Extrait de synthèse-DDASS du Nord-Bientraitance du - Scribe-net

Transcription

Extrait de synthèse-DDASS du Nord-Bientraitance du - Scribe-net
( Pour exemple - Extrait de synthèse Scribe-net )
« ASSISES DÉPARTEMENTALES DE LA BIENTRAITANCE
EN FAVEUR DES PERSONNES ÂGÉES »
Synthèse des débats
Lille, le 15 juin 2009
S om m a i r e
Accueil ................................................................................................................................. 3
• Luc HOSSEPIED, Journaliste
Ouverture ............................................................................................................................. 3
• Valérie LÉTARD, Secrétaire d’Etat à la Solidarité
L’action de la DDASS du Nord en matière de promotion de la bientraitance
des personnes âgées dépendantes ................................................................................... 8
• Pierre PRUEL, Directeur Départemental des Affaires Sanitaires et Sociales du Nord
Le point de vue de l’autorité judiciaire sur la maltraitance des personnes âgées.......... 9
• Vincent LESCLOUS, Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance
de Valenciennes
Le « 3977 » dans le Nord..................................................................................................... 9
• Claude MURIGNIEUX, Président de l’Association Alm’Age
• Bernard DUPORTET, Président de l’Association Française pour la Bientraitance des
Aînés et adultes Handicapés (AFBAH)
Échanges avec la salle.......................................................................................................11
Table ronde « La bientraitance dans les établissements et services médico
sociaux pour personnes âgées dépendantes : quelles réalités au quotidien ? »..........13
• Ruth BARROS, Infirmière coordonnatrice, Service de Soins Infirmiers A Domicile
SSIAD) « Centre Barrois », Fournes-en-Weppes
• Annie CARLIER, Aide-soignante, Etablissement d’Hébergement pour Personnes
Agées Dépendantes « Résidence Obert », Wambrechies
• Françoise OUACHÉE, Représentante des familles au conseil de vie sociale,
EHPAD « Notre Dame d’Espérance », Lille
• Frédéric KNOCKAERT, Infirmier coordonnateur, EHPAD « Villa Senecta », Bavay
• Dr. Françoise KASZTELAN, Médecin coordonnateur, EHPAD « Les Flandres »
et EHPAD « Les Acacias », Tourcoing
• Richard MATUSZEWSKI, Directeur EHPAD « Résidence de l’Abbaye », Solesmes
Échanges avec la salle.......................................................................................................18
Clôture ................................................................................................................................24
• Pierre PRUEL
Accueil
Luc HOSSEPIED, Journaliste
Bienvenue pour une après-midi de réflexion autour de la bientraitance, afin de partager des
pratiques positives, et peut-être reconduire des expérimentations. Madame Valérie Létard,
merci d’ouvrir cette séance des Assises départementales du Nord.
Ouverture
Valérie LÉTARD, Secrétaire d’Etat à la Solidarité
Mesdames, Messieurs, comme vous pouvez l’imaginer, c’est pour moi un grand plaisir d’être
parmi vous aujourd’hui à Lille, pour ouvrir ces premières Assises départementales de la
bientraitance en faveur des personnes âgées. Lorsque j’ai pris l’initiative de ces premières
Assises départementales dans le cadre de l’opération de bientraitance des personnes âgées
accueillies en établissement, je ne doutais pas qu’elles répondaient à une forte attente du
public comme des professionnels. Je souhaite partager avec vous l’ampleur de l’implication
des acteurs locaux et en premier lieu des préfets et des DDASS qui organisent ces assises.
Ainsi, d’ici la fin du mois, ces Assises auront été tenues dans plus de la moitié des
départements. Les autres se dérouleront dès la rentrée. Je suis tout particulièrement
sensible à la mobilisation et à la réactivité des services de l’Etat dans le département du
Nord, dont les Assises se tiennent parmi les premières et soyez-en remerciés
chaleureusement.
Le succès des Assises tient à la justesse de la cause. La maltraitance est inadmissible. Elle
l’est d’autant plus quand la personne concernée est âgée, vulnérable et qu’elle peut
difficilement réagir, encore moins s’opposer. L’opération de bientraitance s’adresse en
priorité aux personnes qui souffrent, les personnes âgées victimes ; elle s’adresse aussi aux
personnels, qui sont à leur service, lorsqu’ils sont confrontés à ces situations de crises qu’ils
ne sont pas ou plus en mesure de résoudre. Aujourd’hui, 15 juin, c’est aussi la Journée
mondiale contre la maltraitance des personnes âgées. Journée lancée en 2006, à l’initiative
du réseau international pour la prévention de la maltraitance des adultes âgés. Il était donc
tout à fait opportun d’organiser notre séance aujourd'hui même.
La création de cette journée traduit l’inquiétude de nos sociétés à l’égard de la maltraitance
dont peuvent devenir victimes nos aînés. Elle a pour but de sensibiliser l’opinion publique,
sur un phénomène inacceptable et jusqu’à récemment tabou. Elle vise aussi et surtout à
dénoncer et condamner collectivement ces situations. Cette journée est un appel à chacun
d’entre nous pour se mobiliser et pour mettre en commun nos énergies et nos initiatives afin
de promouvoir la bientraitance. C’est justement ce que vous ferez tout au long de cette
après-midi de réflexion et de propositions, que je souhaite bien sûr riche et intense. Je dis
avec force et conviction que le droit au respect des personnes âgées fonde notre pacte
générationnel. C’est pourquoi la promotion de la bientraitance est au cœur de l’action menée
par le gouvernement, en faveur des personnes âgées à domicile comme en établissement.
