Les petits filous de Tân Hà

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Les petits filous de Tân Hà
Les petits filous de Tân Hà
Le micro-crédit est la première demande des plus pauvres. Et les résultats sont
évidents : en quelques années les femmes et leur famille se dégagent de l’emprise des
usuriers ! Les revenus augmentent de 50% en moyenne, la sécurité aussi, grâce à
l’épargne. Les femmes prennent confiance et s’affirment.
Mais le micro-crédit n’est pas la panacée ! Apporter un petit capital pour élever des
cochons, quand 1/3 des bêtes meurent des épidémies, faut d’hygiène et de vaccins,
faute de soins aussi, c’est endetter les gens, et non les aider à sortir de la pauvreté.
Des experts critiquent le micro-crédit, le baptisant micro-dette plutôt ! Viêt Nam Plus
refuse de se limiter aux prêts mais essaie de répondre aux besoins les plus pressants
de la vie, par exemple dans le domaine de l’élevage en formant des paysans
vétérinaires. Leur formation est très rapidement remboursée par les animaux qu’ils
sauvent chaque mois. Une fois formés, ils sont payés par les paysans en fonction des
services rendus, non plus par Viêt Nam Plus.
Le micro-crédit n’est pas non plus une sinécure ! Dans
l’ensemble le taux de remboursement est de 99,9%. Les
femmes en retard sont moins de 5% ! Mais au prix de quels
efforts ! Hiên, agronome de Viêt Nam Plus, en sait quelque
chose ! Parmi les 16 communes et quelques 100 villages
actuellement couverts par Viêt Nam Plus, elle a hérité de 2
villages à Tân Hà. Commune très pauvre, les terres sont
mauvaises, et les paysans vont souvent travailler loin.
Hiên !
Dans le 1er village, pas de problème, mais patatras dans les
2 autres ! On dit que Madame Phai, vice-présidente de
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l’Union des Femmes répand la rumeur que « les prêts de Viêt Nam Plus ne doivent
pas vraiment être remboursés, c’est de l’argent étranger ! » La présidente de l’Union
des Femmes de Tân Hà –Madame Nghia – est très sympathique, mais n’a pas le
soutien nécessaire du comité populaire.
Un scénario que l’on retrouve parfois dans ces situations : les femmes élisent une chef
de groupe qui en fait leur a emprunté à titre privé, et ne paie pas ses dettes ! La chef de
groupe doit collecter les remboursements et les livrer à Hiên lors de la réunion
hebdomadaire. Malheureusement Hiên ne peut venir chaque semaine ! Avec l’autre
commune dont elle a la charge aussi, cela lui fait 135 groupes, sans compter son
programme agricole ! Elle doit donc déléguer progressivement aux chefs de groupe, et
aux coordinatrices villageoises formées par le programme. Comme beaucoup de
femmes travaillent aux champs, parfois loin, elles ne sont pas très assidues aux
réunions de leur groupe. Les membres apportent l’argent à la chef de groupe, et filent
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Organe du parti communiste, qui dispose d’un vaste réseau dans les villages.
aux champs. Après quelques semaines, elles ne savent plus très bien où elles en sont
dans leurs remboursements !
Vient le jour où Hiên en a assez : « en participant au programme et en empruntant,
vous vous êtes engagées à respecter le règlement ! Vous devez vous réunir chaque
semaine ! » La chef de groupe se dérobe, prétend que les femmes de son groupe n’ont
pas payé… De réunion reportée en réunion reportée, le problème prend de l’ampleur ! Il
apparaît au bout d’un mois ou 2 que la chef de groupe a bien collecté l’argent et au lieu
de le remettre à Hiên, l’a utilisé pour rembourser ses propres dettes ! Avec le
consentement implicite des femmes du hameau, qui ont ainsi été remboursées sur le
dos du programme !
Bientôt Hiên a le plus grand mal à rencontrer qui que ce soit
dans ces villages. Quand elle vient par surprise chez une des
membres du groupe, un enfant répond que sa mère est partie,
pendant qu’elle se dérobe par la porte de derrière ! Pourtant,
certaines dans le groupe enragent et dénoncent, car Viêt Nam
Plus n’accorde plus aucun prêt à toutes les femmes d’un
groupe, en cas de défaillance d’une seule membre. Hiên a
demandé de l’aide, un autre membre de Viêt Nam Plus est allé
avec elle : les gens les ont menacés de coups, elles ont dû
battre en retraite ! Pas de honte, le policier communal s’est luimême encouru l’autre jour !
Les comptes deviennent
Hiên a fait appel au comité populaire : moins de 10% des un cauchemar quand les
femmes convoquées sont venues. Les cadres du comité femmes ne viennent pas
populaire traînent les pieds : « Ah ces femmes, que de bruit !
aux reunions.
Qu’elles règlent leurs disputes ailleurs ! Madame Hiên !
Organisez vos réunions ailleurs et réglez vos problèmes ! » crie un chef de village. Hiên
me glisse dans l’oreille que lui-même est en dispute avec la banque. Hiên rétorque : «
Toutes les demandes de prêt au programme ont été approuvées par vous, nous ne
faisons rien sans collaborer avec les autorités locales ! C’est votre devoir de nous aider
! » Hiên récupère tout de même 625.000 d2, et une nouvelle réunion est fixée pour le
dimanche matin, 8 heures. « C’est vous qui vous occupez de ça, mais j’essaierai de
venir », lance le chef de village, peu convaincant ! Samedi, Madame Nghia,
responsable de l’Union des Femmes appelle Hiên : « Elles veulent reporter la réunion,
dimanche il y a la messe ! »
Mercredi Hiên retourne au village. Une douzaine de femmes sont là, mais pas celles qui
ont des dettes. Hiên annonce que Viêt Nam Plus ne donnera plus rien à la commune
tant que ce ne sera pas réglé. Au comité populaire un cadre veut participer à une
formation agricole, Hiên refuse. Madame Nghia prévient : « le gouvernement ne
donnera plus aucun prêt, ni la banque, à toutes les femmes en faute », et les femmes
présentes applaudissent.
Ouf, ces 2 villages sont vraiment des cas d’espèce ! Hiên sait être tenace et aura gain
de cause, mais cela prend du temps, beaucoup d’énergie et une motivation… énorme.
Merci Hiên.
2
46 euros.
2
Bernard KERVYN
Le 27 juin 2002.
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