Quandla vérité ne peut sortir de la bouche des... concurrents!
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Quandla vérité ne peut sortir de la bouche des... concurrents!
Date : 01/01/2014 Pays : FRANCE Suppl. : Paroles d'experts Page(s) : 24-25 Rubrique : CONTENTIEUX ECONOMIQUE Diffusion : (15000) Périodicité : Mensuel Surface : 165 % renouiuie . mensuel CONTENTIEUXECONOMIQUE Quandla vérité ne peut sortir de la bouche des... concurrents! côté desactesde débauchageou de détournementde clientèle,le dénigrementapparaît comme l'une des pratiques deconcurrence déloyaleles plus sanctionnées. Celatient notamment à l'interprétation souple de cette notion par les tribunaux : le simple tait dedivulguer une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent est condamnable, peu importe qu'elle soit exacte. À SURLESAUTEURS DanielRotaet RégisPiheryconseillentet défendentlesentreprisesdanslecadrede tant devant leurscontentieuxcommerciaux, lesjuridictionsjudiciairesqu'arbitrales. Ils interviennentplusparticulièrement en droitéconomique(droitsde ladistribution, descontrats,de laconcurrence et dela consommation). Daniel Rota, directeur associé, avocat Dans une conjoncture écono mique difficile, toute avance prise sur la concurrence peut Celle-ci est s'avérer déterminante. généralement le fruit de moyens mis en en vue d accélérer son propre développement - tels que des investis sements pour innover ou renforcer la productivité - mais aussi, de plus en plus en souvent, de procédés tendant à freiner celui des concurrents telles que des pratiques de concurrence déloyale. Parmi lesactes de concurrence déloyale les plus courants, figure en bonne place le dénigrement, défini comme le fait de divulguer une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent. L'interprétation extensive de cette notion en jurisprudence doit appeler la vigilance des entreprises. l.a diffu sion d'une information même exacte concernant un concurrent peut suffire pour faire condamner son auteur sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil. œuvre — Agissements illicitesduconcurrent De manière évidente, la communica tion d'une entreprise axée sur le carac Régis Pihery, avocat tère illicite des pratiques de concurrents est sanctionnable lorsqu'elle s'accom pagne de propos excessiis ou agres sifs. Par exemple, dans un jugement du 15 janvier 2013, le tribunal de commerce de Paris a estimé que constituaient un « acte de dénigrement constitutif de concurrence déloyale » les propos tenus par le fondareur d'un opérateur de téléphonie mobile accu sant l'un de ses concurrents de pratiques commerciales déloyales et trompeuses, en ce qu'ils étaient exprimés en des « termes démesurés (...) induisant] un jugement de valeur nuisible à l'image du concurrent », leur large médiati sation marquant « la volonté de [lui] nuire » (T.com. Paris, 15 janv. 2013, RG no20 12/033422). Le risque de condamnation existe toutefois même en présence d'une communication qui se veut objective, ainsi que cela ressort d'un arrêt de la Cour de cassation du 24 septembre 20 13. Dans cette affaire, des distributeurs commercialisaient sous leur marque des cartouches de gaz. Un concurrent de leur fabricant leur av;iitadressé des courriers dénonçant la non-conformité desdites cartouches à une directive européenne. La Cour de cassarion approuve l'arrêt d'appel ayant qualifié cescourriers d'actes de dénigre ment, considérant que « la divulgation d'une information de nature à jeter le discrédit sur un concurrent constitue un dénigrement, peu important qu 'ellesoit exacte» (Cass. corn., 24 sept. 2013, n0l 2-1 9.790). Procédure initiéeà rencontre d'unconcurrent Selon une jurisprudence constante, la dénonciation par une société de la procédure judiciaire en cours contre un concurrent peut caractériser un acte de concurrence déloyale, dans le cas aucune décision n'a encore été prononcée. Dans un arrêt de principe, la Cour de cassation a ainsi censuré, au visa de l'article 1382 du Code civil, l'arrêt d'appel ayant rejeté l'action en concurrence déloyale, estimant « qu'est fautive la dénonciation faite à la clientèle d'une action n'ayantpas