Echappez au(x) genre(s)
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Echapper au(x) genre(s) : Le travestissement dans la pratique photographique de deux artistes : Claude Cahun et Pierre Molinier Léonie LAUVAUX Doctorante en Arts Plastiques. Université Rennes II. Place du Recteur Henri Le Moal 35043 RENNES Cedex. France. Comment s'identifier l'un à l'autre quand l'autre semble nous renvoyer un reflet erroné de ce que nous sommes? Comment conquérir une nouvelle identité hors des genres déjà établis? C'est ce que Claude Cahun et Pierre Molinier ont tenté de résoudre grâce à l'utilisation du travestissement en photographie. Grâce à de nouvelles théories sur le genre, les Gender Studies, ils abandonnent le modèle classique de la différence sexuelle. Ils se griment, se maquillent, se déguisent, jouent avec leurs corps, le manipulent, pour le faire correspondre avec l'image mentale qu'ils ont de lui. La photographie devient performative, elle permet l'expérimentation corporelle et plastique, d'aller au bout de la découverte de soi. 1. Gender Studies, conquête d'une nouvelle identité. 1. 1. Butler et Freud. L'identité sexuelle. Claude Cahun, Pierre Molinier, tout deux photographes, contemporains l'un de l'autre, une femme, un homme, ont tout deux travaillé sur la question de l'identité en photographie. Pour cela, ils ont pris le parti de se travestir devant l'objectif, mettant à mal les clichés de la représentation binaire des corps, homme vs femme. Par le médium photographie, et grâce au travestissement, ils remettent en cause l'ordre établi de l'identité sexuelle. Cette question même de l'identité sexuelle a été théorisée selon différents modèles. Le modèle patriarcal d'abord, qui met en place une division naturelle des deux sexes entraînant une division des rôles sociaux. Dieux, la Nature, ont « fait » les hommes comme ils sont. Il est donc inenvisageable de remettre en cause la suprématie de l'homme sur la femme. L'homme se doit d'être le sexe fort, la femme le sexe faible. La biologie est un élément déterminant dans la classification des deux sexes. Ainsi, la femme, par son utérus, est réduite à un rôle procréateur et maternel. L'homme incarne, grâce à son phallus, force et domination. Dans ce système, les identités se construisent l'une contre l'autre, dans un antagonisme. L'homme serait donc fort, dominant et la femme faible et docile, etc... Mais, dans cette dichotomie, les critères supposés définir l'un ou l'autre sexe sont toujours établis par rapport à l'homme, seul vrai « genre». La femme ne peut alors se construire quand dans l'opposition, la différence. Aussi, dans ce modèle patriarcal, les rapports sociaux sont transmis par la mère pour la fille, le père pour fils, et tout autre membre du même sexe, sans jamais les remettre en cause. Les adopter et les transmettre à son tour. Les garçons et les filles sont dans l'obligation de devenir Homme, et devenir Femme. Etre un homme masculin et une femme féminine, nulle possibilité d'explorer les limites du genre. Un second modèle, le modèle féministe, vient remettre en cause la domination masculine et donc le modèle précédent. Ce modèle tend à la revalorisation du féminin et oeuvre en quête d'égalité. Dans son ouvrage « Le deuxième sexe », Simone de Beauvoir écrit « On ne naît pas femme, on le devient1. » La philosophe minore le rôle de la biologie dans la construction de l'identité sexuelle. Ce sont des rapports sociaux et culturels qui « font » l'homme et qui « font » la femme. C'est en partie, l'éducation reçue par le jeune enfant qui va lui servir à s'identifier à l'un ou à l'autre sexe. Nous pouvons inclure, dans ce modèle féministe, Judith Butler et ses théories Queer que j'aborderai juste après l'évocation du troisième et dernier modèle. Troisième et dernier modèle donc, le modèle postmoderne. Aucune valeur n'est donnée au sexe comme au genre. La diversité humaine ne peut être réduite à un ensemble de caractéristiques. Le genre comme le sexe serait construits socialement, culturellement, biologiquement. Mais, le sexe reste un élément déterminant dans la construction identitaire. Cependant, hors de ces trois modèles, l'identité est avant tout un sentiment d'appartenance à un sexe biologique, homme ou femme. Claude Cahun a oeuvré, grâce à son travail photographique, à une in-définition identitaire. Ses autoportraits constituent une recherche constante d'un troisième genre, qui ne soit ni féminin ni masculin mais neutre. Dans une de ses photographies de 1929, Claude Cahun se présente nue, les bras cachant sa poitrine. Elle porte les cheveux courts et un masque cache ses yeux. Elle est agenouillée sur un édredon tenu derrière elle, sur lesquelles des spirales tiennent lieu de motif. L'exposition de la photographie constelle de taches lumineuses