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22 janvier 2016 Proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs. • Proposition de loi n°3109 adoptée par l’Assemblée nationale le 17 décembre 2015 • Texte n° 316 de la commission (2015-2016) adopté le 20 janvier 2015 • Rapport n° 315 (2015-2016) de M. François BONHOMME, fait au nom de la commission des lois • Avis n° 314 (2015-2016) de M. Alain FOUCHÉ, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable • Discussion en séance publique le 27 janvier 2016 • Yvon COLLIN interviendra dans la discussion générale pour 6 minutes Les transports en commun constituent un point de vulnérabilité en matière de sécurité en général, et une cible longtemps privilégiée des terroristes en particulier : attaques au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995, attentats à la bombe dans le RER parisien en 1995 et 1996, attentats dans les transports à Madrid en 2004, à Londres en 2005, à Moscou en 2004 et 2010, attaque dans le Thalys en 2015. Compte tenu de cette menace et au regard du flux important de voyageurs (10 millions de Français empruntent chaque jour les transports publics), les pouvoirs publics portent une attention particulière à ce secteur. La proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs poursuit deux grands objectifs comme l’indique son intitulé : d’une part, mieux prévenir les actes terroristes et d’autre part, lutter contre la fraude au titre de transport dont le coût est estimé à 300 millions d’euros pour la SNCF et 180 millions d’euros pour la RATP. q L’ORGANISATION DE LA SECURITE DANS LES TRANSPORTS TERRESTRES La sécurité des transports et des gares est assurée à la fois par des services internes, s’agissant des deux grands opérateurs que sont la SNCF et la RATP et par des moyens relevant directement de l’Etat et parfois des collectivités locales par le biais de la police municipale. Si une coordination entre les différentes entités est assurée à plusieurs niveaux, c’est l’unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun (UCSTC), placée sous l’autorité conjointe de la direction générale de la police nationale (DGPN) et de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) qui assure la coordination stratégique de l’ensemble. -ChristineMartin|Sénat|15,ruedeVaugirard|75291ParisCedex06 Tél:0142342500-Fax:0142342280-Email:[email protected] 2 ð Les services internes de sécurité Le code des transports autorise deux opérateurs de transport, le SNCF et la RATP, à disposer de services internes de sécurité. A la SNCF, la SUGE (sûreté générale) est chargée de lutter contre les incivilités, contre la fraude et le vol, de protéger les personnels du groupe, de contrôler la qualité des prestations servies aux voyageurs et de contribuer à la lutte contre le terrorisme. La SUGE comprend 2800 agents formés, recrutés et rémunérés par l’entreprise publique. Ils peuvent constater par procès-verbal les infractions au code des transports, procéder à des interpellations ou des investigations. La SUGE procède également à un travail de prévention par une veille, une analyse et une anticipation des risques notamment par des patrouilles sur le terrain, en tenue avec port d’arme. Ce service s’appuie aussi sur 33 000 caméras dont 12 000 en gare et 21 000 appareils dans les trains. Les caméras en gare peuvent projeter des images en temps réel. Reliées au poste de commandement national de la SUGE, elles permettent de projeter des images quand un incident est signalé. Des opérations de vidéoprotection active peuvent être conduites avec des agents de sécurité privée qui sont installés derrière les écrans pour repérer des comportements suspects. Les images des caméras embarquées ne sont visionnées qu’a posteriori. La loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire a étendu les missions de la SUGE au nouveau groupe public composé de la SNCF, de SNCF Mobilité et SNCF Réseau. A la RATP, le département sécurité comprend 1200 agents dont 1000 appartiennent au GPSR (Groupe de protection et de sécurisation des réseaux). Recrutés et formés par l’entreprise, ils sont chargés de la sûreté du réseau et du confort des voyageurs. Le GPRS dispose de 9680 caméras déployées dans les espaces publics et 28 730 dans le matériel roulant. En province, les opérateurs de transport ne sont pas autorisés à disposer de services internes de sécurité sur le modèle de deux entités précitées. Ils disposent néanmoins de personnes dédiées à la sûreté et ils peuvent s’appuyer sur des sociétés de sécurité privées. ð Les services étatiques de sécurité La gendarmerie nationale exerce une mission importante de sécurité dans les transports dans la mesure où 90% du réseau ferré français est dans sa zone de compétence. Elle ne dispose pas d’unité spécialisée. En cas de crise, la gendarmerie peut bénéficier du renfort des pelotons de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG). Le service national de la police ferroviaire (SNPF) créé en 2006 dépend de la direction centrale de la police aux frontières. Cette entité comprend une brigade centrale des chemins de fer (BCCF) qui regroupe 275 personnes. Il faut ajouter 271 personnes des brigades de chemin de fer organisées à l’échelle des zones de compétence de la police aux frontières (PAF) sur lesquelles