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Du
Côté de la Culture
AC T UA L I T É J U I V E - N ° 1 3 8 4 - J E U D I 2 4 M A R S 2 0 1 6
Petite Lucarne
A vos
L’école, un terreau
du djihadisme ?
«
L’école, la scolarité au
sens large, est une période
charnière pour l’individu,
pour la construction de son
identité, pour l’affirmation de
sa personnalité. C’est une période où la réflexion intellectuelle est vulnérable, où l’on
peut facilement subir, et choisir de prendre le mauvais
chemin idéologique. L’adolescent qui sera l’adulte de
demain est donc une proie facile. Les entreprises et les politiques le savent bien, mais
les terroristes aussi.
L'Éducation nationale a signalé 857 cas de suspicion de
radicalisation d'élèves pour
l'année scolaire 2014-2015.
Les moins de 21 ans représentaient fin 2015 près de
7 000 cas transmis au numéro
vert Stop djihadisme, selon
les chiffres de la mission de
lutte contre les dérives sectaires. En 2001, après le 11 septembre, on pouvait entendre
des élèves scander le nom de
Ben Laden dans différents lycées de France. En 2015, les
incidents qui ont émaillé la
minute de silence en hommage aux victimes des attentats de janvier ont également
choqué l’opinion. En 15 ans,
rien n’a été fait, ou presque.
C’est dans ce contexte très
problématique pour les acteurs de l’Éducation nationale
qu’Élise le Guevel, Mathieu
Drejou et Emmanuel Lejeune
ont mené leur enquête pour le
magazine Envoyé spécial.
S’il n’a pas été possible de
visionner ce reportage, on
sait cependant que les bonnes
On en Parle
questions sont abordées.
Combien de collégiens, lycéens sont partis en Syrie, ou
ont tenté de le faire ? Comment l'institution gère-t-elle
ce phénomène ? Comment
les enseignants le vivent-ils
dans la pratique de leur métier ? Et bien entendu, quelle
prévention est mise en place
pour lutter contre l'idéologie
djihadiste ?
Ne pas oublier non plus le
rôle des parents par rapport à
« l’enfer » que peut représenter Internet… Ce n’est pas
gagné. ●
DAVID POUVIL
Sur France 2 : « Envoyé
spécial », jeudi 31 mars
2016, 20h55.
« Salomon et la Reine de
Saba » sera diffusé le lundi
28 mars prochain, à 13h35, sur
Arte. L'histoire mouvementée de
l'accession de Salomon au trône
d'Israël et de la visite de la reine
de Saba à Jérusalem est peut être
l’un des plus beaux péplums de
l'histoire du cinéma, le dernier
film réalisé par King Vidor, avec
Gina Lollobrigida en reine de
Saba, George Sanders, John
Crawford, et un Yul Brynner
royal. Superbe histoire d'amour,
scènes de bataille remarquablement filmées en "Super Technirama 70", un grand film ! ●
S.SZ.
A Entendre
Tous les jours de la semaine, de
10 à 11 heures sur France Inter,
Guillaume Erner présente « Service Public ».Ce docteur en sociologie, passé par une expérience dans le prêt-à-porter féminin et journaliste à Charlie
Hebdo, pose son regard acéré sur
la société actuelle. Des raisons de
nos actions aux causes de nos déraisons, Guillaume Erner tente
de comprendre un univers
étrange : le nôtre. ● S.SZ.
ZVI ECKSTEIN
DR.
: « La poignée d’élus »
se présente comme une remise en cause radicale des
thèses devenues des idées
communes sur l’histoire juive,
comme celles de Cecil Roth
ou Yuri Slezkine (Le siècle
juif, La Découverte, 2009).
Pourquoi estimez-vous
erronées leurs interprétations
de l’abandon des activités
agricoles par les Juifs ?
Zvi Eckstein : Je pense que la
principale erreur d’historiens
: Comment les rabbins de l’époque talmudique
ont-ils réagi à cette évolution
socio-économique des Juifs
dont ils ont été les initiateurs
indirects ?
Z.E. : On ne dispose pas de documents attestant qu’ils ont supporté ce mouvement mais ils en
ont tiré le constat. Lorsque les
Juifs se sont tournés vers le commerce, les rabbins ont fourni de
nouvelles recommandations impactant la vie quotidienne des
Juifs. Jusqu’ici, la propriété était
affaire de terrains ; désormais, il
s’agissait de biens meubles. Les
rabbins ont également dû s’adapter au fait que la famille pouvait
être séparée en raison des voyages induits par le commerce international de l’époux.
: Ce tournant stratégique a également conduit
certains Juifs à se convertir
face au coût de l’éducation.
Cela a-t-il amené les rabbins
à remettre en cause leur
niveau d’exigence ?
Z.E. : Des sanctions ont été
«
Fidèle à ses traditions d'ouverture,
en particulier vers la musique,
l’Union libérale israélite de France
(ULIF) a organisé sa deuxième édition
de la Nuit du jazz, du 19 au 20 mars
dans la salle de la synagogue. Comme
l'année précédente, l'équipe a fait découvrir en partenariat avec le label Jazz
& People trois formations différentes.
