'est beaucoup par mail... s’il y a la fuite d'un mineur, on va transmettre par mail, on va pas l'appeler à 3h du matin juste pour lui signaler la fuite d'un mineur. On a géré euh... le lycée est prévenu ; c'est pas le directeur de garde qui va faire grand-chose... Il lit aussi les rapports du coup...les choses comme ça... Ce sont des astreintes à la semaine ? Ils font à la semaine, du vendredi... du vendredi 18h au vendredi suivant. Mais euh... je ne pense pas, ils lisent pas nos rapports, faut qu'on leur transmettre ce qui arrive. D'accord, donc vous faites le lien quand même avec... avec les autres cadres... On fait le lien, avec les cadres, avec la direction, avec... oui... tous les...tous les services... euh... même pourquoi pas... informatiques, euh... un problème avec un logiciel, on le transmet au service informatique. Donc pareil, il y a une astreinte en salle d'informatique, c'est nous qui l'appelons euh... uniquement si on doit juger si vraiment... euh... déjà faut que ça dépende de leur mission d'astreinte informatique et on juge s’il y a nécessité ou si c'est juste une imprimante en panne... en général, je n'appelle pas... ça peut attendre le lendemain... Et puis il y a des astreintes techniques aussi j'imagine ? Euh, électricien de garde, essentiellement qui gèrent quasiment tout... Il y a également un plombier, mais c'est très rare qu'il soit appelé. Et puis une astreinte biomédicale aussi. Donc euh voilà... ces astreintes-là, c'est souvent nous qui... qui les appelons donc euh... ...oui vous êtes au centre de cette coordination... Quand on a le temps... mais bon bientôt, on aura un nouveau temps. Il y aura des nuits, on n'aura pas le temps... euh... il y a des nuits... euh... j'ai fait une nuit il n'y a pas longtemps... euh... voilà... j'ai fait... euh... j'ai passé beaucoup de temps à chercher des lits, voilà, on essaye de faire au mieux, on rappelle les services pour savoir, les lits qui sont dispos, ceux qui ont été pris, surtout qu'on n'a pas été appelé... des fois à 2h du matin on nous appelle, et on n'a pas été appelé avant... et je ne sais pas, par rapport à ce qu'il y avait à 22h, qu'est ce qui a été pris... donc il faut refaire un point, donc des fois on peut y passer 1 heure... ça m'arrive d'aller au SAMU, je travaille avec les médecins : voilà, ils me disent « faudrait placer untel pour telle service » : j'appelle le service, voilà. Il peut y avoir de ce travail-là, dans ce cas-là on est plus au SAMU que dans les services voilà. Puis en fonction des problèmes, il peut y avoir des... des pré-plans blancs on va dire... depuis que j'suis là, il n'y a jamais eu de plan déclenché, ça fait des années mais euh... parfois, ça aurait presque pu... voilà... une intoxication, un incendie avec une quarantaine de victimes annoncées, voilà, bon après il y a eu un décès, les autres ce n'était même pas des personnes intoxiqués, c'était juste des gens choqués voilà... mais euh dans ce cas-là, je suis appelé, je dois être prêt à... à réagir, voilà donc euh... Il y a quand même, de grandes responsabilités aussi... enfin j'imagine que dans ce cas-là, votre astreinte administrative est prévenue, s'il y a des risques de plan blanc ou de choses comme ça ? Ben le directeur de garde, oui, ça je l'appelle en premier. Même parfois même le SMUR... enfin la régulation l'aura peut-être déjà fait, l'aura peut-être prévenu avant moi, mais euh voilà... oui il est prévenu, mais il compte sur nous pour euh... voilà... après, si vraiment un jour, il y a un gros truc, le plan blanc sera déclenché, je ne serai pas tout seul mais, le temps que ça se déclenche... comme ça peut se passer en journée, ça n'arrive pas que la nuit. Voilà, j'avais eu une fois, c'était un... une intoxication alimentaire et une manifestation, c'est vrai qu'on avait eu... euh... 80 victimes voilà... sur le CHU, à gérer tout ça... ça avait commencé en fin d'après-midi, mais il a fallu continuer toute la nuit euh... à 22h, que je trouve du personnel en plus pour le lendemain, voilà... Donc ça c'est pas qu'on peut prévoir... quand ça arrive, on gère... Non, pis c'est ponctuel... c'est ponctuel... voilà quoi... On peut pas avoir une mission spécifique chaque nuit en disant « on passera dans les services chaque nuit », parce que il y a des nuits où... C'est pour ça qu'on a mis dans les fiches de postes, ils ont été gentils les... ce sont les cadres de jour qui nous ont quasiment refait notre fiche de poste, ils sont adorables... Comment communiquez-vous avec vos équipes de nuit ? Euh... pff... Ça dépend pourquoi on doit communiquer... euh, leurs plannings, ils les ont sur le logiciel « Chronos », voilà, donc leurs plannings sont affichés, et éventuellement, on peut les appeler si on a besoin de leur demander d'échanger un roulement de temps partiel, de changer des vacances euh voilà... Après, ce ne sera plus nous, mais euh bon, il y avait ce lien euh voilà. La nuit, ben soit on les voit, soit on leur téléphone, s'il y a un problème la nuit ou qu'on a une question à leur poser... euh et puis bon, en journée, pareil ils peuvent être appelé, mais on a également chacun leur portable, on peut leur envoyer un SMS, on a un programme « Orange » qui permet d'envoyer des SMS groupés. Donc euh... par contre pour une recherche, par exemple pour ce soir, on aurait pu lancé un SMS pour savoir qui était disponible à venir travailler. Ça évite d'en appeler... euh... On en appelle, enfin là on peut envoyer, alors soit sur... à tout le monde, soit sur un roulement par pôle, voilà... donc euh... c'est pas mal, c'est un bon système qui permet d'éviter d'appeler 100-150 personnes. En un SMS, on les a tous joint. Après, ceux qui sont dispos nous rappellent. En général, ça marche bien. Voilà, donc la communication, ben elle est essentiellement... ben la nuit, on les rencontre un petit peu, mais pour l'instant, insuffisamment, même si moi, je les connais tous et tout le monde me connaît, on se connaît. Vous participez au recrutement ? Du POOL... après c'est plus ma collègue de jour, mais euh... mais les cadres de nuit, voilà on participe au recrutement des gens du POOL, mais pour les services, c'est les cadres de jour et le... Ou le cadre supérieur ou le DRH. Et la direction des soins... Même pas la direction des soins, mais la DRH... non la direction des soins n'intervient pas dans les recrutements. Non non, les recrutements infirmiers, c'est vraiment le pôle et la DRH. Et... on parle toujours de pôle, de projet, d'unité... vous avez quelque chose de construit comme ça ?... Ou sur lesquels euh... je sais pas, les agents de nuit s’appuient, travaillent en commun ? Ou... c'est existant ou ça ne l'est pas ? Il n'y a pas un projet de nuit. Il y a des projets de pôle. Les agents en poste fixe doivent connaître le projet de pôle. Parfois ils sont envoyés en formation, parce que justement c'est dans le projet du pôle et autre... voilà, c'est par pôle. Nous pour la nuit, on n'a aucun projet. Ça paraît compliqué... Non, Oui... Sur 65 services, avec des spécificités bien... On ne peut pas dissocier le jour de la nuit, donc voilà, ça c'est les projets de service et les projets de pôles, donc les gens de nuit font partis... s'il y a un projet de service, les gens de nuit, parfois, font partis d'un groupe de travail, d'un pôle ou d'un service, donc ça, ils peuvent être euh... ils peuvent être investis dans des projets. Mais, au niveau spécifiquement de la nuit... euh, peut-être il peut y avoir des projets sur l'organisation du travail de la nuit, sur différentes choses... euh, c'est pas nécessaire, mais... le problème de la nuit, c'est que les gens sont dans la nuit et ont beaucoup de mal à revenir la journée. Et... faire des réunions de travail la nuit... Bon... Ouais... Le travail en termes d'organisation c'est compliqué... Voilà. C'est quasiment impossible... ...Puis la présence dans les services requis, c'est... voilà donc on peut pas... ça dans la nuit, vous ne pouvez pas une activité comme ça de toute façon... Non voilà. Nous les cadres on le fait... beaucoup la journée, des réunions et autres mais on va pas le demander aux gens de nuit. Ils le font une fois une réunion dans le service... C'est dans leurs unités ? Dans leur unité voilà... Puis comme on gère pas l'organisation du service, ce n'est pas... je ne vois pas ce que nous on pourrait faire... 'fin on a pas le temps jusqu'à maintenant... et après... 'fin je vois pas... euh... ce qui pourrait euh... Nous, dans notre rôle ce qu'on pourrait avoir à faire comme projet, pour la nuit. Donc euh... donc non, je ne pense pas. Et, par rapport à l'évaluation annuelle, c'est vrai que ça m'intéresse aussi, parce que du coup, ce n'est pas vous qui évaluez les agents de nuit que vous connaissez et que certains cadres ne connaissent pas... Vous y participez quand même ? Il a toujours été dit aux cadres de jour qu'ils pouvaient nous solliciter. Euh... ça ne se fait plus, enfin on n'a aucun... alors déjà parce qu'on a.… alors moi, j'ai fait cette année les évaluations des gens du POOL euh... quasiment tout, j'en ai fait une soixantaine. Par contre, ça c'est vous... les gens du POOL, c'est vous qui faites... Les gens du POOL, c'est nous qui faisions, tous ceux qui étaient à 100%, parce qu'on a... 150 agents aux POOL, mais il y en a beaucoup qui ont un fixe, voilà... donc on n'a pas 150 agents en temps plein au POOL... ça ça serait merveilleux... Non non voilà, on a.… j'ai dû, voilà, en faire une soixantaine. Il y a juste ceux qui étaient en petites et grandes semaines, de notre roulement que je n'ai pas fait. Mais tous les autres, c'est moi qui les ai faites. Euh... donc je ne pouvais pas en plus faire les agents de nuit. Oui... combien... 500 agents ? 450 voilà.... Sans compter euh... bon après, il y a les agents de nuit qu'on n'a jamais gérer : les réa, les manipulateurs radio, euh voilà, mais euh... Oui, parce que ça ce sont des équipes qui tournent ? C'est beaucoup... Oui, ils font jour-nuit euh... même les manip radio, ce sont des équipes de nuit, mais il y a des gens de jour qui peuvent les remplacer. Donc voilà... par contre les cadres peuvent nous solliciter s'ils ont des questions, mais euh... honnêtement, les feuilles... euh... il y a des cadres qui jouent le jeu : ils font l'évaluation, mais ils mettent pas... il y a une case : « est-ce qu'on a rencontré l'agent ou pas ». Il y a des agents qui... des cadres qui notent bien qu'ils n'ont pas rencontrer l'agent, mais qui font leur évaluation. Et puis il y en a qui notent qu'ils ont rencontré l'agent et qu'ils ne l'ont pas rencontré... Nous on le sait parce qu'après... les gens de nuit nous le disent, mais euh... voilà... donc non malheureusement, les évaluations... les entretiens euh... d'évaluation et de formation ne sont pas toujours réalisés pour les agents de nuits. Donc ça, j'espère que ça va changer aussi. Ah oui, ce n'est pas en face à face avec l'agent, c'est ça que vous me dites ? Non. Très rarement. Alors que les agents de nuit sont prêts à revenir de jour. Mais... il y a des agents de nuit qui sont là depuis plusieurs années qui ne connaissent toujours pas leur cadre qui est là également depuis plusieurs années... donc euh... ...