les genoux, le ventre, les mains de l'artiste. Deux larges zones d'ombre, en haut et en bas de la photographie encadrent l'image. Les spirales de l'édredon se mêlent au corps de Claude Cahun pour créer un ensemble de volutes. Avec cette photographie, Claude Cahun se met à nue dans les deux sens du terme : physique et symbolique. Elle se présente sans artifice, seule trace du travestissement : le masque. Elle est nue, en pleine lumière. Sans être tout à fait à l'aise avec ce corps. La féminité de ses formes ainsi que le motif spirale est nié par ses cheveux courts, ce qui fait d'elle un être androgyne. Ce sentiment d'incomplétude est directement lié à cette question d'un troisième genre. Claude Cahun cherche une sorte d'apaisement, un équilibre entre les parts de féminité et de masculinité qui sont en elle. Le jeu photographique a, tout au long de la vie de Cahun, servi sa quête identitaire. Ce même sentiment d'incomplétude est présent dans le travail de Pierre Molinier. Cette recherche du féminin l'amène dans ses photographies à l'utilisation du travestissement. Ce dernier lui permet de nier son anatomie naturelle pour s'inventer une autre forme de désir. Il pose, de manière répétée et sans fin en bas, porte-jarretelles, talons et masques, dans des poses à caractère sexuel. Le souhait, le besoin de Molinier lorsqu'il se travestit est d'aboutir à une nouvelle corporalité, hors de son sexe biologique, un corps qui serait féminin et masculin à la fois. En 1955, les prémisses de sa scénographie sont déjà mises en place : un Pierre Molinier masqué, ganté, vêtu de dentelle et de bas, et les chaussures à talons, éléments indispensables à son travestissement. Il est là, assis sur le bord d'une table en bois sur laquelle un chapeau, qui fait office de vase, est posé. L'ombre au mur de Pierre Molinier nous révèle l'utilisation de la lumière et l'artificialisation, le caractère fictif de la mise en scène. La notion d'identité est mouvante et propre à chaque personne. Il existe une multiplicité de définitions de la notion d'identité. La psychanalyse freudienne et lacanienne qui interroge également cette question de l'identité et la différence sexuelle me paraît ici intéressante d'aborder. En effet, pour les deux psychanalystes, l'identité sexuelle serait construite autour de l'idée de Phallus, avec pour les hommes, sans pour les femmes. L'absence de phallus chez les femmes se traduirait par l'idée du manque. Serait-ce pour combler ce manque que Claude Cahun s'est tournée vers le travestissement ? Chez Lacan, la femme « est » le phallus en tant que représentation du désir masculin. L'homme lui « a » le phallus. Cahun, en se travestissement en homme obtient ce phallus. En tentant de combler le manque originel du phallus et en mimant le masculin, Claude Cahun se fait « femme phallique ». Il y a deux possibilités pour acquérir ce statut de « femme phallique » et d'obtenir le phallus, soit comme dans le cas de Claude Cahun, de pasticher le masculin, soit en devenant objet de désir de l'homme. Pierre Molinier, en se travestissant en femme, se rend désirable et quand l'illusion est parfaite, devient femme phallique d'autant plus qu'il en perd sa virilité. Molinier va même jusqu'à se présenter « castré » même dans certains de ses autoportraits. 1 Simone de Beauvoir, Le deuxième sexe 1, Gallimard, 1949, pages 285 et 286 Molinier a réalisé de nombreuses photographies retouchées, gommant son sexe, le castrant. Sur l'une d'elles, l'artiste se présente debout, les jambes écartées, le paravent recouvert de toile de Jouy derrière lui. Il porte visiblement une perruque, ses yeux sont recouverts de son masque et le reste du visage voilé d'une résille. Ses bras tendus et écartés sont emmitouflés d'un tissu noir et des bas habillent ses jambes. Sur cette photographie, la retouche effective n'est pas encore masquée par un nouveau tirage. En effet, l'on voit au niveau du sexe et de la tête des coups de crayon blanc, pour affiner le crâne d'abord, et pour gommer le sexe ensuite. La recherche d'identité dans laquelle s'inscrit le travail des deux artistes coïncide avec une recherche de sens. Il est en effet question de donner du sens à son existence. La théorie Queer de Judith Butler que j'ai évoquée plus haut porte un intérêt fort pour le personnage du travesti. Son ouvrage, « Trouble dans le genre », paraît en 1990 aux USA et seulement en 2005 en France. Les femmes, surtout, ont porté un intérêt fort pour les Gender Studies, car en effet, il y est question d'échapper au déterminisme biologique dans l'espoir de s'émanciper des carcans sociétaux et de la domination masculine. Pour Butler, le genre est performatif. En effet, il est un ensemble d'actes et ce sont ces actes qui sont socialement codés qui classent en deux catégories antinomiques