Cette bientraitance est une démarche collective pour assurer le meilleur accompagnement
possible pour la personne âgée, dans le respect de ses choix, et l’adaptation à ses besoins.
C’est une démarche qui concerne chaque citoyen. Elle interroge notre image des personnes
âgées, nos comportements, nos organisations, nos modes de financement, nos modes de
fonctionnement, nos pratiques professionnelles.
Aujourd’hui, je voudrais évoquer les aspects qui me paraissent essentiels : assurer les
conditions idéales à la promotion de la bientraitance. En premier lieu, promouvoir la
3
bientraitance suppose de lever les tabous de la maltraitance des personnes âgées. C’est ce
que j’ai voulu faire en février 2008, en lançant le 3977. Ce numéro d’appel national unique
qui permet aux victimes, mais aussi à tout citoyen, de signaler des cas de maltraitance dont
il a connaissance. Ce numéro est relayé nationalement, par des campagnes de
communication régulières. La dernière a eu lieu en mai, dans les établissements. Après
18 mois de fonctionnement, le pari est en passe d’être gagné. Les victimes et plus largement
les témoins prennent la parole. Ils peuvent s’adresser à un dispositif efficace, opérationnel,
qui enregistre les signalements et les prend en compte localement. Aujourd’hui, le 3977, ce
sont plus de 160 appels par jour, pris en charge par l’Association française pour la
bientraitance des aînés et/ou handicapés, l’AFBAH. Monsieur Duportet, son Président, et par
des plateformes locales qui prennent en charge des signalements, comme celles d’Alm’Age,
dont je salue également le Président, Monsieur Murignieux.
Grâce à l’action conjuguée du 3977, de ses deux associations et de leurs bénévoles, la
maltraitance des personnes âgées et des personnes handicapées est désormais un
phénomène visible et reconnu. Les cas signalés sont pris en compte. De plus, la
connaissance des situations des victimes et des auteurs, est de nature à améliorer les
actions de prévention à développer.
En deuxième lieu, promouvoir la bientraitance implique d’organiser une vigilance de
proximité. Dans chaque département, les services de l’Etat disposent d’un référent
bientraitance, chargé notamment du recueil et des traitements des plaintes, ainsi que du
suivi des contrôles des établissements. Les contrôles sont principalement à but de
prévention du risque de maltraitance. Dans le cadre de l'opération de bientraitance, j’ai
demandé qu’ils soient effectués, dans 80 % des cas, de façon inopinée. Je sais, Madame le
Préfet, que dans le Nord, vous avez atteint un taux de 90 % et je pense que c’est un gage de
meilleure efficacité. J’ai eu l’occasion de le dire : il ne s’agit pas de piéger les établissements,
mais simplement de veiller qu’à tout moment, une personne âgée a droit au respect de sa
dignité. Et à tout moment, l’état est là pour le contrôler afin de le garantir. Très vite, les
services déconcentrés disposeront d’un nouvel outil, avec l’enquête flash, qu’ils pourront
utiliser dès l’été, pour des contrôles restreints. Par ailleurs, je salue l’initiative du Conseil
général du Nord, qui a mis en place un observatoire départemental, des maltraitances en
direction de l’ensemble des personnes vulnérables, dont les personnes âgées et
handicapées, et les victimes de violence au sein du couple. Au plan national, un réseau de
signalement et de risques d’incidents est organisé selon un protocole formalisé, afin de
veiller à une intervention efficace de l’Etat.
En troisième lieu, il nous faut promouvoir la bientraitance. Pour ce faire, il faut agir
concrètement sur les pratiques professionnelles. Cela suppose des référentiels de qualité,
partagés. C’est tout le travail de l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des
établissements et services sociaux et médico-sociaux (l’ANESM). La recommandation
bientraitance en constitue le socle. Ce socle est enrichi régulièrement de nouvelles
recommandations, comme celles sur l’accompagnement des personnes atteintes de la
maladie d’Alzheimer, et prochainement, celle sur le rôle de l’encadrement dans la prévention
de la maltraitance. Agir concrètement, c’est aussi donner des outils aux acteurs. C’est ce
que fait le Comité national de vigilance et de lutte contre la maltraitance, le CNV, que je
préside, au travers du Guide de gestion des risques de maltraitance en établissement,
adopté lors de sa dernière séance, le 4 novembre dernier. Et bientôt, du Guide de gestion du
risque de maltraitance à domicile, à destination des services.
