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Cours d’Algèbre II Prof. E. Bayer Fluckiger Bachelor Semestre 4 1 mai 2013 Série 21 Exercice 1. Soit A un anneau commutatif. Montrer que A est un corps si et seulement si les seuls idéaux de A sont {0A } et A. Solution. Remarquons premièrement que tout idéal I de A contenant une unité a ∈ A∗ est égal à A. En effet, il existe alors b ∈ A tel que 1 = a · b, d’où 1 ∈ I. Pour tout c ∈ A, on a alors c = c · 1 ∈ I, ce qui montre l’affirmation. Si I est un idéal non-nul d’un corps, alors il contient donc un élément inversible (tout élément non-nul), d’où I = A. Ainsi, les seuls idéaux d’un corps sont les deux idéaux triviaux. Réciproquement, supposons que A possède {0A } et A comme seuls idéaux et montrons que tout élément a ∈ A non-nul est inversible. En effet, l’idéal (a) est alors non-nul, d’où (a) = A par hypothèse. En particulier, 1 ∈ (a), c’est-à-dire qu’il existe b ∈ A tel que ab = 1. Exercice 2. Soient K un corps et P un idéal premier non nul de K[X]. Montrer que P est maximal dans K[X]. Solution. Rappelons que l’anneau K[X] est principal, donc il existe f ∈ K[X] tel que P = (f ). Pour montrer que P est maximal, supposons que M soit un idéal de K[X] contenant P . A nouveau, nous pouvons supposer que M = (g) pour un certain g ∈ K[X] non-nul. L’inclusion ci-dessus implique alors que g | f , i.e. il existe h ∈ K[X] tel que f = gh. Comme P est premier, nous obtenons que g ∈ P ou h ∈ P . Le premier cas implique que P = M . D’autre part, si h ∈ P , alors il existe ĥ ∈ K[X] tel que h = f ĥ. Or, f = gh, d’où g ĥ = 1. Par la remarque faite dans la solution du premier exercice, ceci implique que M = K[X]. Ainsi, P n’est contenu strictement dans aucun idéal propre de K[X], c’est-à-dire qu’il est maximal. 2 Exercice 3. Soient K un corps et f ∈ K[X]. Montrer que si K[X]/(f ) est un corps, alors f est irréductible. Est ce encore vrai si on suppose seulement K[X]/(f ) intègre ? Solution. Par le premier exercice, les seuls idéaux de K[X]/(f ) sont les deux idéaux triviaux. Or, on sait que les idéaux de K[X]/(f ) sont en correspondance bijective avec les idéaux de K[X] contenant (f ). Il en résulte que les seuls idéaux de K[X] contenant (f ) sont (f ) et K[X] (notons que ceci est équivalent au fait que (f ) soit un idéal maximal). Supposons qu’il existe g, h ∈ K[X] tels que f = gh. Il vient alors que (f ) ⊂ (g), d’où (g) = (f ) ou (g) = K[X]. Le premier cas implique, en considérant les degrés, que h ∈ K. Le second cas implique que g ∈ (K[X])∗ = K. Ainsi, f est irréductible. Si K[X]/(f ) est intègre, alors on obtient que (f ) est premier. En effet, si gh ∈ (f ) pour g, h ∈ K[X], alors [gh] = [0] dans K[X]/(f ), donc [g] = 0 ou [h] = 0 par hypothèse. En d’autres termes, g ∈ (f ) ou h ∈ (f ), ce qui montre l’affirmation. Par l’exercice 2, le fait que (f ) soit premier implique qu’il est un maximal. Par le paragraphe précédent, on obtient à nouveau que f est irréductible. En examinant les solutions de cet exercice et du précédent, on remarque que l’on a en fait démontré que pour f ∈ K[X] non-nul, (f ) maximal ⇔ (f ) premier ⇔ f irréductible. Il sera vu au cours que ces équivalences ne sont