d'un côté les femmes, de l'autre les hommes. Dans « Trouble dans le genre », Butler revient sur les théories de certains psychanalystes dont Joan Riviere. Pour elle et pour Butler, la féminité est une mascarade. Cette mascarade serait l'essence même du genre. « Ainsi, le genre n'est jamais vrai, jamais original, mais bien une imitation, comme l'est une pratique du travestissement ou de drag. Selon Butler, les pratiques des personnes transexuées, transgenrées et travesties ne sont pas que le pâle reflet d'un genre original, mais elles viennent plutôt démontrer le côté artificiel, factice, construit de l' « original » en fonction des normes et des cadres de pouvoir dominants 2. » Le travestissement est une manière de perturber le genre, de mettre du « Trouble dans le genre ». 1.2. La pratique du travestissement chez Cahun et Molinier. Dès 1910-1915, Claude Cahun, de son vrai nom Lucy Schwob, réalise des autoportraits où elle tente d'échapper aux genres sous le mode de l'androgynie. Comme le confirme l'utilisation de son pseudonyme, Claude, elle tente d'échapper à son identité biologique, à l'appartenance à un sexe. Claude Cahun, artiste hors-norme, s'exile pour pour échapper aux carcans sociétaux. Elle recherche dans son travail photographique à créer un troisième sexe, ni homme, ni femme, mais différent. Elle n'hésite pas à se raser la tête, les sourcils, s'habiller en homme, puis en femme, puis en un sexe indéterminé. Claude Cahun, être androgyne ne voulait appartenir à aucun genre établi et refusait les stéréotypes de l'identité sexuelle. Durant sa carrière photographique, elle réalisa au moins 400 photographies, quasiment toutes des autoportraits. Suzanne Malherbe (Marcel Moore) a sans doute participé activement à la prise de vue photographique même si les photos restent qualifiées d'autoportrait. Par son androgynie affirmée, le prénom « Claude » le confirme, Claude Cahun s'identifie à plusieurs niveaux au sexe masculin, à l'homme, voire même à son père. L'identification à sa mère lui étant de toute façon impossible, internée tôt, elle meurt folle dans une clinique parisienne. Cahun réalise vers 1928 un autoportrait de profil. Le crâne rasé, une veste d'homme sur les épaules. Cette photographie fait directement référence à une autre photographie datant de 1917, un portrait de Maurice Schowb, le père de Claude Cahun. Même pose de profil, même nez, mêmes cheveux courts. L'identification au sexe masculin n'est donc plus à prouver. Pourtant, dans d'autres autoportraits, l'artiste se présente « en femme ». Maquillée, parée d'atours, en robe, comme dans l' « Autoportrait en costume de Barbe Bleue » de 1929. La robe est longue, le buste corseté. La peau pâle de Cahun tranche violemment avec le fond noir. Mais en réalité, Claude Cahun ne se présente pas ici en femme : mais donne simplement l'illusion d'être une femme. Par le déguisement, elle se 2 Audrey Barile, « De la construction du genre à la construction du « sexe »: les thèses féministes postmodernes dans l'oeuvre de Judith Butler », Recherches féministes, vol.20, n°2, 2007, p. 61-90 fait mascarade du féminin. Elle ne s'incarne jamais vraiment dans un sexe ou dans l'autre. Elle ne se fixe pas dans un genre mais alterne de façon compulsive. Est-ce là que peut-être, dans cette allerretour constant, qu'elle trouve son équilibre. C'est en effet ce qu'avance Georgiana Colville dans son article « De l'éros des femmes surréalistes et de Claude Cahun en particulier » : « Le verbe « oser » étant l'anagramme d'eros, on peut dire que toute sa vie, Claude Cahun (1894 – 1954) a osé se fabriquer un éros autre et indéfinissable. Claude Cahun était-elle une femme? Il [me] semble que c'est la question qu'elle aurait voulue que nous nous posions et la réponse restera toujours oui et non3. » Car en effet, Cahun ne se sentait ni homme, ni femme, mais d'un genre neutre et elle l'expose dans son ouvrage « Aveux non avenus » : « Masculin? Féminin? Mais ça dépend des cas. Neutre est le seul genre qui me convienne toujours. S'il existait dans notre langue on n'observerait pas ce flottement de ma pensée4. » Pierre Molinier lui, qui aurait voulu être une « femme lesbien », est dans une problématique légèrement différente de celle de Claude Cahun. Il n'est pas à la recherche d'un troisième genre qui serait neutre. Il tente dans ses photos d'incarner un être hybride, qui soit homme et femme à la fois afin d'arriver à une certaine complétude. Il vient au monde dans la ville d'Agen en 1900. Elevé dans des écoles chrétiennes qui le dirigent vers la prêtrise, il décide de se tourner vers la peinture et prend des cours du soir. Il s'installe à Bordeaux où il s'établit en tant que peintre en bâtiment. Il s'y marie et à deux enfants. Après le décès de son père, puis le départ de sa femme et de