Comment évaluer les coûts et l`utilité des dispositifs médicaux?
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Comment évaluer les coûts et l`utilité des dispositifs médicaux?
Document de prise de position Comment évaluer les coûts et l’utilité des dispositifs médicaux? Position de la FASMED au sujet du HTA (Health Technology Assessment) et de la procédure d’examen de l’EAE en Suisse Berne, le 11.7.2012 Situation de départ Compte tenu de la hausse des coûts du système de santé, la question de l’évaluation des coûts et de l’utilité des prestations médicales (en particulier des nouvelles prestations) a pris une grande importance. Au niveau international, c’est la désignation «Health Technology Assessment» qui s’est imposée comme le terme générique servant à qualifier l’évaluation du rapport coût/utilité des procédés médicaux. Dans de nombreux pays, des «instituts HTA» ont été fondés; ces entités évaluent les procédés médicaux et émettent des recommandations ou, selon le pays, décident si ces procédés seront remboursés. Même si ces instituts HTA ont des objectifs similaires, ils se distinguent largement de par leur mode de travail et de par leurs structures de décisions. Des exemples connus sont le NICE en Grande-Bretagne1, la Haute Autorité de Santé (HAS) en France, le KCI en Belgique, l’IQWIG en Allemagne, le Ludwig-Boltzmann-Institut en Autriche ou le MSAC en Australie. En Suisse également, à plusieurs niveaux, la nécessité d’une stratégie de HTA nationale et même d’une agence HTA nationale est mise en avant. Le Canton de Zurich a démarré, au printemps 2008, sous le nom «Medical Board», une sorte d’institut HTA cantonal qui a déjà réalisé plusieurs HTA et émis des recommandations à ce sujet. Parmi les organismes responsables, la Conférence des directeurs et directrices de la santé (CDS), la Fédération des médecins suisses (FMH), l’Académie Suisse des Sciences Médicales (ASSM) et le Gouvernement de la Principauté du Liechtenstein (RFL) sont venus s’ajouter. De surcroît, santésuisse et Interpharma ont lancé un projet national «SwissHTA», dont l’objectif est d’obtenir un consensus national sur le thème du HTA. Un document de consensus d’Interpharma, santésuisse, de la FMH et de l’ASSM a été publié2. De plus, le Parlement a adressé au Conseil fédéral, en 2011, trois motions exigeant d’une part un institut national d’assurance qualité et d’autre part une agence HTA nationale3. 1 NICE n’est toutefois pas un institut HTA au sens propre, mais fait fréquemment appel, pour la rédaction de rapports HTA et de guidelines, à la collaboration d’instituts indépendants. 2 Le document de consensus peut être téléchargé sur le site web de SwissHTA: http://www.swisshta.ch/ 3 La motion n° 10.3015 de la commission CSSS-N «Pour une organisation nationale chargée de garantir la qualité du système de santé» et les deux motions du CN Ignazio Cassis n° 10.3450 «Pour une organisation indépendante nationale garantissant la qualité» et n° 10.3451 «Pour une véritable agence nationale de Health Technology Assessment». 1 Le Health Technology Assessment n’est cependant pas une nouveauté en Suisse, étant donné que l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) connaît depuis de nombreuses années une procédure d’examen de l’EAE dans le cadre de laquelle les prestations médicales nouvelles et controversées sont soumises à un examen. On y examine si ces prestations correspondent aux exigences ancrées dans la loi sur l’assurance-maladie. Les prestations prises en charge par l’assurance obligatoire des soins (AOS) doivent être efficaces, adéquates et économiques (art. 32 LaMal). Cette procédure d’examen correspond en principe à une procédure HTA telle qu’on la connaît dans d’autres pays. La fédération du secteur de la technologie médicale FASMED a formulé, sur la base de ses analyses et en tenant compte de ses expériences à l’étranger, des exigences et positions au sujet du HTA. Les exigences 1 à 4 portent sur les principes, l’exigence 5 sur les structures et les exigences 6 à 10 sur le déroulement d’une procédure d’évaluation HTA optimale en Suisse. Que signifie HTA? Les trois lettres HTA signifient «Health Technology Assessment». Le Réseau international des agences HTA INAHTA définit un HTA comme suit: «Evaluation systématique des propriétés, de l’effet et/ou de l’impact de technologies de santé. Il peut couvrir aussi bien les conséquences voulues directes d’une technologie que les conséquences non voulues indirectes. L’objectif principal est la prise de décisions politiques au niveau du système de santé. Les HTA sont menés à bien par un groupe interdisciplinaire qui se sert d’instruments analytiques clairs à l’aide de différentes méthodes.» Un HTA peut être mené à bien aussi bien pour les nouvelles technologies que pour les technologies éprouvées, éventuellement désuètes, qui pourraient être remplacées par une technologie plus récente. Un HTA peut servir de base aux décisions de remboursement émanant d’autorités et d’assureurs de même qu’aux décisions d’application d’hôpitaux et de médecins. 