`ai pas conscience

Transcription

`ai pas conscience
NDLP
Mme Guyot
Dm de philosophie, Tes et TS. Correction proposée.
Suis-je responsable de ce dont je n’ai pas conscience ?
On pense communément que la responsabilité d’un acte ou d’un évènement incombe à celui
qui le cause, ou qui est reconnu comme étant à son origine ; pourtant, on admet tout aussi
facilement que seul celui qui agit consciemment est coupable de l’acte, donc qu’il doit en répondre
et l’assumer, quelles que soient les conséquences à subir. On remarque alors que l’opinion
commune se contredit sans s’apercevoir que les deux options tenues ne sauraient être considérées
logiquement comme pouvant être systématiquement vraies simultanément.
En effet, il se peut que l’on soit à l’origine d’un acte sans l’avoir voulu, que l’on y participe
donc malgré soi. Dès lors n’avait-on pu, ni anticiper les conséquences de l’événement déclenché, ni
jauger les raisons pour lesquelles on a été déclencheur de l’acte, attendu que l’on n’a jamais eu
conscience que nos agissements pouvaient entraîner telle ou telle conséquence. Le seul fait de ne
pas avoir conscience des tenants et des aboutissants d’un acte disculperait donc celui qui agit. Mais
l’ignorance, la non-conscience suffisent-elles à déresponsabiliser ? N’est-ce pas susceptible de
devenir un prétexte pour ceux qui souhaitent échapper à toute contrainte ? Si la question de
l’énoncé pose donc problème, c’est avant tout moralement : puis-je refuser de répondre des actes
lorsque je ne les ai pas maîtrisés, parce que je n’en avais pas conscience ? Pourtant, n’ai-je pas le
devoir, en tant qu’auteur de ce que je fais, d’assumer ce dont je suis à l’origine : ne dois-je pas en
tant qu’homme, penser avant d’agir ? Mais, comment ce devoir peut-il s’appliquer aux hommes,
s’ils n’ont pas toujours la capacité physiologique, psychologique, ou sociale, de prendre la pleine
mesure de ce qu’ils sont, de qui ils sont et de ce qui les entoure ? S’opposent donc ici le devoir que
la Raison même semble imposer aux hommes et la capacité réelle des hommes à prendre
conscience.
Nous analyserons d’abord la thèse selon laquelle l’ignorance déresponsabiliserait les
hommes, dans la mesure où elle parait la plus évidente. Mais, il faudra vérifier ensuite si cette idée
est toujours valable, si elle ne peut pas servir d’excuse ou de prétexte pour refuser d’assumer ses
actes, et si elle ne contribue pas gravement à ôter la dignité de l’homme, consistant dans sa capacité
à bien penser. Nous nous demanderons alors si la véritable responsabilité des hommes n’est pas
précisément de chercher toujours à prendre conscience de ce qui peut leur échapper.
Il apparaît a priori que l’idée de tenir pour responsable un individu qui n’aurait pas
conscience d’un élément ou d’un événement est illogique : en effet, la non conscience peut désigner
trois états que peuvent connaître les hommes.
