« L`état des lieux de l`emploi scientifique en France »

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« L`état des lieux de l`emploi scientifique en France »
« L’état des lieux de l’emploi
scientifique en France »
Note de lecture du rapport de l’Observatoire de l’emploi scientifique de février 2007 (Vincent Charlet, le 9 janvier 2008).
Avertissement : cette note était initialement destinée à l’usage d’un groupe de travail portant sur l’emploi des docteurs en
entreprise. En conséquence, elle rend compte d’une lecture partielle du rapport.
Eléments de cadrage sur l’emploi scientifique privé en France
Le personnel privé de recherche en
France représentait, en 2004, quelque
200 000 personnes (en ETP), dont plus
de 105 000 chercheurs. Cette dernière
population se distingue à divers titres.
Forte croissance des effectifs
La population des chercheurs en
entreprise a augmenté de 20 % depuis
2000 : c’est deux fois plus rapide que
pour les EPIC et universités et quatre
fois plus rapide que pour les EPST.
Importance du recrutement
des ingénieurs
Le doctorat n’est pas la voie privilégiée
d’entrée dans la carrière : 50 % des
personnes recrutées sont diplômées
d’écoles d’ingénieur sans être
titulaires d’un doctorat. Les titulaires
du doctorat, éventuellement en
combinaison avec un diplôme
d’ingénieur, en représentent 13 % (y
compris le doctorat en médecine,
pour environ 3 %).
Jeunesse
Les chercheurs du secteur privé sont,
en moyenne, plus jeunes que ceux du
secteur public. Premièrement du fait
d’un recrutement avant le doctorat.
Deuxièmement en raison d’une
évolution rapide, pour une grande
partie des personnels concernés, vers
des fonctions autres que celles de la
recherche. En 2002, les chercheurs de
moins de 35 ans représentaient plus
de 50 % de l’effectif total.
Forte concentration
60 % des chercheurs du secteur privé
sont employés par 2 % des entreprises.
En outre, trois spécialités représentent
deux tiers des chercheurs en
entreprises : sciences pour l’ingénieur
(SPI), sciences et techniques de
l’information et de la communication
(STIC) et électronique.
Avant le doctorat
Vases communicants au sein
des universités
Le nombre total d’étudiants inscrits en
DEA ou en 2e année de master
recherche se caractérise par sa grande
stabilité (39 000 en 2005-2006).
Cependant, il a fortement augmenté
dans les sciences humaines et sociales
(+18 % entre 2000 et 2005) et
diminué d’à peu près autant (-14 %)
sur la même période dans les sciences
de la vie et de la matière. On compte
désormais quelque 10 000 inscrits
dans ces dernières disciplines.
Augmentation des effectifs
d’ingénieurs
Dans le même temps, les effectifs des
formations d’ingénieurs ont augmenté
de +13,5 %. Avec plus de 27 500
diplômes délivrés (et plus de 100 000
inscrits répartis sur trois années de
formation), ces filières représentent
une part importante des étudiants
attirés par les sciences exactes.
Poursuite vers le doctorat
Sur les trois dernières années, un
quart des étudiants en moyenne
inscrits en DEA ou en 2e année de
master recherche poursuit sa
formation en doctorat l’année
suivante.
Les situations diffèrent selon les
disciplines : le taux de poursuite en
doctorat est de 37 % pour les sciences
de la vie et de la matière et de 20 %
pour les sciences humaines et sociales.
Par ailleurs, c’est bien la filière des
masters recherche qui forme la très
grande majorité des doctorants.
Le doctorat
Inscriptions et soutenances
Le nombre d’inscrits en doctorat est
de 70 000 environ. Le flux est
déséquilibré
puisqu’on
compte
chaque année 17 500 premières
inscriptions contre 10 000 soutenances
de thèses.
Ce déséquilibre est très marqué selon
les disciplines. Les sciences de la vie et
de la matière représentent environ
38 % des doctorants (soit autant que
les sciences humaines et sociales) mais
60 % des docteurs de chaque année
(près du double des SHS).
Situation matérielle des
doctorants
L’amélioration du financement des
doctorats a fait l’objet de nombreuses
mesures, notamment dans la loi de
programme pour la recherche du 18
avril 2006, dont les effets ne peuvent
être tous encore mesurés.
Néanmoins,
l’augmentation
du
montant des allocations de recherche
du ministère de la recherche, celle du
nombre des conventions CIFRE et
l’engagement vers la résorption des
libéralités visent à l’amélioration des
conditions de travail des doctorants.
Employabilité après le doctorat
On s’intéresse, dans cette section, à la
situation professionnelle des jeunes
docteurs trois ans après leur
soutenance.
Chômage en hausse
La corrélation est forte entre
l’évolution de la conjoncture et les
conditions d’insertion des docteurs.