ça après, il y va de la disponibilité, de l'investissement du cadre de jour... Tout à fait. Donc euh... je pense que là ça va changer. C'est vrai qu'ils s'investissaient... ils avaient pas trop envie de s'investir dans la nuit, puisqu'ils ne géraient pas les plannings... donc voilà... ils se sont beaucoup battu pour ne pas l'avoir. Maintenant ils l'ont, ils n'ont pas le choix. Mais je pense que... je pense qu'ils s'investiront un peu plus dans les entretiens. Voilà... parce que ce sera... il faudra qu'ils les rencontrent. Ben oui, ils font partie intégrante de leur équipe... donc forcément euh... Voilà, c'est bien pour ça qu'on dit qu'il y a quand même une différence jour-nuit, et malheureusement voilà... qui est... qui est pas juste voilà pour les gens de nuit, c'est pas juste. Parce qu'ils ont aussi besoin de voir leur cadre, de connaître les projets de service, de pouvoir s'exprimer. Ils le font vers nous, mais on peut pas, nous, à chaque cas, lui dire : « ben tiens voilà tu as tel agent qui est pas trop content de son planning ou tu as tel agent qui a eu un souci avec sa collègue. » voilà. C'est pas à nous de... enfin on peut pas... tout... tout redire... Enfin, vous n'intervenez pas dans la gestion de conflit ? Si, on... euh si, c'est nous jusqu'à maintenant qui le faisions essentiellement euh... enfin selon les cas. Parfois, ça peut être un entretien en journée. Mais euh là on a eu, il y a pas longtemps, une aide-soignante du POOL et un... problème avec une équipe de pneumo... donc là c'est en cours de traitement, moi j'ai rencontré essentiellement l'aide-soignante mise en tort... voilà... pour qu'elle puisse... parce qu'il y a eu un courrier de fait par les équipes de nuit. Donc, je vais pas aller revoir... mais c'est de savoir... voilà d'informer l'agent, d'avoir son retour et après faire une réponse euh... voilà. C'est comme là, on gère des conflits euh... voilà, mais... parce que c'est avec un POOL général. Si c'est avec un conflit entre deux agents d'un service, je dirais que c'est au cadre du service de gérer. Après il peut nous demander ce qu'on en pense. Puisque voilà, on connaîtra toujours un peu mieux les agents, euh... ça c'est indéniable. Donc on est... euh faut qu'il y ait une collaboration entre le jour et la nuit. Aussi bien entre les équipes infirmières et aides-soignantes, de jour et de nuit, que les cadres de jour et de nuit. Voilà. Ça, il faut arriver à travailler ensemble et... c'est pas toujours facile. Après... il y a des cadres de jour que je connais, avec qui c'est facile, je peux travailler plus facilement. D'autres que je connais pas ou que j'aime pas et que j'ai pas forcément envie de travailler et c'est... vice versa donc euh... On a aussi des affinités Oui oui, tout à fait, comme les équipes... Comme les équipes... après on va mettre ça de côté quand il y a un gros problème. On est bien d'accord hein. On est là aussi pour ses équipes et puis la prise en soin... Et... du coup, vous, vous n'allez pas « disparaître » - je me comprend- avec cette gestion-là, ce n'est pas le but, il y aura toujours des cadres de nuit... Non, on aura toujours à gérer les problèmes de la nuit... de toute façon, ils veulent toujours un cadre ou une présence, comme il y en a un le week-end de journée. Faudra toujours un cadre la nuit. Et, c'est selon vous, nécessaire ? Je me questionne parce qu'il y a toujours des établissements qui fonctionnent sans cadre la nuit... je voulais un peu votre avis là-dessus. Hum... je sais pas s'il y a des CHU qui peuvent fonctionner sans cadre la nuit. Il y en a ? Ah ben des CHU peut-être pas... mais des structures plus petites... mais euh voilà quoi... la plus-value de votre présence ? C'est ça que je voulais... Il y a des nuits, je pourrais ne pas être là ; ça arrive. Y en a, non mais après c'est pas... après si c'est juste pour gérer un problème informatique, je pense que quelqu'un d'autre pourrait le faire. On n'a pas besoin d'avoir un cadre pour... enfin. Donc non, je pense qu'il y a bien la moitié des nuits de l'année où on pourrait ne pas être là. Le problème, c'est quand... Il y a l'autre moitié des nuits où il faut être là. Euh voilà, donc... donc non il y aura... je pense qu'il faut un cadre la nuit. Euh... voilà. Même pour un accident de travail. Il y en a la nuit, il faut pouvoir gérer. D'ailleurs les accidents de travail la nuit, ça induit que l'agent ne pourra pas finir sa nuit, il faudra trouver des solutions, donc il y a toujours besoin voilà, on ne sait pas quand ça tombera, mais quand ça tombe, il faut être là pour y répondre. D'être astreinte à domicile, c'est impossible, on l'a fait à une époque... euh... Pareil, on a sorti une liste de cadres où on est à.… on faisait 11 heure–minuit... et... bon à minuit-1 heure, on partait... on répondait au téléphone depuis chez nous mais euh... faut déjà pas avoir de compagne. Ou alors avoir bien une chambre pour dormir... Bon, pis après vous dormez une heure : vous êtes réveillé enfin voilà... pour des conneries ou des formalités. Voilà, les agents... ils étaient informés de ça, mais voilà... Ben, je pense qu'on hésite aussi plus à appeler à domicile que quand vous êtes dans l'établissement... Oui, c'est sûr... ...et que, vous devez être solliciter pour des choses... oui qui ne sont pas forcément de votre ressort. Voilà, je vais pas dire que le téléphone... il y a des nuits, le téléphone va sonner euh... 5 à 10 fois, et puis il y a des nuits, il va sonner 40 fois voilà. Ça dépend. Après y'a parfois des questions de congés, des choses comme ça... donc euh, notre téléphone va moins sonner forcément. Quand on n'aura plus les congés, c'est quand même la moitié des appels de la nuit voilà. Les autres appels, c'est des... enfin, ça peut être un gros truc ; ça peut être un appel pour un gros truc, mais euh... voilà, il va nous prendre du temps à le gérer, mais ça sera pas... enfin les problèmes, il n'y en n'aura pas 10 chaque nuit. Je vous pose la question des décès : vous ne gérez pas du tout cet aspect-là ? Euh... non, sauf... s'il y a besoin de les mettre en housse. C'est nous qui les avons. Mais sinon, non, c'est les services qui appellent les brancardiers directement, qui font le transfert... voilà Non que quand il y a des... quand il y a une présentation de corps. Il y a que ça que nous faisons la nuit. Donc, j'en fais très rarement parce que... en général, j'arrive à négocier avec les familles pour qu'ils reviennent le... le lendemain. Parce que... c'est arrivé... ça arrive quelques fois dans l'année, mais ça reste rare. Les brancardiers de nuit gèrent les réquisitions, ces choses-là. Vous gérez aussi les brancardiers ? On gère euh... leur absentéisme, enfin on cherche des étudiants pour les remplacer. Ils ont pas de POOL, c'est des ASH eux donc... c'est également des étudiants qui sont en 3e année qui peuvent les remplacer donc euh... donc on gère la journée... Vous ne gérez pas les plannings... Non, c'est leur cadre de jour qui les fait. Voilà... Parce que bon, il y a toute sorte de personnel, donc c'est vrai... là c'est plutôt infirmiers-aide-soignants... Nous, essentiellement, oui. Les manipulateurs radio, les agents de sécurité, on les gère pas... C'est la DRH ? Non, le responsable, il y a un cadre... il est... il est ingénieur ou je ne sais pas quoi... Non, on est éventuellement informé de... ça peut arriver qu'un Week-end, il y en a un qui s'arrête, mais ils ne sont pas remplacés. Après on peut s'en passer. Il faut les agents de sécurité, mais qu'il y en ait un moins ou de plus.... En même temps, il y a un agent... parce qu'ils sont tous « sécurité incendie ». Maintenant la nuit, il y a un agent de la sécurité, on va dire « police » entre guillemets, mais qui est plus... affecté pour les problèmes de violence et autre... Qui sont d'ailleurs l'un de nos problèmes à gérer. Par rapport aux urgences ou... ? Même dans les services... sur parfois des patients... voilà... un patient qui devient agressif, parfois pour une démence, parfois suite à une anesthésie euh... voilà, on a déjà eu des cas de... d'une personne qui avait une interdiction de visite qui... qui veut absolument venir donc euh voilà. Tous nos services ne sont pas fermés la nuit. Ça peut être problématique... enfin voilà il y a toutes ces choses-là. Les gens peuvent rentrer ? Ou c'est fermé ? Il n'y a rien de fermé. Enfin le CHU... ben s’il ne peut y avoir un accès contrôlé qu'au niveau des urgences. Le niveau 0 n'est plus fermé. Le -2, -3 : souvent c'est... les gens peuvent rentrer. Vous venez la nuit, vous verrez des gens qui dorment dans le hall, ça fait hôtel. On a déjà eu des soucis avec ces.... Il y en a très rarement. Mais on a déjà pu avoir des soucis aussi avec les gens qui dorment... qui peuvent aussi être alcoolisés ou autre... ou de l’effraction sur des distributeurs de... de nourriture. Voilà, il y a des choses... le CHU est équipé en caméra de surveillance mais... mais elles ne fonctionnent pas toutes, il y en a qui sont fictives... ou qui ne fonctionnent plus et qui ne sont pas réparées. Voilà... c'est dur de contrôler la violence au CHU. Mais après voilà, toute situation de violence, nous on est appelé, on se rend sur place, on essaye de... de gérer euh... voilà... Mais après il y a eu. Il y a quelques mois... ouais... une violence avec une... un membre d'une famille et il y a eu un décès... la famille était très mécontente de la prise en charge médicale et voilà donc... il commence à être violent voilà... et nos agents de sécurité n'ont pas le droit de... sauf... tant que les gens ne sont pas... ne sont pas à s'en prendre physiquement à quelqu'un, ils n'interviennent pas. Même pour « désamorcer » on va dire... Mieux ne vaut peut-être pas demander à eux de désamorcer. En général, c'est... c'est moi qui y vais, euh voilà... après il y en a qui sont bien, mais il y en a qui... qui ne savent pas gérer ce genre de situations. Donc après, ils sont là... même moi si j'y vais, je n'y vais pas tout seul. Ils sont là et... ils interviennent si besoin... C'est vous le négociateur un peu... plus voilà, oui. Après, on appelle la police s'il y a vraiment un gros souci. Mais la police ne sont pas nombreux à Besançon de nuit... donc, c'est déjà arrivé qu'on les appelle et ils viennent... euh... on peut les appeler à 22h, ils arrivent à 4h du matin, mais... euh... entre temps, voilà, ça fait long. Donc on n'a pas euh... le lien avec la police... bon, si vraiment on leur dit que c'est très urgent, ils vont quand même venir, mais s'ils ont un problème déjà à Planoise... une gestion de... Oui, ben ils priorisent, et ça pas vous qui passez... Non, c'est pas forcément nous, parce qu'ils savent qu'on a déjà un agent de sécurité... voilà donc euh... Mais qu'ont pas de pouvoir de police, nos agents de sécurité. Pouvez-vous parler de relation avec les équipes de nuit ? De relation de confiance ? Nous en tout cas on a une grande relation de confiance avec eux. La nuit ils sont énormément seuls. Souvent ils sont 1 infirmières et 1 aide-soignante. Parfois y a 2 inf et 1 AS mais ils sont souvent seuls. L’autonomie on la demande beaucoup aux gens du pool. Souvent ils vont se retrouver dans un service où il n’y a qu’une inf. donc l’autonomie elle est énorme, en plus y a pas de médecin de présent. Y a un interne de garde, ils peuvent l’appeler, mais bon ils sont seuls. Leur autonomie est très importante la nuit, donc ils doivent pouvoir se débrouiller. C’est pour ça que nous on est là en soutien, mais y a des choses spécifiques pour lesquelles… Je ne sais pas moi, par exemple en néphrologie ou aux Soins intensifs d’Hémato, si y a un problème particulier avec un patient, moi je ne peux pas les aider, je n’ai pas les compétences pour. Leur autonomie doit être très grande la nuit, d’ailleurs c’est ce qu’ils apprécient. Avec les nouveaux diplômés, particulièrement avec les nouvelles infirmières du nouveau référentiel, où ils n’ont pas fait beaucoup de stage, notamment pratique… mais ils apprennent vite. Ils n’ont pas le choix et ils y arrivent. Plus facilement que la journée du coup, où ils peuvent s’appuyer sur des inf expérimentées. Les recrutements, les nouveaux agents commencent bien souvent de nuit ou pas ? Oui n=bien souvent. On n’a pas le choix que de remplacer les départs de nuit, comme ils sont en effectif minimum, donc heu, même si parfois c’est le pool qui va remplacer un moment. Oui, y a beaucoup de nouveau la nuit. Après je ne peux pas comparer de jour au CHU car je n’ai jamais été cadre de jour. Alors un poste fixe peut avoir une période de jour avant de commencer les nuits, y a des services qui le mettent en place et je pense que c’est bien qu’ils aient éventuellement une semaine ou 15 jours de jours avant de passer de nuit. C’est ce que fait les urgences par exemple, vu qu’ils sont en autogestion. C’est quand même bien qu’ils connaissent le travail de jour. Le travail de nuit n’est quand même pas complet par rapport au travail de jour, donc c’est bien qu’ils puissent aller voir ce qui se passe la journée. Et même pour les anciens, je pense que ce serait bien qu’ils repassent de temps en temps de jour et vice versa. Y a beaucoup de gens qui critiquent le travail de l’autre donc en le connaissant ça peut changer. Ça peut être bien dans les 2 sens pour reconnaitre le travail de chacun. La charge de travail varie selon le service et du jour à la nuit, mais on ne critique pas sans connaître. Moi je ne veux pas que le personnel dorme la nuit, par contre qu’ils soient dans un fauteuil à lire ça ne me gêne pas, tant que boulot est fait y a pas de souci. Alors moi je ne peux pas contrôler. Après c’est