Le détachement selon queqlues grands spirituels

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Le détachement selon queqlues grands spirituels
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Le DETACHEMENT selon quelques grands spirituels
Voici présenté ci-après cinq grands spirituels dont l'expérience et l'enseignement sur le
détachement ont marqué l'Occident. Ils continuent d'inspirer et d'initier les méditants
contemporains en quête d'approfondissement spirituel. Ce sont le Bouddha, Jésus, Maître
Eckhart, Graff Dürkheim et Eckhart Tolle. On pourrait en citer bien d'autres, évidemment
Marie-T h érèse A bela…
LE BOUDDHA
Siddhartha Gautama vécut entre 560 et 480 av. JC. Il naquit sur les contre-forts de l'Himalaya. Son père était un
prince riche et puissant. Après une enfance et une adolescence faciles et protégées, Gautama se marie et a un
enfant. Mais, profondément ému par la vue des souffrances de toutes sortes qui l'entourent, il renonce à sa
famille à l'âge de 29 ans et se livre aux plus sévères austérités ascétiques puis renonce à ces ecxès.
Il obtient l'éveil alors qu'il est en méditation assis auprès d'un arbre et devient le Bouddha (l'Eveillé).
Puis il commence ses prédications près du Gange, entouré de ses disciples.
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L'enseignement de Bouddha est la transmission d'une expérience personnelle, reproductible
par chacun et accessible par la méditation mais non par l'intellect.
C'est dans et par la méditation que peut être acquis le détachement nécessaire à la pratique de
la voie. Tout ce qui est obstacle à la méditation est donc obstacle au détachement.
L'avancée dans cette voie demande de rompre avec des pratiques qui nuisent à la méditation
tels que le désir sensuel, la malveillance, la torpeur , l'agitation, le doute et aussi l'attachement
aux rites et aux règles et la croyance en un soi permanent.
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Rayonnement actuel en France
En France, 300 000 personnes, pour moitié Français d'origine, se disent bouddhistes.
Mais le bouddhisme est une tradition difficile d'accès pour les occidentaux.
Pourtant il fascine de plus en plus des croyants et des incroyants qui pressentent dans cette doctrine des choix
enrichissants pour leur vie spirituelle.
Le bouddhisme en France est constitué d'une multiplicité de traditions parmi lesquelles le bouddhisme tibétain et
le bouddhisme zen (avec sa pratique du zazen) sont les mieux représentés.
Les pratiquants occidentaux cherchent dans la méditation bouddhiste, soit à obtenir simplement la paix
intérieure, parvenir à une plus juste estimation de leur destin et donc à une meilleure compréhension des autres et
de soi-même, partant à un mode de vie plus satisfaisant. D'autres cherchent à découvrir leur véritable nature qui
est nature de Bouddha, nature d'éveillé ce qui suppose le renoncement au moi donc une véritable métamorphose.
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Source: Dennis Gira, Comprendre le bouddhisme, Bayard éd./Centurion, 1995, 206 p.
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JESUS
" Une lecture ouverte et attentive de l'évangile montre que Jésus cherche à transmettre , à
travers son enseignement et sa vie, une véritable science intérieure permettant la
métamorphose, le passage d'un état d'être à un autre. De nombreux auditeurs – pour ne pas
dire la majorité – étaient fermés à cette dimension nouvelle à laquelle Jésus ne cessait
d'appeler."
Son enseignement sur le Royaume de Dieu insiste sur la nature du Royaume.
Le Royaume est une réalité intérieure. Il est invisible parce que situé au cœ ur de l'hom m e.
Jésus invite ses interlocuteurs à abandonner leur conception sensible et matérielle du
Royaume au profit de sa seule dimension intérieure et donc spirituelle.
Le lâcher prise, l'acceptation et la non résistance sont le secret majeur de la voie spirituelle...
Et Jésus ajoute cette affirmation paradoxale : "Si quelqu'un vient à moi sans haïr son père, sa
m ère, sa fem m e, ses enfants, ses frères, ses sœ u rs et jusqu'à sa propre vie, il ne peut être m on
disciple" (Luc).