Enfin, promouvoir la bientraitance, c’est former le personnel et valoriser les métiers du grand
âge. C’est pourquoi j’ai proposé le dispositif de formation opérationnel qui concernera tous
les personnels au contact des résidents, soit 250 000 personnels d’ici à trois ans. Les
premiers cadres seront formés à La trousse MobiQual, élaborée sous l’égide de la Société
française de gérontologie et de gériatrie et adaptée aux recommandations de l’ANESM dès
4
l’automne. A la suite, ils disposeront d’un Kit d’animation destiné à animer une journée de
mobilisation dans chaque établissement. Les professionnels se verront proposer des
formations adaptées, dont le cadre sera défini en partenariat entre les organismes
collecteurs de la formation professionnelle et les fédérations. C’est au total un coût de
dispositif qui est évalué à 132 millions d’euros. Développer une culture de la bientraitance,
c’est aussi valoriser les métiers du grand âge. A l’horizon 2015, vous le savez, les effets
démographiques ajoutés aux départs en retraite nous conduisent à recruter 400 mille
personnes pour s’occuper des personnes âgées et handicapées. Et pourtant, les jeunes
hésitent aujourd'hui à s’engager dans ce secteur. C’est tout l’objectif du plan actuellement
expérimenté dans trois régions dont la vôtre. L’Etat apporte 8 millions d’euros aux régions
expérimentatrices, pour amplifier leur action. L’Etat et la région Nord-Pas-de-Calais ont
décidé en 2009, de conjuguer leurs efforts, et de mutualiser les financements, pour
accompagner le développement des métiers de la dépendance, avec trois objectifs :
répondre aux besoins croissants d’emploi, faciliter l’accès à la qualification, la mobilité et la
promotion professionnelle, et renforcer la professionnalisation des services.
Ces objectifs sont indissociables de la promotion de la bientraitance. La région Nord-Pas-deCalais, par exemple, se trouve, dans le cadre de son dispositif, avec une enveloppe
équivalente à 6 millions d’euros, avec en fait, par cette mutualisation de moyens, et surtout
une intervention de la CNSA – ce qui n’est a priori pas le cas dans les autres régions – de
valoriser un budget qui aurait été entre 1 et 2 millions d’euros et de le passer à 6 millions,
avec une aide de la DDTE qui représente à peu près 1 million d’euros et 2,7 millions d’euros
supplémentaires de la CNSA, plus les organismes collecteurs qui accompagnent la
démarche.
Tout ceci pour dire que nous essayons vraiment de modéliser cela pour être plus proches du
terrain, travailler avec les fédérations, repérer les besoins de chaque région, et de mobiliser
des crédits beaucoup plus ambitieux que ce qui ne serait le cas, si nous n’avions affaire qu’à
des crédits de droit commun, en fait, de l’institution compétente dans le domaine. A la fin de
cette année, nous aurons normalement la capacité d’évaluer ces trois régions avec leurs
spécificités et voir comment généraliser cette dynamique de mutualisation autour d’un plan
des métiers adapté aux besoins de chaque région. Ces démarches d’amélioration de la
qualité du dispositif et des pratiques s’appuient, bien évidemment, sur la consolidation des
moyens financiers des établissements en 2009. C’est pourquoi le Gouvernement renforce
les moyens en personnels soignants des établissements et les trois millions d’euros
supplémentaires ouverts en 2009 pour cet axe de conventionnement tripartite permettent le
recrutement de dix mille emplois soignants supplémentaires, au titre de la médicalisation et
donc, de la signature de ces conventions. Le gouvernement soutient également la
restructuration et la remise en sécurité des locaux, au travers des 330 millions d’euros d’aide
à l’investissement qui sont identifiés sur le budget de 2009. Ces 300 millions sur les moyens
humains pour les établissements qui fonctionnent déjà, viennent s’additionner aux
300 millions de l’année 2008. En fait, nous avons débloqué 20 mille emplois soignants
supplémentaires, non pas pour de nouveaux établissements, mais pour ceux qui
fonctionnent déjà. C’est l’effort que nous avons souhaité mettre en place pour accompagner
ce renforcement nécessaire des personnels soignants, sur lequel nous allons continuer
l’effort.
Comme vous le constatez, l’Etat souhaite être tout à la fois présent pour donner la parole
aux victimes ou témoins, organiser la vigilance au travers de contrôles, mais aussi pour
accompagner les professionnels, les établissements, les services, pour améliorer leurs
pratiques. C’est le message que je livre aux services de l’Etat et je connais l’engagement
des services du Nord pour accompagner l’amélioration continue de la qualité dans les
établissements du département. L’Etat est engagé, mais il faut aller plus loin, plus près des
besoins des personnes âgées. Aller au plus près des besoins, c’est organiser la mobilisation
5
locale des acteurs, au travers des Assises départementales. La mobilisation locale est une
condition nécessaire à la promotion de la bientraitance.
Comme je l’indiquais en commençant, cinquante départements auront réalisé leurs assises
départementales d’ici la fin juin. Cela a du sens. Que toutes les préfectures, en lien avec les
conseils généraux, au même moment, réunissent les acteurs locaux de la prise en charge
des personnes âgées, qu’ils affirment leur refus de la maltraitance, qu’ils réfléchissent
ensemble au contexte et aux problématiques locales et qu’ensemble, ils se mettent d’accord
sur leurs prochaines priorité. Support à la sensibilisation et à la mobilisation des acteurs de
la salle autour des personnes âgées, ces Assises sont un temps commun aux acteurs, pour
partager les enjeux de territoire des populations et des acteurs, et élaborer une politique
efficace de promotion de la bientraitance. La richesse des programmes illustre la diversité
des enjeux, propres aux différents territoires. Certains départements centrent leurs travaux
sur les signalements ou la prévention des risques, quand d’autres élargissent leurs travaux
au champ du handicap ; certaines Assises sont orientées vers les professionnels, d’autres
sont ouvertes au grand public. Autant de situations locales, autant d’approches. Les travaux
s’annoncent riches en initiatives et expériences opérationnelles. Elles ne sont pas une action
isolée. La dynamique engagée ou amplifiée pour les départements qui sont en pointe se
poursuivra d’ici la fin de l’année, par des ateliers interrégionaux. Organisés par l’ANESM ou
avec le concours des partenaires locaux, ces ateliers pratiques, destinés à favoriser les
démarches d’amélioration continue des pratiques, concerneront plus de cinq mille
professionnels.
