Le nouveau programme d`histoire de seconde : « Les Européens
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Le nouveau programme d`histoire de seconde : « Les Européens
Le nouveau programme d’histoire de seconde : « Les Européens dans l’histoire du monde » Diapo 1 Ce programme, comme tout nouveau programme, suscite une première question, que tout le monde s’est donc déjà posé : qu’est-ce qui change ? « Les fondements du monde contemporain » invitaient déjà à envisager l’Europe dans l’histoire du monde, mais cette dimension « mondiale » était moins explicite. Donc continuité et changements ! Avant de se pencher sur la question de l’articulation entre « Européens » et « histoire du monde », donc sur une lecture possible de l’esprit de ces NP, abordons la question de la rédaction de ces programmes, avec les types de choix qu’ils permettent. Diapo 2 Ces extraits de l’introduction des programmes soulignent divers aspects. En particulier, 1 le programme précise : «pas seulement l’étude des héritages et des fondements du monde d’aujourd’hui », il faut donc faire attention à la téléologie ; par ailleurs il est nécessaire aussi de se pencher sur les «mondes perdus» en s’interrogeant : - sur la signification de cette « perte » : perdu pour qui? - sur les finalités de notre enseignement, si il ne s’agit pas ou pas seulement d’expliquer le présent. Rappeler aussi l’interrogation de Gérard Noiriel : qu’est ce que l’histoire contemporaine? qui rappelle l’oxymore que représente «histoire» et «contemporain» 2 à propos de l’histoire des arts : le préambule insiste sur ce point, mais le programme ensuite fait peu de propositions explicites d’œuvres : donc aux enseignants d’être vigilants et imaginatifs … Diapo 3 et 4 : IL ne s’agit pas là d’une présentation exhaustive, ce ne sont que des exemples ; il y a des choix dans presque chaque thème. Par ailleurs, on verra plus tard (dans le déroulé du ppt) comment réfléchir ces choix, et peut-être effectuer des groupements. Remarque : cette présentation n’intègre pas l’aspect par ailleurs essentiel des « objectifs d’apprentissage/capacités et méthodes .» Premier point : « les Européens dans l’histoire du monde » Diapo 5 Ce titre général comme le titre du premier thème, dit thème introductif, « les Européens dans le peuplement du monde », renvoie à trois séries de questions : 1 : quid des Européens = ? 2 : quid de l’histoire du monde= ? 3 : quid de l’apport des Européens à l’histoire (à l’évolution ?) du monde, ou, plus iconoclaste peut-être, mais non moins intéressant, quid de l’apport du monde à l’Europe ? Diapo 6 Quelle pertinence du terme « Européens » pour les deux premiers chapitres, ie pour l’Antiquité ? Et même dans une certaine mesure pour le MA ? Il importe donc d’adapter le vocabulaire selon les chapitres : plutôt les habitants de l’Europe ? Pour l’Antiquité romaine, les habitants/sujets/citoyens de l’Empire ? Dans tous les cas de figure, il faut être vigilant quant aux termes employés pour éviter les anachronismes. Diapo 7 : Le terme « histoire du monde » semble renvoyer à la « World History », ou « Global History », ou ce que l’on désigne plutôt en France par histoire connectée. Deux questions : De quoi s’agit-il ? En quoi le nouveau programme s’inscrit-il ou non dans cette veine historiographique ? Cette histoire globale, bien plus développée dans le monde anglo-saxon et chez bien d’autres de nos voisins qu’en France-même, recouvre deux aspects : -d’une part un processus historique d’intégration mondiale, économique, culturelle, dont l’analyse se heurte à des périodisations divergentes : > XVIe siècle ibérique pour les uns, dans la tradition braudélienne, B : Serge Gruzinski, les quatre parties du monde. Histoire d’une mondialisation, Paris, 2004 > montée des interdépendances économiques et sociales à la fin du XIXe siècle et début du XXe siècle pour les autres, B : Susan Berger, Notre première mondialisation. Leçon d’un échec oublié, Paris 2003 Nous en reparlerons pour le programme de première. -d’autre part, un mode d’approche des processus historiques, se situant donc sur un plan méthodologique : donc un mode d’étude des objets, plutôt qu’un objet d’étude. Parallèlement, les travaux des spécialistes des systèmes impériaux à travers le monde ont mis en avant la notion d’ « histoire connectée », considérée comme une modalité spécifique de l’approche globale. Diapo 8 Quoi qu’il en soit, cette histoire a deux objectifs : dépasser le compartimentage national des recherches historiques pour envisager tous les phénomènes qui excèdent les frontières étatiques, d’autre part éviter d’écrire une histoire du monde du seul point de vue de l’Occident, ce qui nous amène à réfléchir sur l’intitulé et le contenu de nos programmes. In fine, cette World History débouche un refus de l’ethnocentrisme occidental, et une volonté d’identifier des phases d’ouverture et de fermeture, de périodiser et d’historiciser la mondialisation, en échappant au déterminisme économiste pour faire toute leur place aux modes de vie, aux pratiques culturelles, etc. cf les réflexions actuelles essentielles sur les phénomènes d’acculturation, de transferts, de métissages culturels dans une perspective qui n’est pas quantitative. Malgré tout, on assiste