Une approche du genre sur le « cinéclub de caen »

Transcription

Une approche du genre sur le « cinéclub de caen »
Fiche élève
A- Que connaissez-vous du western ?
1°) A partir de ces quatre affiches du film, pouvez-vous reconnaître les codes du western ?
Pouvez-vous rappeler les ingrédients* d’un western ? (* cadre, personnages, actions, thèmes
…)
2°) Sur ces quatre affiches quel motif commun original peut-on observer ?
B- Les figures de l’indien
1°) Observez ces différentes représentations de l’indien extraites du film. A quels motifs du
western les associez-vous ?
2°) Deux images peuvent se lire de manière différente des autres. Lesquelles et pourquoi ?
3°) Quelles sont maintenant vos attentes avant d’aller voir le film ?
Fiche professeur
A- Que connaissez-vous du western.
- La première question vise à répertorier les invariants du western
« Dans Le western ou le cinéma américain par excellence (préface au livre du même titre de JL Rieupeyrout
1953), André Bazin définit ainsi les archétypes du western :
-Des chevauchées, des bagarres
-Des hommes forts et courageux dans un paysage d'une sauvage austérité
-La pure jeune fille, vierge, sage et forte qui finit par épouser le héros
-La sinistre canaille
-Une menace incarnée par la guerre de sécession, les Indiens ou les voleurs de bétail
-L'entraîneuse du saloon au grand cœur qui sacrifie sa vie et un amour sans issue au bonheur du héros et qui se
rachète définitivement dans le cœur du spectateur. Toutes les femmes sont ainsi dignes d'amour. Seuls les
hommes peuvent être mauvais
-Paysages immenses de prairies de désert de rochers où s'accroche la ville en bois primitive d'une civilisation.
-L'Indien est incapable d'imposer l'ordre de l'homme. L'homme blanc est le conquérant créateur d'un nouveau
monde. L'herbe pousse où son cheval a passé, il vient tout à la fois implanter son ordre moral et son ordre
technique, indiscutablement liés, le premier garantissant le second. La sécurité matérielle des diligences la
protection des troupes fédérales et la construction des grandes voies ferrées importent moins que l'instauration de
la justice et de son respect.
-La justice pour être efficace doit être extrême et expéditive moins que le lynch cependant. » ( « Le
western », Le ciné-club de Caen :http://www.cineclubdecaen.com/materiel/ctgenre.htm ).
Vous trouverez en cliquant sur ce lien une présentation très bien faite du genre.
- La deuxième question oriente l’analyse sur l’originalité du film : on y trouve la troupe
d’indiens, le conflit entre les cow-boys et les indiens, l’indien sauvage et menaçant (invariants
du genre) mais aussi, motif plus original en 1950, un couple formé par un « blanc » et une
indienne. Ce couple ainsi que le titre (la flèche brisée = l’arrêt des combats) suggèrent une
recomposition de la figure de l’indien et le dialogue entre les deux peuples.
B- Les figures de l’indien
1°) Chaque image du tableau peut produire les associations suivantes :
Les attaques de convoi, de
diligence, la guerre, les
embuscades …
Le scalp, la férocité des
indiens
Le guerrier, figure menaçante
Le
conflit,
le
l’opposition
entre
mondes
Le dialogue et la paix
Un peuple
étrangers
hostile
duel, Le guerrier, le chef
deux
La danse, la culture indienne,
la culture primitive …
aux La
flèche
brisée :
déclaration de guerre ou
déclaration de paix ?
2°) Les deux images ( qui correspondent aux cases avec les caractères gras) font évoluer cette
figure « négative » de l’Indien : l’indien est une personne avec qui on peut dialoguer dans le
but d’instaurer un cessez-le-feu entre les deux communautés.
3°) Ce travail préparatoire a dirigé les attentes des élèves vers un questionnement sur la
représentation des indiens et des cow-boys : qui sont les gentils ? qui sont les méchants ?
Pour aller plus loin.
« L'attitude à l’égard des Indiens se modifie ; le « sauvage » est vu à nouveau avec sa culture
et sa dignité propres, lent processus d'évolution qui commence avec la Porte du diable (A.