Ce passage d'un état d'être à un autre, d'une réalité à une autre, suppose une telle révolution
intérieure par rapport à l'ancien monde qu'elle ne peut être comparée qu'à une deuxième
naissance. " En vérité je te le dis, à moins de renaître d'eau et d'esprit, nul ne peut entrer dans
le Royaume de Dieu. "
Cette attitude intérieure de non résistance, de lâcher prise et d'ouverture rejoint les Béatitudes.
Les pauvres sont disponibles pour le Royaume de Dieu.
Jésus dit aussi : "Soyez passants" (év. de Thomas). Cela signifie être en mesure de passer d'un
état d'être à un autre et d'évoluer en traversant les différents niveaux de conscience. Cela
suppose de ne pas se raccrocher au passé pour être disponible au présent là où le mental, que
Jésus n'hésite pas à appeler Satan, n'a pas de place.
"Laisse les morts enterrer leurs morts" dit Jésus et "Quiconque a mis la main à la charrue et
regarde en arrière est impropre au royaume de Dieu" . Et aussi : " Ne vous inquiétez pas du
lendemain" afin d'inciter au lâcher prise par rapport à l'avenir.
La vigilance est un état de conscience lucide et attentif. C'est un thème majeur de l'évangile et
de toutes les traditions. Il est impossible d'envisager un quelconque chemin de délivrance sans
l'aborder. Elle constitue l'un des dénominateurs communs à toutes les voies de transformation,
celles-ci, sans exception, ayant pour but d'acheminer l'homme vers une profondeur de
conscience qui reste longtemps insoupçonnée.
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Rayonnement dans le monde
Le christianisme compte environ deux milliards de fidèles dans le monde appartenant essentiellement aux églises
chrétiennes, mais le message spirituel de Jésus s'est fortement affadi au cours des siècles.
Nietzsche " considérait comme une véritable insulte à l'égard de la personne de Jésus la réduction qui a été
in fligée à so n enseig nem ent. (… ) Il affirm ait q u 'il y a eu un vrai chrétien m ais q ue, m alheureusem ent, il etait
m o rt sur la cro ix… "
Source: Eric Edelmann, Jésus parlait araméen, Ed. du Relié, 2000, 478 p.
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MAITRE ECKHART
" Prestigieuse figure mystique de l'Occident chrétien au début du XIV° siècle, Maître Eckhart a connu en son
temps l'opprobre d'un procès en hérésie parce "qu'il a voulu en savoir plus qu'il ne convenait".
A la base de sa doctrine spirituelle, le "détachement". Au plus loin de tout dolorisme ascétique, cette disposition
est l'expression d'une liberté qui "laisse être" toute chose dans la vérité de leur origine. De portée universelle, une
telle exigence abyssale de "pauvreté en esprit" qui a laissé des traces dans l'histoire de la pensée - Nicolas de
Cues, Angelus Silesius, mais aussi Hegel, Yung, Heiddeger, et Bataille – suscite un intérêt bien au delà du
christianisme, en particulier dans les écoles de mystique orientale
Propre à Eckhart est l'audace du détachement , la capacité de conduire la théologie vers le vertige du rien, avec
un geste radical qui rappelle certains textes bouddhistes."
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Me Eckhart place le détachement( traduit de l'allemand par déprise) en tête de toute les vertus:
avant l'amour, avant l'humilité, avant la miséricorde.
" Laisser être les choses selon leur vérité, dans le "dynamisme de leur origine", tel est le
"limpide détachement " dont l'une des formes – la plus sublime – s'annonce , en reprise
évangélique, comme la pauvreté en esprit"
"Pour Maître Eckhart, l'homme vraiment détaché ne saurait donc prier, au sens où la prière
viserait l'obtention de tel bien ou la délivrance de tel mal, ceci ou cela, au sens par conséquent
où la prière connoterait un mouvement s'ajoutant au tout. D'ou cet aveu/affirmation
vertigineuse: " quand je ne demande rien, je prie véritablement".