aussi à une dérive englobante, généralisante, avec de très larges cadres d’interprétation, qui rappelle les anciennes histoires universelles, ou à des travaux moins homogènes qu’ils n’en ont l’air : trop souvent des collages d’études de cas, étalées dans la longue durée et embrassant les continents, mais sans grande cohérence. En réalité, le but de l’histoire connectée est de briser les compartimentages des histoires nationales comme des « aires culturelles » pour faire émerger les modes d’interaction entre le local et le régional d’une part, le supra-régional d’autre part : l’alternative au « grand récit » n’est pas dans l’émiettement parcellaire mais dans l’étude des interactions multiples, à des échelles diverses. Il ne s’agit pas non plus d’une forme de comparatisme planétaire qui dresserait de façon morphologique l’inventaire des parentés et des différences au risque de la décontextualisation. Au contraire, le décloisonnement de l’histoire globale peut déboucher sur une compréhension bien plus fine de ce qu’est une société locale. Cf Denys Lombard, le carrefour javanais. Essai d’histoire globale, Paris 1990, qui envisage d’abord la colo européenne du XIX e siècle, puis la modernité cosmopolite des marchands chinois musulmans du XVe siècle, enfin l’organisation, « traditionnelle et immémoriale » de la « riziculture de droit divin » Cf dans les programmes : « différentes échelles de l’espace, du local au mondial », sans oublier que pour l’immense majorité des êtres humains que nous croiserons dans une bonne partie de ces programmes, le fait que le monde existât ou pas n’avait aucune incidence ou presque sur le déroulement de leur vie. Cl : cette histoire globale, à la recherche des connexions, à différentes échelles, est bien une histoire totale, mais située, ie bâtie depuis un point d’observation situé, qui n’est évidemment pas le point de vue universel : global n’est pas totalisant. Pour nous : la lecture fine du programme va nous permettre de réfléchir à cette relation entre les deux termes Européens/histoire du monde, dans le cadre ou non de cette world history. Thème introductif : les Européens dans le peuplement du monde Diapo 10, 11, 12 Il ne faut pas perdre de vue le faible temps à consacrer à ce premier chapitre, pour éviter toute dérive horaire précoce : une à deux heures pour le premier point, avec des cartes et des tableaux chiffrés, et une heure à deux heures et demie pour le deuxième, avec une courte évaluation. Un cadrage rigoureux du sujet s’impose donc. Diapo 13 : 1 Qu’est ce que le peuplement ? 2 L’histoire du peuplement de la terre a fait l’objet de très nombreux travaux mettant en évidence le rôle important des migrations humaines. Ce sont aujourd’hui les travaux des généticiens des populations qui permettent d’identifier la trace des déplacements anciens, notamment depuis la révolution néolithique, en les complétant par des observations de la diffusion des langues et des artefacts techniques. Les recherches relatives aux paléo-environnements donnent une interprétation aux inégales densités du peuplement dans les régions du monde, selon leur dotation écologique initiale (Jared Diamond), tandis que les modèles de la croissance démographique spatialisée (Gibrat, Pumain, enchaînement historique) complètent les récits historiques des évolutions ultérieures, marquées par les transitions, démographique et urbaine. 3 In fine, l’on retient : le peuplement de la terre achevé (au sens de traces de la présence humaine) il y a 8000 ans l’alternance ce croissance et de décroissance ; l’alternance de paliers et de sauts brusques Diapo 14, Jean-Noel Biraben, « histoire du peuplement humain des origines à nos jours », in Démographie, vol V, …, page 27. Depuis que les premiers hominidae sont apparus sur Terre il y a deux ou trois millions d’années, l’histoire du peuplement de la planète a été, jusque vers le milieu du XVIIIe siècle, une très longue succession de phases de lente expansion entrecoupées de crises et de reculs. C’est aussi une histoire où la balance des naissances et des décès ainsi que les possibilités de migrer vers de nouvelles terres ont lourdement pesé sur le destin de chaque groupe. À partir du XVIIIe siècle, cependant, la maîtrise sans précédent de l’homme sur ses propres conditions de survie a décuplé son rythme de croissance démographique jusqu’au moment où l’équilibre a pu être restauré, grâce à une maîtrise parallèle de la fécondité. D’abord limité à l’Europe, au XXe siècle, le phénomène a gagné le reste du monde avec une formidable accélération, bouleversant les équilibres de la planète. Et les Européens, dans la période qui nous occupe (Antiquité – XVIIIe siècle) ? Diapo15 : tableau de chiffres « population mondiale et par grandes régions, estimée à diverses dates », Jean-Noel Biraben, « histoire du peuplement humain des origines à nos jours », in Démographie, vol V, …, page23. Expansions, crises et reculs repérés à la diapo précédente se retrouvent ici, mais on constate qu’elles n’ont pas la même chronologie selon les parties du monde, évidemment, même si il y a parfois des connexions : cf l’épidémie de variole qui touche la Chine au Ier siècle puis le monde romain au IId siècle. On constate aussi que l’équilibre entre