sa fille, Pierre Molinier décide de bouleverser totalement sa vie. C'est à ce moment précis, qu'il commence à se travestir devant l'appareil photographique. Pourtant, au début, son intérêt pour la photographie est tout autre. En effet, il la voyait d'abord comme le moyen le plus efficace et le plus efficient de reproduire ses tableaux. Elle devient petit à petit un moyen d'expression comme le dessin et la gravure. Dans les archives de Pierre Molinier, il a été trouvé beaucoup de photographies préparatoires, d'autres non satisfaisantes, des montages, mais rien à proprement parler sur ses débuts photographiques. Même si aujourd'hui il est davantage et principalement reconnu comme photographe plutôt que comme peintre, il n'y a aucune de ses peintures dans les collections nationales, il se définissait avant tout comme peintre plutôt que comme photographe. Il avouait d'ailleurs trois de ses passions, à savoir dans l'ordre, « la peinture, les filles, le pistolet ». Mais seules ses photographies et photomontages connaissent un rayonnement international. Grâce à la photographie, Pierre Molinier oeuvre à la création d'un être hybride, hermaphrodite même, où homme et femme résident à la fois dans un seul corps, le sien. Ses photographies impudiques où il n'hésite pas à embarquer ses amis dans de véritables mises en scènes perverses sont pour lui une vrai catharsis. En effet, elles démontrent plastiquement des tiraillements qui le hantent sur sa propre identité. Pour exprimer ses fantasmes auto-érotiques, le collage photographique semble la technique la plus efficace. Pour un seul photomontage, Molinier réalise plusieurs autoportraits préparatoires, bien souvent retouchés. J'évoquerai ici trois de ces autoportraits préparatoires. Il s'agit de trois poses différentes autour d'une même chaise. Pour la première, l'artiste est à genoux sur la chaise, les mains sur un coussin. Pour la seconde, il n'a plus qu'un seul genou sur la chaise, et ses bras sont posés sur le dossier, et pour terminer, il se retrouve assis, jambes croisées, les mains sur les hanches. Pierre Molinier est vêtu de bas, de talons hauts, gants, masque et résille. En plus de la pose, la variation provient de l'utilisation des vêtements. Parfois, il ne porte qu'un soutien-gorge en plus de sa panoplie déjà énoncée, parfois il le recouvre d'un foulard, et enfin il porte ce dernier au tour du cou, ayant camouflé le soutien gorges tout en gardant l'arrondi de la poitrine. Molinier a énormément recours à la retouche qui lui permet de concilier son corps d'homme avec ses fantasmes féminins, où sa représentation féminine se doit de répondre à un certain nombre de critères de beauté. Il accorde d'ailleurs beaucoup de soin et d'attention aux jambes : les siennes, mais aussi celles des personnes qui posent pour lui. Deuxième étape de ce photomontage : se photographier en « homme », nu, chaussettes au pieds. Je ne m'étendrai pas sur cette étape et passe donc tout de suite à la troisième et derrière étape, 3 Georgiana Colville, De l'éros des femmes surréalistes et de Claude Cahun en particulier, Paris, Mars 2006. Disponible sur http://melusine.univ-paris3.fr/astu/Colville.htm. 4 Claude Cahun, Aveux non avenus, Paris, Editions du Carrefour, 1930, p. 176. l'assemblage. Dans le photomontage finalisé, le Pierre Molinier « femme » n'est pas un des autoportraits préparatoires dont j'ai parlé qui a été sélectionné. Sûrement jugés pas assez satisfaisants, c'est une photographie où Pierre Molinier se présente parés de ses atours, les jambes « en l'air » qui a été choisie. Le Pierre Molinier « homme » est debout, le dos courbé et semble fin prêt à pénétrer son alter-ego féminin. Il existe beaucoup de collages de ce genre chez l'artiste. Comme le montrent les études pour « Poupée violée » et « Mandrake » se régale. Une fois encore, il est présent sur la photographie sous la forme de deux individus de sexe différents, le Pierre Molinier « femme » se faisant pénétrer par le Pierre Molinier « homme ». La perversion atteint son maximum dans les tentatives d'autotriolisme, où trois Pierre Molinier, hommes et femmes à la fois « s'emboîtent » littéralement les uns dans les autres. Même la verge en érection, il porte des talons hauts, brouillant tout les codes établis de la différence sexuelle. Chez les deux artistes, Claude Cahun et Pierre Molinier, la pratique photographique du travestissement leur permet d’inventer un nouveau corps et une nouvelle identité. En effet, comme le dit Jérôme Carrié, « Ces images artistiques articulant la surface corporelle avec l’interface photographique sèment le trouble dans la représentation des sexes, cette forme d’indistinction n’est pas seulement une pure transgression des oppositions du sexe, elle révèle la dimension construite et la structure imitative du genre. Ces artistes semblent nous dire qu’il n’y a pas d’essence du féminin et du masculin, et que les attributs accordés aux hommes et aux femmes ne sont en fait que l’objet d’un travestissement et d’un processus culturel d’apprentissage et d’assignation5. » 2. 