La Salamandre, version définitive

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La Salamandre, version définitive
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La Salamandre, version définitive
jeudi 18 janvier 2007, par la rédaction
La version définitive a été obtenue en trois séances de relecture collective du texte projeté à l’écran et corrigé
sur le champ.
Les consignes :
- donner de la cohésion au texte. Chaque élève n’a écrit qu’une lettre mais le lecteur doit avoir le sentiment
qu’il n’y a que deux rédacteurs, Henri et Louis.
Supprimer tout ce qui n’est pas nécessaire à l’histoire ou ralentit le récit.
Et ... pour quelques lettres, corriger les anglicismes.
- donner de la cohérence au texte.Préciser les descriptions. Eviter les "fautes de script" d’une lettre à l’autre,
repérer les omissions ou les implicites qui rendraient le texte incompréhensible, repérer les erreurs de
chronologie ou de délai entre chaque lettre.
Louis à Henri Le 10 Septembre 2006 17h
Salut grand frère,
Je suis maintenant installé dans mon nouveau collège. Il est très grand comparé à l’ancien. La cantine est sous la
terre, avec une verrière et un jardin pour les professeurs au-dessus. Il n’y a pas beaucoup de végétation (mis à part
le jardin des professeurs), seulement quelques platanes qui se courent après.
Au repas je me suis installé à une table et très vite un groupe de garçons est venu. Je me sens un peu moins seul …
mais ils ne m’ont pas beaucoup parlé.
Je suis aussi un peu déçu parce qu’on ne peut pas faire du foot. Les ballons sont interdits !
Dans l’ensemble, mon premier jour d’école était bien.
J’espère que tout va bien au Canada et qu’il ne fait pas trop froid.
Ton frérot,
Louis
12 septembre 2006 Louis à Henri
Henri,
tu sais, mes camarades sont très durs avec les nouveaux élèves. Ils leur réservent une épreuve terrible, que je vais
devoir accepter…
Certes je vais le faire, je n’ai pas le choix. Ils sont sans pitié ! (enfin, pour les nouveaux comme moi). Sinon, une fois
dans leur clan, je crois qu’ils seront gentils. Je n’ai vraiment pas envie de les décevoir.
Ils me diront demain ce que je dois faire. Je t’expliquerai.
Louis
13 septembre 2006 20h Louis à Henri
Salut Henri,
Le défi c’est d’aller chercher quelque chose dans l’ancien labo de sciences, rien que pour prouver que j’y suis
vraiment allé. Je suis bien embêté.
Il paraît qu’il est interdit d’y aller depuis très longtemps et que dedans c’est terrible … Ils m’ont dit que j’étais pas
chiche.
Est-ce que je dois le faire ?
Allez, je te laisse.
Gros bisous,
Louis
13 septembre 2006 Henri à Louis
Cher petit frère,
J’ai bien rigolé lorsque j’ai reçu ta lettre ! Je ne veux pas te décourager mais je pense que ce genre de défi n’est pas
fait pour toi, « trouillard » comme tu es !!
Rappelle toi, il y a deux ans lorsqu’on était chez papy Pierre à la campagne, tu ne voulais jamais dormir seul
tellement tu avais peur du noir. A chaque fois que tu entendais un bruit tu me réveillais !
Tu as toujours eu peur du noir et aujourd’hui tu vas me faire croire que tu vas aller tout seul dans l’ancien labo de
ton collège !
Et cet été, quand tu étais allé chercher ton ballon dans l’arbre ; tu es monté à l’échelle et après l’avoir récupéré tu ne
voulais plus redescendre. Tu es resté au moins une heure, perché là-haut. C’était très drôle vu d’en bas !
Ecoute, moi je comprendrais si tu ne relevais pas le défi de tes amis, mais eux ils se moqueraient de toi toute l’année,
et peut-être même jusqu’en troisième !
Pour une fois, fais-le ce maudit défi ! Il n’est pas bien compliqué : Tu passes une porte, tu entres dans une pièce et tu
ramènes un truc. Sérieusement, tu as peur de faire ça ? Je te souhaite bonne chance ! Je pense a toi !
Henri
15 septembre 21h Louis à Henri
J’ai réussi !
Tu vois, tu disais que je n’y arriverais jamais mais tu as eu tort de douter de moi. Je ne suis pas si peureux que ça et
demain mes copains m’accepteront dans leur bande !
