Pour une participation active : de l`usager au citoyen
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Pour une participation active : de l`usager au citoyen
Congrès de l’UNCCAS 2002 Pour une participation active : de l’usager au citoyen FORUM N° 4 Présidence de la séance : Véronique FAYET, Adjointe au Maire de Bordeaux et Vice-Présidente de l’UNCCAS Intervenants : Hervé CARRE, Adjoint au Maire d’Angers Florence DELORIERE, Directrice Générale Adjointe du CCAS de Bordeaux Georges SANVICENS, Directeur de la Fédération nationale des centres sociaux Personnes-ressources : Claude GASCARD, Vice-Président du CCAS de Champigny-sur-Marne Marcel LOPEZ, CCAS de Sainte-Geneviève des Bois Marie-Lou CHAPPEE, Adjointe au Maire de Lorient La Fédération nationale des centres sociaux tente, depuis plus de 20 ans, de réfléchir sur la question de la participation active des citoyens. Cette Fédération souhaite développer une coopération avec les CCAS sur cette question, celle-ci devant être traitée de manière globale. En effet, cette question de la participation des citoyens représente un thème récurrent depuis plusieurs décennies. Cette problématique existe toujours, puisque la participation – le pouvoir donné aux individus d’être tant les maîtres d’ouvrage que les maîtres d’œuvre - n’est toujours pas optimale. En fait, poser cette question revient à s’interroger sur la refonte complète du système d’action sociale. Il est essentiel de traiter cette question, dans la mesure où le modèle de vie collective ne peut fonctionner que s’il est accepté par les citoyens. Le résultat du premier tour des dernières élections présidentielles l’a d’ailleurs montré avec une réelle acuité. Il faut donc remettre le citoyen au cœur du développement social, en lui donnant les moyens d’y participer. Ce constat vaut également pour le fonctionnement des services publics. De manière plus générale, ce débat autour de la participation des usagers revient à s’interroger sur les enjeux de la citoyenneté. Les notions de citoyen et de participant aux systèmes collectifs sont donc largement interdépendantes, et doivent être traitées de manière concomitante. Bordeaux, les 16 et 17 octobre 2002 1 Congrès de l’UNCCAS 2002 I. Le groupe de dialogue citoyen à Bordeaux Ce groupe est né en 2000, après deux années de réflexion. C’est un espace permanent d’échanges, de réflexions et de propositions entre usagers et CCAS. Il était important de sortir de la logique d’assistanat, visant à considérer l’usager comme un consommateur. Au contraire, l’usager devait être perçu comme une ressource, pouvant être un acteur du changement. Ce groupe était également doté d’objectifs opérationnels. En particulier, il devait pouvoir favoriser l’expression et l’autonomie de la personne, rendre plus lisible l’action sociale et faire évoluer les représentations des professionnels tout en modifiant la culture du CCAS. Pendant deux années, un conseiller technique a travaillé sur cette question, en expliquant tout d’abord aux agents du CCAS la logique de cette démarche. Par ailleurs, un important travail a été réalisé autour de l’élaboration d’une charte et une réflexion a été conduite sur la démarche d’évaluation. Ce projet a été amorcé grâce à un théâtre-forum, permettant de mettre en scène plusieurs situations de blocage au sein du CCAS. Force est de constater que cette mise en scène a parfaitement joué son rôle de catharsis. Aujourd'hui, ce groupe de dialogue citoyen comprend 15 membres permanents, des usagers et des agents du CCAS. Ils sont épaulés par des groupes ressources, ceux-ci étant représentés par des porte-parole qui interviennent au sein du groupe de dialogue de citoyen. Ces porte-parole remontent à ce dernier les demandes et les remarques formulées au sein des groupes ressources. Par ailleurs, les groupes de travail réfléchissent à des problématiques diverses, la question du logement ou de la gratuité des transports par exemple. Enfin, la dernière instance est constituée par la réunion plénière, qui comprend les 15 membres précédemment évoqués et la Direction du CCAS. Les participants à ce groupe de travail se sont fortement impliqués, tant au niveau des agents que des usagers. Tous estiment qu’un dialogue réel s’est instauré, et force est de constater que la participation à ce groupe de dialogue citoyen a représenté, pour certains, un moteur de réinsertion sociale. Plusieurs points faibles sont néanmoins à noter : la représentativité des quartiers de certains services du CCAS de Bordeaux notamment. II. Le comité d’usagers d’Angers A Angers, une initiative proche de l’expérience bordelaise a été conduite, en intégrant les usagers aux réflexions relatives à l’action sociale. Il fallait surtout installer une structure pérenne, faisant intervenir des représentants d’associations, des usagers, des agents du CCAS et des élus. Autrement dit, le but a résidé dans une co-construction des “ règles du jeu ”, via, notamment, une charte et un règlement intérieur. Les contours de cette démarche ont été validés par le Conseil d’Administration du CCAS et le Conseil municipal d’Angers. Bordeaux, les 16 et 17 octobre 2002 2 Congrès de l’UNCCAS 2002 Ensuite, il a fallu convaincre les usagers, en mobilisant les acteurs directement dans les quartiers. 