les foyers a varié, par exemple entre l’Europe et la Chine : il y a des périodes d’égalité, voire de poids démographique de l’Europe (attention à additionner les deux chiffres) supérieur à celui de la Chine. Diapo 16 En ce qui concerne l’Europe : Dans les grandes lignes : le peuplement de l’Europe a été rapide dans l’Antiquité : 2 millions vers 4 000 quand toute l’Europe est entrée dans la phase néolithique, plus de 30 millions vers - 400, 67 millions en 200, jusqu’à l’apparition de la peste antonine (168) (=variole) puis peu après de la rougeole. La décroissance s’accélère par la peste de Saint Cyprien puis par les grandes invasions des IIIedébut Ve siècles, enfin par la réapparition de la peste (peste Justinienne, 542-543) et de la variole. Nous sommes donc dans une phase longue de DEPEUPLEMENT. La croissance démographique ne repart vraiment qu’au Xe siècle, et elle est puissante, malgré les invasions mongoles, jusqu’au XIVe et à la peste Noire qui entraine un recul d’au moins 20% pendant un siècle. Ensuite, croissances, stagnations, voire décroissances dues aux guerres et aux aléas climatiques se succèdent, mais à partir du milieu du XVIIIe siècle, et jusqu’au début du XXe, il y a envolée de la population, ensuite freinée par les deux guerres et la chute de la fécondité. « la place des Européens dans le peuplement de la terre » ? C’est à la fois la question du poids, et surtout celle des phénomènes migratoires. Premier constat : la part relativement négligeable de la migration dans la dynamique des populations, à tous niveaux à l’exception de l’échelon local, est un phénomène assez récent. Autrefois, la migration était un phénomène majeur de l’histoire des populations : mouvements qui ont maintes fois bouleversé et refaçonné la distribution de la population, imposant aussi de lourdes contraintes de mortalité et de fécondité. Les migrations d’aujourd’hui n’ont pas non plus les formes des migrations plus anciennes. Il faut aussi faire attention aux temporalités : des phénomènes lointains nous semblent brutaux, du fait de la compression du temps, ils n’ont pas nécessairement été perçus comme tels par les observateurs contemporains. Les migrations actuelles vers l’Europe de l’ouest et l’Amérique du Nord peuvent s’inscrire dans ce modèle. 1 Les migrations ayant affecté l’Europe : Diapo 16 suite Depuis les origines du témoignage écrit, de forts mouvements migratoires ont été rapportés, presque toujours en relation avec des épisodes de guerre et de conquête, de disparition d’entités politiques, d’expansions d’autres entités ou sociétés. Par ailleurs, l’intrusion ou la migration de peuples nomades ou transhumants dans des territoires occupés par d’autres peuples est un phénomène aujourd’hui disparu mais qui a joué un rôle majeur dans l’Antiquité et au-delà. Ces mouvements migratoires entrainent une évolution de la population en dents de scie, avec des alternances de crises et de récupération parfois très rapides, loin de l’image d’une évolution très lente mais régulière sur de longues périodes. La manifestation la plus spectaculaire de ces processus migratoire est celle des grandes invasions. L’histoire du Bas-empire romain, de l’empire byzantin, de la Chine, de l’Inde et des populations intermédiaires n’est dans une large mesure qu’une longue suite de tentatives pour contenir ces invasions et s’en défendre. On peut formuler l’hypothèse d’un dynamisme démographique particulier de ces populations nomades issues de zones reculées et marginales, dynamisme qui les amène à migrer vers des terres nouvelles, des zones plus prospères mises en valeur par des sédentaires. D’où, grâce souvent aux avantages des nomades (la supériorité des combattants à cheval sur les combattants à pied ; la mobilité ; l’endurance), des pillages et razzias, donc une insécurité poussant les populations sédentaires à fuir, poussant devant elles d’autres peuples encore. Un exemple : la migration/invasion des Huns au IIIe-Ve siècles à la fois vers l’Europe, l’Inde du Nord, la Chine du Nord. Les conséquences démographiques sont presque entièrement négatives : l’apport démographique des conquérants quasi nul mais leur passage entraine la destruction de peuples, d’habitations, d’infrastructures agricoles, donc un recul des effectifs totaux des populations. In fine, la population mondiale passe de 256 millions en l’an 1 à 206 en l’an 500, et ne dépasse à nouveau les 250 millions qu’en l’an mil seulement. Avec le temps, les populations sédentaires qui n’avaient tout d’abord pas les moyens de résister à ces processus sont devenues victorieuses, et ce sont les populations nomades qui ont finalement été marginalisées. Les forces migratoires ont cessé d’exercer leur rôle dominant dans la dynamique des populations, et les variations des composantes endogènes de la dynamique démographique naturelle (natalité, mortalité) ont pris le dessus, débouchant sur les phénomènes de transition démographique. Diapo 17 et 18 : Il n’est donc pas envisageable de représenter les phénomènes migratoires selon une fluidité et une régularité telles que celles suggérées par cette carte, qui de plus, et surtout, offre une représentation cartographique très écrasée de la chronologie, ne rendant donc pas compte de la réalité d’un phénomène qui s’est étendu sur plusieurs siècles. Cette réflexion est à retenir pour envisager les phénomènes migratoires à l’œuvre dans le monde contemporain. 