J’ai fait semblant de m’endormir pour ne pas éveiller l’attention des autres, j’ai sauté de mon lit et je suis sorti avec
mes chaussures à la main.
J’ai traversé plusieurs couloirs sombres et froids pour arriver enfin au labo. La porte était fermée à clef. C’est une
grande porte en bois avec des gravures dessus. J’ai sorti de ma poche un petit fil de fer et je l’ai ouverte comme tu
me l’avais montré cet été pour entrer dans la cave de grand-père.
Quand je suis arrivé dans le labo, j’ai vu qu’il y avait plein de bocaux partout sur des étagères. C’est une grande
pièce avec un plafond très haut et plein de toiles d’araignées.
J’ai continué à avancer en explorant la pièce, il y avait vraiment toutes sortes de bocaux, des très grands, d’autres
minuscules, des larges ou étroits… Il y avait toutes sortes de choses bizarres, des corps décortiqués, des rats gorgés
de formol, des cafards, des serpents, des lézards, des poumons ou des bouts de viscères.
J’étais fasciné, je ne pouvais pas m’empêcher de regarder.
Et puis il m’a semblé voir quelque chose de brillant dans un des bocaux. Je m’en suis approché et j’ai vu à l’intérieur
une salamandre noire avec des taches blanchâtres. Quelque chose brillait au fond du bocal. J’ai pris le bocal et je l’ai
un peu remué et je l’ai bien vu. C’était un médaillon !
Alors je me suis dit que c’était une bonne preuve parfaite pour toi et les autres.
Le problème, c’était qu’il n’était pas question de mettre la main dedans, trop dégoûtant.
J’ai eu l’idée de réutiliser mon fil de fer. J’ai fait un crochet et j’ai sorti le médaillon. Sans le toucher, je l’ai passé
sous le robinet et je l’ai rincé. Il n’est pas très gros mais il est en or avec un blason qui porte une sorte de dragon ou
de lézard. J’ai trouvé ça plutôt joli.
J’ai remis le bocal en place et je suis parti, le médaillon dans ma poche. J’ai hâte de te le montrer !
A plus,
Louis.
15 septembre 21h30 Henri à Louis
Louis,
je te conseille de rapporter tout de suite ce médaillon car tu risques de te faire accuser de vol et tu serais collé ! Je
sais que c’est moi qui t’ai encouragé à impressionner tes copains, mais là, il s’agit d’un médaillon et il peut valoir
très cher. Ce serait noté sur ton dossier scolaire. Maman ne serait pas contente.
Et oui frangin, c’est comme ça !
Fais très attention à toi et ne te fais pas remarquer !!!
Henri.
16 septembre 21h Journal de Louis.
J’avais envie d’épater les copains. Je leur ai montré le médaillon, je l’avais nettoyé un peu pour qu’il brille encore
plus. Ils étaient vraiment surpris ; prendre quelque chose d’aussi précieux dans une salle condamnée du collège,
c’était quelque chose !
Je n’avais pas un ami ici et maintenant ils veulent tous s’asseoir à côté de moi en classe ou à la cantine. ils veulent
tous que je leur raconte et… je suis enfin accepté dans leur clan !
Mon frère veut que je rende le médaillon. Il est tellement jaloux… Pour une fois que je suis plus populaire que lui !
Ce médaillon, il est à moi ! je le garde !
18 septembre 23h Louis à Henri
C’est encore moi,
Peut-être que j’ai pris des risques, peut-être que j’ai eu tort, mais j’ai conservé le médaillon. Je l’ai à mon cou, sous
mes vêtements. Il me donne une si bonne réputation au collège !
Mais ... Il faut aussi que je te dise que je fais beaucoup de cauchemars depuis que je le porte. Et chaque fois je finis
toujours par mourir.
Figure-toi, que cette nuit j’ai rêvé que deux hommes pleins de colère, me pourchassaient. Je courais sans me
retourner. Eux, ils ne couraient pas mais ils allaient plus vite que moi. Le premier m’a attrapé et m’a assommé. Et
tout d’un coup je n’étais plus là et l’homme serrait une salamandre dans sa main. Je me suis réveillé, transpirant,
essoufflé, terrorisé.
Je t’envoie la photo du médaillon. Je l’ai prise avec mon portable. Le lézard sur le blason, c’est peut-être une
salamandre. On dirait qu’elle n’a pas de tête. Ou alors c’est parce que le médaillon est très vieux.