2 HTA: positions et exigences de la FASMED 1. Maintien du principe de confiance 2. En cas de controverse, preuve de l’EAE en tant que dette portable des fabricants et prestataires 3. Tenir compte des spécificités de la technologie médicale dans le processus HTA 4. Rechercher une harmonisation internationale 5. Avoir recours au savoir-faire existant et ne pas créer de nouvelles structures (de monopoles) dans le domaine du HTA 6. Processus allégés, fiables et transparents 7. Implication de toutes les parties prenantes pertinentes 8. Contestabilité des décisions / droit de recours 9. Intégration rapide dans les structures tarifaires (p. ex. SwissDRG et TARMED) 10. L’industrie de la technologie médicale souhaite être impliquée Note de synthèse En matière de prestations médicales, le législateur part du principe que les critères d’EAE sont remplis, à moins que ces prestations soient formellement déclarées comme «controversées». Du fait de ce principe de confiance, en Suisse, de nouvelles thérapies sont introduites relativement vite: revenir sur ce principe pourrait avoir des conséquences extrêmement négatives aussi bien pour la qualité des soins apportés aux patients que pour le pôle de recherche Suisse. Si une prestation est déclarée «controversée» par la Confédération, la mission du prestataire ou du fabricant est de compiler l’évidence disponible dans un dossier de demande correspondant au modèle de l’OFSP: en dépit de déficits en termes de transparence et de déroulements de processus, le principe de la dette portable est maintenu. Une procédure HTA a vocation à prendre en compte les particularités des dispositifs de la technologie médicale ainsi que leurs processus spécifiques d’agrément et de remboursement lors de l’accès au marché. De par leur nature et leur fonctionnalité, les dispositifs médicaux sont à distinguer clairement des médicaments et ne peuvent donc pas être évalués selon les mêmes méthodes que ceux-ci. L’harmonisation des procédures HTA et des demandes d’évidence est possible tout au moins partiellement: la Suisse doit continuer à jouer un rôle actif au sein des groupes de travail de l’EUnetHTA. Une démarche en solitaire de la Suisse dans ce domaine pourrait mettre en péril l’accès au marché de nombreux dispositifs médicaux et donc porter préjudice à la compétitivité du système de santé suisse. 3 Une institution spécialement créée pour la rédaction de rapports HTA est considérée comme ni nécessaire, ni susceptible de conduire à l’objectif. Il semble plus prometteur de définir les missions de chacun des acteurs et de les séparer en termes de procédure. La Confédération peut mettre en place un réseau d’instituts issus d’universités / hautes écoles supérieures suisses recevant, au choix, le mandat de prestation de l’OFSP consistant dans l’examen du dossier de demande. Le processus HTA, comprenant la sélection des thèmes, les critères d’évaluation, le calendrier du déroulement, la prise en compte du niveau d’évidence, le développement de recommandations, doit intervenir de manière systématique, dans les délais impartis, avec transparence et selon des directives claires (guidelines). L’évaluation («assessment») doit être réalisée par un organe d’experts indépendant et selon un déroulement de procédure clairement réglé. Dans la procédure d’examen de l’EAE suisse, le prestataire (fabricant ou société spécialisée) est principalement impliqué par la création du dossier de demande. Pour une pleine implication de toutes les parties prenantes pertinentes, il convient toutefois de songer à donner un accès public aux assessments via l’OFSP et à permettre aux parties prenantes de prendre position. Le demandeur doit avoir la possibilité de contester les décisions de remboursement (droit de recours). Les recours doivent être traités par un organe indépendant des institutions impliquées dans la procédure d’examen de l’EAE. Une intégration rapide dans les structures tarifaires resp. d’éventuels financements intermédiaires sont nécessaires. Pour l’évaluation des critères d’EAE, on exige généralement des données cliniques correspondant à plusieurs périodes d’observation: dans l’intervalle, il est déterminant que la prestation soit remboursable afin que l’accès à des méthodes de la technologie médicale nouvelles et prometteuses ne soit pas bloqué pour les patients. De même, il convient également de donner au fabricant la possibilité de générer l’évidence clinique nécessaire. En cas de conceptualisation éventuelle d’une stratégie HTA / agence HTA nationale, l’industrie de la technologie médicale, branche directement concernée, tout comme les prestataires au sens de la LaMal, doit être intégrée activement à l’examen des conditions cadres ainsi qu’à une éventuelle planification et réalisation. 4 1. Maintien du principe de confiance Conformément à la loi sur l’assurance-maladie (LaMal), les médecins sont tenus de veiller, lors de l’apport de prestations médicales, à ce que les critères de l’efficacité, de l’adéquation et de l’économicité (critères EAE) soient remplis. La législateur a donc résolument ancré le «principe de confiance» pour les prestations médicales à l’article 33 al. 1 LaMal. En matière de prestations médicales, le législateur part du principe que les critères d’EAE sont remplis, à moins que ces prestations soient formellement déclarées comme «controversées». Ce principe permet qu’en Suisse, de nouvelles thérapies puissent être introduites relativement vite. Revenir sur ce principe pourrait avoir des conséquences extrêmement négatives aussi bien pour la qualité des soins apportés aux patients que pour le pôle de recherche Suisse. Le préalable à la viabilité commerciale d’un dispositif médical est un marquage CE. Celui-ci se fonde sur une procédure d’évaluation de la conformité (mettant l’accent sur la sécurité et la performance) passée avec succès par le fabricant. Si toutefois une caisse-maladie (ou un prestataire) est d’avis qu’une prestation médicale nouvelle (voire également déjà établie) n’est pas (ou plus) conformes aux critères EAE, il peut enjoindre l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) de réaliser une «clarification du caractère controversé». Si une telle procédure est ouverte par l’OFSP, le «prestataire» (dans le cas de dispositifs médicaux, il s’agit généralement des fabricants ainsi que de la société technique correspondante) est dans l’obligation de déposer un «dossier de demande» officiel suivant les prescriptions de l’OFSP. Sinon, la prestation est retirée du catalogue de prestations (OPAS Annexe 1). Ce dossier de demande est examiné, lors d’une première étape, par la section «Prestations médicales» de l’OFSP et complété par une évaluation propre (que l’on peut qualifier, dans la langue technique du HTA, d’«assessment»). L’OFSP transmet le dossier de demande muni de son propre «assessment» à la Commission fédérale des prestations et des principes (CFPP) consultative. La CFPP formule une recommandation de prise en charge des coûts par l’assurance obligatoire des soins (AOS) (dans la langue spécialisée du HTA «appraisal»). Cette recommandation est adressée au chef du DFI (Département fédéral de l’intérieur), lequel prend la décision définitive (dans la langue spécialisée du HTA «decision»). La décision définitive est consignée dans l’Ordonnance sur les prestations de l’assurance des soins (OPAS Annexe 1). Cette approche permet une répartition des rôles relativement claire et des structures allégées au niveau des autorités. L’OFSP décrit cinq variantes de décision quant au remboursement des coûts: a) Obligation de prestation oui Paiement par l’AOS sans préalables à la prestation b) Obligation de prestation oui, avec préalables à la prestation Paiement par l’AOS avec préalables à la prestation (p. ex. dans certaines indications, restrictions de quantité, catégories de prestataires, etc.) c) Obligation oui, avec fixation d’un délai et consigne d’évaluation Paiement à durée déterminée par l’AOS avec consigne d’évaluation des critères EAE b) et c) en combinaison a) Obligation de prestation non Pas de paiement par l’AOS 5 Sources: «Opérationnalisation des critères