Il distingue l'homme extérieur et l'homme intérieur:
"L'homme extérieur peut être dans une activité alors que l'homme intérieur se trouve
totalement dépris et immobile."
"Une porte s'ouvre et se ferme sur un gond. Or je compare le panneau extérieur de la porte à
l'homme extérieur; le gond en revanche, je le compare à l'homme intérieur. Or , selon que la
porte s'ouvre ou se ferme, le panneau extérieur se tourne ici et là et cependant le gond
demeure immobile en un lieu et pour cette raison ne subit aucun changement."
" On peut faire le rapprochement avec d'autres mystiques: le "rien" de Jean de la Croix,
"l'indifférence" de Ignace de Loyola, le "nirvana" des Orientaux. Il y a parenté entre la
mystique d'Eckhart et la mystique bouddhiste soulignée par les Bouddhistes eux-mêmes."
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Rayonnement
Me Eckhart a laissé de nombreux traités et sermons qui continuent à être lus et étudiés par des mystiques de tous
pays. Il suscite un intérêt bien au delà du christianisme, en particulier dans les écoles de mystique orientale. Mais
sa lecture est difficile ce qui limite la diffusion de son enseignement .
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Source: Du détachement et autres textes. Traduits et présentés par Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean
Labarrière, Rivage poche/ Petite bibliothèque, 1995, 100 p.
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GRAF DURCKHEIM
Graf Dürckheim est né à Munich, en Allemagne, en 1896.
Il participe à la première guerre mondiale, puis, après la guerre, étudie la philosophie et la psychologie.
En 1939, considéré comme politiquement indésirable, il est expatrié au Japon où il reste 10 ans. C'est là qu'il
s'intéresse au bouddhisme; il pratique assidûment le zazen et le tir à l'arc.
En 1951, Il fonde avec Maria Hippius le Centre de Rencontre et de Formation en Psychologie Existentielle" en
Forêt Noire . Il y reçoit des personnes intéressées par ce qu'il appelle "le chemin de maturation".
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La démarche de Dürkheim est basée sur la reconnaissance de l'Etre essentiel en l'homme, sur
la méditation qui permet d'approcher cet Etre essentiel et sur l'expérience directe.
L'Etre essentiel
"Chacun de nous est conditionné par ses études, sa carrière, ses succès, ses échecs; ses
amours, ses tristesses, ses détresses et par la position qu'il occupe aujourd'hui dans le monde
(… ) M ais chacun de no us est aussi un être inconditionné qui est au -delà du temps et de
l'espace. Je l'appelle Etre essentiel par rapport à l'autre que j'appelle moi existentiel."
" L'Etre essentiel est au delà de toutes les conditions. C'est le noyau qui, en chacun de nous,
représente la façon dont l'Etre universel voudrait se manifester de façon individuelle dans
l'existence. Il se voit en opposition avec le moi existentiel conditionné. Cette tension entre ces
deux pôles est le problème central de l'homme."
"Le problème qui se pose à l'homme actuel est de devenir perméable afin de se laisser
toucher par ce noyau essentiel, d'être capable de l'expérimenter."
L'homme a la possibilité d'abandonner son être existentiel, son petit moi pour s'ouvrir à la
possibilité de goûter ce qui est au-delà de sa conscience naturelle, d'accéder à un autre niveau
de connaissance.
Enfermé dans son moi existentiel, l'homme ne se sent plus en contact avec son Etre essentiel
et va chercher à l'ex térieur ce qu 'il ne sent plus à l'intérieur: rich esse, pou voir… Il trouve un
sens à son existence dans la reconnaissance et l'estime des autres. Par contre, s'il est relié à
son Etre essentiel, il se sent en ordre même au milieu du mépris des autres.