Observe la date au dos : 1795 !
Louis
19 septembre 7h Henri à Louis
Salut Louis,
J’ai fait des recherches sur Internet et figure-toi que ton collège a un grand passé. Il s’y est passé beaucoup de
choses surtout pendant la Révolution mais le plus intéressant concerne la Terreur. Des nobles et des royalistes
venaient s’y réfugier, (à l’époque ton collège était un couvent). Mais certains se sont fait prendre et il y a eu des
exécutions …
Je dois t’avouer que tout cela m’intéresse beaucoup et j’aimerais en savoir un peu plus. Donc je compte sur toi pour
fouiller dans la bibliothèque du collège ou n’importe où. Tu es assez grand pour te débrouiller tout seul.
Sinon pour ce qui concerne tes cauchemars essaie de les oublier car après tout ce ne sont que des rêves.
Henri
23 septembre Journal de Louis
Depuis la découverte de ce fameux médaillon, je fais d’étranges cauchemars toutes les nuits. Ce ne sont jamais les
mêmes mais ils ont tous un point commun : chaque fois, on retrouve une salamandre et on en veut à ma vie. J’avoue
que j’ai la trouille !
Et en plus maintenant, c’est la catastrophe en cours : moi qui suis assez bon élève, je suis de plus en plus distrait, j’ai
de mauvaises notes et des punitions. Je n’arrive pas à me plonger dans mes leçons. Je n’arrête pas de penser à mes
rêves étranges. Il y a même des fois où je me surprends en train de dessiner une salamandre dans mes cahiers.
Que dois-je faire ? Si j’en parle à mon frère, il va encore me dire de me débarrasser du médaillon mais moi, je n’en ai
pas envie parce que avec ce médaillon, les autres me respectent.
24 septembre journal de Louis
Quelle horrible nuit !
J’ai rêvé que j’étais enfermé dans un cachot noir et lugubre. J’avais froid. J’étais pétrifié de peur. Pourquoi avais-je
peur comme ça ? Je ne sais pas. C’était peut-être à cause des cris qui venaient de l’autre salle.
Soudain deux hommes sont entrés et m’ont bandé les yeux. Ils m’ont ensuite amené dans une autre pièce où ils
m’ont allongé sur une vieille planche de bois. Une odeur de sang séché régnait dans la pièce.
A ce moment je sais qu’on va me décapiter. Je me débats de toutes mes forces et soudain j’entends un bruit sec et je
vois la pièce, les bourreaux et, à ma place, sur la planche, une salamandre sans tête ... et d’un coup je me réveille.
25 septembre 4 h 30 Journal de Louis
Je me réveille en sursaut, encore un mauvais rêve. Cette fois-ci, ce n’était pas un cauchemar ordinaire. Je me suis vu
e
avec des habits du XIX siècle.
Je rentrais dans la grande bibliothèque du collège. Elle très ancienne, très grande, bourrée de vieux livres gros
comme des dictionnaires. Des montagnes de livres tous identiques, recouverts d’une épaisse couche de poussière.
Je dissimulais un paquet de lettres derrière les archives de la correspondance aixoise du XVIIIe siècle.
Ce paquet était assez petit, enveloppé dans un papier blanc cassé, et soigneusement attaché avec’un ruban rouge.
Mais je me demande si je dois en parler à Henri. Il va encore se moquer de moi et me traiter de froussard.
28 septembre 2006 20h30 Louis à Henri
Henri, ça va plus du tout.
Dans mon dernier rêve, j’étais un autre, un garçon du XIXe siècle. Je cachais un paquet de lettres dans la
bibliothèque du collège. Et ... devine. Je suis allé voir et j’ai trouvé les lettres ! C’est vraiment comme dans mon rêve
mais le paquet a vieilli, le papier est tout jaune, craquelé et couvert de poussière, le ruban est décoloré et l’encre est
toute pâle.
C’est le journal d’un élève. Je n’ai pas encore eu le temps de le lire mais je peux déjà te dire qu’il est très ancien. Il y
a une date : 1875 !
Et partout des dessins de salamandres !
28 septembre 23h Louis à Henri
Henri, j’ai tout lu !
Celui qui a écrit ce journal signe LB. Comme moi ! Il a trouvé le même médaillon que moi, au même endroit dans le
labo de sciences : dans le bocal de la salamandre, celle que je dessine tout le temps. Il raconte qu’il a reçu pas mal
de punitions pour réponses incohérentes et mauvaises notes. C’est bizarre non ? Les cauchemars qu’il fait sont aussi
horribles que les miens, et ce sont exactement les mêmes !