d’efficacité, d’adéquation et d’économicité», document de travail 2.0 du 21 juillet 2011 (version provisoire), publié sur le site web de l’OFSP et Annexe 1 de l’Ordonnance du DFI sur les prestations dans l’assurance obligatoire des soins (RS 832.112.31) 2. En cas de controverse, preuve de l’EAE en tant que dette portable des fabricants et prestataires Si une déclaration est déclarée «controversée» par la Confédération, la tâche du prestataire ou, dans le cas d’un dispositif médical, celle du fabricant et des utilisateurs, est d’apporter la preuve qu’une prestation est efficace, adéquate et économique (art. 32 LaMal). Les prestataires doivent compiler l’évidence disponible dans un dossier de demande sur le modèle de l’OFSP. Le dossier de demande correspond pour une large part à un rapport HTA. Outre la description de la prestation nouvelle ou controversée, une analyse systématique de la bibliographie doit être créée et les résultats doivent être comparés avec le traitement standard établi dans la pratique médicale (comparateur). En plus de l’évaluation de l’utilité, les coûts subséquents sur plusieurs années sont calculés, et les éventuelles réductions des coûts par rapport au comparateur sont calculées. Idéalement, la nouvelle prestation doit pouvoir être apportée à moindre coût que le comparateur. La Commission de gestion du Conseil national a vérifié en 2008 la procédure d’examen de l’EAE de la Confédération et constaté, sur plusieurs points, des défauts considérables en termes de transparence et de déroulements de processus4. Cependant, la Commission de gestion, tout comme la FASMED, recommande de s’en tenir aux deux principes - le principe de confiance et le principe de la dette portable. 3. Tenir compte des spécificités de la technologie médicale dans le processus HTA Une procédure HTA a vocation à prendre en compte les particularités des dispositifs de la technologie médicale ainsi que leurs processus spécifiques d’agrément et de remboursement lors de l’accès au marché. De par leur nature et leur fonctionnalité, les dispositifs médicaux sont à distinguer clairement des médicaments 5 et ne peuvent donc pas être évalués selon les mêmes méthodes que ceux-ci6. Tenir compte de l’hétérogénéité des dispositifs médicaux La panoplie des dispositifs médicaux est extrêmement large et va des biens d’équipement (p. ex. instruments d’échographie), en passant par les implants (p. ex. piles cardiaques) et les appareils médicaux (p. ex. inhalateurs), jusqu’aux consommables (p. ex. pansements). Ces exemples montrent qu’il existe de grandes différences entre les dispositifs médicaux et qu’en conséquence, tous ne peuvent pas être évalués selon les mêmes méthodes. Etudes cliniques randomisées souvent inadéquates Les recommandations de HTA doivent se baser sur la meilleure évidence disponible possible quant à la question faisant l’objet de la discussion. Les études randomisées sont certes les moyens les plus pertinents pour évaluer l’efficacité comparative, cependant elles constituent encore un cadre artificiel. 4 Détermination et contrôle des prestations médicales dans l’assurance obligatoire des soins; rapport du Contrôle parlementaire de l’administration à l’attention de la Commission de gestion du Conseil national du 21 août 2008 5 Un médicament agit sur le mode pharmacologique, immunologique ou métabolique et entraîne une interaction directe avec l’organisme. L’utilisation d’un dispositif médical, en revanche, se traduit par un effet physique par lequel le dispositif médical assume p. ex. une fonction mécanique, forme une barrière physique ou sert à remplacer ou à assister des organes ou des fonctions corporelles. 6 Voir p. ex.: Drummond M, Griffin A. and Tarricone R.: «Economic Evaluation for Devices and Drugs - Same or Different?», PhD3, article d’abord publié en ligne: 19 NOV 2008; DOI: 10.1111/j.1524-4733.2008.00476_1.x. 6 En particulier dans le cas d’interventions chirurgicales, des restrictions éthiques et pratiques peuvent intervenir. Ainsi, bien souvent, en chirurgie, la détermination d’un comparateur adéquat pose problème. Bon nombre d’études contrôlées randomisées en chirurgie pâtissent d’importantes difficultés de recrutement car les patients ne veulent pas se soumettre à une intervention fictive ou à une alternative chirurgicale qu’ils considèrent comme une méthode plus ancienne et moins performante. Une étude en double aveugle