donné lieu à une décisionde justice » (Cass. com., 12 mai 2004, nc 02-16.623). Cela vaut égale ment en présence d'une décision non définitive rendue à l'éçard du concuroù Tous droits de reproduction réservés Date : 01/01/2014 Pays : FRANCE Suppl. : Paroles d'experts Page(s) : 24-25 Rubrique : CONTENTIEUX ECONOMIQUE Diffusion : (15000) Périodicité : Mensuel Surface : 165 % renouiuie . mensuel ParDanielRota,directeur et RégisPihery, associé, avocat, avocat,ridai LESPOINTSCLES * Le dénigrementconstitue l'une despratiquesde concurrencedéloyalecondamnablessur le fondementdes articles 1382 et 1383 du Codecivil. * Le dénigrementest définide manièrelargecomme le fait de divulguer une information de nature à jeter le discréditsur un concurrent. * Uneentreprisene peutseulementse réfugier derrièrela véracité desinformationsdivulguéesau public relativesau concurrentpour échapperà sa responsabilité. rent. Dans un arrêt de la cour d'appel de Parisdu 23 mars 20 13, il s'agissaitd'une décision de l'OHMl aux termes de laquellecelle-ciavait refuséla demande formulée par le promoteur d'un réseau de franchise de dépôt d'enregistrement de sa marque et fait droit à l'opposition formée par un concurrent en raison de l'existence d'un risque de confusion avec la marque de ce dernier. Le concur rent avait alors adressé à l'ensemble des franchisés un courrier les mettant en demeure de cesser toute exploitation de la marque du franchiseur. La cour d'appel de Paris a jugé qu'une telle mise en demeure, « en imputant [au franchi seur] une infraction aux marques [du concurrent] fondée sur une résolution de l'OHMl faisant l'objet d'un recours et donc non exécutoire,constitue un acte d'intimidation et de dénigrement (. . .) de nature à entacher la réputation [du franchiseur], à porter atteinte à [sa] crédibilité et à désorganiser [son] réseau commercial» (CA Paris, 23 mars 20 12, n"l 1/11910). Qualitéd'ancienpartenaire Des juges du tond ont pu parfois esti mer que le tait pour une entreprise d'informer la clientèle de la rupture de ses relations avec un partenaire n'était pas constitutif d'acte de concurrencedéloyale. Dans un arrêt de la cour d'appel de Lyon du 16 décembre 2010, il était notamment reproché au promoteur d'un réseau de concession d'avoir adressé à la clientèle une lettre précisant : « Malheureusement, [l'an cien concessionnaire] suite à des pro blèmespersonnels et financiers n'assure plus lesengagements de notre réseauet il a négligécesderniers mois lecontact pri vilégiéavecvous,lia récemmentrevendu sa clientèle à une grossesociétéd'accueil aux entreprises qui, de par sa taille et sa qualité de service, ne correspondpas du tout à l'identité de notre enseigne ». Observant que le concédant justifiait « de ce qu 'aucun deséléments mention nés dans la lettre du 29 septembre2006 ne présente un caractère mensonger », la coût d'appel de Lyon a considéré que ladite lettre « constat défaits avéréset non contestés,ne saurait donc êtrequali fiée de dénigrement susceptibled'engager [la] responsabilité[du concédant] »(CA Lyon, 16déc. 2010, RG nrj09Z03875). La dernière jurisprudence semble cependanr aller dans le sens d'une plus grande sévérité. Dans un atrêt de la cour d'appel de Nancy du 2 octobre 201 3, était concerné un distributeur qui s'était interdit, dans le protocole transactionnel mettant fin à sa rela tion avec un fournisseur, « de tenir auprès d'un tiers des propos constitutifs d'un dénigrement de la marque [du fournisseur] » et s'était engagé « àfaire preuve de discrétion et de retenue vis-àvisdes tiersau sujet de [leur relation] , de façon à nepas porter atteinte aux intérêts du [fournisseur] ». Peu après, il avait pourtant fait placarder sur sa devan ture une grande afficheannonçant une « liquidation totale K » accompagnée de la mention « K, c'estfui ». La cour d'appel de Nancy y voit une « opéra tion deliquidation au caractèretapageur en laissant croire que la marque K était appelée à disparaître », de sorte que le distributeur avait manqué «à son obli gation dediscrétionetde retenueà l'égard ^destiers » (CA Nancv, 2 oct. 20 13, RG n" 12/0 1543). Tous droits de reproduction réservés