Etre inconscient c’est d’abord être endormi, ou évanoui. Celui qui est alors dans cet état ne
saurait être conçu comme le véritable auteur d’un acte, puisqu’il n’est pas même éveillé lorsqu’il le
cause, ou lorsque, plus généralement, l’événement a lieu. Ainsi, comment pourrais-je être tenu pour
responsable de la chute d’un tas de pommes sur lequel je m’écroule involontairement dans un
supermarché ? Etre responsable semble donc impliquer que l’on soit au moins éveillé lors de
l’événement produit, parce que pour avoir à en répondre, il faut en être l’auteur, donc celui qui le
décide, ce qui suppose d’avoir un minimum de présence et d’attention lorsque l’événement est
déclanché, de la part de celui qui le déclanche ; il faut dès lors distinguer le simple agent de
l’auteur, c’est-à-dire celui qui participe à l’acte malgré lui, qui est porté à agir sans l’avoir décidé, et
celui qui en décide réellement, après jugement. Or, pouvoir juger volontairement, c’est d’abord être
capable lors d’un choix, de se présenter à la conscience les différentes options que l’on peut repérer,
qui s’offrent à nous ; c’est ensuite être en mesure de peser les raisons et les conséquences qui nous
font opter pour un choix plutôt que pour un autre. C’est alors, suite à cette délibération rationnelle,
pouvoir décider, éclairé par la Raison, c’est-à-dire avec la pleine conscience des tenants et des
aboutissants qui nous ont mené à opter pour un choix plutôt qu’un autre. C’est enfin repérer
l’ensemble des moyens possibles et souhaitables pour appliquer notre décision, afin qu’elle puisse
être actualisée. Ainsi, la responsabilité semble intimement liée avec la conscience, puisque pour
pouvoir assumer ses choix (ses actions, ses décisions, en général), encore faut-il avoir décider
consciemment, donc après un jugement volontaire de ce que l’on allait choisir. Choisir de ne pas
agir, si cela est fait consciemment, peut alors être à juste titre reproché à un homme. L’inaction ne
le délivre pas systématiquement de ses responsabilités, lorsqu’elle est un choix conscient ; mais la
non conscience ou l’ignorance semble au contraire dédouaner les hommes.
D’autant, que la non conscience désigne non seulement l’état endormi d’un homme, mais
touche aussi à l’incapacité structurelle des hommes, en général, à tout connaître, et à se connaître.
En effet, les hommes possèdent naturellement une conscience immédiate de ce qui les entoure et qui
leur offre une possibilité de conscience d’eux-mêmes : c’est parce que, sentant la froideur d’une
poignée de porte dans leur main, ils reconnaissent une partie de leur environnement, et perçoivent
qu’ils ne sont pas cet environnement, qu’ils peuvent effectuer cet acte réflexif de distanciation avec
ce qui n’est pas eux, qu’ils peuvent donc dire : « je suis » et je suis autre chose que cette poignée de
porte que je touche. Mais cette capacité de conscience immédiate, si elle demeure la condition sine
qua non de la connaissance de l’environnement et de soi, est limitée par le fait que l’on ne possède
que cinq sens, qui ne sont ni infinis, ni indéfiniment susceptibles d’être développés. Ainsi, même si
nous en avons l’ardente volonté, nous ne pouvons physiologiquement prendre conscience de tout ce
qui constitue notre environnement : Leibniz l’a d’ailleurs bien illustré dans l’Essai de Théodicée
lorsqu’il expose sa théorie des « petites perceptions ». Il utilise l’exemple d’une vague dont on
entend le flux et le reflux. Mais cette perception est générale : on entend la somme des perceptions
infimes que produisent les gouttes d’eau, non le son de chaque goutte d’eau, qui pour nous, reste
inaudible ; l’on ne peut donc pas avoir conscience de tout. Mais c’est non une question de volonté
ici, mais seulement de possibilité physiologique ; or, notre corps, et les capacités de notre appareil
sensoriel ne dépendent pas de nous. Ce n’est donc pas une question d’efforts à fournir. Ce dont je
n’ai pas conscience ne serait alors pas de ma responsabilité et par conséquent ne saurait m’être
reproché. C’est d’ailleurs seulement suite à une réflexion approfondie que je peux déduire (et non
percevoir immédiatement) que certains éléments du réel m’échappent. Dès lors, si mon activité
quotidienne ne me pousse pas à cette réflexion, ou me l’interdit (si donc je ne suis ni scientifique ni
philosophe), je suis dans l’ignorance de ce qui m’échappe ; et cette ignorance est d’autant plus
réelle que j’ai plus spontanément l’impression que la conscience m’apporte une connaissance fiable
de ce qui m’entoure, d’autant que ce qu’elle me donne me permet de m’adapter à mon
environnement, et qu’à cet égard, les idées que je me fais des choses qui m’entourent sont efficaces
et utiles, quoi qu’elles puissent ne pas être vraies. La conscience que j’ai du monde et les
informations que j’en tire me plongent donc dans la croyance que je peux tout connaître, et qu’à cet
égard, je peux prendre des décisions tout à fait éclairées, dont je pourrais dés lors me sentir
responsable. Elle omet de nous éclairer sur le fait que certains éléments du réel nous échappent
nécessairement, comme nous échappent certains éléments de ce que nous sommes, paradoxalement.