n’est la plupart du temps pas possible en ce qui concerne le chirurgien et, en ce qui concerne le patient, seulement sous certaines conditions. La place tenue par ces problématiques dépend aussi bien de la technologie que de l’indication envisagée. Pour une évaluation des critères EAE, il ne faut donc pas seulement se fonder sur des études contrôlées randomisées, mais également tenir compte d’autres méthodes de génération d’évidence (comme p. ex. études contrôlées non randomisées, études de cohortes, études cas-contrôle, données de registres, etc.). Des études d’observation comparatives et non comparatives bien structurées contribuent à l’évaluation de l’efficacité selon les points de vue des aspects cliniques mais aussi des coûts et doivent être prises compte. Avec l’établissement de registres d’implants nationaux et internationaux, on dispose de données de prestations supplémentaires qui doivent être utilisées dans une procédure HTA. Le succès clinique dépend de nombreux facteurs A la différence des médicaments, l’effet d’un dispositif médical ne peut guère être mesuré de façon isolée, mais le succès clinique d’une nouvelle procédure de technologie médicale dépend généralement de l’alliance d’une multitude de facteurs. L’habileté et l’expérience du médecin (courbe d’apprentissage), les préalables infrastructurels et organisationnels de l’hôpital, la technique d’opération choisie, les caractéristiques des patients ainsi que d’autres facteurs peuvent avoir une grande influence sur le résultat clinique. Cycle de vie court des dispositifs médicaux Les fabricants de technologie médicale réalisent environ un tiers du chiffre d’affaires avec des produits âgés de trois ans au plus. Contrairement aux médicaments, les dispositifs médicaux ne peuvent généralement pas être entièrement brevetés. A peine une technologie est-elle arrivée sur le marché qu’elle est suivie de près par des produits qui l’imitent. Les prix chutent donc relativement vite. Le problème des monopolistes et du manque d’élasticité des prix qui en résulte, tel qu’on le connaît dans le secteur pharmaceutique, n’existe guère dans le secteur de la technologie médicale. Ce système garantit un bon fonctionnement de la concurrence dans la branche de la technologie médicale. En même temps, il a pour conséquence que les fabricants ne sont pas en mesure de financer des études à grande échelle comme c’est le cas pour les fabricants de médicaments. L’évaluation des coûts et de l’utilité doit impérativement tenir compte de cette différence. En même temps, les fabricants de dispositifs médicaux sont souvent confrontés au problème qu’en raison de la courbe d’apprentissage et des modifications continuelles des processus et des produits, l’efficacité au quotidien ne peut être évaluée de manière définitive que lorsque le personnel médical a adapté son activité à l’application des nouvelles technologies (ex.: laparoscopie resp. chirurgie du trou de serrure). En outre, il convient de noter qu’une procédure HTA constitue une analyse ponctuelle qui doit être régulièrement actualisée à différents points du cycle de vie d’une technologie et doit tenir compte de l’évidence nouvellement générée. C’est là un grand défi pour l’utilisation du HTA pour les décisions de remboursement. 7 4. Rechercher une harmonisation internationale L’harmonisation des procédures HTA et des demandes d’évidence est possible tout au moins partiellement. Il existe déjà un niveau considérable de conformité entre les organes HTA de différents pays eu égard à la vérification systématique de l’évidence ainsi qu’à l’uniformisation de principes de processus et de méthodes importants. Les exigences de HTA nationales doivent être formulées clairement dans des guidelines et pouvoir être adaptées à l’état des connaissances. Il s’agit également ainsi de simplifier l’utilisation de rapports HTA émanant d’autres agences. Pour éviter les doubles emplois, il s’agit de définir les analyses à réaliser au niveau national et celles qui peuvent être reprises comme d’application générale suite à l’expérience d’autres pays. Dans ce contexte, la FASMED demande une stratégie claire de la Confédération. La FASMED juge très important que la Suisse continue à jouer un rôle actif au sein des groupes de travail de l’EUnetHTA. Une démarche en solitaire de la Suisse dans ce domaine pourrait mettre en péril l’accès au marché de nombreux dispositifs médicaux et donc porter préjudice à la compétitivité du système de santé suisse. 