Un atelier se déroulera à Lille. J’organiserai ensuite, d’ici la fin de l’année 2009, une
manifestation nationale dans le cadre des travaux du Comité national de vigilance et de lutte
contre la maltraitance, qui mutualisera les bonnes pratiques locales. Je ne suis pas de celles
qui pensent que les territoires sont le simple relais des politiques nationales ; je suis de
celles qui croient à l’Etat, bien sûr, mais qui croient tout autant à l’initiative locale. C’est dans
l’articulation entre le niveau national et l’échelon local que se font la richesse et la pertinence
d’une politique. C’est pourquoi, dès que mon agenda me le permet, je tiens à participer à ces
Assises. J’ai demandé que les services de l’Etat me tiennent informée sur les travaux menés
dans chaque département, afin de disposer d’une synthèse nationale. Il s’agit en priorité
d’identifier ces bonnes pratiques pour les mutualiser. Elles seront présentées dans le cadre
de ce CNV, qui pourra assurer leur diffusion auprès des autres départements. Ainsi, chacun
pourra utilement enrichir sa réflexion et ses pratiques des expériences des autres. Si ces
travaux font remonter des besoins particuliers d’accompagnement de la part de l’Etat, vous
pouvez compter sur moi pour compléter le dispositif national de promotion de la
bientraitance.
Des pistes de réflexion intéressantes se dégagent d’ores et déjà. Les signalements et les
suites données, un exemple en Creuse, avec un guide départemental du signalement, des
situations de maltraitance à domicile et en établissement, concernant les majeurs
vulnérables. L’amélioration continue de pratiques professionnelles et la formation. Un
exemple dans le Haut-Rhin, avec un dispositif de formation composé de différents kits
pratiques à destination du directeur, du médecin coordonnateur et du cadre soignant. La
prise en compte de la maltraitance à domicile, un exemple dans le territoire de Belfort, qui
s’engage dans une convention de formation avec le CNSA. Ce ne sont bien sûr que des
exemples, mais qui vous montrent comment, en allant chercher encore une fois sur le terrain
toutes ces initiatives, nous allons pouvoir contribuer à améliorer et à mutualiser toutes ces
ressources.
Pour le Nord, votre programme confirme ces préoccupations. J’écouterai attentivement la
présentation des données de la maltraitance dans le Nord, par Messieurs Duportet et
Murignieux. Derrière chaque appel, une personne est en souffrance : victime, témoin, voire
auteur. La connaissance de la maltraitance est une étape indispensable à sa prise en
6
compte, qu’il s’agisse des situations individuelles, mais aussi de la compréhension des
mécanismes de la maltraitance. Gardons en tête que dans 70 % des cas, la maltraitance est
négligence. La question des suites données au signalement vient immédiatement après.
Comment intervenir de façon adaptée après un signalement ? Bien sûr, la réponse se doit
d’être rapide et efficace. Mais, tous les cas de maltraitance ne sont pas identiques et un
traitement adapté et gradué paraît nécessaire, tenant compte de la situation de la personne,
de l’auteur et de la gravité des faits. C’est pourquoi le point de vue de l’autorité judiciaire,
présenté par Monsieur le Procureur Lesclous me paraît essentiel. De même, la convention
de partenariat signée entre les parquets de Valenciennes, Cambrai, Avesnes-sur-Helpe et
les services de l’Etat mérite une mention spéciale.
Sachez que cette question des liens entre les différentes autorités concernées – Conseil
général, Direction départementale de l’action sociale, parquet, Inspection du travail – est au
cœur de nos réflexions au plan national. Je vois dans vos expériences locales et tout
particulièrement celle-ci, un apport très utile à la réflexion.
