des drones pour percer les secrets des pyramides

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des drones pour percer les secrets des pyramides
Des drones pour percer les secrets des pyramides
d’Egypte
Le Monde.fr | 25.10.2015 à 22h03 • Mis à jour le 26.10.2015 à 07h40 | Par Florence Evin (/journaliste/florence-evin/) (Le Caire,
envoyée spéciale)
Les Grandes Pyramides et le Sphinx, près du Caire en Egypte, éclairés en bleu pour les 70 ans des Nations Unies, le 24
octobre 2015. KHALED DESOUKI/AFP
Sonder les mystères des pyramides d’Egypte en les
« scannant ». La décision a été annoncée, dimanche
25 octobre, au Caire par Mamdouh el Damatti, ministre
égyptien des antiquités, pour comprendre « comment les
pyramides ont été construites et ce qu’elles que cachent ».
« Y a-t-il une rampe circulaire intérieure pour faciliter
l’acheminement des blocs de pierre ? Existe-t-il des chambres
restées secrètes ? », résume le ministre égyptien.
Une association française à but non lucratif, HIP Institut (Héritage, Innovation, Préservation), a été
chargée de piloter la mission scientifique « Scan Pyramids » qu’elle a initiée, conçue et coordonnée
en collaboration avec la Faculté des ingénieurs de l’Université du Caire, représentée par l’ingénieur
égyptien Hany Helal, cofondateur de HIP Institut avec le Français Mehdi Yahoudi et le Belge
François Schuitten, auteur de BD.
Les réponses à ces énigmes pourraient être révélées par les technologies les plus innovantes, non
invasives, utilisées par Scan Pyramids, pour sonder , sans y percer le moindre orifice, le cœur des
plus hautes pyramides d’Egypte et les mieux conservées, monuments funéraires des pharaons,
datant de 4 500 ans. Hany Helal, professeur qui représente la Faculté des ingénieurs du Caire,
précise que « l’objectif est d’utiliser des techniques qui donnent des résultats concrets. Ensuite,
ajoute l’ingénieur, ce sera aux égyptologues de les interpréter ».
Des techniques inspirées de l’industrie aérospatiale
La mission internationale commencera début novembre pour se terminer fin 2016. Elle portera sur
quatre chefs d’œuvre de la IVe dynastie pharaonique ayant régné entre 2575 et 2465 avant J.-C.
Celles du pharaon Snefrou, le père, de Khéops, le fils, et de Knéfren, le petit-fils. L’opération
commencera à 60 kilomètres au sud du Caire, sur le site de Dahchour, dans le désert bordant la
vallée du Nil, par les deux pyramides bâties par Snefrou (2575 – 2551 av. J.-C.).
Sera scannée la pyramide dite rhomboïdale, du pharaon Snefrou, au fin parement de calcaire en
partie conservé, et dont l’angle de pente a été modifié à mi hauteur. La pyramide rouge du même
Snefrou suivra ; haute de 104 m, contre 146 à l’origine, elle mesure 220 m de côté. Puis la mission,
qui compte vingt-cinq personnes, étudiera ensuite les deux plus hautes pyramides du plateau
désertique de Guizeh, dominant le Caire : la monumentale Khéops, 137 m aujourd’hui, contre 146 à
l’origine et 230 m de côté, avant d’étudier sa jumelle Khéphren, 138 m sur 215 m de côté.
Plusieurs technologies d’exploration se succéderont, sans toucher aux édifices eux-mêmes. Deux
missions de thermographie infrarouge - technique utilisée dans l’industrie aérospatiale -, l’une de
courte durée menée par le spécialiste Jean-Claude Barré de LedLiquid, l’autre, d’une année au
moins, conduite par l’université Laval de Québec, permettront d’établir une carte thermique des
quatre monuments pour analyser la « peau » de la pyramide et détecter les vides intérieurs proches
de la surface de calcaire.
Imagerie à la caméra infrarouge qui détecte les vides à l'intérieur d'une structure et la présence éventuelle de galerie, de
chambres funéraires, etc. HIP INSTITUT
Drones, scanners et reproduction 3D
Suivra la radiographie par détecteur de muons, les particules élémentaires. Une technique
développée au Japon par les équipes du KEK (High Energy Accelerator research Organization) et
l’université de Nagoya. Elle pourra vérifier et visualiser avec précision la présence de structures
inconnues au cœur même des pyramides. Enfin, une campagne, menée par la société Iconem, à
l’aide de drones et de scanners au laser, produira la reconstitution en 3D du plateau de Guizeh. La
photogramétrie laser fournira une précision centimétrique jamais atteinte de l’intérieur et de
l’extérieur des pyramides de Guizeh et de celles du site de Dahchour, ainsi que de tous les
monuments qui y sont érigés.
Détection de particules cosmiques par technologie utilisant les muons révélant la présence de structures à l'intérieur
d'une pyramide sans la toucher. HIP INSTITUT
« L’essentiel est d’avancer en mettant en œuvre de nouvelles approches, souligne Mehdi Tayoudi,
président de HIP Institut. Beaucoup de missions précédentes ont tenté de percer les mystères des
pyramides et si elles n’y sont pas parvenues, elles ont chacune fait progresser la connaissance
comme ce fut le cas, par exemple, il y a tout juste trente ans, de la mission de la Fondation EDF ,
qui a décelé une anomalie de sous-densité en forme spiralée dans Kheops. Notre objectif est
d’apporter notre pierre à l’édifice et de préparer , en toute humilité, le chemin pour de futures
missions de recherche scientifiques. »
C’est cette fameuse rampe intérieure en spirale qui pourrait être révélée par les images produites. Et
apporter un début de réponse à l’énigme de la construction de ces monstres comme la pyramide de
Khéfren, composée de 2,3 millions de blocs de pierre montés en gradins, d’un poids moyen de 2,5
tonnes chacun et pouvant atteindre les 200 tonnes pour les plus massifs. L’archéologue Jean
Philippe Lauer avait déjà imaginé, lui, qu’une rampe de briques et de terre, renforcée par des
poutres, et montée au fur et à mesure de l’avancée du chantier sur l’un des côtés de la pyramide,
était une solution.
Relancer la fréquentation touristique
L’opération Scan Pyramids, d’un million d’euros, financés par des mécénats de compétence et
financiers, accompagne les grands chantiers culturels lancés par l’Egypte. Deux musées colossaux
sont annoncés à Guizeh, au pied des pyramides. Le Musée national égyptien des civilisations
(NMEC) – de la préhistoire à aujourd’hui –, doté d’un centre culturel avec cinéma et commerces,
ouvrira début 2016. Le Grand musée égyptien (GEM), qui devrait être terminé en 2018, présentera
tous les vestiges et l’histoire du jeune Toutankhamon. Tandis que le musée national du Caire, place
Tahrir, recélant les trésors de l’ancienne Egypte sera entièrement restauré dans son jus, comme s’il
venait d’ouvrir en 1902.
Scanner porté par des drones pour une imagerie en 3D. HIP INSTITUT
Des annonces prometteuses qui devraient raviver l’intérêt international pour la terre des pharaons.
La fréquentation touristique est en berne. Les 14 millions de visiteurs de 2010 seront moins de
9 millions en 2015. La manne du tourisme représente le tiers du PNB. La Haute Egypte souffre. Les
sites y sont quasi déserts.

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