5. Avoir recours au savoir-faire existant et ne pas créer de nouvelles structures (de monopoles) dans le domaine du HTA En 2011, le Parlement a adressé au Conseil fédéral une motion exigeant explicitement la création d’une agence HTA nationale et deux motions exigeant la création d’un institut national d’assurance qualité (voir note de bas de page 3). La FASMED considère une institution spécialement créée pour la rédaction de rapports HTA comme ni nécessaire, ni susceptible de conduire à l’objectif. Il semble plus prometteur, pour la FASMED, de définir les missions de chacun des acteurs et de les séparer en termes de procédure. La Confédération peut mettre en place un réseau d’instituts issus d’universités / hautes écoles supérieures suisses recevant, au choix, le mandat de prestation de l’OFSP consistant à examiner les dossiers de demande déposés par les prestataires et fabricants selon des guidelines harmonisés et à rédiger un rapport d’assessment. L’OFSP peut soumettre ces mandats et sélectionner, parmi les différents instituts, celui qui est le plus adéquat. Une procédure semblable a été adoptée en Grande-Bretagne, où NICE a mandaté des instituts de recherche pour une large part indépendants afin de créer des Health Technology Assessments. Les fabricants peuvent soumettre leur évidence et également prendre position au sujet du rapport d’assessment avant qu’une décision ne soit prise. 6. Processus allégés, fiables et transparents Si des procédures HTA sont systématiquement exigées pour chaque nouvelle procédure de technologie médicale avant toute décision au sujet des demandes de ristourne, ceci peut représenter la fin d’une multitude de nouvelles technologies et procédures et constituer une menace sérieuse pour la capacité d’innovation du système de santé suisse. Un remboursement pour les prestations médicales en cours d’évaluation devrait toujours être possible. Décisions motivées dans les délais impartis, avec transparence et plausibilité Le processus HTA, comprenant la sélection des thèmes, les critères d’évaluation, le calendrier du déroulement, la prise en compte du niveau d’évidence, le développement de recommandations, doit intervenir de manière systématique, dans les délais impartis, avec transparence et selon des directives claires (guidelines), ce qui est déjà en partie le cas aujourd’hui. L’évaluation («assessment») doit être réalisée par un organe d’experts indépendant et selon un déroulement de procédure clairement réglé, afin que la transparence, la qualité et la participation de toutes les parties prenantes pertinentes soient assurées. 8 Limiter les charges bureaucratiques Les charges bureaucratiques doivent être limitées et les délais tenus afin que la capacité d’innovation et la compétitivité du système de santé suisse soient maintenues. Permettre aux patients un accès rapide à des produits innovants La Suisse a créé un environnement relativement favorable aux innovations. Une nouvelle technologie médicale peut être évaluée dans des délais définis avec les demandeurs et, ce faisant, la courbe d’apprentissage des utilisateurs (p. ex. les médecins) peut être prise en compte. Dans ce contexte, il arrive fréquemment que l’on recueille des données sur le nouveau traitement afin d’attester l’efficacité en conditions quotidiennes («effectiveness») jusqu’à ce qu’il y ait suffisamment d’évidence permettant de prendre une décision fondée pour ou contre une technologie. Cette approche favorable à l’innovation doit impérativement être maintenue. 7. Implication de toutes les parties prenantes pertinentes Une caractéristique décisive d’un processus HTA mené à bien selon les normes internationales est l’implication de toutes les parties prenantes pertinentes. C’est le cas pour de nombreuses institutions HTA reconnues à l’échelle internationale, comme par exemple pour NICE en Grande-Bretagne et MSAC en Australie. Les fabricants, sociétés techniques médicales, organisations de patients et unités d’imputation des coûts y ont la possibilité, au préalable de la réalisation du HTA, de remettre des études et des évaluations, ainsi que de prendre position une fois le rapport HTA établi. Dans la procédure d’examen de l’EAE suisse, le prestataire (fabricant ou société spécialisée) est principalement impliqué par la création du dossier de