2 Les phénomènes migratoires au départ de l’Europe Diapo 19 : Cette expansion coïncide avec le reflux des conquêtes nomades des siècles précédents. Exemple : milieu du XVI e siècle : Ivan le Terrible prend les villes de Kazan et d’Astrakhan sur les Mongols. C’est le début du processus de conquête et de colonisation russes qui atteint les rivages du pacifique à la fin du XVIIe, et s’achève avec la conquête des steppes d’Asie centrale dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Ces migrations qui débutent à la fin du XVe siècle s’appuient sur les progrès de la navigation qui permettent le transfert à travers les océans de populations de petite taille mais à la technologie très avancée, à la fois explorateurs, combattants, aventuriers, pirates, missionnaires, commerçants, colons. Le choc culturel et surtout les ravages causés par des maladies inconnues des populations locales, ainsi que dans certains cas des politiques délibérées d’extermination (Argentine, Tasmanie) ont permis aux nouveaux venus de déposséder les autochtones (pê 40 millions de personnes en Amérique centrale et du Sud à la fin du XVe siècle, et seulement 10 à la fin du XVIe ; diminution de même ampleur en Amérique du Nord au XVIIe et après) et de s’installer à leur place. Ensuite s’est mise en place une migration régulière d’Europe vers ces Nouveaux Mondes colonisés qui débouche sur la migration globale la plus spectaculaire de l’Histoire, de la fin du XVIIIe au début du XXe : cf environ 54 millions de personnes entre l’Europe et l’Amérique du Nord entre 1815 et 1930, dont un tiers probablement retourna vers l’Europe. De plus, la traite des esclaves d’Afrique par les Européens (entre 3,5 et 25 millions…) apporte une nouvelle composante au peuplement du Nouveau Monde et aggrave la dépopulation de l’Afrique tropicale ( - 10 % entre 1600 et 1800), déjà enclenchée par les trafics plus anciens vers l’Afrique du Nord et le Moyen orient. Dans la même période, la colonisation des terres désertes de la Sibérie à partir de 1899 amène l’installation de 3,5 millions de personnes entre 1906 et 1915. Ailleurs : en Inde, en Chine, dans d’autres parties de l’orient, face à un peuplement déjà dense, les Européens établissent grâce à leur supériorité militaire leur domination sur les pouvoirs en place mais ni en Asie ni en Afrique ils n’ont de volonté de peuplement sauf cas particuliers : Indonésie, Afrique du Sud. 3 Les populations de l’Europe dans la croissance de la population mondiale Diapo 18 : « évolution de la population mondiale par grande région de 1500 à 1950 », Jacques Vallin, « la transition démographique européenne », in Démographie, vol V, …, page 73. De 1750 à 950, l’équilibre démographique des continents est remis en cause au profit des populations européennes ; cf chiffres de la diapo. Alors même que l’Europe est touchée par un phénomène migratoire/d’exode de grande ampleur, son poids relatif s’accroît, du fait de son entrée dans la transition démographique. Sans entrer dans le détail à propos de la transition démographique, rappelons simplement que se conjuguent : - un recul sans précédent de la mortalité, en particulier de la mortalité infantile et de la mortalité infectieuse - un progrès spectaculaire de l’espérance de vie, qui s’accompagne d’une atténuation des fluctuations, avec à la fois : l’effacement, entre le milieu du XVIIIe et la fin du XIXe, des deux principaux facteurs de mortalité : l’épidémie (d’abord grâce aux progrès de l’organisation administrative, avant les progrès médicaux de la révolution pasteurienne) et la famine la régression aussi de la mortalité dans les années fastes. - une baisse profonde de la natalité par la maîtrise de la fécondité Cela dit, il ne faut pas oublier ce qui a déjà été dit pour l’échelle mondiale : il n’y a pas un mouvement uniforme mais des phases de progrès et des phases de stagnation et de recul. Par ailleurs, il y a des calendriers différents selon les aires géographiques et culturelles, avec trois pays pionniers : AngleterreGalles, Suède, France, aux chronologies et aux rythmes légèrement décalés les uns par rapport aux autres, puis les autres pays d’Europe du Nord-ouest, puis ceux d’Europe centrale, enfin ceux d’Europe méditerranéenne et orientale. Enfin, c’est le décalage à la fois des chiffres et dans le temps entre la baisse de la mortalité qui entraine une croissance exceptionnelle : cf pour Angleterre-Galles : en deux siècles, 6,1 >>42 millions d’habitants, sans compter la forte « exportation » d’émigrants outre-mer. Sinon, peut-être 4,5 millions d’habitants supplémentaires en Angleterre-Galles en 1939. Et comme ce sont les plus jeunes et les plus dynamiques qui ont émigré, ils ont « exporté » avec eux ce dynamisme démographique exceptionnel, et peut-être que le dynamisme sur les lieus d’émigration en a été amoindri. -la fin de la transition sort de notre champ chronologique Cl : diapos 20 et 21 - au niveau mondial comme au niveau régional, des phases de croissance et de décroissance selon des chronologies différenciées - des foyers de peuplement hérités de