Le plus jeune groupe, celui du pianiste
Jeremy Hababou en trio, qui a ouvert la
soirée. Puis ce fut au tour d'un duo inédit de prendre la relève et les amateurs
ont été certainement très curieux de
l'entendre. En effet, carte blanche a été
proposée au saxophoniste David ElMalek, pour formé un duo inédit. Rappelons que ses années passées en Israël
lui ont inspiré l'oeuvre émouvante commandée par Radio France "Music from
source", enregistrée sous forme de suite
vol. I et II (ed. Naïve). C'est au pianiste
Yaron Herman, 1er prix au concours de
Jazz à la Défense (2005), révélation des
Victoires de la musique (2008) et président (depuis 2012) du jury du concours
de piano du Montreux jazz festival,
qu'il a demandé de le rejoindre dans
cette aventure. Et en matière d'événement, pour achever cette soirée, un autre a été proposé et pas des moindres,
celui de découvrir en exclusivité la formation du contrebassiste Omer Avital,
qui a présenté avec son quintet "Abutbul Music ", son nouvel album à sortir
(on en reparlera) sous le label Jazz Village. De quoi réchauffer les esprits et
les corps pour des semaines.
MONIC FELD
Une triste
famille juive
«
Les Juifs se sont-ils détournés de l’agriculture en raison des persécutions?
Non, répondent Zvi Eckstein et Maristella Botticini dans un livre fascinant*. La thèse :
l’obligation d’alphabétisation des enfants imposées par les rabbins a conduit
les familles à se détourner de la terre, pas assez rentable, au profit du commerce
où le « capital humain » des Juifs est apparu comme un avantage compétitif décisif.
comme Cecil Roth est de
s’être focalisé sur ce qu’ils ont
observé à la fin du Moyen Age
et le début de l’époque moderne. Ils n’ont pas insisté en
outre sur le fait que les revenus étaient plus importants
pour un marchand que pour un
agriculteur. Beaucoup d’agriculteurs n’étaient pas indépendants au Moyen Age et travaillaient pour des féodaux. Les
historiens n’ont jamais posé la
question suivante : pourquoi
les Juifs ont-ils quitté l’agriculture pour rejoindre les villes, en particulier dans l’empire mésopotamien, entre le
VIIIe et le Xe siècle ?
Nuit du Jazz
à Copernic
En salles :
«Pourquoi les Juifs ont abandonné
le monde de l’agriculture»
« Les rabbins étaient
certainement
conscients
qu’étudier
la Torah était
coûteux »
Agendas
A Voir
DR
Quand on connaît la
dangerosité de la propagande
des groupes terroristes auprès
d’une jeunesse tourmentée,
cette enquête, qui s’intéresse
à la radicalisation dans les
écoles, tombe à point nommé.
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décidées contre les familles qualifiées de « bour » (incultes)
et « Am haaretz » (ignorants) qui n’envoyaient pas leurs enfants étudier le Talmud, enfants
dont on compliquait ensuite le
mariage avec des membres de
la communauté. Les rabbins
étaient certainement conscients
qu’étudier la Torah était coûteux et que certains Juifs s’éloignaient de ce fait du judaïsme.
Mais l’importance de l’étude
était si importante à leurs yeux
pour réorganiser la vie juive
qu’ils ont accepté que cela
amène une partie du peuple à
quitter le monde de la Torah. ●
PROPOS RECUEILLIS
PAR STEVE NADJAR
* La poignée d’élus.
Comment l’éducation a façonné
l’histoire juive. 70-1492,
Albin Michel, 425 p., 30 €
À travers une tragédie qui se joue
dans l’ancien quartier juif de New
York, la sortie restaurée de « Little
Odessa » est à (re) voir pour apprécier
un réalisateur qui va devenir un des
grands d’aujourd’hui, James Gray,
comme son acteur principal, Tim
Roth. Joshua Shapira, tueur à gages de
son métier, doit exécuter un contrat
dans le quartier de son enfance. En y
retournant, il reprend contact avec son
petit frère, et retrouve un amour de
jeunesse qui ne l’a pas oublié. Côté
parents, son père le considère mort et
le rejette, sa mère souffre d’une tumeur au cerveau. Quand il approche sa
grand-mère, c’est en yiddish qu’elle
lui hurle toute son animosité. Mais ce
qui met mal Joshua, c’est de ne pas
être près de sa mère et la violence
qu’exerce son père à l’égard de son
jeune frère. Père qui calme sa douleur
chez une maîtresse, ce qui a pour effet
de fragiliser encore plus ses enfants.
Joshua protège comme il peut Reuben,
son cadet, tente de lui expliquer les
aléas de la vie : « On est juifs, on erre.
T’as pas appris ça à l’école ? » Et à
l’enterrement (poignant) de leur mère,
le sens du film se révèle : Qu’est-ce
que faire partie d’une communauté ?
Dans ce drame, on n’aime, ni on ne
déteste personne. Mais la grandeur du
film nous transporte.
ROBERT SENDER