Expérience utile aussi, pour mieux cerner les actions à engager, afin de favoriser des
modalités de travail coordonnées entre les autorités chargées du contrôle administratif et les
services du parquet pour le traitement des situations de maltraitance. Je ne pourrai
malheureusement pas assister à la totalité de votre table ronde sur « Bientraitance dans les
établissements et services médico-sociaux pour personnes âgées dépendantes », mais
soyez assurés que je le regrette. Réunir autour d’une même table, les points de vue des
familles, des établissements et des services, exprimés par les différents métiers du grand
âge – infirmières coordinatrices, médecins coordonnateurs, aides-soignantes ou directeurs –
est un gage de débat nourri, dont je ne doute pas de la qualité. Ce plateau est à l’image de
ce que je souhaite pour chaque établissement, un débat sur la réalité de la bientraitance, qui
implique toutes les personnes d’un établissement, ainsi que le Conseil de vie sociale. C’est
l’objet du questionnaire d’auto-évaluation que les établissements doivent renseigner d’ici au
30 juin. J’ai demandé, en octobre dernier, à l’ANESM d’élaborer un outil permettant, chaque
année, aux établissements d’élaborer collectivement un diagnostic bientraitance. A partir de
repères et d’indicateurs concrets, il permet aux équipes des établissements de s’interroger
sur leurs pratiques, d’élaborer un diagnostic bientraitance et de dégager des pistes
concrètes d’améliorations de leurs pratiques. L’année suivante, le nouveau diagnostic
bientraitance enregistre les évolutions. Il s’agit de mobiliser les professionnels et d’agir
concrètement sur les pratiques. Ce diagnostic est soumis à la signature du ou de la
président(e) du Conseil de vie sociale, car promouvoir la bientraitance, c’est mettre le
résident et ses besoins au cœur des pratiques et des organisations. Mais, c’est aussi donner
toute leur place aux résidents et aux familles, dans le cadre de la vie sociale de
l’établissement. Je crois au dialogue dans les établissements, entre professionnels et entre
les professionnels, les résidents et leurs familles. Ainsi, la bientraitance de nos aînés est
partie intégrante de toutes les politiques publiques engagées par le Président de la
République et par le gouvernement. En témoignent le plan Alzheimer, la médicalisation des
établissements et la signature de conventions tripartites, la création du 3977, l’opération
bientraitance ou encore le plan des métiers en faveur des personnes âgées dépendantes,
que j’ai lancé en 2008. Il y aura très bientôt un appel à projet sur des unités spécifiques
Alzheimer avec des moyens renforcés et adaptés, dès cette année. Autant de dossiers qui
vont nous permettre d’accompagner de façon plus qualitative, la prise en charge des plus
fragiles d’entre nous. Je sais que cette démarche est au cœur de votre action et, pour cette
journée, de nos débats.
Vous me permettrez d’abord un dernier point qui me tient à cœur et qui me servira de
conclusion : il s’agit des aidants familiaux. De ceux qui accompagnent l’un de leurs proches
dans le grand âge et souvent, la dépendance. Une dépendance marquée de plus en plus
fréquemment par des troubles liés à la maladie d’Alzheimer. La formation des aidants est
une mesure indispensable, qui contribue à la promotion de la bientraitance de nos aînés
7
restés à domicile. Aussi, je suis fière d’avoir porté, devant le Parlement, tout récemment,
dans les jours précédents, une mesure législative qui permettra, dès la rentrée, de financer
des formations pour ces personnes. La loi ne nous permettait pas de le faire. C’est
maintenant chose faite. Je suis tout aussi fière que l’Etat contribue d’ores et déjà, dans le
cadre du plan des métiers de la région Nord-Pas-de-Calais, à des actions expérimentales de
formation des aidants, qui nous ont permis, d’ailleurs, de servir de base à ce que nous avons
proposé dans le cadre du texte HPST. Ces formations des aidants, qui sont formés
aujourd’hui, tant pour l’accompagnement de l’autisme que pour la maladie d’Alzheimer. Cette
action, à l’initiative du réseau régional de la mémoire Nord-Pas-de-Calais concerne
350 personnes ou familles dont 210 pour l’autisme et 140 pour la maladie d’Alzheimer. Cette
action permet aux aidants de comprendre les comportements du malade atteint de ces
maladies et, bien sûr, de les prendre en charge de la manière la plus adaptée et de mobiliser
les ressources des professionnels, au moment opportun, évitant isolement et épuisement.
L’action est en cours de réalisation. Je conclurai donc mon propos avec cette nouvelle
illustration du dynamisme du Nord et de la fertilité des partenariats bien compris entre l’Etat
et les collectivités territoriales. En cette journée internationale de lutte contre la maltraitance
des personnes âgées, je lance donc un appel pour que la bientraitance soit véritablement
une cause de mobilisation intergénérationnelle et qu’elle reste au cœur de notre projet de
société, car, comme j’ai pour habitude de le dire, à chaque fois que j’interviens, je pense
qu’une société moderne est une société qui n’oublie pas de prendre en charge les plus
fragiles d’entre nous et de les mettre véritablement au cœur de leurs projets. Je vous
remercie pour votre attention et bon courage pour la tenue de ces travaux. Merci à vous
tous.
L’action de la DDASS du Nord en matière de promotion de la
bientraitance des personnes âgées dépendantes
Pierre PRUEL, Directeur Départemental des Affaires Sanitaires et Sociales du Nord
Il s’agit bien de l’exercice de droits et de libertés individuelles, mais fondamentales ; de la
bientraitance des personnes prises en charge en établissements, services sociaux et
médico-sociaux. La loi du 2 janvier 2002 nous dit qu’il faut « garantir l’exercice effectif des
droits et prévenir tout risque de maltraitance ». La notion de maltraitance peut-être
l’émanation de personnes, mais aussi d’institutions. Une « maltraitance est qualifiée
d’institutionnelle si l’institution laisse perdurer ou se reproduire sans réagir ou si elle adopte
une réaction inappropriée qui place de fait ou délibérément l’intérêt de l’institution et de ses
membres au-dessus de celui de la victime ». Développer une culture de bientraitance, c’est
élaborer et diffuser des bonnes pratiques, généraliser l’évaluation. C’est entrer dans une
démarche d’amélioration continue de la qualité des prises en charge. Un plan national de
développement de la bientraitance et de renforcement de la lutte contre la maltraitance de
mars 2007 nous dit qu’il faut améliorer les procédures de signalement, renforcer la fréquence
et l’efficacité des contrôles, mettre en place une politique de prévention et de promotion de la
bientraitance. L’opération bientraitance d’octobre 2008 nous demande 80 % de contrôles
inopinés, de généraliser les démarches d’autoévaluation et de sensibiliser les acteurs.