au cadre de jour de nous signaler si agent ne remplit pas ses missions la nuit. Alors là, éventuellement on surveillera. Alors dans ce cas c’est bien de rencontrer les agents, de leur demander pourquoi. C’est des cas exceptionnels, mais ça arrive, voilà. Les agents savent qu’ils doivent être éveiller, mais on ne va pas leur demander de courir après du travail qui n’existe pas, voilà. Ils doivent être réactif s’il y a un problème, mais si y a pas de problème ils ont droit de se poser tout en restant vigilant. Donc y a une relation de confiance d’eux envers moi et vice versa, nous on leur fait confiance aussi. Bon je pense que, allez je me lance, qu’il y a 80% des agents de nuit qui sont satisfaits de nous et 20% qui… qui n’ont peut-être pas eu leurs congés par exemple… Mais je pense que dans l’ensemble… je peux aller dans tous les services et en ressortir vivant… donc c’est déjà une bonne chose… sur 65 services, c’est déjà pas mal. Bon on ne gère pas les 65 services, mais sur les 50 qu’on gère, c’est bien. Ça arrive que ce soit tendu, mais en général on arrive à se dire les choses, voilà. Ils ont le droit de s’exprimer, parce que souvent ça fait du bien. C’est ce qu’on manque nous les cadres de nuit, c’est quelqu’un vers qui on peut s’exprimer. Y en a avec qui la communication a déjà pu être rude, on me raccroche au nez des fois, c’est déjà arrivé. Alors c’est des gens que je ne reverrai pas forcément la nuit même, mais plutôt après. Je retournerai la voir après et parfois même c’est oublié. Parfois avant la fin de la nuit, la personne me rappelle pour s’excuser. Après je ne vais pas vous mentir, on n’est pas cadre de proximité. On ne peut pas être de proximité avec 4 ou 500 personnes, voilà. Mais on est quand même plus proche des agents de nuit que les cadres de jour. Donc on reste cadre de proximité, mais sans pouvoir les voir régulièrement. Je connais tous les agents puisque je suis là depuis 4 ans, après je ne connais pas tout sur eux. Parfois certains nous parle de leur vie privée quand ils ont besoin, mais je ne connais pas leur intimité. Mais je les connais, e, tout cas les gens du pool je sais qui peut aller où. Vous avez la connaissance de vos agents et… Oui, et de nuit c’est moi qui les connais le mieux parce que je suis le plus ancien. Y a un poste vacant de nuit depuis 6 mois et personne n’en veut. On est critiqué mais personne ne veut le poste. Je sais moi qu’un jour ou l’autre je repasserai de jour pour retrouver cet encadrement de proximité, de faire des projets, parce que la nuit ça peut manquer. Gérer que de l’absentéisme, ce que l’on fait actuellement. Bon on a mené majoritairement ce projet de nuit. Les agents de nuit n’ont pas été impliqués, mais ce projet entre les cadres de jour et nous. On a été à toutes les réunions, on a été la parole principale puisque c’est nous qui connaissions la gestion du personnel de nuit. On nous a quand même écouter… Et on a une bonne relation avec les équipes de nuit. Y a des cadres de jour qui rencontrent les agents de nuit de temps en temps, mais la plupart ne les connaissent pas. Oui ça dépend de l’investissement du cadre par rapport à leur agent de nuit. Oui, et ça reste rare. On leur demande maintenant d’imprimer les plannings de nuit de leur service et je peux vous dire que ce n’est pas toujours fait. Les cadres de jour n’y pensent pas. C’est bien un signe que la nuit… Je suis appelé très souvent pour me dire qu’on n’a pas notre planning… Alors quelques fois je leur ai donné, mais maintenant je ne le fais plus. Demandez à votre cadre de jour qu’il vous l’imprime, quoi. Vous voyez autre chose à ajouter ? Sur le sujet ? Je reconnais que pour un cadre de jour c’est compliqué de gérer la nuit. Ils ont peur de gérer les plannings alors qu’ils ont des plannings fixes. Donc vous les rencontrer, vous leur demander de planifier leurs congés, y a rien de difficile. Vous tranchez quand y a besoin et voilà. Après gérer les organisations de la nuit, rencontrer le personnel, là voilà. L’idéal c’est de venir à 20h pour les rencontrer. Après pour un cadre de jour il faut se rendre disponible, faut venir le soir. Après quand on est cadre on aime bien les voir travailler, le jour on voit des choses alors que la nuit on n’est pas présent et on ne voit rien. Y a peut-être des agents de nuit qui travaillent mal mais personne ne le voit. Et moi je me vois mal faire la police dans les services non plus. Mais bon tant qu’il n’y a pas de problème estce qu’il faut les chercher ? Ça fait partie de notre travail, mais bon on ne voit pas tout. Y a environ 150 agents qui travaillent chaque nuit, donc on ne peut pas tous les surveiller et tout voir la nuit, ni le jour d’ailleurs. Et le comportement des agents est différent quand y a un cadre ou quand y en a pas. Caractéristiques sociales : - Homme 44 ans Divorcé, sans enfants Parcours professionnel : - IDE aux Tilleroyes pendant 8 ans Service de soins à domicile à la mairie de Besançon : IDE coordinateur. IFCS 2008-2009 Retour à la mairie CHRUB de nuit en 2012 Choix du travail de nuit à l’arrivée au CHU, mais souhaiterait aujourd’hui l’encadrement d’une équipe de jour. Difficulté de recruter des cadres de nuit. ANNEXE 4 Entretien CDS EHPAD Dans le cadre de l’école des cadres, mon thème de mémoire est la place du cadre face à son équipe de nuit. Et votre coordinatrice des soins m’a dit que c’est vous qui gériez les plannings de nuits. Ah non, le service de nuit Le service de nuit. Ah oui, je suis présente de nuit. Ha d’accord, ok et comment vous organisez votre temps ? J’ai demandé un temps dédié, parce qu’au début je gérais la nuit, j’étais de nuit et de jour donc y a un moment donné c’est compliqué. Après bon c’était le temps de s’organiser, j’ai demandé un temps dédié qui m’a été accepté, heu, donc ça veut dire que je ne suis pas dans l’établissement le mercredi après-midi, je prends mon après-midi, bon qui peut se changer et j’ai demandé à avoir une demi-journée pour moi et par contre je viens une nuit par semaine, enfin pas la nuit complète mais je passe au minimum une nuit par semaine et j’ai fait le choix de passer dans la nuit du mardi au mercredi. Et comme là cette semaine je suis passée dans la nuit de mardi à mercredi et dans la nuit de mercredi à jeudi et puis voilà. Donc j’ai un temps dédié. Donc mon activité ne s’arrête pas à la constitution des plannings. Je travaille avec l’équipe de nuit comme je travaille avec l’équipe de jour. J’ai moins de temps, mais ils ont ma présence au moins une fois par semaine ça veut dire que je rencontre chaque personne au moins tous les 15 jours et si y a un besoin précis on se rencontre, elles le savent, elles me mettent un petit mot et c’est moi qui me déplace la nuit. D’accord, ok donc y a les 2 missions de jour et de nuit du coup. D’accord alors moi ma première question c’est quelle place à l’équipe de nuit dans… dans votre unité de soins ? Donc c’est un peu difficile à répondre parce que moi la place de l’équipe de nui c’est… c’est institutionnel, hein… heu… donc mon rôle… mon rôle avec l’équipe de nuit c’est d’assurer la continuité et de faire en sorte que les projets de jour soient relayés sur la nuit et que les projets de nuit soient relayés sur le jour. Donc en synthétisant, en schématique, c’est faire en sorte que les équipes de jour et de nuit travaillent réellement ensembles, voilà. Heu… donc voilà la place qu’a l’équipe de nuit. Alors comment ça se vit, heu, concrètement, donc c’est bien différencier équipe de nuit et équipe de jour ce qui veut dire que moi j’ai un service de jour plus la globalité d’un service de nuit et que mes collègues ont leur service de jour donc je fais du lien dans leur service selon les projets des unités, selon le plus souvent les problématiques qui sont rencontrées soit de l’équipe de nuit par rapport à l’équipe de jour soit les équipes de jour par rapport à la nuit. Avec des projets qui heu, des projets qui permettent, qui facilitent un petit peu ce lien parce qu’il y a heu en fait on a le choix de travailler sur la continence, avec des référents continence de jour et de nuit. Ce qui permet déjà d’avoir des référents avec des thématiques communes et on travaille depuis 2 ans et demi grâce aux implications des aides-soignants qu’ont impulsés ça, on est bien d’accord. On travaille en fait sur coordonner la vie du patient sur les 24 heures et les activités des uns et des autres. Je m’explique : l’objectif principal de la nuit est que les patients dorment. Euh… et il reste difficile pour un soignant de nuit de na pas changer quelqu’un le matin parce que qu’est-ce qu’on va bien dire ? Donc le travail a été d’identifier les patients qui étaient réveillés en fin de nuit, je veux dire entre 4h et 7h, donc tôt le matin. Ces patients-là identifier à quel moment ils avaient leurs soins le matin pour essayer de faire en sorte de ne plus les réveiller s’il n’y avait pas d’impact de continence sur le matin. Donc ça donne, on va dire un petit peu d’entrain dans le partage des facilités des uns et des autres. Donc voilà ce que je peux vous en dire, heu, en ce qui me concerne y a des réunions de service, service de jour et les soignants de nuit sont toujours invités, pour mes collègues je ne sais pas, autrement, heu, autrement c’est quand même bien séparé, les problématiques de nuit ne sont pas les mêmes que celles de jour. Heu j’ai fait un gros travail avec eux depuis 3 ans sur l’implication du personnel de nuit dans la vie de l’établissement parce que tout ce qui est travail de groupe, qualité, gestion des risques… tout ça me paraissait pas les concerner du tout. Donc j’ai fait un gros travail de communication depuis plusieurs années ce qui fait qu’on va avoir la certification cette année et bien les soignants qui se sont le plus déplacés aux réunions d’informations cette année ce sont les agents de nuit. Ce qui a un petit peu interpeller tout le monde, je veux dire voilà, c’est que c’est gagné, ils s’impliquent d’avantage, mais bon c’est heu, c’est un monde un petit peu différent. Je réponds à votre question ? Heu oui oui, et même à plusieurs du coup. Bon ben c’était les missions de l’équipe de nuit, ben en effet de faire aussi assurer la continuité des soins et assurer le sommeil du patient C’est la priorité. Et puis, vous avez là un projet qui, qui… commun Oui y a ce projet commun, des projets spécifiques d’unité, là on travaille depuis 6 mois suite à l’évaluation externe de la partie EHPAD. Vous savez dans notre structure on a une partie sanitaire et une partie EHPAD, on a la total… Heu donc suite à l’évaluation externe, il y a eu dans les remarques que l’idées serait bien de mener une réflexion sur la déambulation de nuit. Donc à chaque réunion, 4 réunions minimum par an avec le service de nuit et en amont de ces réunions, une réunion avec les infirmières. Par ce qu’on différencie le travail avec les infirmières et le travail avec les équipes. Heu, donc, tout ça pour dire, oui, donc suite à cette évaluation et à cette remarque sur les déambulations, j’ai relancé le fait qu’il faudrait qu’il y ait une réflexion, mais je voulais que ça vienne d’eux. Donc on a attendu 1 an, ça venait pas trop d’eux, donc j’ai saisi cette année les entretiens d’évaluation annuelle pour leur demander ce qu’elles en pensaient, sur les personnes les plus concernées dans les unités. Leur demander si elles seraient d’accord pour démarrer quelque chose. Après j’ai réuni les infirmières qui étaient partantes pour le projet, on a monté un groupe projet et sur un service y a un travail de réflexion qui s’est mené depuis la fin de l’année dernière sur la déambulation de nuit et avec un temps d’observation etc, etc… Et là on en est à l’étape de communiquer à l’équipe de jour les constats qu’on a pu faire. Donc voilà, y a du collectif mais y a aussi selon les problématiques particulières des sous-groupes spécifiques service. Oui, du coup ils ont des projets communs, mais aussi du coup des projets différents mais qui vont… Et on ne travaille pas seul puisqu’ils sont faits en lien avec les équipe de jour, en fait on a poussé plus loin car j’ai fait en sorte qu’il y ait 3 soignants du groupe projet qui vont en formation en même temps que les soignants de jour de ce service pour justement faire le relai de, de ce projet. Faire des choses qui ont du sens. Et je vous disais justement par rapport au fonctionnement de la nuit, je m’appuie