le SNPF exerce une autorité fonctionnelle. Le SNPF est compétent sur le territoire national à l’exception de la région Île-de-France dont la sécurisation relève de la compétence de la sous-direction régionale de la police aux transports (SDRPT) qui dépend de la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne -ChristineMartin|Sénat|15,ruedeVaugirard|75291ParisCedex06 Tél:0142342500-Fax:0142342280-Email:[email protected] 3 (DSPAP) de la préfecture de police de Paris. La sous-direction dispose d’une brigade des réseaux franciliens (BRF) de 1156 policiers qui peuvent être renforcée par d’autres moyens. D’autres forces de police concourent à la sécurisation des transports tels que les escadrons de compagnies républicaines de sécurité pour la sécurisation des gares. Par ailleurs, Marseille, Lyon et Lille ont un service interdépartemental de sécurité des transports en commun (SISTC) émanant de la direction générale de la police nationale. Plusieurs grandes villes disposent d’unités de protection des transports en commun (USTC). Il faut ajouter à ces dispositifs les effectifs militaires déployés dans le cadre de Vigipirate (environ 566 personnes à ce jour) ainsi que la douane qui intervient dans le cadre de la lutte contre la fraude douanière. En outre, les transports s’inscrivent dans le cadre de la protection des organismes d’importance vitale. Enfin, certaines polices municipales exercent des missions de sécurisation des transports à l’échelle de la ville ou de l’intercommunalité. Dans leur rapport d’information n°291 (2015-2016), intitulé « Renforcer la sécurité des transports terrestres face à la menace terroriste », les sénateurs Alain FOUCHE et François BONHOMME pointent une multiplicité des acteurs intervenant dans la sécurité des transports terrestres rendant l’ensemble peu lisible. En outre, certains acteurs cumulent des fonctions de coordination et des missions opérationnelles, ajoutant ainsi encore plus de complexité. C’est pourquoi, les auteurs recommandent « d’attribuer la coordination de l’action de la sécurisation des réseaux au SNPF, en concentrant le rôle de la SDRPT sur ses missions opérationnelles. » q LE CONTENU DE LA PROPOSITION DE LOI ðL’article 1 entend autoriser les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP à procéder à des inspections, fouilles et palpations avec le consentement des intéressés et dans les mêmes conditions que les agents de sécurité. ðL’article 1er ter introduit par la commission du développement durable prévoit l'expérimentation de l'utilisation, par les agents de la SUGE et du GPSR, de caméras-piéton, afin de sécuriser leurs interventions en dissuadant les comportements violents à leur égard. Cette expérimentation est limitée à trois ans et comporte plusieurs garanties : le renvoi aux dispositions du code de la sécurité intérieure sur la vidéoprotection, la limitation de l'enregistrement à la seule durée de l'intervention, et dans des conditions permettant aux personnes filmées d'en être informées, son interdiction hors des lieux dans lesquels interviennent les agents et ces données ne seront pas accessibles aux agents qui les enregistrent. ðEn contrepartie de l’article 1, l’article 2 renfonce le contrôle exercé par les forces de l’ordre sur les services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP. Les agents passent pour ce qui est en particulier de « l’activité opérationnelle », sous le contrôle des commissaires, officiers et sous-officiers de la police et de la gendarmerie nationale. En outre, les agents de la SUGE ou du GPSR recevraient une formation adaptée à cette nouvelle mission dont le contenu serait soumis au contrôle du Conseil national des activités privés de sécurité (CNAPS), l’agence du ministère de l’Intérieur chargé de l’agrément, du contrôle et du conseil des professions de sécurité privées. Le code déontologique du CNAPS serait également soumis aux agents. Le bilan des contrôles effectués sur les services internes -ChristineMartin|Sénat|15,ruedeVaugirard|75291ParisCedex06 Tél:0142342500-Fax:0142342280-Email:[email protected] 4 de sécurité par les forces de l’ordre, qui doit déjà être transmis au Défenseur des droits, serait également adressé au CNAPS. ðL’article 3 élargit les possibilités accordées aux agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP d’agir en civil. La commission a ajouté le port d’un signe distinctif pour que ces agents ne soient pas confondus avec les agents des services publics. ðL’article 3 bis permet de procéder à des enquêtes administratives préalables au recrutement ou à l’affectation d’agents de la SNCF et de la RATP, opération communément appelée « criblage ». Ces enquêtes existent déjà lorsque les fonctions remplies par l’agent nécessitent une habilitation au titre de la protection du secret défense nationale ou un accès à un point d’importance vitale. L’élargissement des enquêtes permettrait de viser aussi les agents liés aux aiguillages, à la sécurité des systèmes d’information ou à la conduite de certains matériels. La commission a étendu ce dispositif à tous les transporteurs publics de personnes et a prévu la situation de personnes qui présenteraient des risques après leur recrutement ou leur affectation. ðL’article 4 ouvre la possibilité aux agents de police judicaire de