130 partenaires ont été rencontrés, et neuf spectacles débat ont été organisés. Lorsque cette conviction a été bien ancrée dans les quartiers, le comité d’usagers a pu s’installer : la première réunion plénière s’est tenue en juillet 2002. Enfin, en septembre 2002, huit groupes de travail ont été créés, visant à “ tamiser ” les idées émises et dégager des problématiques sur lesquelles il était nécessaire de réfléchir. Les axes de réflexion choisis par ces groupes de travail ont été les suivants : • • • • • • • Améliorer l’information des usagers en développant des supports adaptés ; Améliorer les prestations et les services offerts aux usager ; Explorer les possibilités de travail pour tous ; Retrouver la fierté de vivre dans son quartier ; Lutter contre l’isolement et renforcer les solidarités ; Aider à prendre soin de soi ; Favoriser l’engagement. Les Elus ont particulièrement été surpris par certains thèmes, dont la teneur était hautement politique. Le comité d’usagers dispose d’un budget annuel de 100 000 €uros, et le réseau comprend 90 membres. Les impacts sur la participation des usagers sont réels, notamment au niveau de la gestion du temps et de la position de chacun des acteurs de la définition de l’offre sociale. De manière plus générale, force est de constater que tous les acteurs – usagers, politiques et agents de l’action sociale - ont été conduits à s’interroger sur leur propre rôle. Au-delà, il est évident que la question de la place et du rôle du service public se pose également. III. Débat A Bordeaux comme à Angers, les conseils de quartiers cherchent un nouveau souffle. Ces instances de dialogue entre usagers et services d’action sociale peuvent justement représenter ce second élan. Il semble évident que la participation à ces instances de concertation responsabilise les usagers des centres sociaux d’action sociale. Ces personnes, souvent exclues, retrouvent en outre un réel sentiment d’appartenance à la société. Il est par ailleurs indéniable qu’ATD Quart Monde a contribué de manière forte à la mise en place de ces projets. Par exemple, à Bordeaux, une convention a été signée entre le CCAS et ATD-Quart Monde. Un membre de cette association participe à des réunions, et apporte à la fois son expérience dans le domaine de l’exclusion et un regard extérieur profitable. Sans jouer un rôle d’expert, ATD Quart Monde apporte une “ participation éclairée ” à la mise en place de cette démarche participative. Bordeaux, les 16 et 17 octobre 2002 3 Congrès de l’UNCCAS 2002 Convaincre les usagers de participer à ces groupes de réflexion n’est pas toujours aisé. A Creil par exemple, les usagers du CCAS ne sont pas au rendez-vous, et la municipalité se demande comment il est possible de les attirer. A Angers, il a été décidé de contacter tous les acteurs associatifs des quartiers et les personnes individuelles en contact avec des exclus. Ainsi, un véritable dialogue avec les usagers des CCAS a pu être instauré, dans la mesure où le contact direct et individuel a été privilégié. A Bordeaux, une logique similaire a été mise en place, dans la mesure où des associations en relation avec les usagers des CCAS ont été mises à contribution. La conduite des réunions n’est pas particulièrement facile, dans la mesure où les usagers ont parfois trop tendance à centrer le débat sur leurs propres problèmes, sans élargir leur propos. Toute personne dans la précarité a de toute façon du mal à faire abstraction de sa propre situation. La participation à ces groupes de travail vise justement à atteindre ce but. A Lorient, une démarche identique aux exemples angevin et bordelais est conduite depuis 1997, en se focalisant sur la problématique de la solitude dans les quartiers. Un colloque a été organisé, et a rassemblé 400 personnes : il a donné naissance à une “ semaine du voisinage ”, qui remporte un réel succès. Les acteurs de l’Education nationale sont souvent en contact avec la problématique de l’exclusion. En ce sens, il peut être nécessaire, pour l’Education nationale, de dialoguer avec les acteurs de l’action sociale afin de renforcer l’efficacité des démarches mises en place. IV. Conclusion La question de la participation représente une nouvelle forme de contrat social. En premier lieu, il appartient aux Elus de conduire de telles initiatives, mais celles-ci resteront lettre morte si les politiques ne peuvent pas s’appuyer sur un réseau. En outre, la mise en place d’un projet spécifique est indispensable. De manière plus générale, la participation des usagers représente un nouveau travail de conquête pour l’action sociale : elle représente de toute évidence un chantier d’avenir. Bordeaux, les 16 et 17 octobre 2002 4