beaucoup sur les infirmières parce que ce sont elles qui sont là en priorité et ce sont elles les responsables principales en mon absence. Donc je les réunis toujours avant une réunion de service, pour voir aussi si elles, elles ont heu, si y a des choses qui faut évoquer, si y a des problématiques, des choses qui ne paraissent pas claires etc… Donc on travaille en amont et puis après on, on rediffuse au reste de l’équipe. D’accord, c’est bien organisé du coup. Je ne pensais pas que vous interveniez la nuit du coup. Et si, donc minimum une fois par semaine et quand c’est la période des entretiens d’évaluations c’est 2 fois par semaine. Donc là vous faites les évaluations pour l’ensemble de l’équipe de nuit ? Les autres cadres ne… Non, non les autres cadres n’ont vraiment qu’un rapport fonctionnel avec eux, que si y a une problématique particulière, une situation particulière sur laquelle il faut des échanges ou alors si y a une modification organisationnelle, mes collègues passent par moi pour, heu, pour relayer à l’équipe de nuit pour pas qu’on est trop de glissement. Oui du coup vous êtes la pièce centrale, du, du relai entre les équipes que ce soit pour les autres équipes de jour ou vos collègues cadres. Et votre relation avec l’équipe de jour ? Si on parle de cohésion d’équipe avec l’équipe de jour, avec l’équipe médicale aussi ? Alors la particularité de notre structure depuis 1 an c’est que pour la nuit jusqu’à présent on avait les médecins de l’établissement qui avaient des astreintes de jour comme de nuit. Depuis les nouvelles lois avec le repos obligatoire pour les médecins, heu l’établissement a pris l’option de travailler avec SOS médecin. D’accord… Donc de 20h à 8h le matin si y a une problématique particulière on travaille avec SOS médecin. Donc les infirmiers de nuit n’ont pas de rapport direct avec les praticiens, au jour d’aujourd’hui, de la structure. Pour autant nous avons fait le choix et c’est un souhait des infirmières, avec le médecin coordonnateur, de nous réunir plusieurs fois par an pour évoquer les problématiques médicales qu’elles peuvent avoir. Besoin d’un protocole pour une chose, ou des prescriptions qui paraissent pas judicieuses de nuit, ce genre de chose, donc voilà le lien est conservé. Pas plus tard que cet après midi, on a eu notre première réunion avec le président de SOS médecin pour justement travailler sur un retour de eux comment ils vivent les choses et nous comment on vit les choses, comment chacun peut améliorer de son côté pour faciliter la prise en charge de nos patients. Donc voilà le lien avec les médecins. Voilà l’organisation actuelle. Oui en effet il y a une très bonne coordination. Et ça fonctionne bien du coup avec SOS médecin. Ils se déplacent. Ça fonctionne très bien parce que d’une part nos infirmières le souhaitaient et notre médecin co a pu booster les choses, rencontrer le président de SOS médecin pour échanger avec lui sur ce qui est bien, sur les choses à améliorer… c’est très efficace. Et puis il y a une philosophie commune parce que notre crainte au début c’était que les urgentistes nous hospitalisent nos patients à tout bout de champ mais c’est pas du tout ça. Comme ils ont une très bonne vision de ce qui se passe à l’hôpital, ils ont le souci de faire ce qui faut sur place tout en sachant qu’on est une structure médicalisée et qu’il y a des infirmières sur place. C’est totalement différent du domicile. Donc voilà les liens avec l’équipe médicale. Vous me posiez la question de la continuité jour/nuit, il y a toujours les mêmes petites accroches, qui sont, comment dire, qui font partie du métier, de ne pas avoir suffisamment la connaissance du métier des uns et des autres. Toutefois au niveau de l’institution une chose est très claire heu je n’accepte pas des soignants de nuit qui n’ont jamais travaillés de jour. Si des gens arrivent de nuit, systématiquement ils viennent 1 mois de jour. Ça peut se faire, mais dans tous les cas ils travaillent de jour. Ça aplanit un petit peu tout ça. Sur le respect du travail de chacun ? Voilà, voilà, et là j’ai eu un turn over relativement important avec des départs en retraite et des gens de jour sont repassés de nuit donc le lien se fait plus facilement, alors c’est pas le monde des bisounours, chacun tire la couverture à soi, ne comprennent pas ceci cela mais bon globalement y a moins de tiraillements comme il pouvait y en avoir y a une dizaine d’années ou vraiment les gens restaient camper sur leur position et ne cherchaient pas à assurer la continuité. Donc c’est des équipes de nuit fixes et quand il y a de l’absentéisme par exemple les agents de jours sont habilités à les remplacer ? Non, alors habilités ils pourraient l’être mais heu… Alors voilà dans l’établissement les gens sont recrutés de jour ou de nuit, on ne change pas les gens comme ça. Il faut qu’il y ait une demande ou un problème médical pour qu’on change la position de l’agent. Les agents qui souhaitent à un moment donné passé de jour, se doivent de le faire par écrit. Dès l’instant où on a cet écrit et que l’on peut la remplacer, il pourra aller faire un petit tour de jour et il revient de nuit et inversement mais si j’ai un absentéisme de nuit on ne va pas piocher dans les effectifs de jour. On appelle l’équipe déjà, en priorité, ou après faire du recrutement externe puis pour rendre les nuits aux agents. Il y a certain cas de nuit on fait appel à l’intérim, mais je souhaite que… ils sont isolés, c’est un poste à responsabilités, c’est médicalisé, donc ça ne peut pas être n’importe qui. Quand je dis n’importe qui, c’est pas péjoratif de ma part, la bonne volonté suffit pas dans des établissements comme le nôtre, c’est pas de la veille c’est du soin. Donc c’est acté avec la direction, jusqu’à présent c’est rarissime qu’on soit en sous-effectif de nuit, ça arrive ponctuellement, aller si ça arrive 5 fois dans l’année, c’est le maximum. On a une équipe très solidaire, si je passe un coup de fil ils se rappellent les uns les autres et j’ai quelqu’un de soir et pis si vraiment y a pas de solution c’est l’intérim mais on a une procédure dégradée. Et du coup elles fonctionnent à combien de soignantes la nuit ? Alors, elles sont 9 sur tout l’établissement, alors je parle des aides-soignantes. Les infirmières elles sont une par bâtiment et elles tournent donc elles connaissent tous les résidents de la structure. Elles font 1 roulement dans 1 bâtiment et l’autre roulement dans l’autre bâtiment et ça roule tout le temps. Au niveau des soignants j’ai 7 fixes, y a 7 services, sur les services du 2é étages, pour les résidents les plus autonomes 1 fixe pour 40 patients, sur les 5 autres services j’ai 1 soignantes fixe pour 30 résidents et une roulante sur chaque bâtiment qui fait les différents services. Mais, les roulantes ont un secteur identifié. Et j’ai une équipe tampon, temporelle qui si un agent fixe prend des congés c’est ces personnes qui remplacent. Donc 5 personnes supplémentaires, bon c’est un calcul mathématique pour que ça tourne donc c’est bien pour ça que je n’ai que du personnel affecté de nuit. Après dans le projet de service, ils changent de service au maximum tous les 5 ans. Alors pourquoi on a mis ça en place c’est justement pour que les personnes roulent sur les différents services. C’est pour qu’ils s’encrent pas dans une unité, qu’ils ne voient plus que celle-là et venir critiquer aussi le travail des uns et des autres. Et depuis cette mise en place, je vois qu’à leur entretien annuelle d’évaluation ils sont déjà dans cette dynamique de dire par exemple que bon ça fait 2 ans que je suis dans ce servicelà, je n’ai pas vraiment envie de changer maintenant mais si je dois changer, voilà je préfère aller dans celui-ci ou dans celui-là. Ce qui permet que tout le monde travaille avec tout le monde et au niveau infirmier ça tourne tous les 6 mois, ce qui fait que tous les infirmiers, au bout de 18 mois, ont tous travaillé ensembles. Et ils ont travaillé dans les 2 roulements ce qui fait qu’on a pas 2 équipes mais plus qu’une seule équipe. C’est bien organisé… Bon y a toujours à améliorer mais heu ça c’est le théorique, pratico pratique, mais avec la personnalité des gens c’est loin d’être aussi simple mais au moins au niveau organisationnel c’est pas fait pour empirer les choses. Et avant que vous soyez affectée à gérer cette équipe de nuit, y avait quelqu’un qui le faisait ou ça été mis en place… Alors avant c’était la cadre sup qui s’occupait de l’équipe de nuit en transversal et elle avait missionné une infirmière pour faire les plannings. Donc quand la cadre sup est partie on m’a demandé de m’occuper de l’équipe de nuit donc au départ je faisais un peu comme je pouvais essentiellement… j’avais encore l’infirmière qui faisait les plannings et je passais voir les gens de temps en temps. C’était une infirmière de nuit ? Oui c’était une infirmière de nuit qui avait de l’ancienneté, qui gérait les plannings depuis des années, qui s’en sortait pas trop mal et avec le déménagement et la réorganisation, toutes les questions qui se posaient et tous les changements ben ça venait difficile pour elle en terme de positionnement, ça devenait un petit peu compliqué. A un moment donné elle m’avait demandé de prendre un petit peu le relai pour les plannings et quand elle est partie en retraite bon je ne me suis même pas posée la question, j’ai récupéré les plannings. Donc voilà, avant la responsable des soins supervisait… Elle n’avait pas forcément de présence… Non, non, non, ce n’était pas dans sa manière de fonctionner, elle venait jamais de nuit. Pour les entretiens elle demandait aux agents de revenir de jour, ce n’était pas du tout le même fonctionnement et la même implication de l’équipe de nuit. Alors voilà, moi je n’ai qu’un service de jour, donc j’ai un peu plus de temps, mes collègues ont 2 services de jour, moi j’en ai qu’un donc je peux m’occuper du service de nuit. Bon vous avez 2 services quand même du coup… Oui, mais bon voilà c’est un autre fonctionnement. Et c’est vous qui avez demandé à être détachée pour être présente la nuit ? Ben c’est-à-dire que quand j’ai eu la nuit à m’occuper j’avais aussi mes services de jour et c’était comme ça sauf qu’il y avait pas mal de remplaçant qui arrivaient, les soignants me demandaient donc il fallait que je me déplace mais bon on travaille selon les valeurs qu’on a. J’estime que quand quelqu’un a travaillé 10 heures dans sa nuit il n’a pas à attendre le cadre le matin pour lui demander quelque chose et il a encore moins à revenir l’après-midi mais ça c’est mes valeurs. Donc très rapidement, parce qu’au début c’était ça, ils m’attendaient à 7 ou 8 heure le matin pour me parler des problématiques qu’il y avait eu donc moi j’ai été très claire, j’ai fait une réunion et préciser les choses à tout le monde : vous finissez votre nuit, vous n’avez pas à m’attendre à la fin de votre nuit. S’il y a un problème déjà ils ont tous mon numéro, si y a un problème vous m’appeler et moi je passe. Je ne passerai pas forcément la nuit où vous me le demander, mais je me rendrai disponible pour vous voir. Mais parce que c’est ma façon de voir les choses. Un autre cadre ferait peut-être autrement, il les ferait peut-être déplacer. Mais moi je fonctionne comme ça, déjà pour 2 raisons : par respect pour eux et pour faire des économies. Parce qu’un cadre qui se déplace aujourd’hui ça coute rien parce qu’il est au forfait alors qu’un agent qui vient 2 heures il est payé 3 heures. Et donc quand il s’est déplacé 3 fois et bien vous lui devez 1 nuit. Donc en terme de gestion de planning ça facilite les choses. Surtout que quand vous recevez un agent vous recevez l’infirmière avec, donc quand vous recevez 2 personnes 2 heures vous devez déjà une nuit, vous avez perdu 10h. Donc voilà, en même temps ça permet d’avoir une incidence sur le plan financier ce qui n’est donc pas négligeable. Et ça fait partie de mes attributions, ça demande pas un effort de se déplacer. C’est pour rencontrer ses équipes et par contre c’est d’une importance capitale. Ils vivent les changements, les exigences institutionnelles différemment qu’ils ne les vivaient avant parce que ben maintenant il y a quelqu’un qui les représente. C’est gagnant gagnant et c’est surtout gagnant pour l’institution. Le directeur n’est plus du tout ennuyé avec les équipe de nuit. Depuis que ce personnel est reconnu, a sa place