Or, si l’on a une vision seulement partielle du réel, elle peut aussi fausser notre jugement sur le
réel : si je n’aperçois que la face d’un cube, je puis bien penser que c’est un simple carré sans
profondeur, de même que je peut bien croire qu’une tour octogonale est ronde si je la vois de loin.
Ainsi, on peut se demander si l’illusion, ou la croyance que fait naître la conscience quant à
sa possibilité de permettre à l’homme de tout connaître ne le plonge pas dans l’idée fausse qu’il doit
se rendre responsable de tout, puisque, possédant la conscience immédiate et réfléchie, il devrait
pouvoir tout connaître, et tout envisager : mais peut-on par exemple reprocher aux hommes grecs de
l’antiquité d’avoir considéré l’esclavage comme normal ? Doit-on le leur reprocher, quand même
les esclaves acceptaient leur sort ? Auraient-ils pu penser autrement ? Les sciences humaines
comme la sociologie établissent en effet l’existence d’une conscience collective, qui déterminerait
chaque conscience individuelle. Les hommes pensent donc selon l’esprit d’un temps, et sont
inconsciemment conditionnés à n’envisager que ce qui est conçu comme « normal » à leur époque
au sein de leur société. Ils ne peuvent alors être jugés responsables de ce qu’ils sont « programmés »
à penser, ou à tenir pour évident, dans la mesure où l’idée qu’ils sont libres de leurs choix, de leurs
décisions volontaires ne serait elle-même qu’une illusion, puisque lors de la délibérations qui
intervient lors du jugement volontaire, l’évaluation des choix serait biaisée par certains facteurs qui
influencent celui qui juge, et l’aveuglent. Ainsi, rien n’est plus difficile que de remettre en question
une pseudo évidence, dans la mesure où, se donnant comme claire et indubitable, elle s’impose à
nous sans que nous puissions nous en mettre à distance, et la critiquer. On peut alors aussi
considérer que nous ne sommes pas responsables de ce dont nous n’avons pas conscience
psychiquement ou psychologiquement, dans la mesure où nous ne connaissons pas, ou mal, ce qui
détermine notre conscience, et son fonctionnement. Et même lorsque, comme les sociologues, nous
avons conscience d’être soumis à l’esprit d’une époque, nous ne pouvons connaître si cette idée
n’est pas elle-même le produit d’une tendance de nos sociétés à penser de la sorte, si donc nous ne
sommes pas nous mêmes victimes encore une fois de cet esprit du temps que nous dénonçons
comme faussant la conscience et les systèmes de pensée de nos ancêtres.
Mais alors, si ma conscience est la victime d’une illusion, due à sa constitution même, et
dont, par définition, je n’ai pas toujours conscience, n’est-ce pas que l’homme, qui se croit distinct
des autres êtres vivants et reconnaît sa dignité dans sa capacité à penser bien, c’est-à-dire
rationnellement et raisonnablement, et dans sa résolution de suivre la voie du Bien, n’est en réalité
qu’un être qui s’invente une fausse responsabilité, et qui s’aveugle sur lui-même et sur sa soit disant
liberté ? Ne doit-on pas alors le déresponsabiliser ? Mais reconnaître à l’homme son
irresponsabilité, n’est-ce pas le réduire à un être inconsistant, incapable d’appliquer correctement et
justement ce qu’il croit à tort définir son essence : sa faculté de penser. Ce serait en effet devoir
admettre qu’il n’est jamais plus conscient et responsable qu’un enfant ou qu’un animal supérieur,
qu’il peut à ce titre être conçu comme un être dans l’inconscience. Mais cette idée semble choquer
notre intuition, attendu que l’on ne saurait imputer de responsabilité à un animal ou un jeune enfant,
tandis que cette idée nous vient spontanément lorsque c’est un homme qui agit.
II. L’homme doit être reconnu comme responsable, même de ce dont il n’a pas conscience,
du moment qu’interviennent des enjeux moraux dans les actes commis et leurs conséquences.
