L`électronique à portée de culotte

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L`électronique à portée de culotte
“MERCREDI 1ER JUIN 2016 m“
RÉGION 3
MICROTECHNIQUE L’innovation profite de compétences régionales traditionnelles.
L’électronique à portée de culotte
des auditives Phonak à très
basse consommation d’énergie
(et grande discrétion), ne sont
que quelques exemples de
technologies portées qui ont eu
leurs heures de gloire. Elles ont
permis de mettre en évidence
les conditions d’acceptabilité
de ces accessoires, comme l’attention à la mode: pour ne
l’avoir pas compris, certains
dispositifs pour personnes
âgées, comme les détecteurs de
chute ou boutons d’alarme, ont
connu un succès mitigé… Le
confort, les coûts ou la multifonctionnalité comptent aussi
parmi les caractéristiques nécessaires pour envisager le succès.
Avec le concours du CSEM,
différents dispositifs électroniques ont ainsi été par exemple
intégrés dans des lentilles de
contact, pour signaler certains
paramètres des yeux liés à des
maladies, ou dans des chaussures, pour analyser la foulée. Des
bandages électroniques permettent aussi de vérifier l’état
d’une plaie grâce à des capteurs,
sans retirer le pansement.
A ce rythme, les humains seront bourrés d’électronique
bien avant que les robots ne
prennent vie. }
LE CONTEXTE
La Fondation pour la recherche en microtechnique a tenu
lundi soir son assemblée
annuelle ponctuée d’une conférence de Mario El-Khoury.
Le directeur du CSEM a ainsi
livré un témoignage de première main sur le devenir
encore incertain des nouvelles technologies dites «portées». Une bonne occasion,
au-delà des fantasmes
«d’humain augmenté», de
faire le point sur la réalité des
dernières inventions de l’électronique qu’on porte sur soi.
LUC-OLIVIER ERARD
La veste qui se resserre autour
du corps, simulant un câlin livré
via un réseau social; un bleu de
travail qui vous transforme en
flûte à bec, interprétant chacun
de vos mouvements en musique; un vêtement qui s’illumine
en fonction de vos émotions interprétées d’après la conductivi- Au-delà des bracelets pour accros de l’activité physique, l’électronique portée pourrait s’inviter de plus en plus dans notre quotidien. KEYSTONE
té de votre peau.
Parfois tout à fait farfelues, les technologies portées (voir ci- ques-unes des clés qu’il faut plus d’assurer la fiabilité de l’in- tion, rappelle Mario El-Khoury.
Dans les années 1980, la calcuidées de vêtements et d’acces- contre). Montre, patch posé sur avoir en main. Et les premières terprétation des mesures.
Mais les technologies portées latrice bracelet de Casio, puis,
soires connectés ne manquent la peau, lunettes, chaussures, et réussites en la matière ne font
dans
le
farfelu. ne sont pas en soi, une révolu- dans la décennie qui suit, les aipas. Mais ces exemples ne reflè- bien sûr vêtements: de plus en pas
tent pas l’actualité d’innova- plus d’électronique est embar- Premier domaine concerné: la
tions qui connaissent actuelle- quée dans ces objets du quoti- santé. Un très grand nombre de
paramètres physiologiques sont
ment une évolution rapide: les dien.
désormais accessibles aux appaLe potentiel en Suisse
reils de mesure: rythme cardiaINNOVER EN MOTS A entendre Mario El-Khoury, que mais aussi acidité ou conLa FSRM (Fondation suisse pour la recher- du public convié à l’assemblée annuelle de
le CSEM et la région sont très ductibilité de la peau, signaux
che en microtechnique) c’est aussi une institu- l’institution. Elle a aussi été le théâtre de la reLe conférencier a choisi d’utili- bien placés pour faire passer ces électriques du cerveau, tempétion qui permet de prendre le pouls de la bran- mise du Prix Omega, institué en 1949 pour céser «technologies portées» outils du rêve d’ingénieur à la rature, niveau de stress, fertilité,
che. Et comme dans bien des secteurs actifs lébrer le centenaire de la marque et destiné à répour désigner ce que les An- réalité des consommateurs.
dans la région, après des années «exceptionnel- compenser chaque année l’excellence d’un
etc.
glo-Saxons désignent sous
Leur potentiel succès dépend
les», 2015 a été marquée par un ralentisse- travail dans les domaines de la physique de la
l’expression «wearable». CelIndispensables
données
en
effet
de
technologies
bien
ment. Il se manifeste par une baisse de 15% matière condensée, des micro et nano-technoles-ci désignent les dispositifs
Acquises
auprès
d’un
nombre
maîtrisées
à
Neuchâtel:
capdes heures de cours données par l’institution logies, ou encore de la chronométrie. Doté de
électroniques qui donnent aux
croissant
de
personnes,
ces
meteurs
de
toutes
sortes,
miniatudans ses locaux de Neuchâtel. «Les inscriptions 5000 francs et d’une montre, il a été remis
vêtements et accessoires des
sures
permettent
d’accumuler
risation,
basse
consommation,
sont très dépendantes du moral des entreprises», cette année à Csaba Azau qui, après l’EPFL,
capacités de calcul et des foncdes
quantités
énormes
de
donrécupération
d’énergie
et
trainote le président de la fondation, Pierre-André poursuit son travail d’ingénierie horlogère au
tionnalités.
tement de données sont quel- nées, qui permettent de plus en
Grandchamp. Pas de quoi trop ternir le moral sein de la Haute Ecole Arc. }
Baisse des cours à la FSRM
CHAMBRES FÉDÉRALES Le Conseil national se penche demain sur la coopération. Lourdes économies envisagées.