1. Mise en scène et outils du travestissement. La pratique de l'autoportrait chez Cahun et Molinier est une pratique quasi-quotidienne, une performance. Chez l'un comme chez l'autre, les archives ont révélé un nombre incroyable de photographies, pas moins de 400 chez Claude Cahun, et autant d'identités différentes. Concernant Cahun, il est sans nul doute que Suzanne Malherbe (Marcel Moore) a participé aux prises de vues même si les photos sont qualifiées d'autoportraits. Dans les archives de Pierre Molinier, beaucoup de photographies préparatoires ont été trouvées, certaines d’entres elles n’étaient pas satisfaisantes, d’autres constituaient des montages, mais rien à proprement parler sur ses débuts photographiques. La date exacte de ses premiers autoportraits photographiques et de ses premiers travestissements reste inconnue. Dès 1913, Claude Cahun n'a de cesse de réaliser des autoportraits en lien avec un travail d'écriture. Elle est tour à tour, femme voyante, moine bouddhiste, artiste de foire, poupée, nue sans artifices, homme aux cheveux courts... dans une constante métamorphose. Moliner lui, incarne toujours le même personnage, cet être hybride mi-homme, mi-femme, puissamment érotique, parfois retouché, visant l'illusion de la femme parfaite. L'abondance de photographies annonce une profusion de mises en scène tout autant différentes chez les deux artistes. Cahun se met en scène, chez elle, ou dans son jardin à Jersey. Chaque lieu est un lieu de mise en scène possible. Parfois, le lieu se fait incongru comme dans cet autoportrait de 1932, où elle est déguisée en petite fille endormie, dans une armoire. Cette dernière est imposante, encadrée par deux grandes portes et quatre longs tiroirs. Les deux portes battantes ouvertes laissent découvrir le corps endormi de Claude Cahun. Des boîtes et flacons sont posés sur des étagères au dessus d'elle. La « fillette » Cahun, noeud dans les cheveux, chemisette à pois, bras ballants, socquettes blanches n'est sans évoquer l'onirisme du monde imaginaire d'Alice au pays des merveilles. Habituellement chez Cahun, la mise en scène est moins élaborée, plus rudimentaire. De grands carrés de tissus tendus, tentures et rideaux servent de décor sommaire aux photographies. Cette simplicité de fond a l'avantage de concentrer tout l'intérêt sur le personnage incarné par l'artiste grâce à ses différents travestissements. Je vais ici prendre l'exemple de deux autoportraits réalisés à un an d'intervalle seulement mais foncièrement. Dans le premier, datant de 1928, Cahun est habillée en costume d'homme, foulard blanc noué au tour du cou, crâne rasé, devant un mur recouvert d'un rectangle de 5 Jérôme Carrié, Du jeu à la norme : l'art du travestissement, Emplan, 2007/1 n°65, p. 13-17. tissus. Elle affirme ainsi son androgynie. Dans le second autoportrait, de 1929, l'artiste se présente masquée, portant une perruque et vêtue d'une grande cape noire sur laquelle plus d'une dizaine de masques sont apposés. Le fond est une fois encore une fois composé de tissus, deux rideaux foncés encadrant une tenture à motifs. Cahun, cachée derrière son masque est non-identifiable, une espèce de pantomime désincarnés. Malgré la similitude de la pose, debout devant un fond composé de tissu, les deux mises en scène différentes rendent toutes les deux trouble et insaisissable l'identité de Claude Cahun. La « trame » du travail de Cahun est là, se métamorphoser sans cesse et échapper à toute catégorisation. Pierre Molinier a quand à lui fait le choix de ne se photographier que dans l'intimité de sa maison. Son décor une fois posé reste identique au fil des années. En effet, Molinier s'est construit un décor quasiment invariable dans son grenier : lors des premières photographies, il se positionne contre le mur et entre deux lampes. Ne possédant pas de retardateur, lors de la prise de vue, il tire un fil relié à l'appareil grâce à un système de minuscules poulies pour déclencher la photographie. Puis, quelques années plus tard, il modifie la scénographie en ajoutant un rideau et deux paravents recouverts de toile de Jouy cadrant la scène. Le progrès technique aidant, il passe ensuite à un déclenchement avec poire. Occasionnellement, Molinier peut être amené à réaliser ses photos ailleurs qu'au grenier, dans son lit, son salon voire son atelier. Autre élément récurent chez Molinier, son travestissement, invariable, construit autour de l'idée de fétichisme, comprenant bas, chaussures à talons, porte-jarretelles, maquillage outrancier... Pierre