Après une amélioration perceptible
entre 1998 et 2001, les conditions
d’emploi des docteurs se sont
dégradées entre 2001 et 2004, où le
taux de chômage a atteint 10,9% (+4
points).
L’analyse des parcours individuels
montre que la principale difficulté des
docteurs n’est pas l’obtention d’un
emploi mais plutôt la stabilisation dans
l’emploi. 39 % des docteurs diplômés
en 2001 ont connu, entre 2001 et
2004, une trajectoire professionnelle
difficile : 25 % sont restés dans des
emplois à durée limitée, 8 % ont
connu un chômage persistant et 6 %
ont
basculé
d’un
emploi
(généralement à durée limitée) vers le
chômage.
Toujours entre 2001 et 2004, la part
des CDD a augmenté.
Enfin, 24 % des jeunes docteurs
travaillant dans le secteur public ne
relevaient pas, en 2004, d’un contrat à
durée indéterminée ou du statut de
fonctionnaire.
La distinction entre SHS et
sciences exactes n’est pas la
seule variable probante en
matière d’insertion des
docteurs
Entre 2001 et 2005, les différences
disciplinaires se sont accrues en
matière d'insertion professionnelle.
Au sein des sciences « dures », deux
ensembles se distinguent. Les
mathématiques, l'informatique, la
physique, les matériaux, l'électronique
et la mécanique en constituent un
premier. On y relève un taux de
chômage de 6% en 2004 pour les
jeunes docteurs.
Les docteurs en sciences de la vie et
chimie ont vu leur situation évoluer de
manière moins favorable. Ils
rencontrent la même année un taux de
chômage de 13,6%, un recours aux
CDD plus fréquent et des salaires
médians moins élevés.
Un hiatus similaire s’observe au sein
des sciences humaines et sociales.
D’un côté, les conditions d’emploi des
docteurs en droit, économie et gestion
s'améliorent pour tendre vers celles
des docteurs en sciences exactes. Mais,
les conditions se sont détériorées pour
les autres diplômés de lettres et
sciences humaines (taux de chômage
de 16,7%).
Regain d’attractivité des
carrières publiques
Le secteur public est l’employeur
majoritaire des docteurs. Il a vu son
importance s’éroder entre 1997 et
2001 (de 66 % à 53 % des docteurs en
situation d’emploi) mais celle-ci s’est
réaffirmée dans la période 2001-2004
(66 % des docteurs actifs en 2004),
Cette « captation » par le public est
minimale dans le domaine des
sciences de l’ingénieur (49 %) et
maximale pour les SHS (74 %).
Le mode de financement de la thèse
influence nettement le type de
débouchés professionnels : plus d’un
allocataire de recherche sur deux
occupe un emploi dans la recherche
publique ou l’enseignement supérieur,
contre un doctorant CIFRE sur 7.
Inversement, ces derniers s’orientent
très majoritairement vers le secteur
privé (81 %).
D’autre métiers que la
recherche
En 2004, près de la moitié des jeunes
docteurs en situation d’emploi sont
chercheurs ou enseignants-chercheurs
dans le public. Près de 40 % font autre
chose que de la recherche,
équitablement répartis entre les
secteurs public et privés.
Restent seulement 15 % qui sont
devenus chercheurs en entreprise.
Autrement dit, trois ans seulement
après la thèse, les jeunes docteurs
employés dans les entreprises y
exercent moins souvent des métiers
de recherche que d’autres métiers.
Parmi les jeunes docteurs en SHS,
seuls 5 % sont chercheurs en
entreprise, contre 20 % employés par
les entreprises pour d’autres métiers.
En chimie et SPI, ils sont près de 30 %
à être chercheurs en entreprise, et
20 % environ à y occuper d’autres
activités.
point de vue salarial que statutaire,
que leurs homologues de SHS. 77 %
de ceux qui travaillent dans le privé
ont un statut de « cadre ». Cette
proportion monte à 90 % parmi ceux
qui ont un emploi de recherche. La
proportion n’est que de 60 % environ
parmi les jeunes docteurs en SHS
travaillant « hors recherche »
Une majorité de cadres
Les jeunes docteurs en sciences
exactes occupent des emplois
nettement plus valorisés, aussi bien du
Attractivité internationale
L’attrait international du
doctorat français
En matière d’accueil de doctorants,
après une période de net tassement
dans les années 1990 (19 480
doctorants en 1993, 16 720 en 1999),
le nombre d’étrangers accueillis en
France augmente à nouveau depuis le
début des années 2000, pour atteindre
23 970 inscrits en 2005, et représente
désormais plus du tiers des
doctorants.
Le nombre de doctorants étrangers
augmente plus rapidement que
l’ensemble des doctorants inscrits.