De quels leviers d’action disposons-nous ? D’abord, recruter du personnel qualifié et
renforcer les ratios d’encadrement. Nous avons renouvelé les conventions tripartites avec
54 établissements, et injecté plus de 12 millions d’euros pour le recrutement. La DDASS
diffuse les bonnes pratiques professionnelles, par le développement de la formation
continue, à l’aide de crédits ponctuels spécifiques. Par ailleurs, nous contractualisons pour
une démarche qualité en EHPAD, en améliorant les premières conventions tripartites et en
demandant aux établissements de garantir le respect des droits des usagers. Nous
améliorons également les circuits d’information en cas de fait présumé de maltraitance, à
8
l’aide d’une centralisation du dispositif des plaintes à la DDASS, du protocole national de
signalement, enfin d’une convention de partenariat avec les parquets des TGI. Nous
réalisons des missions d’inspection et de contrôle sur plainte des usagers ou de
professionnels, dans le cadre du Programme national de prévention et de lutte contre la
maltraitance, ainsi qu’à l’aide des 90 % des contrôles inopinés. La bientraitance, c’est aussi
diffuser, impulser et contribuer à la réalisation de référentiels de qualité. Dans ce cadre, nous
avons élaboré une Charte d’adhésion des professionnels de santé médicaux, paramédicaux,
libéraux au projet de soins en EHPAD. Nous avons également adressé des questionnaires
d’autoévaluation aux établissements. En conclusion, nous menons trois actions en termes de
bientraitance : la prévention de la maltraitance institutionnelle, le respect des droits des
usagers et l’amélioration continue de la qualité.
Le point de vue de l’autorité judiciaire sur la maltraitance des personnes âgées
Vincent LESCLOUS, Procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance
de Valenciennes
L’intervention d’un procureur dans un sujet administratif témoigne de la complémentarité
entre l’action de l’Etat et celle de la justice. Pour un parquet, s’intéresser à la maltraitance ne
va pas de soi ; c’est pourtant indispensable. Notre action en la matière est très technique, ne
concerne que très peu de procédures et exige un gros investissement en termes de suivi, de
construction juridique, etc. Sur la base du succès de notre politique de logement, le parquet
s’est lancé dans la politique de lutte contre la maltraitance des personnes en institution.
En début d’année, nous avons signé une convention visant à rapprocher deux univers. Ainsi,
je parle d’infractions quand la DDASS parle de circulaires, de protocoles, etc. Nous devons
donc trouver un langage commun, calibrer les signalements acceptables pour l’autorité
judiciaire et rédigeables pour l’autorité administrative. Ensuite, la justice doit s’engager à un
traitement raisonnable de la matière qu’on lui envoie. Une fois le traitement judiciaire
terminé, il faut une retombée dans une logique de fertilisation croisée. La DDASS doit
récupérer les fruits de son action, la justice doit voir son effectivité améliorée.
S’agissant des infractions, c’est l’aspect maltraitance des personnes physiques individuelles
qui pose problème. Les infractions sont soit intentionnelles, soit involontaires. La convention
a également pour objet de capitaliser les expériences pour les faire redescendre devant les
acteurs de terrain, de façon à ce qu’un message de prévention se diffuse par l’intermédiaire
de l’administration d’Etat et que vous puissiez être exactement informés de ce qu’il se passe.
Les personnels de ces établissements sont exposés, parce que les malades sont difficiles à
traiter, les familles exigeantes et peuvent avoir des réactions parfois violentes. Malgré le côté
un peu marginal de cette action de politique pénale, nous sommes décidés à nous y
impliquer pleinement, même si notre population rencontre des difficultés importantes. J’ai
désigné un substitut référent à cet effet. Faites attention à ce que vous faites. Prévoyez votre
action en fonction des risques courus par votre personnel, vous-même, vos malades, de
façon à agir en professionnel responsable et à parer ce qui doit nécessairement l’être.
Le « 3977 » dans le Nord
Claude MURIGNIEUX, Président de l’Association Alm’Age
Alm’Age est à votre disposition, nous attendons au bout du fil, une personne en souffrance,
qui a besoin d’être accompagnée, aidée, pour faire cesser cette souffrance. Ce téléphone
est disponible en deux permanences physiques, le lundi matin et le jeudi après-midi,
assurées par des bénévoles. La permanence pour libérer la parole et signaler ces
9
maltraitances est libérée grâce au dispositif 3977 mis en place l’année dernière au plan
national. Ce tabou existe et survivra ; aussi, il n’est pas facile, pour une personne âgée
maltraitée, de le signaler. Le monde du silence règne majoritairement.
A 70, 80 %, les maltraitances se passent à domicile. Les territoires comptent beaucoup et
leur psychologie propre accentue les différences. Néanmoins, l’on constate un trio infernal
en la matière : l’argent, la maltraitance psychologique, enfin la maltraitance physique. Depuis
la mise en place de ce numéro national, la parole s’est libérée et l’action est plus efficace au
plan local, car la plateforme reçoit et recueille en permanence ces témoignages et ces
plaintes. Elle les transmet ensuite aux différents centres départementaux, comme la
structure Alm’Age. Aujourd’hui, les appels sont nettement plus nombreux, mais nous
pourrions les traiter mieux que nous ne le faisons, faute de disponibilité.