Molinier, mort de n'avoir pu être homme et femme à la fois « [...] a hérité de cette part masculin (l' « andro »), qu'il accepte d'ailleurs volontiers ; mais, devant le sentiment d'incomplétude qu'elle laisse en lui, il n'aura de cesse qu'il n'acquiert la part féminine qui lui fait défaut (le « gunê »)6 ». C'est cette incomplétude, cette recherche du féminin qui l'amène à l'utilisation du travestissement dans ses photographies. Plus les années passent, plus Pierre Molinier renforce et enrichit son travestissement. Il coud lui-même ses sous-vêtements féminins, pour cela il part d'articles du commerce et les retouche. Les chaussures, elles, sont faites sur-mesure. Pierre Molinier chausse du 42, il lui est donc impossible de trouver dans le commerce une paire de chaussures à talons hauts. Mais comme il n'est pas totalement satisfait par la hauteur du talon qu'il juge insuffisant, il en taille dans du bois qu'il recouvre de cuir. Il réalise également son « éperon d'amour », godemiché de fabrication maison qu'il fixe au talon et qui lui permet de se sodomiser, face à l'appareil photo, tout en se regardant dans les divers miroirs fixés dans la pièce. Pour que l'illusion d'un corps féminin soit presque parfaite, Molinier se voue à de longues séances d'épilation, il se rase les jambes, les aisselles, le pubis... Il complète cette mascarade en ayant recours à des artifices qui sont l'apanage des femmes, à savoir le maquillage comme la poudre de riz, le rimmel, le rouge à lèvres, les faux-cils et faux-ongles, le vernis... Cette volonté de métamorphose du masculin vers le féminin grâce aux artifices du travestissement est certes déjà sensible dans ses premiers autoportraits, mais l'est d'autant plus et de manière plus affirmée et assumée dans ses autoportraits plus tardifs, comme dans l' « Autoportrait en travesti » des années 60. Pierre Molinier s'y présente assis sur un fauteuil, dans un décor fait d'un tapis au sol et d'un paravent recouvert de toile de Jouy en arrière-plan. Son visage est recouvert d'un loup et d'une résille ce qui permet d'adoucir sa mâchoire carrée. Un foulard est noué à son cou, un vêtement négligemment baissé laisse découvrir sa poitrine. Des bas sont mis sur ses jambes croisées. Il porte des bijoux de femme, un bracelet au poignet et un à la cheville. Ses ongles sont longs et vernis. Une paire de chaussures probablement à talons hauts vient parfaire le travestissement. Pierre Molinier ne regarde pas directement l'objectif de son appareil photo. Sa tête est tournée vers un hors- champ qui nous est inaccessible. Peut-être contemple-t-il son reflet dans un miroir, c'est ce que laisse à penser son large sourire, tandis qu'il déclenche la prise de vue à distance. Le choix de la pose révèle une volonté d'incarner une attitude féminine. L'androgynie dont fait preuve Molinier est rendue possible grâce au travestissement. En, effet, l'artiste se pare des différents atours d'une femme, oscillant doucement vers l'idée de fétichisme par l'utilisation répétée et massive de ce que j'appellerais des 6 Pierre Petit, « Changer de corps : Fantasmes et réalités chez Pierre Molinier » , Modèles, fantasmes et intimité, sous la direction de Jean-Michel Devèsa, actes du colloque de décembre 2004, Pleine Page éditeur, 2005, p. 21 « totems », les bas, les escarpins.... L'illusion est presque parfaite, seul hic au niveau de sa poitrine désespérément plate. Au fil des années qui passent, Molinier continue à perfectionner son travestissement. Il est en recherche constante de la bonne pose, chaque séance est l'occasion de rendre ces poses plus nombreuses et d'en constituer des séries. Allongé sur un lit, toujours vêtu de son masque, porte-jarretelles, cette fois-ci en dentelle, chaussures à talons, gants longs, il se pince un téton et se masturbe, puis se pince les deux tétons, les jambes pliées et le sexe en érection. Il reprend ensuite les deux poses précédentes et y apporte des variations. 2. 2. Illusion et jeu de miroirs. La photographie est le médium par excellence pour faire croire à l’illusion. En effet, elle permet un certain nombre de retouches et de manipulations. Pierre Molinier a recours à un certain nombre de retouches sur la photographie, dans le but de faire coïncider l'image mentale du corps féminin si parfait qu'il tente d'incarner avec l'image du corps photographié. C'est ce que nous apprennent les archives de l'artiste regroupées par Jean-Luc Mercié dans un ouvrage consacré à l'artiste, édité aux presses du réel. Dans une de ces photographies, Pierre Molinier se présente semi-assis, face à l'appareil photo, les genoux écartés et le sexe à nu. Le masque, élément récurrent, cache encore une fois ses yeux. Le travestissement est complété par un collier au ras du cou, toujours ces mêmes longs gants