Monsieur Stéphane Hessel à l`Athénée Invité par Monsieur Nicolas
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Monsieur Stéphane Hessel à l`Athénée Invité par Monsieur Nicolas
Monsieur Stéphane Hessel à l’Athénée Invité par Monsieur Nicolas Schmit, Ministre délégué aux Affaires étrangères et à la Coopération dans le cadre du 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, Monsieur Stéphane Hessel a parlé le 20 janvier 2009 devant les élèves des classes de 2e de l’Athénée. Monsieur Hessel avait exprimé le souhait de s’adresser à des jeunes, les décideurs de demain, pour leur parler de son expérience de vie et pour échanger ses vues avec les jeunes générations sur le monde d’aujourd’hui. En guise de préparation, Monsieur Victor Weitzel, conseiller spécial, a fait le tour des classes pour présenter la vie riche en expériences de l’invité et pour initier les jeunes au sujet des droits de l’homme. Il leur a parlé de cet homme « aux mille vies », citoyen du monde et Ambassadeur de France, qui est reconnu comme étant une des consciences de notre siècle. Stéphane Hessel est né à Berlin en 1917 dans une famille de la bourgeoisie libérale allemande. La vie du couple Franz Hessel - Helen Grund, les parents de Stéphane, a d’ailleurs inspiré le film « Jules et Jim » de François Truffaut. Stéphane Hessel rejoint la France avec sa mère en 1924 .Après son baccalauréat, il s’inscrit à l’Ecole normale supérieure et se fait naturaliser français. Il est mobilisé en 1939, mais rejoint le Général de Gaulle en 1941. Envoyé en mission spéciale en France, il est arrêté en 1944 par la Gestapo et déporté à Buchenwald. Il échappe à la pendaison et arrive à s’enfuir lors d’un transfert de détenus en échangeant son identité avec celle d’un autre détenu en train de mourir. Après la guerre, Stéphane Hessel devient diplomate et fait partie, en 1948, de l’équipe des rédacteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Pleinement engagé dans son siècle, Stéphane Hessel n’a cessé de se battre en faveur des droits de l’homme. Il a notamment joué un rôle de médiateur dans l’affaire des sans-papiers de l’Eglise Saint-Bernard et intervient, depuis, activement en faveur des mal logis. Malgré ses origines juives, il n’a pas hésité à dénoncer la récente intervention israélienne dans la bande de Gaza comme crime contre l’humanité. Notre invité du jour est une des personnalités connues et respectées qui ont marqué leur époque de leur empreinte. C’est donc avec un grand respect que les jeunes de l’Athénée se sont rendus à la salle des fêtes pour écouter le conférencier. Excellent orateur, il suffisait à Stéphane Hessel de quelques minutes pour capter l’attention de son jeune auditoire et pour gagner sa sympathie. La glace fut définitivement rompue quand Monsieur Hessel, parfaitement bilingue, se mit à réciter par cœur un poème de Hölderlin en allemand et un poème de Rimbaud en français. Impressionnés par la culture et surtout par le charisme de cet homme, les jeunes n’hésitaient pas intervenir dans le débat et à poser les questions qui leur tenaient à cœur. Debout pendant deux heures, Monsieur Hessel a plaidé la cause des droits de l’homme. Le débat portait d’abord sur la genèse de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Au lendemain de la 2e Guerre mondiale, la communauté internationale prit conscience que, pour éviter qu’un tel désastre ne se répète, le monde était à construire sur des bases nouvelles Le Président Roosevelt en particulier avait la vision d’un monde de paix et de prospérité fondé sur les valeurs de la personne humaine, de la liberté et de l’égalité. Ainsi fut signée en 1945 la Charte de l’ONU. Sur initiative du Président Roosevelt fut lancé ce projet ambitieux de la rédaction d’un texte fondamental qui aurait une valeur universelle. Les droits de l’homme, notion nouvelle à cette époque, seront les fondements des sociétés futures. La Déclaration universelle des droits de l’homme se concevait comme la base des valeurs sur lesquelles s’édifierait un monde de justice et de paix. Cette Déclaration, fruit d’une politique volontariste particulièrement ambitieuse et éminemment positive, fut signée le 8 décembre 1945. Depuis du chemin a été accompli. À noter notamment la Création du haut Commissariat aux droits de l’homme présidée à l’heure actuelle par une éminente juriste sud-africaine ou la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité de La Haye qui juge entre autres les responsables politiques et militaires des massacres commis en exYougoslavie. Des avancées ont notamment été faites en Europe. La peine de mort est abolie dans tous les Etats membres de l’Union européenne, la Cour des droits de l’homme de Strasbourg a pu être créée grâce à la réconciliation francoallemande, l’Espace Schengen, un espace de libre circulation des personnes et des biens a été instauré. Mais ce projet d’un monde de paix construit sur les valeurs fondamentales de la personne humaine a aussi connu de graves échecs. A commencer par le gouvernement Bush qui au cours des huit dernières années a gravement délaissé sa responsabilité en matière de droits de l’homme en répondant aux attaques du 11 septembre par la guerre en Irak et par la prison de Guantanamo. Monsieur Hessel cite ensuite la répression du Soudan vis-à-vis du Darfour ou bien l’intervention d’Israël contre ses voisins palestiniens qui sont autant de violations du droit des peuples. A noter que dans ce contexte, les ONG comme Amnesty International ou Human Right Watch, jouent un rôle éminemment important d’observateur et de contrôleur des droits de l’homme. L’orateur pense que le moment d’une nouvelle prise de conscience est venu. Les relations de l’homme avec la nature seront au centre des préoccupations du 21e siècle. Toutes les capacités qui sont celles de notre espèce à savoir l’altruisme, la générosité, comprendre l’autre, respecter la nature devront être mobilisées pour sauver la nature, notre patrimoine universel et permettre à tous les peuples une vie de prospérité et de paix dont rêvaient les rédacteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme il y a 60 ans. Aussi la Déclaration devra-t-elle être révisée en vue d’un ajout sur la notion de l’environnement dont la défense est aussi un droit de l’homme. Dans le contexte de la crise financière et économique, il faudra faire usage de cette épreuve, estime Monsieur Hessel, pour bâtir une nouvelle façon de vivre plus généreuse, plus solidaire, plus juste, où l’appât du gain ne sera plus l’unique objectif. Aux questions des élèves sur des sanctions à l’encontre de la Chine ou de l’Iran à l’instar de celles imposées à l’époque à l’Afrique du Sud, Monsieur Hessel renvoie au rôle pacificateur de l’ONU. Quant à l’euthanasie qu’un autre élève aborde, Stéphane Hessel, se disant n’appartenir à aucune communauté religieuse, est d’avis que le droit de mourir est aussi un droit de l’homme. La décision de mourir étant une des libertés individuelles fondamentales, toute personne souhaitant mourir doit pouvoir compter sur l’aide d’un médecin. En guise de conclusion, Stéphane Hessel en appelle à la bonne volonté et à l’engagement des jeunes. Les droits de l’homme ne sont pas acquis une fois pour toutes Etre jeune, c’est à ses yeux, être disponible, avoir la volonté de connaître, avoir l’esprit ouvert sur les valeurs morales, s’engager pour la défense des droits universels qui lient les peuples du monde, participer à l’édification de ce monde de justice, de prospérité, de paix dont nous rêvons tous.