légitime et écouté et représenté. Je vais vous dire ça fait 2 jours je me bats juste pour les poubelles. C’est de la bricole mais en attendant descendre à 4h du matin à l’extérieur mettre ses poubelles alors qu’avant y avait un local dédié à l’intérieur. Le fait de savoir que le problème va être posé c’est suffisant. La question c’était quelle sont vos missions par rapport à cette équipe de nuit ? Vous en avez cité plusieurs, vous en voyez d’autres ? Ben, heu, l’accueil. L’accueil en premier lieu on n’en a pas parlé, l’accueil des stagiaires puisqu’on accueille des stagiaires de nuit, l’accueil des nouveaux arrivants, pour laquelle on a fait une procédure et personne n’arrive dans l’établissement sans que je me sois déplacer pour les rencontrer. Alors normalement y a une rencontre de jour, mais si je n’ai pas pu les voir de jour je passe quand même les saluer les premières nuits qu’ils sont là. Donc l’accueil, l’accompagnement des équipes, bien entendu l’accompagnement de chaque soignant dans son projet individuel, heu dans le projet de nuit, heu pis après la continuité, le lien avec l’équipe fonctionnelle de jour, le lien avec l’établissement qui prédomine aussi, je pense qu’on a fait le tour. Après il y a la communication, forcément cadre de jour/équipe de nuit. Alors quand vous vous déplacez pas la nuit, quelle mode de communication avez-vous avec votre équipe de nuit ? Le plan de soins informatisé, les infirmières… enfin les soignants aussi mais s’il y a des problématiques organisationnelles ou avec des patients des choses comme ça, on communique essentiellement par PSI. Et vraiment en cas d’urgence elles m’appellent. Mais elles ne l’ont jamais fait. Elles sont suffisamment autonomes. Bon y a eu de grosses problématiques de nuit au début où j’étais de nuit, où les infirmières ne savaient pas quoi faire et n’ont pas fait forcément ce qu’il fallait faire, mais bon on fait comme on peut. Quand vous êtes 2 infirmières et que vous hésitez les 2… bon voilà… vous hésitez, vous avez mon portable, n’hésitez pas à m’appeler. Je ne vous dirai jamais rien si vous m’appeler. J’ai eu un soir à 22h30 un soignant qui était pas bien qu’ils ont voulu faire partir, ils ne savaient pas bien, ils m’ont appelé : la soignante était vraiment pas bien est-ce que vous pouvez venir la voir. Et le truc c’est qu’ils ne m’appelleront que si y a un problème avec un soignant. Pour le reste ils gèrent. Ben oui, ils ont SOS médecin pour les problématiques médicales et y a une astreinte technique dans l’établissement et y a une astreinte administrative. Voilà, donc ça limite quand même les besoins. Et je vous dis pour le reste si y a une problématique ils me mettent un mot sur PSI ou vraiment s’il n’arrive pas à traiter ils m’attendent le matin. Mais ça ça arrive quoi, 3 fois dans l’année. Pour le reste… on est dans de la continuité… On a un cahier aussi dans lequel on s’écrit, mais c’est vraiment pour les grosses choses. Si y a du monde qui est intervenu la nuit, soit SOS médecin, soit s’ils ont dû appelé la garde administrative, l’astreinte, s’il y a eu un problème avec un soignant, si quelqu’un ne peut pas venir ou un soignant qui n’était pas bien et qui risque de ne pas venir la nuit d’après, voilà ce genre de chose. Donc le cahier il est ici en terme de moyen de com’. Ok. Pouvez-vous parler de relation avec votre équipe de nuit ? C’est-à-dire ? Bien justement, quelle relation… face à leur travail, à leur autonomie… Ben c’est ce que je vous disais tout à l’heure, en plus j’ai la chance d’avoir une équipe de jour et une équipe de nuit donc je vois bien l’écart. Je n’ai pas du tout la même relation avec mon équipe de jour et l’équipe de nuit. Et je m’autorise beaucoup plus de chose avec l’équipe de nuit qu’avec l’équipe de jour. Parce que l’univers est différent. De nuit j’interviens à 2 moments de la nuit : leur souhait ce serait que l’intervienne entre 22h30 et 1h du matin. Pour moi c’est ce qui convient le mieux. Moi je sais que rarement je pars à 1h du matin mais je ne le fais pas systématiquement. En période hivernal je viens plutôt vers 4h du matin et pis je tire ma journée jusqu’à midi donc ça fait déjà une bonne tirée. Tout ça pour dire que quand j’interviens sur la fin de nuit, ça reste du relationnel, fonctionnel. Bonsoir ça va, y a-t-il un problème particulier ? 9a se limite à ça parce qu’ils ont une activité débordante. Il faut finir à 7h donc même si y a des choses c’est pas le moment. Quand je viens à 22h30 jusqu’à 1h du matin comme je l’ai fait encore cette nuit ben mon tour, heu ma visite dure beaucoup plus longtemps ils sont généralement plus loquaces et y a plus de choses et ce que je m’autorise avec l’équipe de nuit et que je ne fais jamais avec l’équipe de jour j’attends leur pause pour la prendre avec eux. Ils apprécient. Qu’avec l’équipe de jour je ne le ferai jamais car c’est tellement serré dans la journée que je veux que ce soit un moment pour eux. Voyez la différence, c’est que de jour je suis toujours en face à face avec eux, je les vois. Que de nuit y a pas de temps de rencontre et d’échanges donc si je ne leur octroie pas ce moment-là, ben y a rien. Et c’est vraiment la différence entre les 2. Alors je ne prends pas le café toutes les semaines avec eux mais c’est régulièrement qu’on a des moments de convivialité de nuit que je n’ai pas de jour. Alors on est bien d’accord, c’est vraiment le contexte de travail qui fait qu’on a pas du tout les mêmes échanges. Les agents de nuit vont plus vite faire le lien avec le perso que de jour où on est vraiment dans de l’opérationnel, dans du linéaire : besoin résidents, besoin équipe et y a pas trop d’espace d’échanges sur autre chose. De nuit, beaucoup plus facilement. Donc pas du tout la même relation. Par contre une gestion de personnel beaucoup plus difficile de nuit que de jour. De jour vous faites une réunion, vous posez les choses, c’est mis en route, c’est clair. On discute, on est pas d’accord, d’accord, on avance. De nuit, tout le monde est d’accord, rien ne se fait, ils se tirent dans les pattes. Le truc le plus simple possible vous n’arrivez pas à le mettre en place. Et je vous passe les détails des incompatibilités d’humeur. L’année dernière j’ai fait des changements de service, les infirmières n’ont rien vu voir non plus. Parce que là je m’appuie sur elles parce qu’elles voient ce qui se passe. On a eu la cata. Les gens ne peuvent pas se voir. Et de nuit c’est dramatique. Dans une unité d’équipe de jour ça ne se sent pas mais alors par contre de nuit, ouah… Oui quand on fonctionne par binôme et qu’il y a incompatibilité d’humeur… Oui c’est terrible. Donc des équipes beaucoup plus difficiles, qui sont dans la revendication, qui sont plus dans rechercher leur légitimité, donc beaucoup plus… Donc mercredi fallait que je vois les 2 équipes, je me suis dit es-tu bien prête ? Dans tous les cas ça cherche la petite bête, ça titille, ça cherche le vice caché… Y a rien de simple. De jour c’est simple en général avec les équipes. De nuit y a jamais rien de simple. Et ce que vous pensez acquis et comme y a beaucoup d’autonomie et qu’ils sont très seuls et ben le temps de découvrir les choses. Quand on découvre les choses, c’est le cas de le dire c’est l’iceberg. On a le petit bout et quand on a le truc dessous il vous faut des fois 1 an, 1 an et demi pour… moi pour un chariot… pour qu’elles prennent le chariot de nursing des services. Il a fallu 2 ans pour qu’elles prennent le chariot de chaque service et non plus un petit chariot… il a fallu 2 ans pour ce chariot alors imaginer pour le reste… Plus de résistance… Beaucoup plus… Et puis en plus comme ça travaille par roulement, même si on essaie d’aplanir un peu ça et bien y a toujours ceux qui savent mieux que les autres. Maintenant quand on essaie quelque chose c’est sur 1 mois pour être sûr que tous les roulements ont pu tous essayer et qu’on ne prenne pas une décision trop vite. Et c’est pareil, c’est hiérarchisé les prises de décisions. Sinon c’est pas possible. Il faut y aller plus que progressivement. Ah ben oui, oui oui. Donc c’est des équipes très autonomes… Oui mais sous la supervision d’une infirmière… Et sous la vôtre… Oui… Alors par contre on a pas abordé ce terme-là alors du coup je vais le lancer : la relation de confiance avec cette équipe ? Totale. Mais c’est pareil, ça se travaille. Et quand je n’ai pas confiance en quelqu’un il le sait. Alors après il retravaille cette confiance sinon il repasse de jour. Là par contre, là-dessus c’est cash. Alors je les reçois quand ils arrivent de nuit pour dire, leur repréciser ce qu’il est attendu, leur place, qu’ils sont seuls etc… Je refais un point avec eux 1 mois après. Si y a pas la confiance. Pour travailler de nuit y a pas le choix, faut que j’ai confiance en vous. Donc ça ils le savent. Et infirmier comme agent. Mais ça, moi c’est de jour et de nuit. J’ai la même chose de nuit, j’ai rencontré une infirmière cette semaine. Y a des choses qui ne vont pas il faut qu’ils le disent, s’ils ont fait une bêtise ils le disent, ils voient les choses d’une telle manière ils le disent, ils ne sont pas d’accord avec ma manière de penser ils le disent. Si ça se fait pas comme ça, de toute façon je le sais à un moment ou à un autre et là c’est pas la peine. Jusqu’à présent je n’ai pas eu… si une fois j’ai demandé à un infirmier qu’il repasse de jour pendant 3 mois, ça a été fait, ça lui a permis de se requestionner. Il souhaitait vraiment repasser de nuit donc je lui ai dit que j’étais en capacité ben de… de lui laisser une chance supplémentaire donc j’étais d’accord pour qu’il repasse de nuit et il y est depuis 4 ans. Mais là avec une aide-soignante je ne sais pas si je vais pas la repasser de jour. Voilà donc ça peut arriver mais bon globalement comme ils ont les éléments d’emblée, je ne veux pas dire mais heu… en tout cas j’ai confiance. Mais qu’est-ce qui vous permet de dire, ben justement j’ai confiance. Elle se base sur quoi ? Ça va se baser en premier lieu sur le respect de l’équipe avant le reste. Déjà le respect de l’équipe, par exemple s’il y a une absence de prévenir l’équipe. La parole de l’autre je ne la critique pas, du moins je ne la juge pas, je peux la critiquer mais je ne la juge pas et après la confiance va venir sur des éléments que je récolte : les relèves, les échanges que je vais avoir avec les infirmiers et sont nourris aussi des différentes réunions qu’on a ensemble parce que sur les réunions qu’on a ensemble, je prévois en général 1h et quart de réunion : j’ai une demi-heure d’information et le reste je veux que ça soit de l’échange. Donc tout ça fait que, au jour d’aujourd’hui, le personnel qui est de nuit… alors déjà c’est du personnel diplômé, ce sont des gens qui ont déjà fait leur preuve. Bon on les fait déjà passer de jour, mais on va vite quoi. Et pis vous le savez entre le jour et la nuit on le voit vite, parce que s’il y a une problématique d’un soignant de nuit par le biais de la prise en soin des résidents, y a toujours un impact sur le jour et on le sait tout de suite. Donc on regarde d’un petit peu plus près et après voilà… De toute façon elles sont toujours doublées quand elles arrivent de nuit par une soignante chevronnée qui va être en capacité de dire si ça va ou pas. Donc on ne prend pas de risque, si ça va pas on ne prend pas. Donc je ne peux pas ne pas avoir confiance, et déjà c’est ma manière de fonctionner je ne peux pas prendre quelqu’un si j’ai pas confiance. Dès lors je n’ai pas d’éléments qui font que ça ne va pas y a pas de risque. C’est donc la vigilance que vous avez derrière, soit les fonctionnements de chacun, leurs compétences… Ah ben oui certainement, certainement et pis de ce qui est posé dès le départ à leur prise de poste. Ils ont des fiches de tâches. En début d’année moi je reprends les règles, on fait des rappels voir si on est dans les clous. Si on est pas dans les clous on en parle, voir ce qui a glissé… Là par exemple y a un service qui commence les soins à partir de 3h30 du matin sinon ils n’y arrivent pas donc en parle, on en discute… donc voilà je vous dis je ne peux être qu’en confiance lorsqu’on échange. J’ai la chance aussi, comme on est dans un nouvel établissement, de tout recréer avec eux donc ils étaient partie prenante de tout donc les fiches de tâches qui ont été créées c’est avec eux. Bon y a certainement des aménagements dont je ne suis