Des nouvelles De Mr Charly

Transcription

Des nouvelles De Mr Charly
Des nouvelles de Mr Charly
Mr Charly
Des nouvelles
de Mr Charly
Récits divers
Editions Persée
Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages et
les ­événements sont le fruit de l’imagination de l’auteur et toute ­ressemblance
avec des personnes vivantes ou ayant existé serait pure coïncidence.
Consultez notre site internet
© Editions Persée, 2014
Pour tout contact :
Editions Persée — 38 Parc du Golf — 13856 Aix-en-Provence
www.editions-persee.fr
Merci à
Stephanie Egret
Txeu-Anne Yang
Jocelyne Corbel
Laure Miquel
À bas Bush !
Sommaire
C’est moi la star......................................11
Mon épicier..................................................17
Le speed dating politique...................29
Sur la route, On the road again....35
Rencard à l’opéra...................................43
Monkey Market........................................53
Mon ex-petite copine.............................65
La lettre......................................................73
Le banquier du temps............................81
La télévision..............................................87
La réponse à la lettre.........................93
Rêvez-vous..................................................101
L’air bête......................................................113
La lettre du futur.................................121
Les p’tits bouts de rien........................127
9
C’est moi la star
Des fans, il y en a partout sur Terre. Tout le monde est
fan de quelqu’un, mais à différents degrés. Certains prennent des vacances pour voir un concert de leurs idoles de
l’autre côté du pays. D’autres collectionnent les coupures
de presses, les autographes et vont même jusqu’à fouiller
dans les poubelles. Enfin, il en existe qui copient les looks,
les tatouages, les objets dérivés, le prénom des enfants…
Moi je n’échappe pas à la règle. Je suis fan de
certaines personnes pour leurs parcours, leurs valeurs
et ce qu’ils transmettent. Mais ce n’est pas la question
pour ce texte. Je vais vous raconter la dernière fois où
j’ai rencontré une célébrité qui m’impressionne.
Voici mon histoire :
« Un week-end à Deauville, je me balade, il ne fait
pas beau. Nous sommes à la fin de l’année et je ­n’attends
que les beaux jours pour voir le printemps dans les
sourires, entendre le soleil dans les rires et observer les
filles en mini-jupe.
À ce moment-là, j’ai une situation confortable, voire
une très bonne situation. Effectivement, je suis entouré
11
de gens qui m’aiment. J’ai quelques privilèges : un
cuistot personnel, un chauffeur qui m’amène au travail
tous les jours (je n’ai pas encore mon permis), le pressing gratuit et les croissants tous les dimanches.
Tous les jours, à partir de huit heures : boulot, boulot.
Puis le midi, je mange avec mes collègues, des repas pas
top, mais je m’y fais.
Je pratique un peu de sport, mais c’est surtout grâce à
mes histoires que j’ai du succès. Je ne suis pas un grand
écrivain, j’aime raconter des blagues, des récits d’aventures, des anecdotes poignantes ou des ritournelles
romantiques. Et certaines nuits, les bras de Morphée me
poussent vers le rêve américain.
Il y a des collègues que j’adore car ils voient la vie
comme moi. D’autres que je méprise et que je rabroue
avec excellence à la moindre occasion. Je suis comme
ça, à ce moment de ma vie. Mais je suis obligé, sinon on
se fait dévorer. Je dois rester dominant. La tête haute et
ceux que je croise ont intérêt à fermer les paupières.
L’après-midi, je vois ma maîtresse et le soir, chez
moi, je continue mes devoirs. Je cherche sans cesse de
nouveaux personnages, de nouvelles situations burlesques qui feront rire petits et grands.
Dans la rue, on me klaxonne, les filles se retournent
et n’osent pas toujours me parler. Elles doivent se dire
qu’un mec comme moi est inabordable.