demande. Pour une pleine implication de toutes les parties prenantes pertinentes, il convient toutefois de songer à donner un accès public aux assessments via l’OFSP et à permettre aux parties prenantes de prendre position. Dans le cas du Medical Board, en revanche, du point de vue de la FASMED, on ne donne actuellement pas encore la possibilité aux parties prenantes pertinentes, selon des règles et uniformes et transparentes, de prendre position au préalable ou à l’issue d’un rapport HTA. Seuls deux à trois «experts techniques» externes sont sélectionnés en vue d’une prise de position. La manière dont ces personnes sont sélectionnées n’est en revanche pas établie avec transparence. 8. Contestabilité des décisions (droit de recours) Le demandeur doit avoir la possibilité de contester les décisions de remboursement. Les recours doivent être traités par un organe indépendant des institutions impliquées dans la procédure d’examen de l’EAE (OFSP, CFPP et DFI). 9. Intégration rapide dans les structures tarifaires (p. ex. SwissDRG et TARMED) Etant donné que pour l’évaluation des critères d’EAE, on exige généralement des données cliniques correspondant à plusieurs périodes d’observation, il faut souvent très longtemps pour qu’une décision définitive au sujet de l’intégration ou de l’exclusion du catalogue de prestations d’une nouvelle prestation médicale puisse être prise. Dans l’intervalle, il est déterminant que la prestation soit remboursable afin que l’accès à des méthodes de la technologie médicale nouvelles et prometteuses ne soit pas bloqué pour les patients. De même, il convient également de donner au fabricant la possibilité de générer l’évidence clinique nécessaire. Aujourd’hui, le DFI n’octroie cette possibilité qu’aux prestations qui se trouvent en cours d’évaluation (voir Annexe 1 OPAS). De plus, le lien important entre catalogue de prestations et tarification fait aujourd’hui défaut. 9 Financement intermédiaire au sein du SwissDRG nécessaire Dans le tarif réservé aux prestations hospitalières (le nouveau système de forfaits par cas «SwissDRG»), il faut, selon les propres déclarations de SwissDRG SA, quatre à cinq ans pour qu’une nouvelle prestation puisse être représentée par un tarif dans le catalogue SwissDRG7. C’est une période de temps beaucoup trop longue. Pour les nouvelles prestations de technologie médicale qui ne sont pas représentées dans le catalogue de forfaits par cas et pour lesquelles l’examen des critères EAE n’a pas encore eu lieu, les partenaires tarifaires doivent donc rechercher activement un financement intermédiaire8. La responsabilité dans ce sens a été transmise, conformément à la décision du conseil d’administration de SwissDRG SA du 19 avril 2011, aux partenaires tarifaires au niveau local. Nous n’avons jusqu’à présent connaissance d’aucun cas d’une convention de ce type. Une fonction de conduite plus forte de SwissDRG SA est très souhaitable dans ce domaine. Ajustement de TARMED beaucoup trop lourd De même, dans le système tarifaire pour le domaine ambulatoire (TARMED), il faut souvent des années pour que de nouvelles prestations soient intégrées au catalogue, notamment parce que bien souvent, le consensus entre les partenaires tarifaires fait défaut. Etant donné que les consommables (pour autant que le prix d’achat, TVA incluse, par unité dépasse CHF 3.-) sont remboursés séparément dans TARMED, l’introduction de nouveaux dispositifs médicaux (en particulier implants) dans TARMED est, à première vue, nettement plus simple que dans le nouveau système SwissDRG. Si toutefois la prestation médicale liée ne peut pas être correctement décomptée par l’intermédiaire d’une position TARMED existante, il y a là aussi de gros problèmes de financement. Financements intermédiaires également nécessaires pour la LiMA La Liste des moyens et appareils (LiMA) règle les montants maximums remboursés (MMR) des appareils médicaux au débit de l’assurance obligatoire des soins. C’est le Département fédéral de l’intérieur qui est compétent pour la fixation de ces prix. La LiMA est une annexe de l’OPAS (Annexe 2). Afin d’atteindre une position dans cette liste avec un MMR, une procédure similaire à la procédure de demande décrite ci-dessus pour l’Annexe 1 OPAS est exigée. Ce n’est que lorsque l’utilité peut être clairement attestée dans plusieurs études cliniques qu’une nouvelle position est ouverte avec un MMR dans la