l’Antiquité (Asie / Europe) entre lesquels l’équilibre a fluctué, notamment avec l’entrée de l’Europe dans la transition démographique ; - une excroissance de l’Europe et dans une moindre mesure de l’Afrique (l’Amérique) devenue un foyer de peuplement secondaire. Thème 2 : l’invention de la citoyenneté dans le monde antique Diapo 23 Remarque générale : à partir de ce thème : le programme est organisé selon l’ordre chronologique (ce ne sera plus le cas en première) mais avec des entrées thématiques. A partir de là, deux questions : Comment faire réfléchir les élèves sur ce qu’est une société à un moment, en un lieu donné, dans sa globalité, avec ces entrées thématiques qui semblent parfois très fermées? Comment cela se relie-t-il à notre fil conducteur : « les Européens dans l’histoire du monde » ? A propos de la citoyenneté dans l’Antiquité 1 Là encore, attention aux anachronismes : ne pas juger à l’aune d’aujourd’hui mais réfléchir sur la notion de démocratie et de citoyenneté à partir de l’héritage antique, héritage diffusé et/ou discuté, réfuté, etc dans toutes les parties du monde : « une citoyenneté antique bonne à penser la citoyenneté moderne, dans la ressemblance comme dans l'écart. » Pauline Schmitte-Pantel >dans la ressemblance : les notions d’intégration et de participation, sur lesquelles nous allons revenir >dans l’écart : dans les deux cas, il s’agit d’abord de sociétés basées sur l’esclavagisme. L’homme libre, citoyen d’Athènes ou de l’empire, se définit d’abord comme libre par rapport au nonlibre, l’esclave ; par ailleurs, ce sont des sociétés qui ont pensé les libertés de leurs citoyens, mais non leurs droits. 2 Un programme qui invite donc à la comparaison et à la confrontation des deux expériences entre elles c’est là une différence majeure avec l’ancien programme, et qui suggère aussi de confronter et de différencier ces expériences avec notre présent. 3 diapo 24 : Les « bases antiques de la citoyenneté moderne » (Pauline Schmitte-Pantel) sont la participation et l'intégration. - La participation est le premier angle d’approche. La participation directe de tous les citoyens à la prise de décision politique est le principe sur lequel sont fondées les assemblées des cités grecques, quel que soit le nombre des citoyens puis, dans une certaine mesure, celles du régime municipal romain, à distinguer des institutions impériales. - L'intégration est le second angle d’attaque privilégié par les programmes. Elle doit être entendue comme la réunion des citoyens dans un statut public et privé unitaire. Ici, monde grec et monde romain diffèrent. Si les cités grecques (au premier rang desquelles Athènes, la cité démocratique) ont pour l'octroi de la citoyenneté privilégié la naissance et donc limité l'intégration, l'obtention de la citoyenneté pour les Romains est un acte juridique capable de transformer en citoyens romains d'anciens esclaves devenus affranchis aussi bien que des étrangers : les Romains eurent des sénateurs ou des empereurs illyriens, sémites ou arabes qui étaient citoyens romains (et l'édit de Caracalla en 212 fit de tous les hommes libres de l'empire des citoyens romains). Ce double modèle peut trouver un écho dans les débats et les évolutions juridiques, en France comme dans bien d’autres pays, européens ou pas, entre le droit du sang et le droit du sol pour l'obtention de la citoyenneté. D’autres pistes à envisager dans l’un ou l’autre cas : 4 une description des citoyennetés antiques permet aussi une approche concrète des rouages institutionnels de la vie politique, du fonctionnement de la justice, des droits et des devoirs des citoyens, de ce que Claude Nicolet a appelé "le métier de citoyen." 5 La nécessité d'expliquer que les différences de statut se creusent au fur et à mesure que se précisent les droits et les privilèges des citoyens. Cf la remarque de M.I. Finley selon laquelle le développement de cette forme de l'esclavage que l'on nomme l'esclavage-marchandise va de pair avec la garantie des droits du citoyen à Athènes. Par ailleurs, il ne faut ne pas négliger les différences sociales qui expliquent l'évolution des cités vers un régime de notables bienfaiteurs. Cf aussi la place importante des groupements, des associations, intermédiaires entre le monde de la famille et celui de l'État, qui en créant des formes de sociabilité renforcent le lien social et la cohésion, et d'autre part la complexité des relations entre la masse et les élites qui, par le biais des bienfaits, transforment les hiérarchies sociales en autorité politique. 6 Les programmes demandent en introduction que l’on considère « la place des femmes dans les sociétés » et les questions du genre : Or, toujours en suivant Pauline Schmitte-Pantel, depuis la fabrication de la première femme, Pandora, par les dieux pour répondre par un "beau mal" à la ruse de Prométhée, histoire racontée par Hésiode, l'altérité radicale du monde féminin est inscrite dans l'histoire de la pensée grecque. L'histoire des femmes d'abord, l'histoire de la différence des sexes - appelée aussi histoire du genre - ensuite, ont atteint les lointaines contrées du monde antique et les acquis sont importants >> à intégrer dans les cours, dans le cadre de la réflexion sur la citoyenneté comme dans le cadre d'une place globale donnée à l'étude historique de cette forme ordinaire de rapports sociaux que sont les relations entre les sexes. 