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Colmar série Des girolles bien fraîches bien cachées. Le cueilleur doit être observateur, les comestibles ne sont pas forcément à nos pieds. DIMANCHE 28 AOÛT 2011 24 Les mousserons sont des comestibles grégaires : on les trouve, très nombreux, dans les prés, formant des cercles parfaits. L’herbe, à leur contact, prend une couleur plus sombre. Sparassis crépu, chou-fleur ou crête-de-coq… D.R. Marcher malin La forêt du Schaentzel, paradis pour le cueilleur de champignons Notre série estivale de randonnées nous conduit aujourd’hui entre le HautKoenigsbourg et le Taennchel avec Emmanuel Perrin, cuisinier de métier passionné par les champignons. À partir du Schaentzel (580 m), carrefour fréquenté entre le Haut-Koenigsbourg, Thannenkirch, et la vallée de Saint-Marieaux-Mines, la balade peut mener jusqu’au Taennchel. Pour récolter des champignons, il suffit de s’enfoncer dans la forêt en direction du refuge des Amis de la Nature et de « zoner » dans une forêt de résineux et de feuillus. Accompagné de son fils, Jules, « 8 ans et demi », Emmanuel Perrin, notre guide du jour, estime qu’il n’y a « rien à cacher ; il faut être là avant les autres », c’est tout. Aucune réticence donc pour ce cuisinier de métier à dévoiler ses « coins » où la Nature se montre généreuse pour peu que l’on soit patient, observateur, chanceux et bon marcheur quand même. mandoline japonaise avant de l’assaisonner à l’huile de noix ». Quelques bouchons n’échapperont pas à la vigilance d’Emmanuel. « Il y a une légende qui dit : quand il a été vu, il ne pousse plus ». En continuant sur le chemin forestier, Emmanuel reconnaît une russule. « Celle-là, je ne la ramasse pas ; gustativement, elle n’a aucun intérêt ». « Sentir les choses » À peine sorti du véhicule, Emmanuel repère un bolet bai, « en bon état, parfait pour un velouté de champignons ». Les amanites tuemouches sont légions ; bon signe alors qu’il n’a pas plu depuis plusieurs jours ? « Il peut y avoir des cèpes ; mais en général, le cèpe sort en lune descendante », croit savoir ce cueilleur invétéré dont la technique consiste à « sentir les choses ». Et il les sent plutôt bien notre cuisinier qui, rapidement, cueille son premier cèpe de Bordeaux de la matinée. Il y en aura d’autres… C’est « en montant » que le repérage des comestibles s’effectue le plus aisément, et de préférence accompagné d’un « soleil du matin ». Tiens voilà des améthystes, impossibles de les confondre avec un faux ami, tant Noyau d’abricot FÉmotions à partager Emmanuel Perrin a lancé à Saint-Hippolyte son entreprise baptisée « Émotions culinaires » pour partager [sa] passion », dans la cuisine des autres ; il s’agit d’« un service de chef à domicile ». Les tarifs s’échelonnent de 40 à 70€. Différentes formules ont été élaborées dont la formule « surprise » : il intervient à domicile « avec un panier « garni de plantes, de fleurs ou de champignons » pour réaliser « ensemble une ou plusieurs recettes ». Pour les enfants, ce cuisinier compétent et créatif utilise les bases élémentaires que sont le sucré et le salé, par exemple. Emmanuel Perrin vient de récolter un cèpe de Bordeaux à quelques encablures du Schaentzel ; bel exemplaire bien frais… leur couleur violette (jeune) est caractéristique. « J’utilise juste le chapeau », le pied étant sans intérêt culinaire. Dans une poêlée, l’améthyste est certes discrète mais loin d’être ridicule… Voilà un autre cèpe sous un rocher de grès ou de granit, on ne sait plus, bien ancré dans un sol sablonneux. « Il