" Nous sommes tous imprégnés par l'idée d'une réalité objective, telle que l'envisage la
science (… ) m ais on oublie cette réalité qu'est l'homme sujet (… ) P our reconnaître cette
réalité de l'homme sujet, il faut retirer les lunettes de l'homme de science et les lunettes du
théologien parce que ces deux autorités représentent une source d'erreur pour ce que je vis, ce
que je sens, ce que je ressens."
Méditation
C'est par la méditation et les activités méditatives que se fait l'approche de l'Etre essentiel.
Le but de la méditation est la rencontre de l'Etre essentiel présent dans le tréfonds de l'homme
et qui est sa vraie nature. La méditation assise et sans objet (zazen) est une pratique qui a fait
ses preuves, mais nombre d'activités quotidiennes ordinaires peuvent être occasion de
méditation. Chaque méditation permet à l'homme d'en sortir plus naturel, plus authentique,
plus vrai. Mais la méditation ne se fait pas avec la tête; la transformation recherchée concerne
le corps autant que l'esprit.
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La pratique de la méditation vise à une transformation qui demande d'abandonner un grand
nombre de convictions, d'opinions et d'habitudes.
C'est au cours de la méditation que se situe le lâcher prise. Et ce lâcher prise est la voie qui
conduit à l'intégration entre le plan du moi et l'Etre essentiel.
"En lâchant prise, vous devenez un autre. Etant devenu un autre, vous voyez autrement et
vous voyez autre chose. La profondeur de ce que vous voyez dépend du degré de votre
profondeur."
Expériences intérieures
" Le travail que l'homme peut faire sur lui-même, je l'appelle le chemin initiatique. Il
com m ence av ec une ex périence. C ette ex périence nous fait connaître notre E tre essentiel. …
L'Etre essentiel est une réalité dont on peut vraiment faire l'expérience."
" Dès qu'il s'agit d'expérience manifestant l'Etre essentiel ce sont des expériences d'une
qualité totalem ent différente de celles dont l'ho m m e a l'habitude."… "Je fais la distinction
entre les grandes et les petites expériences de l'Etre. Les grandes expériences de l'Etre sont
très rares mais nous devons être attentifs aux petites expériences."
Une petite expérience peut nous arriver dans n'importe quelle situation.
" Souvenez-vous ! C'était au bord de la mer, regardant et éco u ta n t le va et vien t d es va g u es… , c'éta it à la
ca m p a g n e co n tem p la n t silen cieu sem en t le co u ch er du so leil… , c'éta it d a n s u n e sa lle d e co n cert… , c'éta it lo rs
d 'u n e p ro m en a d e … , c'éta it ( je d eva is a vo ir q ua tre a n s ) lo rsq u e je p a rven a is po u r la prem ière fo is à rouler à
vélo seu l, to u t seu l … !
C'était ! Qu'est-ce qui était ? Tout à coup la vie, ma vie s'est animée depuis le centre de l'Etre, moment
sin g u lier, em p rein t d 'un m erveilleu x q u i m 'a sa isi … S u b item en t , je retro u ve d a n s cette exp érien ce sp iritu elle ,
l'état originel de ma vraie nature.
… Q u e d o is-je faire pour découvrir cet autre moi-même et en conséquence , rester en contact avec cet état d'être
confiant, serein, en paix ? Le zen répond : Mets-toi en chemin !"
J.et C.Castermane, Centre Dürkheim.
Rayonnement en Occident
Graf Dürkheim est considéré aujourd'hui comme le pionnier d'un zen adapté à la culture occidentale.
Après sa mort, en 1988, son disciple, Jacques Castermane, fonde et anime le Centre Dürkheim, dans la Drôme,
q ui p ro lo nge l'œ u vre d u maître et où sont proposés des stages de maturation spirituelle.
" De plus en plus d'hommes et de femmes sont prêts aujourd'hui à faire des exercices pour retrouver le contact
avec leur p ro fo nd eur hu m aine, avec leur E tre essentiel… C 'est u n événem ent extraordinaire que pour la première
fois dans l'histoire de l'humanité l'homme occidental s'ouvre à ce que l'Orient a toujours appelé le chemin
intérieur."