noirs, un corset porte-jarretelle prolongé de bas et d'une paire d'escarpins. Derrière lui le décor est sommaire, il ne pose pas ou pas encore devant le paravent recouvert de toile de Jouy, il est même possible que la photo ne soit pas encore recadrée. Pas assez satisfait par la largueur de la taille, qu'il juge trop large, Pierre Molinier la rectifie et l'affine au crayon directement sur la photographie. Celle-ci sert sûrement d'étude préparatoire afin de tirer le cliché définitif, en passant par une retouche directement sur négatif. Dans plusieurs de ses séries, Molinier se focalise sur certaines zones de son corps et en réalise des gros plans. Ainsi, il photographie « Son cul », ou bien « ses jambes » à plusieurs occasions en opérant un cadrage serré sur ces parties du corps. Avec l'utilisation du gros plan, le fragment montré se charge d'une puissance évocatrice forte. Ainsi, Molinier met en place un véritable fétichisme de certaines parties de son corps, un érotisme fragmenté. Le corps se fait manipulable et ajustable aux désirs changeants de Molinier. L’érotisme en photographie se trouve au croisement entre la notion d'authenticité et celle de censure. L’intimité esthétisée est directement proposée au spectateur. Ici, le spectateur n'est autre que l'artiste lui-même, et les quelques privilégiés qui faisaient partie de son cercle intime. Ce qui n’est pas montré, ce qui est caché à la vue, a le pouvoir de rendre l’image plus érotique encore. Le spectateur-voyeur, Pierre Molinier, peut projeter sur le corps ses fantasmes, ses désirs. Molinier mime le féminin, « pour qu'enfin l'insupportable corps réel coïncide avec le corps désiré et désirable 7 ». L'alliage de la photographie et du travestissement lui permet de mettre en image ses fantasmes d'auto-érotisme et d'assouvir sa pulsion scopique et masturbatoire. En effet, lors que la prise de vue, Pierre Molinier, entouré de miroirs s'admire sous toutes les coutures, dans toutes les postures. Claude Cahun éprouve également une fascination pour le masque et le miroir, rehaussé par l'androgynie et l'inversion. En 1928, elle réalise un autoportrait où elle se présente debout de profil, le visage de trois-quart. Ses cheveux sont courts et elle est vêtue d'une longue veste à carreaux. Le miroir, symbole de sa quête identitaire renvoie son reflet androgyne. Le miroir a le pouvoir de renvoyer l'image reflétée inversée par rapport à son modèle. Claude Cahun double ses identités toujours insaisissable, à la fois homme et femme, pile et face, Janus aux deux visages. Le miroir, détenteur de la vérité, « miroir, miroir, dis moi qui est la plus belle », est symboliquement ouverture vers un autre monde. Monde imaginaire chez Lewis Caroll, lieu de tous les possibles. La thématique du double et du mimétisme est récurante dans le travail de Claude Cahun. Elle réalise un travail de surimpression, dans un autoportrait de 1929, avec deux photographies dont l'une évoquée précédemment. La première photographie a subit une 7 Dominique Baqué, Mauvais genre(s), érotisme, pornographie, art contemporain, Editions du Regard, Paris, 2002, p. 111. surexposition. Claude Cahun est face à nous, dans le costume de barbe noire. Juste derrière elle, une autre Claude Cahun, de plus petite taille. Petite voix, conscience? Doublement de sa personnalité mouvante? Quoi qu'il en soit, cet autoportrait comme le suivant, et comme tant d'autres encore, sont l'expression du dialogue intérieur qui tiraillent Claude Cahun, et cela sans répit. Le second autoportrait dont je souhaite parler présentement est beaucoup plus énigmatique voir même dérangeant. Deux portraits de l'artiste, crâne rasée, évoquent un monstre à deux têtes. Un visage se fait plus menaçant, l'autre interrogatif, et semble interroger son double « Que me veut-tu » (titre de l'autoportrait). Cahun s'interroge, que veut-elle? Comment vivre en étant deux, à la fois semblables mais différents, dans un seul et même corps? Pour tenter de répondre à toutes ses interrogation sur sa propre identité, Cahun fait de son corps est un lieu d'expérimentation : elle se colore les cheveux plusieurs fois. Se rase la tête et les sourcils. Se travestie en homme. « Claude Cahun emprunte mille et une identité, utilisant maquillage, vêtements, postures et attitudes, aussi diverses que déconcertantes, sans jamais omettre d'en fixer la trace, mnémonique et bien réelle, au moyen de la photographie8. » Cette expérimentation corporelle va être complétée par des expérimentations techniques, aussi bien chez Cahun que chez Molinier. Aussi, la surexposition, la surimpression, le montage, la solarisation vont participer à brouiller encore un peu plus l'identité des deux artistes. L'image se fait inaccessible, l'identité illisible. Claude Cahun a illustré son ouvrage « Aveux