Salle 4 - Musée Cognacq-Jay
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Salle 4 - Musée Cognacq-Jay
« Dédicaces & déclarations » - Parcours hors les murs YIA#05 au musée Cognacq-Jay / Salle 4 Célia Nkala (née en 1983), MELANCOLIE I, laiton et résine, 2013 et Série MILLENIUM, résine, 2015 La pièce Mélancolie I associe un aspect décoratif à une symbolique précise. Si le contenant (une saucière) semble provenir d'une table aristocratique, indiquer un certain cérémonial ou un idéal fantasmé, le contenu évoque la bile noire et la théorie humorale en vogue au XVIIIe siècle. © Eric Emo / Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet La série Millenium (MLNM) met en scène des figures humaines et animales, biscuits de style XVIIIe modifiés, recouverts d'une épaisse matière noire, telle une fiction rétro-futuriste. Courtesy de l’artiste Sabine Pigalle (née en 1963), Le Complexe de Diane, photographie, 2015 Courtesy de l’artiste © Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet Inspirée par Le Repos des Nymphes au retour de la chasse de François Boucher, Sabine Pigalle présente une hybridation de peintures sensuelles de « petites créatures déshabillées », amalgamant différents tableaux représentant déesses, nymphes et courtisanes. Sans pervertir le ton propre au peintre des grâces, dans un hymne au corps féminin, la contemplation de l’ « élégante vulgarité » décrite par les frères Goncourt reste de mise. En s’attachant à mettre en scène l’étalage de chair d’un gynécée masqué et licencieux, la relecture contemporaine cristallise ce qui caractérise l’esprit libertin d’un siècle élégant et raffiné, dédié à l’art du plaisir, célébrant le ton galant et mignard, la jouissance de l’immédiateté, mais aussi l’esprit canaille et superficiel. L’univers onirique perdure, mais le rêve semble se muer imperceptiblement en cauchemar : le jour frais et délicatement coloré fait place à l’inquiétante étrangeté blafarde et monochrome de la nuit. La lune, classiquement associée à Diane, telle une gigantesque épée de Damoclès, menace de déferler sur l’insouciante assemblée. Le ton s’est globalement brouillé et osbcurci, telle une préfiguration du cataclysme de la révolution à venir. A travers une mise en perspective historique, Sabine Pigalle force le trait en évoquant les signes de décadence d’un siècle frivole : la fête est bientôt finie. Edwart Vignot (né en 1969), Halte à l’aqua !, installation, 2015 Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-End © Musée Cognacq-Jay / Roger-Viollet « Au delà de l’œuvre d’art - une huile sur toile - et de sa dimension pittoresque - le sujet traité - le choix de prendre l’une des deux vues de Venise que possède le Musée Cognacq-Jay comme source d’inspiration, est avant tout la volonté de montrer l’importance au XVIIIème siècle de ces « promoteurs-amoureux » de la Sérénissime à savoir les peintres appelés védutistes. La diffusion à travers toute l’Europe d’œuvres mettant en scène la beauté de la cité la rendra certes célèbre mais contribuera surtout à la fragiliser en attirant de plus en plus de monde en son sein. L’héritage de cet état d’esprit louable autrefois et surtout sans réelles conséquences, met depuis plusieurs décennies Venise en très grand danger. Car les hordes de touristes embarquées sur ces HLM (Hôtels Lagunaires Malfaisants) en quête d’immortels trophées photographiques engendrent de manière égotique, stérile et irréversible des dommages qu’un présent consumériste ignore béatement. La partie centrale expose une reproduction photographique légèrement réduite du tableau de 1730 de Antonio Canal dit Canaletto, Vue du canal de Santa Chiara, propriété du Musée. La partie droite projette sur un moniteur vidéo un film de trois minutes montrant un navire de croisière qui traverse de nuit la Giudecca. La partie gauche quant à elle contient un aquarium rempli d’eau et d’encre de chine noire dans lequel est immergée une photo sur acier du portrait du gigantesque paquebot. Cette image, format carte postale 10 x 18 cm, cause première de la montée des eaux et donc de la dégradation empirique de la cité, est ici présentée comme un symbole. Le message est simple et très clair : si nous n’y prenons garde et par la faute non plus seulement des marées mais de l’homme, la Sérénissime disparaitra sous les eaux troubles du tourisme de masse. » « Dédicaces & déclarations » - Parcours hors les murs YIA#05 au musée Cognacq-Jay / Salle 4 Depuis plus de 25 ans, Edwart Vignot conçoit ses oeuvres à partir des dessins, tableaux ou objets d’art issus de sa propre collection. Ses créations se nourrissent des dimensions littéraires, symboliques, voir historiques contenues dans ces artefacts du passé. Ni readymade, ni mises en scène, ses installations ont pour vocation d’amplifier, de questionner, ou à l’inverse de détourner, le sens premier exprimé par les auteurs originels. Edwart Vignot a fait donc de l’Art -ou de l’histoire de l’art- son médium privilégié. Axelle Remeaud (née en 1984) , La chevelure, Bois et cheveux, 2013-2015 Courtesy de l’artiste et de la galerie Da-End © Carole Rabourdin / Musée CognacqJay / Roger-Viollet Les oeuvres d’Axelle Remeaud travaillent ces relations substitutives (la réduction du tout à la partie, du contenant au contenu, de l’artiste à l’oeuvre) pour exploiter au mieux la plasticité de notre visibilité libidinale : le fétichisme, le voyeurisme, l’exhibition, en un mot les modalités du fantasme, jusqu’à la plus sadique. Le mécanisme du désir n’est en effet pas ici pure affirmation, il se compose des rejets et des différés dans lesquels se noue la relation à l’objet, selon un jeu bien connu des psychanalystes entre pulsion de vie et pulsion de mort. A travers des chignons montés en trophée ou une assemblée de sculptures-poings, Axelle Remeaud exploite, avec un réel souci du matériau, la créativité plasticienne de nos regards intimes. « Chevelure » manifeste en première lecture tous les attraits d’une pièce onirique, mobilisant l’imaginaire enfantin des princesses aux longueurs capillaires, la charge érotique de la représentation classique de la féminité et la symbolique de la sophistication séductrice. En seconde analyse toutefois, le chignon se fait instrument d’une réification de la femme, montée en trophée de chasse, face auquel s’installe un certain malaise, accentué par l’absence de visage, fantomatique ou mortifère. La multiplication des chignons confirme l’expérience d’un objet étrange, semblant se replier sur lui-même, et créant en son milieu, sous des atours brillants, une sorte de béance, un point de fuite sombre, une menace d’invagination. Extrait du texte "Métonymiques" de Florian Gaité.