A. Définition d’inconscience et distinction inconscient/ inconscience.
Explication de cette distinction avec l’exemple de l’animal tuant, à comparer à celui d’un
homme qui tue à titre individuel ; conséquence de l’exemple : on compare ce que l’homme a
fait à ce qu’il aurait du faire et les causes de son acte peuvent expliquer l’acte mais en aucun
cas le justifier.
Donc : si on est non responsable de ce dont on n’a pas conscience, c’est seulement si l’on
n’avait aucune capacité d’en prendre conscience, car dés lors, notre intervention n’est que
fortuite, et intervient de façon concomitante parmi d’autres causes qui peuvent elles-mêmes
exister de façon contingente, donc non nécessaire.
Si la responsabilité peut s’appliquer en revanche à ce dont je n’ai pas conscience, c’est dans
la mesure où j’aurai pu et du établir un raisonnement rigoureux avant d’agir, et que je ne l’ai
pas fait.
B. l’inconscience : une circonstance aggravante.
Pénalement
Moralement : je nie ma qualité d’être capable de travailler ma pensée.
Pascal. La conscience se travaille et s’actualise.
C. Excuse et mauvaise foi. La fausse non conscience des choses. Solution de facilité.
Tr : Mais sommes-nous pour autant responsables de tout : le conscient et l’inconscient ? Ce
dont on est conscient et ce qui nous reste inconnu ? Et comment dans ce cas prendre conscience de
ce qui nous échappe, de ce qu’on ignore, si, par définition, je n’ai pas conscience de ce dont je n’ai
pas conscience?
III. Travailler sa pensée et chercher à élargir sa conscience de soi et du monde est un
devoir : je suis responsable non de ce dont je n’ai pas conscience, mais de ne pas chercher à me
rendre conscient de ce qui m’échappe.
A. Certains éléments n’ont pas à être pris en compte ( nombre de grain de sables sur une
plage (etc.…), parce qu’ils n’ont aucune importance. De même, je ne peux être
considérée comme responsable de manifestations spontanée d’une maladie, que je subis :
Définition de l’ignorance. Mais une fois que j’ai conscience des conséquences et des
retombées de quelque chose pour autrui, j’en deviens responsable : je suis responsable
de me soigner par exemple, et de préserver à ma mesure l’environnement.
B. C’est ma conscience qui peut alors me révéler mon devoir, du moment que j’accepte de
l’écouter : les sentiments de honte, la mauvaise conscience, le remord, comme
indicateur. Ma responsabilité consiste à écouter ma conscience : Alain ; c’est aussi ce qui
fait mon humanité. L’idée de se déresponsabiliser de ce dont on n’a pas conscience est
souvent utilisée à mauvais escient et ceux qui se cache derrière des circonstances
atténuantes utilisent un sophisme en opposant faussement l’idée de non conscience et
celle de sagesse comme accumulation de connaissance. Or, être sage = être moral et
responsable non parce que connaissant tout, mais parce qu’ayant conscience de ses
faiblesses et cherchant à y remédier : savoir qu’on ne sait pas suffit à ouvrir un espace de
réflexion nécessaire pour progresser
C. D’ailleurs les théories psychanalytiques (comme celle de Freud), qui défendent l’idée de
l’existence d’un inconscient, ne s’opposent pas à l’idée de responsabilité des actes. Si
Anna O. n’est pas responsable de ses symptômes, c’est à elle de faire des démarches
pour les résoudre, et c’est à cette seule condition qu’elle pourra les stopper. Je suis donc
responsable de ne pas chercher à prendre en charge ce dont j’ai conscience de ne pas
avoir conscient ( mes déterminations physiologiques, en travaillant les techniques et en
contribuant à l’avancé de la science –directement ou en finançant des recherches-, mes
déterminations historico-culturelles, et sociales, -en étudiant les autres mœurs pour les
comparer à ce que je tiens pour évident, par exemple-, mes déterminations psychiques,
en consultant, si je le crois nécessaire et bon pour moi comme pour autrui.
Ccl : Ma responsabilité est alors de devenir toujours davantage l’acteur de ma propre vie en
recherchant sagesse et maîtrise. C’est par cette maîtrise et cette prise en charge de moimême par moi-même que je peux me considéré comme un être digne, libre, conscient, et
éclairé sur ce qui, en moi, et hors de moi, peut m’échapper…