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Source : Karlfried Graf Dürckheim, Le centre de l'être, propos recueillis par Jacques Cestermane, Albin Michel,
1992, 212 p.
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ECKHART TOLLE
Eckhart Tolle est un contemporain. Il est né en Allemagne où il a vécu jusqu'à treize ans. A ce
moment là, il vivait dans un état presque continuel d'anxiété et de dépressions suicidaires.
A 29 ans, une nuit, il éprouve un sentiment de terreur absolue et de dégoût du monde, puis, au réveil,
il comprend quelle est sa véritable nature et entre dans une paix profonde.
Eckhart Tolle n'appartient à aucune religion, n'a pas de maître et ne défend aucune doctrine,
mais il rejoint les autres maîtres spirituels quand il aborde la dimension profonde de l'homme.
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Pour lui, une notion essentielle est celle, universelle, de l'Etre nommé différemment selon les
cultures. L'Etre, c'est l'éveil, l'illumination dans le langage des orientaux. C'est la Royaume
dans la prédication de Jésus, c'est l'homme intérieur selon Me Eckhart, c'est la vie essentielle
par rapport à la vie existentielle chez Durkheim. C'est le lieu de notre Moi profond pour
Echart Tolle.
Le chemin de l'Etre, c'est d'accepter le moment présent sans réserve, c'est laisser couler le
courant de la vie sans y résister. C'est se sentir habités par la vraie vie.
Voici un témoignage de détachement vécu dans la paix et dans la joie malgré la souffrance:
" Il y a de cela une trentaine d'année, au bord du Gange, à Vanarasi, une femme – elle pouvait avoir aussi bien
trente ans que cinquante ans, tant la tuberculose l'avait affectée – se tenait avec un petit enfant dans les bras et
une gamine d'à peine deux ans à ses cotés. Il n'y avait plus aucun espoir pour elle. Elle avait été victime d'un
mari alcoolique qui l'avait abandonnée. Une vie à tous points de vue ratée, frustrée, souffrante. Selon toutes
probabilité, l'enfant qu'elle portait dans ses bras allait mourir, elle même savait qu'elle n'en avait plus pour
lo ngtem p s. N o u s avo ns p arlé (… ).
Or cette femme, dont le souvenir m'émeut encore, m'exprima alors la joie qu'elle avait d'avoir été invitée au
banquet de la vie, d'avoir eu le bonheur d'une vie conjugale, si courte qu'elle ait été – car elle avait très vite
connu l'horreur – le bonheur d'avoir été mère deux fois, et de savoir maintenant que cette invitation touchait à sa
fin. Elle se tenait là, si pleine de gratitude et de joie d'avoir été invitée, à partir de rien, à jouir d'un moment de
plénitude. Qu'aurait-elle attendu de plus ? De l'avenir, alors qu'il n'existait pas ou pas encore ? Du passé, alors
qu'il n'existait plus ? Elle avait vécu, et cette lumière d'un instant lui suffisait pleinement."
R. Panikkar. Entre Dieu et le cosmos, pp.98-99
L'illumination n'est pas l'apanage de Bouddha. Elle est tout simplement notre état naturel, la
sensation de ne faire qu'un avec l'Etre. C'est un état de plénitude, d'unité avec le tout, et donc
de paix.
L'Etre nous est accessible immédiatement et représente notre moi le plus profond, notre
véritable nature. Mais ne cherchons pas à le saisir avec notre mental ni à le comprendre. Nous
pouvons l'appréhender seulement quand notre mental s'est tu, quand nous sommes présents.
Le mental, c'est essentiellement la pensée. Il est extérieur à notre Etre.
Nous nous identifions trop facilement à notre mental. L'identification au mental crée un faux
moi, l'ego, qui se substitue au véritable moi qui irradie de l'Etre. Mais nous ne sommes pas
notre mental. Nous avons à nous en libérer en nous concentrant sur l'instant présent.