constater les infractions à la police des transports. ðL’article 4 bis permet aux entreprises de transports publics routier de voyageurs et de marchandises de recevoir communication à tout moment des informations relatives à la validité du permis de conduire des personnes qu’elles emploient. ðL’article 5 simplifie les règles de compétence territoriale des procureurs en matière de police ferroviaire notamment en raison du fait que les TGV changent de communes toutes les minutes. Il créé un principe de compétence territoriale du procureur du ressort de la gare de départ, ou la gare d’arrivée si le train part de l’étranger. ðL’article 6 étend les possibilités d’inspection et de fouille des bagages accordées aux officiers et agents de police judiciaire. Aussi, il modifie les dispositions du code de procédure pénale relatives aux contrôles d’identité préventifs des personnes autorisés par le Procureur de la République ou des véhicules pour y inclure le contrôle de bagage. Si le refus du propriétaire du bagage d’un contrôle préventif n’aurait pas besoin d’être surmonté par une autorisation du procureur de la République, l’autorisation de celui-ci reste nécessaire pour la fouille de véhicule en cas de refus du conducteur. ðL’article 6 bis AA introduit par la commission vise à organiser la transmission en temps réel d’images de vidéoprotection aux forces de l’ordre par les opérateurs privés. ðL’article 7 autorise les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP à constater par procès-verbal les ventes à la sauvette. ðL’article 8 modifie les caractéristiques du délit de fraude d’habitude. Le délit serait désormais fondé sur 5 contraventions au lieu de 10, sur 12 mois. La commission a souhaité comptabiliser les amendes décidées dans le cadre d’une transaction avec l’opérateur. ðL’article 8 bis créé un délit de soustraction à l’obligation de rester à disposition de l’agent contrôleur en attendant la réponse de l’officier de police judiciaire. La violation de cette obligation est punie de deux mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende. La commission a prévu un délai maximal de trente minutes autorisant à retenir un fraudeur refusant de donner son identité, afin de permettre à l’agent du service de sécurité de prévenir l’officier de police judiciaire. -ChristineMartin|Sénat|15,ruedeVaugirard|75291ParisCedex06 Tél:0142342500-Fax:0142342280-Email:[email protected] 5 ðL’article 8 ter vise à lutter contre les « mutuelles de fraudeurs ». Il s’agit ici de sanctionner les souscriptions ayant pour objet de financer une garantie assurantielle pour diminuer les risques financiers à la fraude, cette pratique se faisant souvent par Internet ou par des applications pour mobiles. ðL’article 9 instaure un droit de communication entre les exploitants de transports publics et les administrations publiques pour faciliter la recherche des adresses des contrevenants. Les demandes des exploitants et les renseignements communiqués seront transmis par l’intermédiaire d’une personne morale unique commune aux exploitants. L’échange d’information sera limité aux noms prénoms, date de naissance et adresse des fraudeurs. ðL’article 10 lève l’ambiguïté juridique sur la définition de la transaction proposée aux contrevenants. ðL’article 12 dispose que le président de l’intercommunalité peut se voir attribuer les compétences permettant de réglementer l'activité de transport, quand l'intercommunalité est compétente en matière de transport. Un maire peut s'opposer à ce transfert. Cette mesure s’inspire d’une disposition proposée dans le cadre du rapport Pillet-Vandierendonck relatif aux polices territoriales et votée par le Sénat dans le cadre de la PPL relative à la police territoriale le 16 juin 2014 en ce qui le concerne. ðL’article 13 introduit diverses dispositions relatives à la fraude et à l’accès aux trains. Est notamment prévu de sanctionner d’une peine de deux mois d’emprisonnement le fait de déclarer intentionnellement une fausse identité ou une fausse adresse. Les agents des douanes qui devaient solliciter des opérateurs des cartes de circulation pourront accéder librement aux trains dans le cadre de leurs missions. Par ailleurs, les agents de sûreté pourront interdire l’accès aux trains aux personnes refusant de se soumettre à l’inspection visuelle, à la fouille de leurs bagages ou aux palpations de sécurité. ðL’article 15 vise l’applicabilité à l’Outre-mer. Le texte tente de répondre aux défis de sécurité propres aux transports dans un souci d’équilibre entre protection des libertés et impératifs de sûreté. Il en résulte des mesures qui pourraient parfois se révéler vaines en cas de fouille d’un présumé terroriste. Le texte paraît plus enclin à répondre à la question de la fraude qu’à celle du terrorisme qui justifierait surtout une augmentation des moyens humains. Par ailleurs, ce texte est un peu « francilien » dans la mesure où la SUGE et le GPSR sont très concernés alors que les défis de sécurité touchent de plus en plus tout le territoire. Enfin, les agents des services des deux grands opérateurs de transport voient leurs missions élargies sans que la question de leur statut soit posée. -ChristineMartin|Sénat|15,ruedeVaugirard|75291ParisCedex06 Tél:0142342500-Fax:0142342280-Email:[email protected]