Le nombre d’appels a évolué de façon importante. En 2007, nous avions imaginé que nous
serions en mesure de maîtriser assez facilement ces appels. Nous avons été tout à fait
débordés, pour des raisons diverses : l’augmentation des appels qui correspondent à des
situations avérées ou tout au moins supposées ; apparition d’un nombre important d’appels
qui ne sont pas directement en rapport avec des situations de maltraitance avérée, mais
avec des situations de souffrance. Nous devenons un véritable observatoire de la souffrance
et depuis quelques semaines, nous avons pris l’initiative d’établir des liens beaucoup plus
étroits avec les autres numéros d’appel de la téléphonie sociale.
Il y a dix ans, le pic des personnes concernées se situait autour de 75 à 80 ans. Aujourd’hui,
il est entre 85 et 90 ans, ce qui correspond à l’évolution sociologique des résidents dans les
établissements et à l’évolution globale de la société âgée. Les enfants directs apparaissent
toujours comme des maltraitants supposés « préférentiels ». Mais, il faut faire preuve d’une
très grande prudence. Car, ceux qui sont accusés le plus facilement sont ceux qui
s’occupent également au quotidien des personnes âgées au domicile. En EHPAD, cette
maltraitance existe, essentiellement en termes de négligence dont il faut analyser les
causes, et les conséquences. Pour autant, Il ne faut pas voir de la maltraitance partout. D’où
l’importance de travailler en collaboration étroite, non seulement avec les services de l’Etat,
mais aussi avec les services des collectivités territoriales.
Valérie LÉTARD
Avec le 3977, nous avons rendu lisible et accessible une main tendue face à une situation
qui n’est parfois qu’un simple appel au secours d’une personne à un moment donné isolée,
perdue, en situation de détresse par rapport à sa propre réalité. Tous les cas sont loin d’être
des maltraitances avérées, physiques. Simplement, il était important d’avoir d’une part, des
campagnes d’information, de sensibilisation, essayer de briser le silence. Les violences
viennent souvent en premier lieu de la maison. Nous devons en tirer les leçons, le plus
d’éléments positifs possible de tout ce qu’il nous remonte par ce numéro. Je ne sais si cela
suscite des espoirs ; cela ouvre une porte vers des solutions. Nous avons la capacité
d’écouter, d’essayer d’informer, d’orienter, d’accompagner en fonction de chaque réalité.
Ensuite, les solutions à apporter à domicile et en établissement sont différentes. S’agissant
des établissements, mon souhait est la formation à tous les niveaux de compétences et la
capacité à travailler tous ensemble sur cette auto-évaluation, dans une construction partagée
d’une bonne évaluation des atouts et des difficultés d’un établissement, dans l’ensemble de
ses composantes, avec l’ensemble des acteurs administratifs, soignants et familles. Les
questionnaires d’évaluation sont au cœur du dispositif dans les établissements. Ils nous
permettront de travailler ensemble. Pour le domicile, je crois beaucoup à la formation des
aidants familiaux et au travail partenarial avec tous les services d’aide à domicile. Le 3977
n’est sans doute pas la panacée ; il est vraiment un moyen d’aller beaucoup plus loin et de
permettre une lisibilité et un accompagnement vers les bonnes démarches.
10
Echanges avec la salle
Bernadette LAURENTY, Directrice EHPAD, Bondues et Mouvaux
Madame la Ministre, l’EHPAD de Bondues est en cours d’extension, avec un accord
favorable du CROSMS et des autorités, mais sans moyen de fonctionnement. Ainsi, je n’ai
pas les effectifs nécessaires à son fonctionnement, ni correspondant au cahier des charges.
Pourtant, la loi de février 2005 prévoit l’égalité des chances, le maintien et la continuité de
l’accompagnement quel que soit l’âge de la personne.
Valérie LÉTARD
Cette question nous donne raison sur la partie médico-sociale du texte HPST qui nous
permet le décloisonnement entre le sanitaire et le médico-social. Sur la fongibilité
asymétrique et la possibilité de faire en sorte que les crédits du médico-social n’aillent jamais
vers le sanitaire, mais que les crédits du sanitaire viennent vers le médico-social, c’est là un
des premiers combats que nous avons gagné et qui permet, aujourd’hui, que ce soit sur la
question de l’autisme, des transformations du SLD en EHPAD, avec des ratios qui doivent
nous donner la capacité de transférer les moyens dans l’enveloppe médico-sociale à hauteur
du niveau de dépendance de chaque structure qui passera d’une situation à l’autre.
D’autre part, vous parliez des enveloppes, des autorisations CROSMS avec les
financements qui ne suivent pas. La logique des appels à projets que nous défendons, c’est
bien d’en finir avec les avis favorables donnés à des projets qui ne trouveront pas de
financement. Chaque autorisation qui sera donnée dans le cadre de cet appel à projet, aura
un financement ; puisque ces appels à projet correspondront, d’une part, aux besoins du
territoire en termes de titres de structure et d’autre part, à une enveloppe disponible. Avec
les commissions d’appels à projets, il y aura des possibilités d’expérimentation encadrées.