Mann, 1950) et La Flèche brisée (Daves, id.) et s'achèvera, après de multiples détours et
retours en arrière, aux alentours de 1970 avec Little Big Man (A. Penn, 1970) et Soldat bleu
(R Nelson, id.). Dans l’intervalle, le western pro-indien aura été illustré notamment par
Hondo, l’homme du désert (J.V Farrow, 1953), Bronco Apache (Aldrich, 1954), Taza, fils de
Cochise (D. Sirk, id.), les Rôdeurs de la plaine (Siegel, 1960), Willie Boy (A Polonsky,
1969)... Non sans ambiguïté : les interprètes sont, pour la plupart, des Blancs ; ils incarnent
souvent des métis ; on oppose le « bon » Indien, susceptible de collaborer avec les Blancs, au
« mauvais » Indien qui veut la guerre. Ce lent cheminement d'un humanisme moderne renoue,
curieusement, avec les sources mêmes du western, où l’Indien était vu comme bon sauvage
plus que comme un être sanguinaire faisant indûment obstacle au progrès de la civilisation ;
Au delà du Missouri de Wellman (1951), la Captive aux yeux clairs ou la Rivière de nos
amours (De Toth, 1955), célébrant des idylles entre un Blanc et une Indienne, évoquent
l’atmosphère « primitive » de The Yaqui Cur de Griffith ou de The Squaw Man de De Mille.
Il est vrai que ces oeuvres constituent des préwesterns situés à l’époque des trappeurs, donc
de l’échange entre les Indiens et un petit nombre de Blancs, et non à celle de la conquête et
des grandes guerres indiennes. » (« Western », Dictionnaire du cinéma, Jean-Loup Passek,
Larousse, 1991, p.700)
Voici le témoignage du réalisateur :
« J'ai fait La Flèche brisée, déclarait Daves, avec l'intention de renouveler complètement les
données du genre. La Flèche brisée est un western adulte, un western vrai. La plus grande
partie de l'action se déroule dans le camp de Cochise, le grand chef apache de la tribu des
Chiricahuas. Nous avons décrit les coutumes indiennes avec le plus grand réalisme et le plus
grand respect. Jusqu'alors, dans le western, les Indiens étaient violemment caricaturés, on les
faisait parler anglais, afin qu'on les comprenne bien. Dans La Flèche brisée, les Indiens ont le
sens de l'honneur, la dignité naturelle, les espoirs simples de tous les êtres humains ». Delmer
Daves a toujours considéré le film comme l'un de ses préférés, « le premier où l'on montrait
les Indiens comme des gens respectables et non comme des sauvages ». Sans être tout à fait
exact – Ramona lui est antérieur de quatorze ans -, La Flèche brisée a en effet joué un rôle
considérable dans la manière dont Hollywood a modifié sa représentation de l'Indien. La
sortie, peu de temps après, de La Porte du diable contribuera, encore plus tragiquement, à
attirer l'attention du public sur la personnalité même de l'Indien. Opposant d'un côté le
fanatisme belliciste de Goklia (Géronimo) au désir de paix de Cochise et, de l'autre, le
racisme de Ben Slade à l'humanisme de Tom Jefford, Daves évite pourtant tout manichéisme.
La définition que Juan fait à Tom de Cochise – « Ne lui mentez jamais. Ses yeux voient
jusqu'au fond du cœur. Il est plus grand que les autres hommes » - donne à la figure du chef
indien une aura exceptionnelle. Ce n'est pas une coïncidence si, à la fin, c'est Cochise luimême qui demande à Tom de ne pas se venger et de tout sacrifier à la réussite de la paix.
L'image de Tom et de Sonseeahray partant le soir de leur nuit de noces sur des chevaux
blancs, la tendresse avec laquelle Daves décrit leur amour et la dignité des rapports entre
Tom et Cochise rendent inoubliable La Flèche brisée. Le fait que Daves ait lui-même vécu au
milieu des Indiens alors qu'il avait vingt-deux ans et ait appris leurs coutumes, leur manière
de vivre et une partie de leur langue a donné au film son authenticité. Jeff Chandler et Debra
Paget ne sont désormais plus des acteurs hollywoodiens maquillés, mais de véritables
représentants d'une nation indienne haïe par les conquérants blancs. Quatre ans plus tard,
Douglas Sirk redonnera - brièvement - à Jeff Chandler le rôle de Cochise dans Taza, Son of
Cochise (Taza, fils de Cochise). Une manière de rendre hommage à La Flèche brisée et à
son importance historique. » (Patrick Brion, Le western : Classiques, chef-d’œuvres et
découvertes, Editions de la Martinière, 1992, p.166).
[email protected] (enseignant conseiller-relais auprès de la D.A.A.C. pour le
dispositif « Collège au cinéma » sur les Côtes d’Armor).