pas au courant mais ils ne doivent pas être gravissime pour le patient sinon y aurait forcément un retour. Si y a un souci avec un soignant alors déjà les infirmières elles le voient et si elles ne le voient pas y a un impact sur l’équipe de jour, soit les patients sont plus agressifs, soit ils sont mouillés le matin… donc j’ai des indicateurs qui me font dire que y a quelque chose à voir de plus près. Et dans ce cas-là on suit d’un petit peu plus près l’agent. Vous participez au recrutement ? Non… enfin ça m’est arrivée de participer au recrutement mais je n’y tiens pas forcément. Moi elles connaissent les exigences que j’ai pour la nuit, je n’ai pas forcément besoin d’y être. Par contre dès qu’elles sont recrutées je les vois avant qu’elles arrivent de nuit. Sauf cas exceptionnel elles n’arrivent pas un soir sans que je les ai vu avant. On voit les fiches de poste, les objectifs afin qu’elles soient d’accord avec tout ça. Pour les intérims on fait appel aux mêmes généralement, mais elles je ne les rencontre pas forcément. Bon on a déjà pas mal fait le tour du sujet. Moi si j’ai bien compris le travail se fait par votre présence, c’est donc primordial de les rencontrer régulièrement. C’est certain. Dans le réel c’est vraiment rien mais ça transforme tellement de choses… A un moment donné on s’était posé la question avec cette restructuration, on s’était posé la question : on retire cette supervision de nuit, qu’on replace dans chaque service au cadre de jour. Sauf que, parce que ça aurait été tout à fait jouable, mais malheureusement si on fait comme ça il n’y a plus de projet de nuit. La nuit ne ferait plus qu’assurer la continuité et ça c’est juste pas possible. Alors ça je le dis aujourd’hui, je ne le disais pas il y a quelques années en arrière. C’est paradoxal mais j’étais partie prenante pour que le cadre ait la responsabilité globale de son unité, équipe jour et nuit, et je me rencontre dans le réel que ça c’est juste pas possible. Enfin fonctionnellement parlant oui mais en terme de qualité c’est juste pas possible. Parce que c’est une entité la nuit, c’est un fonctionnement différent, une équipe de nuit a besoin d’être portée par des projets, elle a certainement besoin de beaucoup plus de reconnaissance que les équipes de jour qui a déjà la reconnaissance directe de ses patients, de l’infirmière qui est là, des collègues, des familles mais eux ils n’ont pas tout ça. Donc oui, là maintenant je pense que ce n’est pas possible qu’un cadre de jour assure cette continuité. Je m’en rends compte parce que je ne m’appuie pas plus sur mon service de jour que sur le reste. Donc ça c’est significatif. L’exemple du travail sur la déambulation ce n’est pas sur mon service, pas sur mon secteur et pis pour le reste. Là par exemple on travaille sur les projets de formation alors que les soignants de nuit ne voulaient pas de formation. Parce que la formation veut dire moins d’heures, moins de récupération alors les soignants de nuit, quand je suis arrivée, n’avaient pas du tout de formation. Y en a ça fait 10 ans qu’ils étaient dans la maison, hormis les formations sécurité incendie, disons les obligatoires, mais les formations professionnalisantes leur permettant d’évoluer pas du tout. Ça fait 2 ans tous les agents vont être formés au travail de nuit. Et on a pas cette vision là quand on a les 2, donc c’est indispensable qu’on fonctionne comme ça. Et je pense qu’en fonctionnant comme ça les établissements gagnent de l’argent. A l’inverse de ce que l’on pourrait croire. 9a peut se compter en mensualités. On ne fait plus se déplacer les équipes de nuit. Moi j’ai 30 agents de nuit, donc quand vous comptez, si vous les faites déplacer à chaque fois qu’il y a un problème, les rencontrer de jour, que vous leur rendez leurs heures quand vous calculez le tout ça se compte en mensualités. C’est gagnant gagnant, gagnant pour les équipes, gagnant pour les patients et gagnant pour l’établissement en même temps. D’accord, bon du coup moi j’ai fait le tour par rapport à mon questionnement vous avez des choses à ajouter ? J’avais noté aussi l’évaluation annuelle mais je sais que vous la faite, je pense que ça doit la faciliter aussi ? Alors moi ma question c’était comment évaluer du personnel qu’on ne voit pas ou que très ponctuellement quand on est cadre de jour ? Bon moi c’est vrai que ce n’est pas en passant 1 fois par semaine que je vais tout voir. Avant de rencontrer les agents en entretien annuel je rencontre l’équipe infirmière, pour avoir leur avis. Bon c’est pas de me dire ah ben il est sympa, ça va bien, ça fonctionne bien. Non je ne construis pas l’entretien sur ça. Moi c’est qu’est-ce qu’on peut lui dire pour que ça aille encore mieux, qu’est-ce qu’il a fait de bien sur l’année… c’est ces choses-là qui m’intéressent. Mise à part quand il y a des points à améliorer et des points fort qui sont de l’ordre de la communication justement, heu, interpersonnelle plus que la prise en soin des patients, bon bien évidemment faut leur dire aussi. Mais heu… avec ces professionnels là on n’est pas là-dedans quoi. Faut vraiment qu’ils ne soient pas dans de la routine. Bon maintenant ils ont des envies, ils ont des demandes : des demandes de formation, de questionnement, de rencontre des équipes de jour. Un réel travail de collaboration en fait ? Ah oui, oui. Enfin réel on est dans des balbutiements et pas se cantonner à la critique de ce que font les autres, donc c’est l’essentiel. Bon évidemment ça prend du temps. Faut pas vouloir tout transformer dès le début, ça c’est sûr. Comme ils n’étaient pas habitués à voir du monde. Et surtout toujours travailler pour que ça vienne d’eux. Moi je viens à toutes les heures de la nuit donc je vois en globalité les organisations. J’ai un regard superficiel mais je sais ce qui se passe la nuit. Donc quand je veux que des changements s’opèrent j’en parle en réunion, à chaque réunion. Des fois ça prend plus d’une année pour que ça change mais bon je veux que ça vienne d’eux. Je leur en parle régulièrement, ils sont alors dans la réflexion. De toute façon j’ai compris une chose avec la nuit c’est pas la peine de leur dire : demain je veux que vous fassiez comme ça. Comme ce sont des gens autonomes, tant que ça ne vient pas d’eux, ça n’est pas la peine. Donc voilà, j’utilise tous les biais. Et je sais qu’à un moment donné y aura un déclic, quand un service le fera ben y en aura un deuxième et que ce sera eux qui auront choisi et que ce sera eux qui le feront et moi ça me convient tout à fait comme ça. Parce que nous Cadre on a parfois déjà la réponse. Sauf que dans la réalité avec la nuit ça ne marche pas comme ça. On se dit ils sont autonomes, vous avez confiance, mais si on veut avoir confiance faut leur laisser le temps et rien ne peut arriver parce que uniquement je le souhaite. Faut qu’ils fassent leur propre cheminement, leur propre réflexion de leurs pratiques. En général c’est 18 mois : l’idée et 18 mois après ça commence et puis on y arrive. Mise à part des choses pratico pratiques où elles s’y mettent d’emblée. Mais dans des projets comme ça qui demandent à modifier leur façon de fonctionner, là faut plus de temps. En plus je ne veux pas que les infirmières fassent sans cesse appliquer ce que demande le cadre et soient en porte à faux tout le temps dans l’équipe. Il m’a fallu un moment pour le comprendre quand même parce qu’au début je ne fonctionnais pas comme ça. Les erreurs qu’on peut faire au départ. Et on rame derrière… Donc ça c’est la particularité de nuit qu’on n’a pas de jour. Le jour on décide en équipe, avec les infirmières on met en place et hop ça suit. Y a plus de personnes, les agents suivent le mouvement. Y a toujours une personne pour rappeler les choses, donc c’est plus facile. Aujourd’hui ma légitimité elle est vraiment propre. Au niveau de la nuit y a aucune ambiguïté. Que ça soit de la direction, le corps médical, les équipes de jour ou pour les équipes de nuit à faire remonter certaines choses alors là je suis vraiment au centre. Je dirai même plus que de jour. Alors est-ce que c’est le fait que pendant longtemps y en a pas eu, qu’il n’y a pas eu de présentéisme et le fait que je sois là… Est-ce que c’est parce qu’ils étaient un peu livrés à euxmêmes et pis que là, la bonne aubaine, on a quelqu’un à qui se raccrocher ? A l’inverse au début ils pensaient que je venais pour tout contrôler… Bon moi il m’a fallu un an pour m’adapter aussi, au rythme, pour comprendre un petit peu le fonctionnement de cette équipe de nuit. Mais y a quelqu’un pour gérer les choses, pour nous poser un cadre. Et au jour d’aujourd’hui je dirais que je suis bien plus confiante aux éléments qui me sont rapportés par la nuit que par le jour. Alors que j’y suis beaucoup moins et que j’ai beaucoup moins de relations avec eux. C’est peut-être pour ça. On peut se poser la question. Après la prise en soins de jour et de nuit ne requiert pas la même nécessité de notre présentéisme : les problématiques des familles, du corps médical pour lesquelles parfois faut qu’on soit là… y a pas ça de nuit quoi. Du coup d’avoir les 2 casquettes c’est pas mal. C’est génial d’avoir ces 2 versants là, c’est très enrichissant mais au niveau perso et au niveau équilibre physiologique c’est galère. Parce que même si j’ai ce temps dédié, heu et même si je n’ai qu’un service d’USLD en terme d’équilibre personnel c’est raide. Ça demande un investissement personnel. On a quand même 2 équipes bien distinctes avec des projets bien distincts. Avec toute la diplomatie qu’il faut avoir aussi entre les 2 équipes. 9a c’est tout un apprentissage. Maintenir une cohésion d’équipe, faut prendre des gants bien souvent. C’est sans regret mais en même temps je comprends qu’il y ait pas mal d’endroits où la nuit est un petit peu à l’abandon et on se contente de ça. On a des fois meilleur temps de ne pas se poser trop de questions… Et la plupart du temps, alors ça c’est une particularité aussi les gens ne passent pas de nuit par choix professionnel, la plupart du temps c’est des obligations personnelles qui les conduisent à passer de jour ou de nuit. C’est le perso au départ qui joue. Tous les agents que j’ai de nuit, au départ c’est pour des raisons perso. Et pour les agents de nuit qi veulent repasser de jour, dans 90% des choix, voir même plus, c’est pour des raisons de santé, des problèmes de sommeil généralement ou une grande fatigue. Le corps a certaines limites à un moment donné. Donc je suis très vigilante à ça. Donc voilà Marieke… Caractéristiques sociales : - Femme - 50 ans - Mariée - 3 enfants Parcours professionnel : - ASH dans l’établissement Formation aide-soignante Formation à distance de remise à niveau BAC pour préparer le concours d’infirmière IDE en 1992 toujours dans l’établissement dans les différents secteurs médico-social et sanitaire Diplôme interdisciplinaire en gérontologie Rentrée à l’IFSI en 2001 en tant que faisant fonction cadre de santé Diplôme de Cadre de santé en 2004 Réintégration à l’IFSI ensuite en tant que formateur Coordination d’une année 2008 : retour sur l’établissement en tant que Cadre de santé 2015 : DU de management des équipes en gérontologie ANNEXE 5 Entretien IDE Quelle place a l’équipe de nuit dans votre unité ? Quelles spécificités dans votre travail de nuit au SI de cardio ? Alors on est très complémentaire à l’équipe de jour, on travaille vraiment ensemble, on ressent vraiment une continuité des soins. La spécificité du travail de nuit c’est qu’on a moins de monde sur place, on a toujours les médecins avec nous mais on a pas d’aides-soignantes, on a pas d’ASH, c’est nous qui sommes maîtres à bord on va dire. Voilà, heu, on anticipe les allers et venues des patients, on anticipe les entrées. Après on travaille en collaboration avec l’équipe de jour, c’est vraiment une continuité de soins, vraiment. En termes de cohésion d’équipe ? Vous vous sentez une équipe à part entière dans le service… Tout à fait, travailler ensemble, transmettre le mieux possible les informations d’une équipe à l’autre, passer à côté des moins de choses possibles. Oui beaucoup de cohésion. Après on ressent beaucoup de stress et de fatigue parce que c’est un service qui est lourd. On a des équipes qui se renouvellent en permanence, on a beaucoup de jeunes dans le service. On a parfois l’impression de récupérer pleins de choses qui n’ont pas été faite dans la