Le mental comprend aussi les émotions. Les émotions naissent au point de rencontre du corps
et du mental. Une émotion est la réaction de notre corps à notre mental et nous risquons de
nous identifier à l'émotion comme nous le faisons avec le mental.
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S'identifier au mental nous rend prisonnier du temps. Or passé et futur n'existent pas. Rien
n'existe à part l'instant présent. Il n'y a jamais eu dans notre vie un instant qui ne soit pas dans
le moment présent.
Un grand nombre de personnes intelligentes et instruites sont totalement identifiées à leur
mental. C'est le cas aussi d'une grande partie de l'humanité
"Je pense donc je suis" disait Descartes. Il formulait ainsi une erreur fondamentale: celle
d'assimiler la pensée à l'Etre et l'identité à la pensée.
Accepter le moment présent inconditionnellement et sans réserve, c'est renoncer à se laisser
conduire par le mental, c'est renoncer à la résistance intérieure qui s'oppose à ce qui est. C'est
accepter totalement ce qui libère de l'identification au mental et conduit à la paix.
Mais le mental ne doit pas être rejeté. C'est un outil utile pour résoudre les problèmes
quotidiens et pour mettre au point les grandes inventions scientifiques.
Le détachement ou lâcher prise n'est pas un but en soi. Son objectif est d'abandonner le faux
moi ( l'ego, le mental) pour aller vers l'Etre qui est notre véritable nature, notre Moi profond
afin de ne faire qu'un avec lui. Le lâcher prise est la seule porte d'accès au royaume de l'Etre
C'est une attitude purement intérieure.
J'ai à lâcher prise par rapport aux biens matériels, à mon identité sociale, à mon milieu, à mes
conditions de vie, à mon apparence physique, à mes compétences et aptitudes, à mes relations,
à mon histoire, à mes convictions religieuses et morales, au passé et au futur, bref, à tous mes
repères habituels. J'ai à interrompre le bruit incessant de mon monologue sur le passé et le
futur. La voie, c'est la méditation. La méditation, c'est l'attention au moment présent, ici et
maintenant. Le vide mental ainsi obtenu nous fait accéder à l'instant présent et à l'Etre.
Se détacher n'est pas nier ce que nous sommes ou avons été. C'est changer de niveau de
conscience. C'est prendre conscience que nous sommes habités par la vraie vie.
Le lâcher prise n'est pas la passivité. Ce n'est pas endurer passivement une situation sans
tenter quoi que ce soit pour l'améliorer. Ce n'est pas non plus cesser d'établir des plans pour
transformer notre vie et poser des gestes positifs.
Il n'est pas nécessaire d'accepter une situation indésirable ou désagréable.
Il ne faut pas confondre le lâcher prise avec une attitude je m'en foutiste du genre "ça m'est
égal" qui serait une résistance déguisée.
Lâcher prise n'est pas non plus se laisser exploiter par les autres. Un non ferme peut être
opposé à l'interlocuteur tout en restant dans une attitude de lâcher prise. C'est une
manifestation de liberté.
Le lâcher prise est donc la chose la plus importante que nous puissions faire pour amener un
changement positif en nous. Aucune action véritablement positive ne peut provenir d'un état
de conscience qui n'est pas fondé sur le lâcher prise.
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Rayonnement actuel en Occident
Eckhart Tolle est connu aux Etats Unis et en Europe par deux ouvrages qu'il a publié en 1997 sur "Le pouvoir du
moment présent" et qui ont été traduit en 15 langues. Il est reconnu, selon la préface du livre, comme un
enseignant de classe mondiale. Ses livres transmettent le résultat de son expérience d'éveil. C'est un
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enseignement spirituel et intemporel relativement facile à lire. Il enseigne à de petits groupes en Europe et en
Amérique du Nord. Il habite Vancouvert.
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Sources:
Eckhart Tolle, Le pouvoir du moment présent, Guide d'éveil spirituel, 2000, Ariane Ed., 220 p.
Eckhart Tolle, Mettre en pratique, Le pouvoir du moment présent , 2002, Ariane Ed., 112 p.
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