7 N’oublions pas enfin les rituels réservés aux jeunes : Rites d'inversion, mascarades, vie à l'écart des cités, récits d'enlèvements, combats rituels trouvent ainsi leur place dans une explication globale de sociétés qui ont à cœur de "faire passer" la classe d'âge des jeunes au monde adulte, car de la réussite de cette intégration dépend la survie du corps civique. Thème 3 : l’Europe médiévale Diapo 26 Il faut souligner ici: - le cadre chronologique resserré - la dimension d’histoire sociale et culturelle (et pas seulement culturelle…) -la difficulté de réfléchir en termes d’histoire connectée, sauf dans des interstices : villes d’aires culturelles différentes. MAIS on est toujours en Europe. Même la christianisation ne concerne que le territoire de l’Europe. Les Croisades vers la Terre Sainte ne sont pas au programme. On pourrait discuter à nouveau de la notion d’Europe dans ce cadre-là, Les populations orientales avant leur christianisation par les chevaliers teutoniques, en quoi sont-elle européennes ? Mais après tout, jusqu’à la réforme/contre-réforme, la christianisation des sociétés était « ambiguë et incomplète » (François Lebrun), « mélangeant christianisme officiel et croyances ou pratiques plus ou moins magiques. » Bien que ces questions n’aient pas figuré dans les anciens programmes, elles sont généralement connues pour avoir été abordées dans le cadre des études universitaires. Un point historiographique n’est donc pas indispensable. Nous abordons d’abord la seconde question, avec le choix rural/urbain Pour le choix monde rural/monde urbain, il faut envisager aussi l’étude de villes dans le thème 4. Est-il judicieux, formateur de mener une étude globale sur les mondes urbains, ou choisir ici le monde rural pour contrebalancer ? A chaque enseignant de choisir en fonction de ses élèves et des ses affinités. En tout cas : les aires culturelles différentes méritent réflexion : christianisme catholique / byzantin ? Mais l’étude de Byzance/Constantinople est obligatoire dans le thème 4. Une ville de Sicile ou d’Espagne, cf les anciens programmes ? Moscou ? Peut-être des difficultés de documentation en langue française… Au moins une ville commerçante ? A réfléchir en fonction d’un autre choix, celui de travailler dans le thème 4 sur un grand port. -Le contexte est la floraison des villes après le décollage du XIème s (« première économie-monde » d’Europe et les travaux de Braudel) : elles décollent de leur entourage rural et regardent au-delà de leur horizon propre. C’est une énorme rupture. - Dans tous les cas, on peut utilement articuler cette seconde question à la première, en choisissant dans le premier cas une abbaye, siège d’une seigneurie ecclésiastique, dans le second cas d’une cathédrale. Enfin, on peut souligner que « la féodalité, réalités, imaginaire, symbolique » est à mettre éventuellement en relation avec l’enseignement « Littératures et sociétés. » - Diapo 27, 28, 29 : sur les aspects religieux : si le premier point a été articulé à au traitement des sociétés rurales/urbaines, on peut donc se concentrer sur le deuxième point, le plus intéressant en ce qu’il aborde des aspects qui ne sont pas dans le programme de cinquième : (AR entre les diapos 25, 26, 27) : je ne commente pas pour vous le programme de 5e, mais leur montrer que l’on est dans une rédaction notionnelle dans le programme de 5e, et qu’ils ont tout intérêt à s’y reporter pour éviter la redondance ; que les croisades (si certains les regrettent) sont traitées en 5 e ; enfin et surtout que la christianisation de l’Europe est justement un point qui n’est pas dans le programme de cinquième. Thème 4 : l’époque moderne Diapo 30 : Clairement, on retrouve le fil conducteur Européens/histoire du monde Pour autant, il y a des écueils, des interrogations, et aussi des pistes intéressantes (heureusement.) Ainsi, une certaine lecture pourrait envisager que l’Europe a apporté/offert/imposé au monde, après la démocratie antique, la religion, le livre, la science, grâce à son avance technique. Mais d’autres lectures sont possibles. Pistes de réflexion : 1 le titre : « horizons » : dans le programme, ils sont à la fois réels (dans la question obligatoire) et symboliques (dans les questions au choix) : le monde est de fait bien plus présent dans les premiers horizons que dans les seconds. 2 « l’élargissement du monde » Que dit le programme ? « contacts » des Européens avec d’autres mondes, cf en 1992 la tentative de modification des appellations courantes : non plus la Découverte du Nouveau Monde, mais la Rencontre des deux Mondes, ce que dit à sa façon le programme. 