Cette progression est essentiellement
liée à l’augmentation du nombre
d’étrangers non titulaires d’un
baccalauréat français. Leur nombre a
doublé entre 1999 et 2004.
Cette augmentation concerne surtout
les filières « économie, administration
économique et sociale » et « sciences ».
Cette progression se retrouve dans les
doctorats délivrés aux étudiants
étrangers dans ces deux filières.
Parmi les doctorants, le nombre de
ressortissants de pays asiatiques
s’accroît fortement. Alors qu’ils étaient
environ 10 % en 2002, ils représentent
désormais près du quart des
doctorants de nationalité étrangère.
Mobilité entrante des
chercheurs étrangers dans les
secteurs public et privé
En 2001, les étrangers représentaient
6,7 % des chercheurs publics en
France (soit 6 572 personnes, dont
une grande partie en provenance de
l’Union européenne) et 5,3 % des
chercheurs privés (soit environ 6 000
personnes). Les entreprises accueillent
chaque année plus de chercheurs
étrangers (en moyenne près de 700)
qu’il n’en part à l’étranger (en
moyenne près de 500).
Diplômés de l’enseignement
supérieur
Faute de statistiques internationales
sur le nombre de chercheurs français
travaillant à l’étranger dans les
secteurs public et privé, les données
de l’OCDE sur l’immigration par
niveau de qualification permettent
d’estimer à 16 000 le nombre de
personnes nées en France, disposant
d’un diplôme de doctorat et résidant à
l’étranger. Parmi ceux-ci, près de 8 000
résident aux Etats-Unis, 2 400 au
Canada, 1 200 en Espagne, 1 100 en
Belgique et en Australie.
Toutefois, ces données ne reflètent
que partiellement la mobilité, certains
pays tels que le Royaume-Uni,
l’Allemagne, le Japon et l’Italie n’étant
pas inclus dans l’étude.
L’OCDE apporte un éclairage
complémentaire, permettant d’estimer
la mobilité internationale des
personnes
diplômées
de
l’enseignement
supérieur.
Les
données proviennent d’une collecte
spéciale effectuée en 2003 en
collaboration avec les bureaux
nationaux de la statistique (voir
figure).
Séjours postdoctoraux
Sur les quelque 10 000 nouveaux
docteurs diplômés chaque année en
France, près d’un tiers effectue une
période postdoctorale. 70 % d’entre
eux l’effectuent à l’étranger,
essentiellement aux Etats-Unis et dans
les pays de l’Union européenne
(principalement, Royaume-Uni et
Allemagne). Les disciplines les plus
concernées sont les sciences du vivant
suivies de la chimie.
Une étude de la Mission pour la
science et la technologie de
l’ambassade de France aux Etats-Unis
(avril 2005) montre que, malgré des
difficultés de parcours importantes, les
post-doctorants français en Amérique
du Nord réussissent leur expérience :
une forte majorité rentre en France.
Environ 20 % d’entre eux ne rentrent
pas, la plupart restant en Amérique du
Nord.
Les emplois après le post-doctorat se
répartissent de manière stable depuis
quinze ans entre les organismes de
recherche (50 %), les universités (un
petit tiers) et les entreprises (15 %). La
durée du post-doctorat en Amérique
du Nord dépasse trois ans dans 30 %
des cas. Cette durée dépend très
fortement de la discipline : la
proportion
de
post-doctorats
supérieurs à trois ans s'élève à 45 % en
sciences de la vie contre 10 % en
mathématiques et informatique.
Seulement 18 % des post-doctorants
trouvent tout de suite un emploi ;
pour 45 %, il s'écoule plus d'un an
entre la fin du post-doc et l'obtention
d'un emploi. Pour 20%, il s'écoule
même plus de deux ans. Au total, la
probabilité pour que les postdoctorants français d'Amérique du
Nord aient trouvé un emploi stable
dans les six ans qui suivent leur thèse
est, toutes disciplines confondues, de
64 %. Elle est supérieure à 90 % en
mathématiques et en informatique,
mais de 50 % en sciences de la vie.
Renouvellement
Le renouvellement des effectifs de la
recherche publique se pose
différemment selon les disciplines.
Dans certaines, les besoins de
remplacements de chercheurs des
EPST et d’enseignants-chercheurs
correspondent à un tiers ou plus, des
doctorants qui soutiennent chaque
année : sciences de la vie (33 %),
mathématiques (38 %), physique
(38 %) et chimie (43 %).
Dans d’autres disciplines, la marge
reste beaucoup plus vaste : STIC
(16 %), SPI (11 %), sciences de
l’univers (13%).
A noter que, dans les disciplines STIC
et SPI, les opportunités de
recrutement dans la recherche privée
sont également les plus fortes.

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