Acteurs neuchâtelois de l’aide au développement inquiets
«Ce n’est pas du bla-bla. Des
ONG neuchâteloises seront touchées.» Les acteurs de la coopération sont inquiets. Le Conseil
national doit se pencher demain sur l’aide au développement. Et le secteur de la coopération pourrait en payer le prix,
au moins 150 millions de
francs par année. Le Conseil fédéral propose de passer le
montant global à 0,48% du
PIB, contre 0,5% actuellement. La commission des finances du National pousse à le
diminuer à 0,3% (notre édition
du lundi 23 mai).
«Les fonds de la DDC, – la direction du développement et de la
coopération –, nous donnent un
effet de levier important», explique Patrick Kohler, sous-directeur du Centre écologique Albert Schweitzer (CEAS) à
Neuchâtel. Engagé avec des
partenaires français, belge ou
italiens, le centre, une fois l’apport suisse acquis, va recevoir
des fonds européens. «Si on
nous coupe 7-8-10%, ce ne sera
plus possible.» Le CEAS mène
notamment un programme au
Sénégal, qui touche la famille et
la nutrition infantile. Il coûte
250 000 francs par année. «Si
on trouve 50 000 francs, il y a un
effet de levier. Si on ne l’a plus, il
faudra arrêter le programme»,
regrette Patrick Kohler.
De santé publique
Grâce à la DDC, le CEAS
mène des programmes de gestion et d’assainissement des déchets au Burkina Faso et au Sénégal. «Un véritable programme
de santé publique et alimentaire», indique son sous-directeur. A Madagascar, il est actif
dans le domaine des énergies
renouvelables. «95% de la population rurale n’a pas accès à
l’énergie. Ces populations n’ont
pas la possibilité de rêver à un développement
socio-économique.»
Max Morel, directeur de Médecins du monde, est du même
Les projets de lutte contre la précarité énergétique du Centre écologique
Albert Schweitzer à Madagascar sont notamment financés par la DDC
et Latitude 21. CENTRE ÉCOLOGIQUE ALBERT SCHWEITZER
avis. «En général, il est clair que
recevoir des contributions de la
DDC est un gage de confiance
pour d’autres partenaires. Si le
montant diminue ou disparaît,
les partenaires vont être découragés et pas forcément investir.»
Dans un premier temps, les
ONG ont été informées sur
une baisse linéaire de 9% pour
tous. «Maintenant, nous avons
compris que certaines décisions
seront stratégiques.» En clair,
des organisations pourraient
devoir fermer leurs portes.
A titre d’exemple, pour le
Centre écologique Albert
Schweitzer, la contribution de
la DDC se monte à hauteur de
30% du budget. «C’est plus important pour les grandes organisations», relève son directeur.
Elle peut représenter jusqu’à
60% du budget.
Au-delà des questions financières, les responsables de
l’aide au développement insistent sur le message envoyé et
ses conséquences. «Au Burkina
Faso, si la société civile n’avait
pas été renforcée par la coopération sur le long terme, qui donne
une capacité de résilience, on se
retrouvait dans le chaos comme
au Rwanda», relève Patrick
Kohler. «Il est extrêmement regrettable de voir ce repli.»
Plus que les urgences
Max Morel se dit aussi extrêmement préoccupé. Selon lui,
c’est comme si on arrêtait de
vacciner les gens et qu’on se
contente de les soigner, une
fois qu’ils sont malades. «Des
centaines de milliers de personnes vont souffrir. Il ne faut pas
que nous soyons séduits par un
discours qui dit qu’on va soigner
pour moins cher», lâche-t-il.
«C’est comme on ne finançait
plus que les urgences et pas les
généralistes», renchérit Patrick
Kohler. «Ça nous désole. La coopération est un outil pour l’avenir, la lutte contre la pauvreté, la
précarité, les migrations. Nous
avons le sentiment qu’on veut
appliquer la loi du plus fort,
alors qu’il y a de la part de la
Suisse une belle solidarité.»
Les deux ONG peuvent
compter sur le travail de lobbying de Latitude 21, la Fédération neuchâteloise de coopération au développement, qui
réunit les ONG du canton.
Elle mène ce travail dans le cadre de Fédéréseau, qui regroupe les associations des
cantons romands et du Tessin.
«Chacune d’entre elles a pris
contact avec les parlementaires
de son canton», indique Diana
Polimeno, secrétaire générale
de Latitude 21. } DANIEL DROZ