3 Le cadre chronologique XVe-XVIe siècles : relatif affranchissement des découpages canoniques, excellente chose. B déjà cité mais incontournable : P Boucheron (dir) , Histoire du monde au XVe siècle, Fayard, 2009 3 Les études : -Constantinople/Istanbul : on voit bien que la Méditerranée au XIIe siècle revient par cette fenêtre. Audelà de cette première considération, l’élargissement géographique me semble inadapté, sauf à considérer que les Turcs des XVe et XVIe s sont perçus par les Européens comme plus Européens que les Byzantins … Néanmoins, Constantinople devenue Istanbul reste incontestablement un lieu de contact. Pour les deux autres études au choix parmi quatre : l’écueil est incontestablement celui d’une histoire exclusivement culturelle. Par exemple : « la cité précolombienne » : cette formulation nous invite presque naturellement à choisir Mexico. B Carmen BERNAN et Serge GRUZINSKI, Histoire du nouveau monde, Fayard 1990-1993 et leurs autres travaux sur Mexico Or, les travaux de Serge Gruzinski sur le Mexique et sur les empires coloniaux espagnols et portugais du XVIe siècle, si passionnants soient-ils, n’envisagent en réalité qu’une petite frange d’élites coloniales, indigènes et métissées. Cette réflexion remarquable sur le métissage ne concerne que les élites mais quid de l’histoire économique et sociale ? Il serait bon de ne pas oublier Nathan Wachtel et ce que celui-ci a justement nommé « la vision des vaincus », bien que N.Watchel ait traité des sociétés rurales andines et non de cités. Cela entre en résonnance avec par exemple les travaux d’E W Said, pour lequel le point de vue du colonisant est plus intéressant parce qu’il construit une image de l’autre (discours, images) vraie et/ou fantasmatique et qui interroge donc non pas la réalité sociale des sociétés coloniales mais les cadres anthropologiques qui permettent de construire la figure du colon. Pour le dire autrement, ce chapitre clé (par rapport à l’intitulé du programme) nous renvoie à la place des subaltern studies : cf l’historiographie indienne des années 80 qui réinterroge les sociétés colonisées autrement qu’au miroir des sociétés coloniales, ie en nous obligeant à un décentrement du regard. Cf aussi les travaux de Françoise Verges qui s’intéresse à la fois au discours du colonisateur et au discours du colonisé. A propos du choix entre un navigateur et un grand port : Les navigateurs sont sûrement plus familiers aux élèves que les grands ports, et ceux-ci offrent un champ de réflexion propre au lycée, quand ceux-là peuvent utilement illustrer les programmes de collège. Il ya bien sûr pléthore d’exemples de ports, l’important est de ne pas occulter les aspects économiques et sociaux, de ne pas considérer le port choisi seulement là comme un espace dans lequel se transposent des aspects d’autres sociétés (jusqu’à « l’importation » de population indigènes), mais d’envisager aussi les dimensions économiques et sociales de la conquête. Petit rappel : l’économie-monde telle que définie par F. Braudel à la fin des années 1970 in : Civilisation matérielle, économie et capitalisme, XVème-XVIIIème siècle Tome III Le Temps du monde L’économie-monde, ce n’est pas l’économie mondiale C’est une économie qui est : -un monde en soi, -un espace économique cohérent, non limité par des frontières étatiques, et animé par une dynamique spatiale planétaire. « C’est une économie qui obéit à une organisation concentrique : un emboîtement, une juxtaposition de zones liées ensemble, mais à des niveaux différents. Sur le terrain, trois aires, trois catégories au moins se dessinent : un centre étroit, des régions secondes assez développées et d’énormes marges extérieures […] le centre, le « cœur », réunit tout ce qui existe de plus avancé et de plus diversifié. L’anneau suivant, c’est la zone des « brillants seconds ». L’immense périphérie avec ses peuplements peu denses, c’est au contraire le retard, l’archaïsme, le retard, l’exploitation facile par autrui […] » Retour à la diapo 30 : Pour les deux questions au choix, il y a de nouveau une familiarité avec les contenus (cf par exemple Humanisme et Renaissance), mais en partie fausse : le découpage chronologique est différent. En revanche, comme pour le point précédent, on a à être vigilant sur le risque de dérive personnalisante : UN navigateur, UN réformateur, UN éditeur, UN artiste, UN savant … Le programme invite bien à les replacer (pour certains au moins) dans leur époque, j’ajouterais dans les réseaux (d’imprimeurs, artistique, etc). Vous connaissez le changement de perspective dans les études de cas en géographie, attention à ne pas en rester à l’étude d’un exemple modélisant en histoire, attention aussi à ne pas présenter ce navigateur/éditeur/réformateur/savant comme un personnage déconnecté. Cf la façon dont Luc Olivier a présenté pour les nouveaux programmes de 5e (sur le site hgc de Créteil), Nicolas Copernic savant de son temps, à travers ses contacts (épistolaires et de voyage) avec la communauté des savants de son temps. En fait, attention à une vision héroïsante/individualisante. Ainsi la citation de Michel Morineau (diapo 31) est donc valable bien au-delà de son objet ; elle pointe l’articulation essentielle de l’histoire globale. Thème 5 : Révolutions, liberté, nations à l’aube de l’époque contemporaine Diapo 33 Premier thème : La RF, l’affirmation d’un nouvel univers politique La difficulté est dans cet « univers », et dans la « nouveauté » Univers ou universel ?? On retrouve ici le risque d’une lecture européano-dominatrice… Ce terme d’univers pose par ailleurs des difficultés conceptuelles. Nouvelles pratiques ? Nouveaux discours ? Nouvelles représentations ? Ce qui est sûr, c’est que : -il y a bel et