journée, mais c’est la charge de travail qui veut ça, c’est pas toujours facile. Mais ça arrive aussi que ce soit nous qui laissons du travail aux équipes de jour, ça fait partie du jeu. Et ça, ça ne crée pas de conflit entre les 2 équipes ? Non, non, entre collègue de travail on communique beaucoup et quand y a quelque chose à dire on le dit. Les choses sont réglées et puis on va de l’avant. Vous pouvez parler d’une reconnaissance de votre travail de nuit ? Oui, oui, oui, vraiment. On communique beaucoup entre nous, on est assez proche, on est content de travailler ensemble. Donc on se dit les choses. D’abord c’est important parce que la nuit on est moins nombreuses et puis aussi parce qu’on veut faire progresser nos pratiques, de toute façon c’est comme ça qu’on travaille. Et puis des fois ben on a des retours par rapport aux équipes de jour de la même façon que quand nous y a quelque chose qui nous convient pas on le dit et ça a des répercussions positives pour tout le monde. Donc pas d’ambiguïté de par la communication du coup ? Oui, tout à fait. Quelle autonomie de l’équipe de nuit ? Je pense qu’on est plus autonome parce qu’on a moins de relai on va dire. Bon on appelle les médecins quand on a des problèmes, quand on a besoin d’adapter les prescriptions, quand on a des choses comme ça, mais après c’est nous qui sommes sur le terrain en direct. Si on doit sortir un chariot d’urgence c’est nous qui le sortons, c’est nous qui commençons le temps que les médecins arrivent. Donc oui une grosse marge d’autonomie, cadrée malgré tout parce qu’on a des protocoles, y a des façons de faire mais oui on est relativement autonome la nuit. En plus pas d’aides-soignantes et pas d’ASH alors qu’il y en a la journée. On apprend à être autonome, on le devient. Alors la relation avec l’équipe de jour vous m’en avez parler et avec l’équipe médicale ? Et bien une relation directe, on s’adresse directement à eux. La nuit on travaille ensemble. Ils sont vraiment à l’écoute de ce qu’on peut leur demander. On a tout de suite des réponses, tout de suite des prescriptions. Dans la mesure du possible on essaie de secouer les internes et avoir des prescriptions en directe afin de les valider lorsqu’on les administre au patient. Après c’est relativement bien réajuster, heu, on est entendu par rapport à nos demandes la plupart du temps. Donc particulièrement les internes, mais vous voyez les autres médecins ou pas ? Oui, oui : les internes, les séniors, nos chefs. La nuit ils sont là puisqu’on a forcément un interne et un chef, mais on travaille avec l’interne en fait. Ça dépend de ce qu’on a à faire ne fait. Les chefs on les voit aussi parce qu’ils sont présents en début de nuit, il passe dans le service. Ils sont venus un coup et puis nous on a du technicage : si les patients sont venus pour un arrêt, il passe en salle de coronarographie, on a le chef qui est là, il se lève, il intervient aussi donc du coup on travaille avec lui. Donc vous avez des contacts avec l’équipe médicale globale. Et la relation avec le cadre de santé ? Alors le cadre de nuit on l’appelle quand on a besoin de lui. De temps en temps il passe dans le service, mais bon nous on est tout au bout de l’hôpital, donc ça n’arrive pas très très souvent. Mais on a de bons rapports avec eux, parfois on a du mal à avoir des réponses à nos questions, faut rappeler en journée quand c’est les cadres généraux de garde. Mais sinon pour des questions de planning, d’organisation… heu l’autre jour j’ai un patient qui a fugué du service, j’ai appelé ma cadre, elle m’a donné la procédure à suivre et heu on la suivi. Non mais on peut les joindre y a pas de souci. Y a des périodes où ils sont joignables et d’autres moins, ils gèrent les plannings, ils gèrent pleins de choses. Après on les voit pas tellement : ils font leur boulot administratif on va dire et nous notre boulot technique. Bon déjà ça va diminuer la pression du fait que tout le monde travaille sur le même rythme maintenant. C’est beaucoup plus simple je pense pour eux à gérer. Bon notre rapport avec le cadre de nuit va tendre à décroître parce que on aura plus tellement de rapport avec eux, hormis un arrêt de nuit. Par rapport à la cadre de jour, moi j’ai de bons rapports. Elle disponible aussi, heu, bon maintenant ils sont pris le jeu malin de nous envoyer des SMS donc on reçoit des petits messages. Oui, elle m’a dit qu’elle communiquait comme ça. En même temps c’est pratique. Est-ce que ça suffit ? Non ça ne suffit parce qu’on a besoin de voir les gens c’est certain, mais elle est disponible malgré tout, on arrive à s’organiser, à trouver des temps de parole, des temps d’entretien, des temps d’écoute quand on en a besoin, quand elle en manifeste le besoin aussi, je pense que c’est correct, ouais. Alors quels moyens de communication avec le cadre de santé, hormis ces sms ? L’entretien annuel, heu, s’il y a ponctuellement quelque chose à redire, des questions à poser elle appelle aussi. Sinon entretien ponctuel dans le bureau si y a besoin de se voir en face à face. Elle est passé aussi nous voir une ou 2 fois en début de nuit, un matin aussi avant qu’on s’en aille elle est venue un petit peu plus tôt. Des fois pour des formations, pour des choses mise ne place dans le service, non elle fait le relai, je pense qu’elle essaie de faire au mieux. Après ce n’est pas pratique pour elle, elle est partout, elle gère l’hôpital de jour, elle gère plein de choses, je pense qu’elle a bien du travail. Déjà le fait qu’elle se déplace marque une certaine reconnaissance. Et vraiment on fait partie de l’équipe, je pense que dans son état d’esprit et dans le notre on est une équipe. Elle est la cadre de l’équipe de jour, mais c’est notre cadre aussi, c’est la cadre du service. Y a vraiment une continuité pour ça, elle nous connaît toutes. Après elle nous voit pas travailler, elle ne sait pas comment on travaille, voilà mais… Et l’évaluation, qu’est-ce que vous en penser d’être évaluer par quelqu’un qui ne vous voit pas travailler justement ? Je pense qu’elle a le retour des équipes de jour, le retour des médecins, le retour de mes collègues. Lors de l’entretien on parle de ce qui nous est propre, mais on parle aussi de nos rapports avec nos collègues, de notre place dans l’équipe et du travail qu’on fait. Donc elle doit avoir un retour, à mon avis il est censé être objectif. Elle doit avoir un retour assez, assez… fondé sur notre travail. Je pense qu’elle nous évalue sur notre personnalité, sur notre caractère, sur notre façon d’être et notre façon de faire parce qu’on se voit aussi pendant des temps de formation. Elle a parfois trace de notre cheminement, de notre questionnement, notre investissement et notre volonté. De là à dire qu’elle peut évaluer notre travail pratique, technique proprement dit, c’est compliqué. Mais bon après on a des résultats aussi et les résultats sont aussi le reflet de notre travail. Je pense qu’on a pas de retour négatif au niveau des soins intensifs : au niveau de l’accueil au niveau de la prise en charge, au niveau des soins, au niveau du respect du patient. La prise en soins est satisfaisante dans le service. Et le cadre en est garant aussi. Après c’est un service où le patient passe et reste peu, c’est du service d’urgence. Bon ça peut arriver qu’il y ait des heurts, que quelqu’un s’accroche, on ne peut pas s’entendre tout le temps avec tout le monde. Mais on est là pour le travail et je pense qu’on sait faire la part des choses entre notre ressenti personnel et notre travail. Il faut savoir dire les choses en étant correct, c’est important. Non mais je pense qu’on a un travail satisfaisant dans l’équipe. Donc se rend-elle disponible, oui. Est-ce qu’elle prend en considération vos rythme de nuit lors de la planification des réunions par exemple ? Elle respectueuse aussi de ça ? Alors elle est respectueuse de ça, je pense qu’elle se questionne. Après ça ne tombe pas toujours bien. On a par exemple les formations vers 14h ou 14h30 c’est un peu tôt. Moi j’habite à côté c’est relativement facile et je ne suis pas une grosse dormeuse, donc voilà. Mais j’ai des collègues qui habitent à 40’ donc elles ne se déplacent pas pour aller en formation quand elles ont travaillé la nuit d’avant ou quand ça tombe au milieu d’un roulement. Après ça tombera toujours dans un roulement de nuit de quelqu’un, nous ou la contre équipe de toute façon. De toute façon c’est forcément compliqué d’avoir tout le monde de nuit. Y en a forcément qui ont travaillé la veille. Après on se dit qu’une formation à 19h ou 19h30 ça pourrait être pas mal, on se rapproche de notre horaire de travail. Alors est-ce que les équipes de jour validerait ça, ce n’est pas évident. Est-ce que les médecins qui nous font les formations sont disponibles à ce moment-là ? En général il nous ait proposé 14h30 : ce n’est pas facile pour tout le monde mais c’est comme ça. On s’adapte. Oui il s’agit des disponibilités de chacun. Je pense qu’elle tient compte des disponibilités de tout le monde, mais en premier lieu ça reste la disponibilité du médecin. En premier je pense que c’est lui ou le labo qui propose l’horaire. Après celles qui participent font le relai pour celles qui n’ont pas pu se déplacer. On fonctionne comme ça. Alors quelles sont vos attentes par rapport au CDS ? Qu’attendez-vous du CDS ? Je dirais qu’elle reste disponible comme elle l’est déjà. Heu ce que l’on attend c’est qu’elle s’investisse d’une manière qui nous satisfera nous par rapport à la gestion de nos plannings. Parce que par rapport au cadre de nuit, parfois c’est un petit peu compliqué ; j’explique : nous on est 4, parfois 5 dans notre équipe, sans compter la contre équipe. Alors on a pour principe de se concerter pour poser nos congés. On fait coïncider nos vacances pour que tout le monde puisse poser ce qu’il souhaite. On décale, on s’arrange entre nous en fonction des besoins. Chaque fois qu’on pose des vacances on les pose de façon à ce que ce soit possible et qu’elles soient gérées comme ça. Parfois ça coinçait parce que les cadres de nuit n’avaient pas forcément quelqu’un pour nous remplacer. Mais maintenant on est attitré à des pôles d’activité. On ne fait pas chevaucher nos vacances, donc on avait généralement des réponses favorables à nos demandes et on espère que ça restera comme ça. Parce que l’organisation de nos congés c’est important qu’on puisse aussi les gérer de façon satisfaisante et qu’on puisse respecter notre rythme de nuit et notre fatigue. On sait à quel moment on a besoin de nos congés, à quel moment on a besoin de nos repos. Alors les filles de jour elles sont submergées de travail, leur planning change tout le temps dès qu’il manque quelqu’un, ça c’est compliqué mais il ne faudrait pas que ça devienne comme ça la nuit, c’est pas possible. A cause du rythme de nuit et du besoin de sommeil et de repos qu’on a c’est pas possible. Vous n’êtes pas rappelé régulièrement ? On est rappelé régulièrement mais on a un rôle et un rythme la nuit qui nous protègent. Si on peut faire une nuit sup on la fait, si on peut pas on nous reprochera jamais de ne pas la faire. On est dans notre rythme de nuit, on est décalé de tout le monde, du coup chacun le vit comme y peut, le mieux possible. Après c’est souvent un choix le travail de nuit, donc on s’adapte. Mais c’est pas facile de rajouter des nuits à notre rythme. Après le jour ce n’est pas facile non plus. Le personnel n’est pas toujours considéré. On change les plannings, tu fais comme ça et t’as pas le choix. Moi je ne suis pas trop d’accord pour ce type de fonctionnement. Ok on bosse pour la santé, ok on bosse au service des gens qui sont malades, ils n’ont pas choisi. Mais on a des vies de faille, on a des vies à côté. On n’a pas que notre travail, on a aussi des enfants à faire garder. Et je pense que parfois de jour c’est très très compliqué. Finalement de nuit vous êtes un peu préserver de tout ça. Oui, je pense. Et c’est vraiment un choix aussi par rapport à ça. Après on se débrouille, entre nous. Bon maintenant qu’on est en petit et grande semaine mais on pourra toujours faire comme quand on était en 3/3, on intervertissait des nuits, on faisait des échanges entre les collègues, on se débrouillait quand y en a qui était en repos, mais je pense que ça va être plus compliqué sur les grosses semaines, forcément, mais sur les petites ça va être possible. Après à nous à gérer