pas vraies en général, mais que l’argument ci-dessus est généralisable pour une certaine classe d’anneaux. Exercice 4. On note M2 (Z) l’anneau des matrices à coefficients dans Z et a 7b ∈ M2 (Z) : a, b, c, d ∈ Z T := 0 d I := 7a 7b 0 7d ∈ M2 (Z) : a, b, d ∈ Z . (1) Montrer que T est un sous-anneau de M2 (Z), que I est un idéal bilatère de T , et que T /I est isomorphe à (Z/7Z)2 . (2) On note a 7b ∈ M2 (Z) : a, b, d ∈ Z . J := 0 7d Calculer le cardinal de J/I. En déduire que T /J est isomorphe à Z/7Z. 3 Solution. (1) La vérification que T est un sous-anneau de M2 (Z) est triviale. Pour la seconde partie de la question, considérons l’application f : T → (Z/7Z)2 a 7b 7→ (a, d). 0 d Notons que f (( 00 00 )) = (0, 0), f (( 10 01 )) = (1, 1) et que pour tous a, b, d, a′ , b′ , d′ ∈ Z, on a ′ a 7b′ a 7b a + a′ 7(b + b′ ) + = , 0 d′ 0 d + d′ 0 d ′ ′ a 7b′ aa 7(ab′ + bd′ ) a 7b = . 0 d 0 d′ 0 dd′ Par conséquent, il suit que f est un homomorphisme d’anneaux, qui est de plus clairement surjectif. Or, ker f = I, donc I est un idéal bilatère de T et par le premier théorème d’isomorphisme pour les anneaux, on a T /I ∼ = (Z/7Z)2 comme souhaité. (2) En définissant l’homomorphisme de groupes abéliens J → Z/7Z a 7b 7→ a, 0 7d on voit de la même manière qu’au point précédent que J/I ∼ = Z/7Z en tant que groupes, ce qui implique que |J/I| = 7. Par le troisième théorème d’isomorphisme pour les anneaux, on a que T /J ∼ = (T /I)/(J/I), donc |T /J| = 72 /7 = 7. Par conséquent, (T /J, +) ∼ = (Z/7Z, +), mais il s’agit seulement d’un isomorphisme de groupes. Pour montrer que T /J et Z/7Z sont aussi isomorphes en tant qu’anneaux, on montre le fait suivant : tout anneau fini (avec 1) d’ordre premier p est isomorphe à Z/pZ. En effet, on a alors (R, +) ∼ = (Z/pZ, +), donc il existe r ∈ R non-nul tel que R = hri. Montrons que R est intègre. Soient a, b ∈ R non-nuls et écrivons a = m · r := r| + ·{z · · + r}, b = n · r, m fois pour m, n ≥ 1 non-divisibles par p. On a alors ab = mn · r2 . Notons que si r2 = 0, alors le produit de n’importe quels éléments est nul, donc r2 6= 0 4 puisque 1 · 1 = 1. Puisque p ∤ m, n est premier, on en tire que ab 6= 0, d’où l’affirmation. Considérons maintenant l’homomorphisme d’anneaux ϕ : Z → R défini par 1| + ·{z · · + 1} si n > 0 n fois ϕ(n) 7→ −1 · · · − 1} si n < 0 | −{z n fois 0 si n = 0. Comme Z est principal, il existe m > 0 tel que ker ϕ = mZ. On prétend que m est premier. En effet, s’il existe a, b > 1 tels que m = ab, alors on a que f (a)f (b) = f (ab) = f (m) = 0. Comme R est intègre, cela implique que f (a) = 0 ou f (b) = 0, ce qui est contradictoire avec la définition de m et le fait que a, b < m. Ainsi, on obtient un homomorphisme d’anneaux injectif Z/pZ → R. Comme R est de cardinalité p, on peut finalement conclure que R ∼ = R/pZ en tant qu’anneaux. Note : Bien sûr, on aurait également pu utiliser le premier théorème d’isomorphisme comme en (1) pour aboutir au résultat immédiatement, en définissant un homomorphisme d’anneaux surjectif T → Z/7Z avec noyau J. Le but de cette question était néanmoins d’illustrer le troisième théorème d’isomorphisme et de caractériser au passage les anneaux (avec 1) d’ordre premier.