bien de nouvelles pratiques : la lecture et l’écriture des journaux, l’apprentissage démocratique, etc cf in Michel BIARD (dir), La Révolution française, Une histoire toujours vivante, Tallandier 2009, les contributions de Eric WAUTERS, « la naissance d’un « quatrième pouvoir « ? » Serge ABERDAM et Malcom CROOK, « Délibérer et voter, une passion durable » - De nouveaux discours ? Mais ce sont des discours qui renvoient à la deuxième moitié du XVIIIe - De nouvelles représentations ? oui, et encore : ce sont essentiellement des références à l’Antiquité La nouveauté, essentielle, c’est d’abord que c’est la premier événement à se penser lui-même : nous sommes dans là dans un nouveau régime de temporalité, avec désormais une vision présent-passé-futur, contrairement à la monarchie qui a une conception cyclique du temps : l’histoire s’écrit en puisant dans des exempla. Av la rRF le pst ouvre sur un futur. La nouveauté radicale est aussi bien sûr dans la dimension religieuse vs rationalité : aux multiples tensions entre « raison d’Etat » et « raison d’Eglises » qui caractérisent l’univers politique et culturel de l’Ancien régime succède le projet révolutionnaire d’une régénération de l’homme et du citoyen, dans un affrontement violent ave les fidélités religieuses et les résistances culturelles des populations chrétiennes, et ce jusqu’à l’émergence de « religions séculières ». En fait : deux modèles d’évolution de la situation du christianisme d’Etat à lâge de la modernité des Lumières et du libéralisme naissant : >modèle de tolérance, particulièrement net dans le cas américain >>régime de liberté de conscience et de culte, coexistence des Eglises >modèle d’affrontement, dont la France révolutionnaire offre le prototype le plus achevé. Une référence bibliographique unique, mais qui offre à la fois un bilan historiographique lumineux (introduction de M. Vovelle), une multiplicité d’entrées thématiques en accord avec le programme, et une actualisation bibliographique. Deuxième point : le premier XIX e siècle. Diapo 36 : Sur le premier thème : cf les travaux de : Hobsbawm, Nations et nationalisme, AM Thiesse, La création des identités nationales, 1999 Les identités nationales ne résultent pas d’un lent de travail de maturation qui accoucherait ainsi au XIXe siècle, mais c’est une entreprise délibérée de quelques hommes, qui commence en Europe au XVIIIe, pas avant. Donc AM Thiess remet en cause l’idée même d’histoire nationale : « la véritable naissance d’une nation, c’est le moment où une poignée d’individus déclare qu’elle existe et entend le prouver », par la constitution scientifique d’un corpus d’épreuves (linguistique, littéraire, historique et géographique, etc) Sur le deuxième thème, en relation avec le premier : « printemps des peuples », oui, mais surtout des élites : 48 ce n’est pas seulement le printemps des peuples, ou plutôt 48 c’est d’abord une révolution sociale, tuée en juin à Paris, ou en 51 à Vienne selon des chronologies propres à chaque pays. Donc attention à l’intitulé, qui précise bien révolutions politiques, révolutions sociales : ne pas passer sous silence le social. Attention aussi à ne pas confondre liberté et démocratie, surtout que en 48 la démo c’est la démocratie sociale Cf Lamartine qui incarne cette dimension de démocratie sociale, et qui, aux élections présidentielles de 48, n’existe plus. Dernier thème : La question de la traite nous permet à la fois d’aborder un thème jusque là innommé : l’esclavage ! Par ailleurs, cela nous permet de revenir à notre fil conducteur de l’histoire connectée. Rappel : les traites sont abolies au tournant des XVIIIe-XIXe, mais ces abolitions restent virtuelles, car le droit de visite dans les bateaux, seul moyen de vérifier la réalité de l’absence de traite, remet en cause tout le droit de la mer : monter sur un bateau c’est entrer sur le territoire national. C’est ainsi que les différences de chronologie dans l’abolition des traites et dans l’application effective de cette abolition entre la France et l’Angleterre mérite d’être étudiée de près. En France, on le sait, la Révolution Française abolit l’esclavage dans certaines colonies, mais Napoléon le rétablit en 1802. Dans ce contexte, quid de la traite, qui avait connu son apogée en 1789 ? Elle est certes déclarée illégale en 1807 mais il n’y a pas d’évolution notable avant Juillet. A ce momentlà, Guizot, dont on sait par ailleurs qu’il appartient aux milieux protestants, milieux dont sont issus les lobbies abolitionnistes, signe la « première Entente cordiale » (et a donc besoin des Anglais.) il fait donc appliquer alors la loi avec un peu plus d’efficacité. Les Anglais eux ont une interdiction beaucoup plus respectée. Cf les travaux de O PETRE-GRENOULLEAU, ainsi que ceux de Serge DAGET sur les traites illégales. La traite française, toute illégale qu’elle soit, reste extrêmement efficace dans le premier XIXe siècle, aussi bien en direction de l’Amérique du Nord (presque jusque guerre de Sécession) que de l’Amérique du Sud (ainsi vers le Brésil : même si c’est de façon beaucoup plus réduite, il y a une traite européenne en direction de ce pays jusqu’à abolition de l’esclavage dans les années 1880 : l’esclavage fonctionne comme une pompe aspirante.)