Ensuite, vous parlez de la barrière d’âge : cette question sera évoquée dans le cadre du
texte en préparation sur le Cinquième risque. Les ARS nous y aideront sans doute. Le volet
médico-social du texte HPST a deux mesures essentielles : cette fongibilité asymétrique et
les logiques d’appels à projets. Avec ces éléments, nous devrions résoudre une partie des
éléments évoqués et continuer à faire évoluer les moyens. 920 millions d’euros, bien sûr, ce
n’est jamais assez, mais 6,3 % d’augmentation budgétaire, peu de budgets de l’Etat ont
évolué de cette façon. Nous devons continuer. Nous comptons sur votre action.
Gérer un établissement ou un service d’accompagnement des personnes âgées ou
handicapées est certainement ce qu’il y a de plus complexe, de plus difficile. C’est bien pour
cela que nous engageons toutes ces démarches de diffusion, au sein de tous les
établissements et de tous les services, des bonnes pratiques, pour donner les moyens de la
formation, d’encadrement. C’est un ensemble de choses que nous sommes déterminés à
faire avancer, avec votre aide, parce que c’est vous qui, au quotidien, faites le plus difficile,
certainement, mais le plus formidable, humainement, en accompagnant ces personnes qui
méritent de l’être dans les meilleures conditions possible.
Nina MUTEBA, Directrice EHPAD, Neuville-en-Ferrain
On a parlé de la prise en charge individuelle des personnes atteintes de la maladie
d’Alzheimer. Dans mon établissement, 15 personnes sont concernées, mais je n’ai pas
d’unité Alzheimer formalisée. Après être passé en convention tripartite, j’espérais des
moyens supplémentaires pour les prendre en charge. Cela n’a pas été le cas.
Luc HOSSEPIED
Votre question est donc comment prendre en compte la réalité de la maladie d’Alzheimer,
dans une population âgée dont la maladie évolue ?
11
Pierre PRUEL
Il y a quelques années, le dispositif ne prenait pas suffisamment en compte la personne. Les
conventions tripartites ont permis d’augmenter l’encadrement et la qualité. La maladie
d’Alzheimer parmi d’autres a été prise en compte dans ce cadre. Sans doute encore il
demeure des améliorations à apporter. Mesurons d’abord le chemin parcouru… vous pouvez
cependant continuer à demander plus et souligner les particularités de certaines pathologies.
Nous examinons chaque demande et y répondons en fonction de nos moyens.
Christophe DOURNEL, Directeur EHPAD, Croix
En termes de politique, comment conçoit-on la problématique des personnes issues et
institutionnalisées déjà en psychiatrie, pour lesquelles, dès l’enfance, il y a pléthore de
structures, qui ensuite évoluent sur des structures plus spécifiques de l’adulte et qui, passé
le cap des 60 ans, se retrouvent dans des EHPAD dit généralistes ?
Pierre PRUEL
Vous posez une question très ancienne. On a connu auparavant les hospices, cela n’était
pas si satisfaisant. Les malades mentaux et handicapés très lourds restaient dans les
établissements et y demeuraient jusqu’à leur décès. Après, on a hésité entre deux
politiques : un principe selon lequel ces personnes atteignant 60 ans sont des personnes
comme d’autres, donc relèvent de maisons de retraite. Or, ces personnes n’ont pas les
caractéristiques habituelles. Alors, il faut inventer quelque chose. Peut-être des
établissements spécialisés ; peut-être aussi des sections dans des EHPAD, avec des prises
en charge spécifiques. Au niveau national, les choses évoluent petit à petit vers cela.
Luc HOSSEPIED
Monsieur Duportet, est-ce que la maltraitance entre résidents au sein d’une maison de
retraite vous arrive au niveau des appels ? Comment réagir alors ?
Bernard DUPORTET, Président de l’Association Française pour la Bientraitance des
Aînés et adultes Handicapés (AFBAH)
Au niveau des établissements, la maltraitance n’est pas à sens unique : des agents
maltraitent les résidents ; des résidents se maltraitent entre eux ; les agents parfois
également. Les personnes handicapées vieillissantes posent aujourd’hui un énorme
problème, mais je n’ai pas de piste précise à vous apporter. Car, l’on se trouve face à des
populations aux modes de réactivité différents. Il y a dix ans, on parlait de sections Alzheimer
à l’intérieur des maisons de retraite. Maintenant, on devrait faire des sections pour résidents
non-Alzheimer à l’intérieur de maisons de retraite. Je crains qu’il en soit de même demain,
pour les handicapés vieillissants et pour les malades psychiatriques vieillissants.
En Essonne, nous avons mis en place une politique départementale de sensibilisation et de
formation de l’aide à domicile et des EHPAD. Dans ce cadre, nous nous sommes rendu
compte que, pour la première fois, trois établissements ont eu chacun, trois familles qui ont
retiré les personnes âgées présentes depuis plusieurs années, faute de moyens matériels
pour payer la maison de retraite. Cette population qui va retourner au domicile pour simple
raison économique, risque de ne pas trouver un domicile performant et adapté. Or, il s’agit
de personnes très lourdement dépendantes. Ensuite, lors d’une séance de travail avec le
SAMU social, notre attention s’est portée sur l’extraordinaire croissance de la population
âgée dans la rue. Ce thème va nous interpeller très fort dans les prochaines années.
12

Documents pareils