12
Je vais toujours chez le même coiffeur. Le boulanger
sait d’avance ce que je vais prendre et souvent ma
commande est déjà prête. Des gens me conseillent pour
m’habiller, pour manger, pour sortir… Il y en a qui
m’envient, d’autres me haïssent, ce sont probablement
des jaloux. Quoiqu’il en soit, j’aime ma vie et je suis le
plus heureux du monde.
Un peu narcissique certes, macho sans doute. Je suis
jeune et j’ai encore beaucoup à apprendre. Ma réussite
grandit et je la dois à moi, rien qu’à moi, car je suis un
bosseur… un peu aussi grâce à mes parents ! De plus,
j’ai compris très rapidement qu’avec quelques caprices
ou un air malicieux, on peut tout avoir.
Un jour, je suis au supermarché avec ma mère (oui,
je sais, faire les courses aux supermarchés, ce n’est pas
classe, on va encore me demander des autographes, il y
a trop de fans dans les lieux publics). Donc, je déambule
fièrement dans la galerie avec ma mère (oui, je sais, c’est
ringard de sortir avec sa mère, mais elle est contente. Il
faut bien !). Mes chaussures neuves couinent sur le sol.
C’est drôle au début, puis très vite le bruit devient usant.
J’observe les vitrines : les nouvelles coupes de pantalon,
les couleurs à la mode et les chapeaux. Je passe un
coup de peigne dans mes cheveux propres. Je vérifie
le blanc de mes dents dans un miroir. Pas de paparazzi, ni de groupie hystérique qui me sautent au cou.
13
Pas ­d’adulateurs qui perdent leurs moyens sous mon
regard. Pas d’admiratrices qui me jettent des bouquets
de fleurs que j’offre après aux plus belles venues. Et pas
d’entarteur, normal, je ne suis pas non plus une célébrité
de la télévision.
Je sens des regards sur moi et entends des enfants
angoissés au loin. Nous nous rapprochons des cris, et
soudain, mon cœur se met à battre fort… très fort…
encore plus fort.
Au bout de l’allée centrale : mon maître à penser.
Mes jambes tremblent, mes doigts suivent la mesure
décadente.
Mes mains sont moites, mon front perle.
Je le vois lui, l’idole des jeunes.
Ma mère me regarde et me dit avec un petit sourire :
« Ça ne va pas Charly ? C’est le Père Noël qui te fait
peur ? »
Car oui, à ce moment-là, j’ai quatre ans et j’ai peur
du Père Noël. Pas vous ?
Dans un premier temps, je suis resté coi, puis devant
lui j’ai assuré.
J’ai retenu mes larmes et avalé la boule que j’avais
dans le fond de la gorge. J’ai eu un haut-le-cœur. Un
rot au goût bizarre a empesté ma bouche. Mes premières
syllabes ressemblaient aux premières syllabes de ma
petite enfance (ou à un homme ivre), c’est-à-dire
­hésitantes et à répétition, l’odeur en plus.
14
Toute ma vie, il a été un père spirituel. C’est mon
mentor. Il me guide sur le chemin de la vie et j’espère
son passage tous les ans.
Comme un vrai professionnel, je m’étais préparé. Je
savais que ce jour allait arriver. L’an dernier déjà à la
même période il m’avait effrayé. Mais cette année, je ne
vais plus fondre en larmes et m’écrouler dans les jupes
de maman. Je vais l’approcher, le toucher.
J’ai plein de choses à lui demander ! Plein de choses
à lui dire, à lui avouer. J’y aurais passé la nuit.
Je me suis approché, flageolant de tout mon être, il
m’a pris sur ses genoux. Enfin « il m’a pris », façon de
parler !
Le père Noël me demande mon nom, mon âge, si
j’ai été sage cette année. Je fais rapidement la balance
entre mes bonnes actions et les dents que j’ai cassées à
la récréation et réponds aussitôt : « OUIIIIIII ! ».
Un monsieur nous prend en photo (un fan, ou plutôt
un paparazzi vu la taille de l’appareil).
Le vieil homme anciennement vêtu de vert me
demande :
« Qu’est-ce que tu veux faire mon p’tit quand tu seras
grand ? ».
Illico, j’ai répondu :
« Plus tard, je veux être connu comme toi. Parce que
les gens connus, ils ont de l’argent. Et avec tous les jouets
que tu fabriques (j’ai vu les prix dans les ­magasins),
15

Documents pareils