Te rends-tu compte qu’il a vécu les mêmes événements que moi à plus d’un siècle d’intervalle ? Mais je ne sais pas
comment tout cela s’est terminé pour lui, son journal est inachevé.
J’ai peur Henri, j’ai très peur. C’est comme si tout recommençait, comme si son histoire était mon histoire. Dis-moi
ce que je dois faire. Et ne te moque pas de moi, c’est pas le moment.
Louis
28 septembre 23h30 Henri à Louis
Louis,
J’ai une mauvaise nouvelle à t’annoncer : j’ai fait des recherches sur cette salamandre. J’ai découvert que c’était
l’emblème de François Ier, et qu’au XVIII ème siècle, elle était aussi l’emblème d’une famille aixoise, de longue
tradition de noblesse. Ils ont tous été massacrés pendant la Terreur.
Et je suis sûr et certain que tu es sous la possession du médaillon et du coup t’es dans la même situation que ce
fameux L.B. que tu vois dans tes rêves.
Ce que tu devrais faire c’est voir quel genre de type c’était ton L.B.. Pour cela t’a juste à trouver le registre des
élèves de 1875. J’espère que tu t’en sortiras.
Henri
28 Septembre 23h 45 Louis à Henri
Henri, je viens de relire le journal et j’y ai découvert qu’on peut ouvrir le médaillon en faisant tourner la salamandre.
Je l’ai ouvert ! une pièce d’étoffe pleine de sang séché est tombée en découvrant une inscription :
« Ni toi ni personne ».
Je suis tout de même curieux de savoir ce que cela cache. Tu peux m’aider ?
Fais vite, Henri, mets-toi à ma place.
Louis
29 septembre 1h Henri à Louis
Louis, il faut absolument que tu remettes le médaillon dans le labo, exactement là ou tu l’as trouvé et que tu quittes
ce collège tout de suite.
Moi aussi j’avance. Pendant la révolution , il y avait une guillotine dans ton collège. Beaucoup de monde a été
exécuté là.
Un jeune homme se cachait dans une cellule du couvent. Ils l’ont trouvé et été guillotiné. On dit qu’il portait un
magnifique médaillon et qu’un des gardes le lui a arraché. Alors le jeune homme lui a crié : « Maudis sois-tu voleur,
tu ne pourras porter ce médaillon sans périr ! Ni toi ni personne » !
Et le voleur aujourd’hui, c’est toi. Remets le médaillon à sa place et enfuis toi.
Courage, petit frère.
29 Septembre 2006 6h00 Louis à Henri
Henri,
J’ai trouvé dans la salle des archives au fond de la bibliothèque, une trace du fameux ’LB’... celui des lettres.
Il y avait écrit clairement, noir sur blanc, « Décédé accidentellement le 29 septembre 1906 » !!
Henri, le 29 septembre, c’est aujourd’hui !! Je vais mourir !! Je quitte le collège tout de suite.
Par la grande entrée, les surveillants ne me laisseront pas sortir mais les copains m’ont expliqué un autre passage.
Louis
30 septembre 2006 Dans la presse locale
Tragique accident au collège M.
Un élève mortellement blessé par la chute d’une vitre. Les circonstances de sa mort n’ont pas
encore été élucidées.
Le jeune LB, élève de 4e au collège M. d’Aix-en-Provence a été mortellement blessé par la chute d’une
vitre hier en fin d’après-midi. Une enquête est en cours pour déterminer les causes de cet accident dont le
caractère particulièrement brutal et sanglant a profondément choqué ses camarades de classe.
Le jeune homme essayait vraisemblablement de sortir du collège en passant par la verrière du jardin
suspendu qui surplombe la cantine. Une vitre se serait détachée sur son passage.
Le jeune homme est mort sur l’instant, décapité sous la force du choc.
L’enquête déterminera les causes exactes de cet accident.
Est-il bon d’ajouter que deux élèves, amis du jeune LB soutiennent qu’il portait un pendentif au moment
du drame ? La chaîne et le médaillon n’ont pas été retrouvés. N’ayant pas connaissance de cet objet, la
famille a décidé de ne pas donner suite. Il n’y aura donc pas d’enquête à ce propos.
FIN