TENDANCE

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126 ELLE QUÉBEC OCTOBRE 2009
Beth Ditto: Certainement LA ronde de l’heure. Lesbienne
assumée, rockeuse dans l’âme, la chanteuse du groupe
The Gossip vient de lancer sa ligne de vêtements pour rondes
et a fait la couverture du premier numéro du magazine
britannique Love l’hiver dernier.
mannequins
tailles fortes
dans les événements auxquels elle participe. «Il m’est
arrivé de devoir me battre pour introduire des modèles de grande taille
dans mes défilés. Ce n’est pas normal!
Combien de femmes sont de taille
zéro et mesurent six pieds?»
UN MARCHÉ COLOSSAL
En effet, les clones de la top polonaise Anja Rubik ne courent pas les
rues. Un sondage du groupe britannique Mintel International réalisé en
2008 a révélé que la taille la plus
commune aux États-Unis était 14.
Les rondes représentent donc un
marché colossal. D’après NPD
Group, spécialiste américain des études de marché, elles dépensent plus
de 22 milliards de dollars aux ÉtatsUnis et plus de 2,3 milliards de dollars au Canada en vêtements. Le
hic? Elles ont encore bien de la difficulté à trouver autre chose que des
tuniques trop amples et des robes
trop fleuries.
Écœurée d’être snobée par l’industrie de la mode, Gwen DeVoe, qui
organise elle-même régulièrement des
défilés partout aux États-Unis et qui
forme des mannequins taille forte, a
décidé d’organiser sa propre semaine
de la mode alternative à New York,
plaque tournante de la mode internationale. «J’y pensais depuis déjà cinq
ans, dit la New-Yorkaise, mais je
voulais être sûre d’avoir un public
avant de me lancer.» Cette militante
espère notamment que son événement fera comprendre aux designers
que les femmes fortes peuvent également être fortes en mode.
Son message sera-t-il entendu? Seul
le temps le dira. Une chose est certaine,
le timing semble approprié. Au cours
des derniers mois, des chaînes de magasins importantes, comme Forever 21 ou Target, se sont mises à proposer des collections taille forte pour
des filles qui se décrivent elles-mêmes
avec humour comme des «fatshionistas» (grosses fashionistas). De plus,
en juillet dernier, la chaîne britannique Evans a dévoilé la toute première collection de Beth Ditto, icône
XXL de la mode et chanteuse du h
KEYSTONE PRESS (B. DITTO)
de toutes les couleurs
et de toutes les formes.
Les plus minces sont
de taille 12; les plus
fortes, de taille 24.
Leur sex-appeal et
leur assurance évoquent
aussi bien Mae West que
Queen Latifah. Plus elles
sont rondes, plus elles se
déhanchent, et plus la
foule apprécie. Certaines
robes ultrasexys de la marque torontoise Candi Apple
Couture provoquent même des cris à
faire friser le bob d’Anna Wintour, la
papesse du Vogue! Quand les filles
défilent dans des maillots de bain
blancs rehaussés de sequins argentés
de Jewel Shannon, l’ambiance tourne
au délire.
Pour les mannequins et les spectatrices, cet événement est plus qu’un
défilé de mode: c’est la célébration
d’une libération. Pour les designers,
c’est une occasion rare de créer des
vêtements sans avoir peur de mettre
en valeur les courbes féminines.
«C’est stupéfiant! C’est la première
fois que j’assiste à un défilé de mode
présentant des tailles fortes à la fois
sexys, chics et avant-gardistes. C’est
phénoménal», s’exclame avec un enthousiasme contagieux Lydia Moss,
une Canadienne qui a fait le voyage
depuis Saskatoon afin de dénicher des
pièces pour la boutique A Bit More
Hip, qu’elle compte ouvrir sous peu.
La designer Delali Osun Haligah
partage son enthousiasme: elle ne cache pas que les trois jours de la FFFW
comptent parmi les plus heureux de
sa carrière, qui a débuté à l’aube des
années 1980. «Pour moi, c’est comme
arriver au sommet de l’Empire State
Building! Il n’y a rien qui peut battre
ça, explique-t-elle. Tout le monde
rayonne, c’est merveilleux.» Delali
Osun Haligah, dont les créations
s’adressent aussi bien aux filles bien
en chair qu’à celles tout en os, déplore depuis des années l’absence de

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