suffit de le taper pour jauger sa fraîcheur. On peut le déguster cru. Moi, je le passe à la La girolle se montre généreuse ce jour-là, plusieurs dizaines d’exemplaires sont arrachées à leur lit naturel. « Sentez ! Ce sont les arômes de noyau d’abricot ». Voilà, changeons de secteur… La mécanique du cueilleur est simple : l’intuition lui dicte d’aller voir ailleurs. Et bingo ! Des feuillus, une clairière et quelques résineux dissimulent quelques familles d’excellents comestibles comme ce sparassis crépu bien frais qui « déglacé au vin blanc et mouillé à la crème » se révèle goûteux ; ce champignon tout droit sorti des fonds marins est difficile à nettoyer mais l’exercice vaut la chandelle. « À chaque fois, c’est magique. Je prends en photo chacun des champignons que je rencontre. J’approfondis ; j’essaie d’en apprendre le plus possible. C’est le but dans la vie, non ? ». La balade se poursuit et aucun comestible n’échappe à la perspicacité de ce chasseur-cueilleur des temps modernes. « C’est la nature qui décide. On n’a pas le choix. Et s’il n’y en a pas, tant pis ». Textes et photos Jean Daniel Kientz Pleurotes à l’état sauvage : arôme anisé garanti… Une amanite rougissante, vineuse ou Golmotte, un bon comestible ! De la forêt à la cuisine Les champignons peuvent constituer une bonne base pour un dessert. La preuve ! En cas de récolte abondante, la conservation est bien pratique pour cuisiner cèpes et autres mousserons en hiver… Le panier de l’authentique cueilleur. Emmanuel Perrin, notre guide, fait ses premières armes auprès de Pierre Jourdan, à Saint-Lattier, dans la Drôme. Puis, il acquiert davantage d’expérience dans les cuisines de l’Auberge de l’Ill et celle du père Floranc, à Wettolsheim. Régis Marcon, chef de l’’Auberge des Cimes à SaintBonnet-le-Froid, en Haute-Loire, sera son mentor. En 2005, il devient le chef du Parc à Saint-Hippolyte, établissement qu’il quitte en 2011. Voici la recette qu’il propose : Cèpe en dessert Quelques exemplaires de pieds de mouton. Dans une clairière, il y a des mousserons mais aussi du serpolet (Thymus serpyllum), une variété de thym sauvage… Il s’agit d’une sphère meringuée crème glacée aux cèpes, sparassis crépu et trompette-de-la-mort confite, trait de sève de pin. La veille, faire une meringue avec trois blancs d’œufs et 100 g de sucre en poudre bien ferme ; l’étaler avec une cuillère dans un moule en silicone en forme de demi-sphère puis cuire au four Une sphère meringuée crème glacée aux cèpes… pendant trois heures à 80 degrés ; ensuite confire 100 g de trompette et 100 g de sparassis avec 80 g de sucre et 160 g d’eau pendant une heure à petit feu. Préparer 20 g de cacao additionnés de 20 g de poudre de cèpes secs ; en mélanger une bonne partie avec un quart de litre de crème, la mettre dans un siphon avec une cartouche de gaz. La veille aussi : confectionner une crème anglaise dans laquelle il faut incorporer de la poudre de cèpes, de l’huile de cèpes grillée à votre convenance au niveau du goût puis la turbiner pour en faire une glace. D.R. Pour la sève de pin, il faut des bourgeons de sapin pour en faire un sirop avec eau plus sucre en y ajoutant du jus d’orange ; réduire le tout sur le gaz moyen jusqu’à obtenir l’état d’un sirop. Pour le dressage : tailler de fines lamelles de figues fraîches dans la demi-sphère du dessous incorporer les champignons confits ajouter par-dessus la glace aux cèpes, puis la chantilly chocolatcèpe. Recouvrir de l’autre demisphère et saupoudrer de cacao-cèpe ; embellir l’assiette avec la sève de pin.