LiMA. Il peut donc se passer des années avant qu’une nouvelle position soit créée dans la LiMA. L’établissement d’une période d’évaluation avec remboursement provisoire correspondant est également nécessaire ici. 11. L’industrie de la technologie médicale souhaite être impliquée Dans le cas d’une conceptualisation éventuelle d’une stratégie HTA nationale voire même d’une agence HTA nationale, la FASMED demande que l’industrie de la technologie médicale, branche directement concernée, tout comme les prestataires au sens de la LaMal, soit intégrée activement à l’examen des conditions cadres ainsi qu’à une éventuelle planification et réalisation. De nombreuses sociétés du secteur de la technologie médicale en Suisse évoluent à l’échelle internationale et sont donc confrontées à des HTA dans le monde entier. Elles peuvent fournir des spécialistes adaptés, familiers des spécificités des produits de la technologie médicale ainsi que de leurs processus d’agrément et de remboursement pour l’accès au marché. 7 Au cours de l’année x, un nouveau code CHOP identifiant la nouvelle procédure est demandé dans le cadre de la procédure de demande de SwissDRG SA. Au cours de l’année X+1, le nouveau code CHOP est introduit et peut être codé pour la première fois, durant l’été de l’année X+2, les données de coûts liées sont fournies à SwissDRG SA, au cours de l’année X+3, ces données de coûts sont calculées par SwissDRG SA et, au plus tôt durant l’année X+4 (ou X+5, selon la durée de la procédure d’approbation par la Confédération), ce nouveau code est groupé dans un forfait par cas calculé à cet effet. 8 Bien évidemment à l’exception des cas pour lesquels le DFI refuse un remboursement des coûts (variante de décision de l’OFSP «Obligation de prestation non» selon le tableau de la page 4). 10 Bilan Ce qui est décrit, au niveau international, comme procédure HTA, existe, sous une forme similaire, en Suisse, depuis longtemps, et correspond au concept de procédure d’examen EAE de la Confédération. Les deux principes sur lesquels cette procédure repose, le principe de confiance et le principe de la dette portable du prestataire (moyennant dépôt d’un dossier de demande), ont fait leurs preuves et devraient impérativement être conservés si l’on désire maintenir la capacité d’innovation du système de santé suisse. La procédure d’évaluation de la Confédération (assessment, appraisal et decision) présente toutefois sans aucun doute un potentiel d’amélioration, en particulier en termes de transparence, de fiabilité, de clarté du déroulement de la procédure et de partage des rôles entre l’OFSP, la CFPP et le DFI. Au lieu de créer un nouvel institut HTA national, comme c’est actuellement discuté, il semble cependant plus pertinent, pour la FASMED, de recourir au savoir-faire existant au niveau des différents instituts académiques qui se penchent déjà sur l’opportunité du HTA. Dans une procédure HTA, il convient de faire attention aux différences entre les prestations médicales, notamment entre les dispositifs médicaux et les médicaments. La génération de l’évidence clinique de qualité scientifique supérieure de l’efficacité et de l’économicité des dispositifs médicaux est beaucoup plus compliquée que pour les médicaments. D’une part, un grand nombre de facteurs est décisif quant au succès clinique de procédures de technologie médicale (médecin, hôpital, patient, etc.) et d’autre part, des dispositifs spécifiques sont nécessaires, compte tenu des cycles de vie courts des différents produits et de l’arrivée constante de nouveaux produits concurrents sur le marché, afin que l’évaluation puisse sans cesse être adaptée aux nouvelles circonstances. Le règlement de la prise en charge des prestations prévue dans la LaMal, avec l’obligation de l’évaluation, est un moyen adéquat afin d’y parvenir; il garantit que les critères EAE puissent être vérifiés sans que l’accès à ces innovations prometteuses soit d’emblée bloqué pour les patients. Ce modèle pragmatique et favorable à l’innovation, qui est d’ailleurs appliqué dans d’autres pays, comme p. ex. aux Etats-Unis ou en Australie9 doit impérativement être conservé. 9 Sous le terme «Coverage with Evidence Development» (Etats-Unis) et «Interim Funding» (Australie), aux Etats-Unis et en Australie, de nouvelles procédures de technologie médicale sont intégrées au remboursement, avec engagement simultané d’évaluation. 11