non avenus », avec de nombreux photomontages. Ces images hétéroclites sont composées de fragments de ses autoportraits et d'autres photographies de provenance diverses. Les corps se mélangent, s'empilent, se touchent et s'enchaînent les uns aux autres dans une indistinction identitaire. Molinier superpose les négatifs, ce qui rend les images illisibles. Le corps n'est plus reconnaissable. Seules deux spectres de jambes nous rappellent la présence d'un corps furtif. Le corps est déconstruit, fragmenté, explosé même. L'artiste va plus loin encore pour brouiller les pistes en se photographiant avec la Poupée, qu'il a créé de toute pièce. Un tirage négatif le représente debout, travesti, appuyé à un grand tabouret. Debout, à ses côtés, la Poupée, en bas comme Molinier, porte la même voilette sur le visage. Qui est qui? Lequel des deux personnages n'est pas une femme? Les deux. La mascarade du féminin est mimée deux fois de deux manière différentes, une par un homme, une par un ersatz de femme, une poupée, un simple jouet. Seule la rigidité des membres de la poupée, sa droiture, la distingue de Pierre Molinier, courbé, dans une attitude lascive. Parfois, Pierre Molinier mêle son corps à celui de la poupée. Une fois, la tête de la Poupée est posée entre ses jambes, une autre fois, ce sont les jambes de la Poupée serrée contre sa poitrine. Ce méli-mélo de corps lui permet de réaliser des poses anatomiques impossibles. Ainsi, elles enrichissent la photographie et en permettent une nouvelle cartographie du corps, manipulable. Molinier était un proche du surréalisme, et l'on ne peut que mettre en relation son travail avec la Poupée avec le travail de Hans Bellmer et sa poupée, objet érotique manipulable à l'envie. Conclusion : Cahun et Molinier ont ouvert la voie à toute une génération d'artistes interrogeant l'identité qu'elle soit gay, lesbienne, transgenre... Michel Journiac, Cindy Sherman ou encore Matthias Herrman manipulent le corps et se travestissement devant l'appareil photo. Ils multiplient les identités, questionnent les limites du genre. Journiac réalise « 24h dans la peau d'une femme ordinaire » en novembre 1974. Il se travesti en femme et reproduit, sur un mode de la banalité, des rituelles des gestes féminins, depuis le réveil du mari en passant par l'exécution des tâches ménagères, (cuisine, vaisselle, ménage, lessive…), le départ pour le travail, le pointage, le déjeuner, le raccord de maquillage, les courses, l'achat de Tampax dans une pharmacie, jusqu'au retour de l'époux. Puis, se déroule la soirée avec entre autres le dîner, et enfin, dans le lit conjugal, l'entreprise de séduction du mari plongé dans la lecture de son journal. En se travestissant Michel Journiac remet aussi en cause les rôles et les conditionnements sociaux, sexuels dictés par un système normatif. En effet, en dénonçant une certaine oppression de la femme, cet artiste homosexuel 8 Muzzarelli Federica, Femmes photographes, Emancipation et performance (1850-1940), Hazan, 2009, p. 191. exprime en miroir, le rejet de l'homosexualité qui, à l'époque, ne sort qu'exceptionnellement de la clandestinité, ou est traitée comme une maladie. Il désapprouve cette société patriarcale. L'artiste épingle les gestes stéréotypés, conformes et quotidiens imposés par les conventions sociales. Cindy Sherman se trouve également dans un travail de falsification, de tromperie. Pourtant, ces autoportraits ne révèlent jamais rien d'elle, elle ne parle pas d'elle mais des Femmes en général. Les femmes incarnées par Sherman sont toujours stéréotypées, ses personnages sont issus de la culture populaire. Elle s'interroge sur les stéréotypes véhiculés par le cinéma et les médias, la création des personnages de la femme au foyer, de la femme fatale, etc... Dans son travail, le costume, l'accoutrement sert, soit à faire passer pour réel ce qui ne l'est pas, soit à affirmer des plus grossièrement l'inverse. Mais, même si les personnages qu'elle interprète sont fictifs, nous ne pouvons pas nier la femme qui s'expose et se cache à la fois. Comme Cahun et Molinier, elle se cache sous différents masques et fuit sans cesse. BIBLIOGRAPHIE : BAQUE D., Mauvais genre(s), érotisme, pornographie, art contemporain, Editions du Regard, Paris, 2002. BARILE A., « De la construction du genre à la construction du « sexe »: les thèses féministes postmodernes dans l'oeuvre de Judith Butler », Recherches féministes, vol.20, n°2, 2007, p. 61-90 BUTLER J., Trouble dans le genre, Le féminisme et la subversion de l'identité, Paris, La Découverte, 2005-2006 pour la traduction française. CAHUN C., Aveux non avenus, Paris, Editions du Carrefour, 1930. CARRIE J., Du jeu à la norme : l'art du travestissement, Emplan, 2007/1 n°65, p. 13-17. 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