nos plannings. Y a une réelle cohésion d’équipe, on est très solidaire entre nous, même avec la contre équipe. On se voit de temps en temps, on s’entend bien. On arrive bien à gérer tout ça donc j’espère que ça va continuer. Et donc ce changement de gestion du planning par le CDS de jour, qu’est-ce que vous pouvez en dire ? Je ne sais pas. Moi je ne veux pas me faire d’a priori et me baser sur ce que j’entends la journée. Si je me bas sur ce que j’entends la journée, j’ai peur. Mais bon on a beau entendre plein de choses faut qu’on se fasse notre propre jugement. C’est une certitude. J’espère juste que ça va continuer à bien se passer. Dans le service où on est je pense qu’on est privilégié la nuit. C’est un service difficile mais confortable malgré tout : parce que je suis dans une bonne équipe, parce que je m’entends bien avec mes collègues, parce que vraiment c’est un choix le travail de nuit, dans les conditions qu’on a maintenant. C’est difficile parce qu’on manque de personnel, c’est difficile parce que quand on nous accorde des congés on nous rappelle parce que y en a plus qu’un de l’équipe… C’est difficile de travailler avec des collègues qui ne sont pas du service, le travail est spécifique aux SI de cardio. Donc j’espère que cette cohésion, cette cohérence va être maintenue et exister sinon ça va être difficile. Le cadre a un rôle à jouer là ? Oui, je pense. Je pense que malgré toutes les difficultés de manque de personnel, du fait que c’est un service d’urgence, de tout ce stress à gérer en permanence, heu on a quand même un certain confort et j’espère qu’on ne perdra pas ça. Parce que c’est un choix de travailler dans ce service là et dans ces conditions-là aussi. Alors après on a entendu parler y a récemment que ce serait 1 infirmière pour 5 patient la journée et 1 infirmière pour 8 la nuit. Alors moi faudrait qu’on m’explique la différence entre les patients de jour et les patients la nuit. Comment la charge de travail est moindre la nuit que le jour… On est dans un service où on fait des entrées en permanence, autant la nuit que le jour, y a pas de différence. On accueille le SMUR, on accueille le pompier. Les gens sont directement orientés chez nous, il ne passe pas forcément par le SAU. On est pas considéré comme service d’urgence parce que le service d’urgence c’est le SAU. Mais à un moment donné, on ne sait pas trop à quelle sauce on va nous manger. On sait qu’on finira par être manger, mais comment ? C’est pas rassurant. Donc oui pas de reconnaissance par rapport à la spécificité de votre service qui est du coup quand même un service d’urgence. Y a marqué urgence cardiaque quand on arrive et heu je m’excuse mais quand on accueille les ambulances, les pompiers et le SMUR, heu, les urgences elles arrivent directement chez nous. La régulation du SAMU nous appelle et envoie directement les patients chez nous. Après tout est question d’administratif, de dossier, de papier et d’argent. On ose nous dire que la priorité c’est le patient, les soins apportés aux patients et de quelle manière il faut le faire, mais bon c’est une réalité de terrain partout, de plus en plus. La santé et l’éducation c’est le parent pauvre en France, de toute façon. Et ce changement petite et grande semaine, du coup ça va ? Là j’ai été régulièrement en congés donc pour l’instant ça ne m’impacte pas tellement. On essayait de gérer nos congés et nos récupérations de manière régulière pour éviter d’accumuler et d’avoir trop de jour à poser sur l’année. Maintenant la Cadre aura sans doute une autre manière de procéder. Y a des feuilles qui disent que vous devez poser tant et bon on essaie de coller à peu près à ça pour pas accumuler des congés pour la fin de l’année. Pour les grandes équipes c’est nécessaire. Après de jour je pense que c’est plus difficile à gérer avec les congés, les arrêts de travail, les remplacements réguliers. Nous sur la nuit on sait relativement bien se gérer, et le rythme de nuit n’étant pas du tout le même que le rythme de jour, y a des périodes où on peut travailler et on sait qu’on va bien travailler et y a des moments où on a accumulé de la fatigue et on sait qu’on a besoin de congés. Et à un moment donné aussi ça peut être à double tranchant, on nous a imposé des congés, certes on les a eus, mais ça n’empêche pas qu’après on ait besoin de congés parce qu’on est fatigué et y en a plus. Je pense qu’il y a du pour et du moins bien, à voir. Il va falloir tester ce changement pour nous connaître sur ce rythme. On planifie nos congés à l’année. Et, bon maintenant je me retrouve à 100% aux soins de cardio, mais avant je faisais 70 et 30 % au pool. Donc pour les personnes en fractionnée ça va pas être simple non plus. Oui, je pense que ça ne va pas être simple de s’organiser entre les services pour la gestion des plannings. Bon je pense qu’il y a des façons simples de le faire, il faut juste s’organiser par semaine. Après est-ce que c’est toujours possible ? Je ne voudrais pas avoir à faire ça, mais bon chacun son rôle. Et on va y venir : avec la mutualisation des services, à long terme, même si on nous présente pas les choses comme ça, le personnel de jour sera amené à remplacer le personnel de nuit. Après ça présente l’avantage de connaître le travail de chacun. Mais bon ça va être compliqué, il va y avoir des résistances, ça c’est sûr. Faut avoir la possibilité mais pas que ce soit imposer. On a pas le même quota d’heure le jour et la nuit : nous c’est 10h30 la nuit et elles, c’est 7h30 le jour. Et aussi la garde des enfants, pour la nuit y en a qui ne pourront clairement pas. Et après moi j’ai fait le choix de travailler la nuit après avoir travaillé longtemps de jour, pour rien au monde et je dis bien pour rien au monde je reviendrais travailler de jour. Et qu’est-ce que vous avancez pour dire je ne retravaillerai pas de jour ? Le rythme, le bruit, moi ça c’est des conditions dans mon travail qui sont primordiales. L’administratif, l’informatique, bon qu’on a déjà un peu à gérer la nuit, mais bon quand même dans de moindres proportions. Le fait d’avoir les cadres sur le dos tout le temps, c’est aussi quelque chose qui pèse, ça n’apporte pas que du confort dans notre travail. C’est important de savoir qu’on a quelqu’un sur qui compter, de là à l’avoir sur le dos tout le temps. Après ça dépend la place que se donne le cadre dans son équipe. Et les parkings, l’accès à l’hôpital toutes ces choses-là, c’est juste infernal, c’est juste pas possible. Encore d’être du matin ça ne me posait pas de problème, je pense que ce serait gérable, mais l’aprèsmidi c’est juste non, c’est hors de question. D’abord pour mon rythme, pour le rythme de ma fille surtout, parce qu’il faut être là une heure avant, tourner sur le parking pour trouver de la place. Je terminerais par une dernière question : pour vous qu’est-ce qu’un bon CDS ? Je pense que c’est un cadre qui se remet en question, qui est à l’écoute de son équipe. Un cadre qui connait son équipe, qui connait les pathologies de son service, qui connait les soins à apporter aussi, c’est important aussi. Et je pense qu’il ne doit pas passer par l’autorité pour se faire en entendre, je pense que ça ne marchera pas. C’est très intéressant ce que vous dites. Souvent l’autorité c’est vécu comme quelque chose de subie ou d’imposée et je pense qu’il y a d’autres moyens pour faire passer des choses. Vous auriez un exemple ? Comment le cadre peut-il être légitime ? Je pense qu’il peut concerter son équipe, faire des enquêtes et demander des avis. Se baser sur la majorité même si c’est pas son avis à lui. Vouloir mettre des choses en place c’est bien, mais si l’équipe manifeste une contre avis et ben il faut automatiquement se heurter et imposer les choses à tout prix. Dans ce cas ça passera de manière temporaire mais à terme ça restera pas. Et oui, la priorité c’est d’être à l’écoute de son équipe. Avant le cadre était infirmier, bon il est aussi mais maintenant y a du management plus que du rapport aux soins. C’est du management et de la gestion d’équipe. Je pense que le management ça va pour certaine, mais ce n’est pas que ça. Importance de la communication, du respect. Et si je vous dis « relation de confiance », qu’est-ce que ça vous évoque ? Je pense que c’est primordial une relation de confiance dans le travail. D’autant plus dans un service de soins I de cardio où on fait de l’urgence et de la réanimation. Par rapport à nos collègues c’est certain, c’est évident. Après par rapport au cadre…. C’est nécessaire, c’est évident, prioritaire et primordial, mais c’est pas toujours facile. Dans quel sens ? De l’équipe par rapport au cadre. Mais du cadre par rapport à l’équipe, j’espère qu’il a confiance en son personnel. Sinon faut changer de personnel ou changer de service. De ‘équipe par rapport au cadre, c’est toujours pareil : c’est une histoire de hiérarchie, d’administratif entre ce que le cadre dit, ce qu’il fait, ce qu’il peut faire, ce qu’il aimerait pouvoir faire et qu’il peut pas. C’est compliqué ce rapport au personnel et en tant que cadre on a de la pression, du poids sur les épaules, ça on le sait. C’est du management, de la gestion, les flux entrants, les flux sortants. Il faut rentabiliser l’hôpital malgré tout même s’il ne s’agit pas de faire du bénéfice, mais à quel prix, à quel détriment ? Donc je pense que la confiance c’est primordial, sans la confiance c’est pas la peine. Après c’est une histoire d’humanité et de rapport à l’autre en général. Mais je pense qu’en expliquant les choses comme il faut et en se positionnant dès le départ, y a des façons de faire, même quand on est pas d’accord. Quand l’équipe subit plus qu’elle ne s’investit ou ne s’implique dans le projet, ouais, je pense qu’il faut mettre les formes. Etre cadre c’est un choix, il faut beaucoup de pédagogie, ça c’est certain. C’est pas toujours à portée de main et ce n’est pas donner à tout le monde, mais bon y a une façon de faire. Et vous voyez une différence entre autorité et positionnement, du cadre ? Oui, je pense. On est pas obliger de passer par l’autorité pour se positionner, moi c’est comme ça que je le ressens. Parce que l’autorité pourrait se transformer en autoritarisme et ça c’est pas bon. Autoritarisme, abus de pouvoir… Bon alors de mon côté j’ai fait le tour de mes questions, auriez-vous des choses à rajouter sur le sujet ? Non, je pense que non. Caractéristiques sociales : - Femme - 38 ans - Divorcée, 1 enfant Parcours professionnel : - Aide-soignante au CHRUB, de jour, diplômée de 2004 (hémato, onco, pneumo et cardio Ecole d’infirmière par promotion professionnelle IDE en 2012 SI de cardio de nuit Choix personnel de travailler la nuit : gestion familial, rythme personnel, confort dans le travail. Choix fondé, réfléchi et qui va durer longtemps. Abord du patient qui n’est pas le même par rapport au jour. Les patients n’ont pas les mêmes besoins la nuit que le jour. Gestion de la famille aussi, même la nuit dans notre service. A travaillé de jour car à l’époque, pas d’enfant, pas les mêmes besoins. Centre Hospitalier Régional Universitaire de Besançon I.F.P.S. – Formation cadre de santé 44 chemin du sanatorium 25030 BESANCON Cedex Titre : Soigner la nuit, loin des yeux (du cadre de santé), près du cœur des soins MOISSONNIER Marieke Année de formation 2015/2016 Option : infirmière Résumé : Lumière plus douce, bruits étouffés, couloirs presque déserts : le travail de nuit s’effectue à l’hôpital dans des conditions particulières, un peu à contre temps, mais il fait partie intégrante de l’activité hospitalière. Le personnel de jour et de nuit partage le même objectif de qualité et de sécurité des soins. Le cadre de santé joue alors un rôle essentiel dans la cohésion du travail entre ces deux équipes. Mais comment peut-il accompagner et encadrer le personnel de nuit malgré une distance horaire qui les sépare ? Cette notion de distance fait écho sur le terrain à la complexité de ce management, notamment au niveau de la communication. A travers une approche théorique et une enquête auprès de professionnels, ce travail de recherche met en évidence que le cadre de santé use de stratégies, d’outils managériaux pour instaurer et maintenir des relations de qualité avec cette équipe éloignée et ainsi garantir la continuité des soins. Mots clés : Travail de nuit – Management à distance – Continuité des soins – Relation – Communication –