Les soucis d`une flotte mixte

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Les soucis d`une flotte mixte
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25/02/08
FLEET-OWNERS
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CORNER
Les soucis
d'une flotte mixte
Il y a véhicules de tourisme et véhicules utilitaires, et la différence est importante, surtout
pour un gestionnaire de flotte mixte. En quoi l'approche des conducteurs est-elle différente ?
L'aspect écologique est-il aussi important pour ces deux groupes ? Deux questions parmi
d'autres auxquelles nous aimerions obtenir une réponse. Nous avons donc réuni deux
Fleet Managers de flotte mixte : David Gaudissart (ThyssenKrupp) et Isabelle Briké
(SA SPIE Belgium).
En guise de boutade, on pourrait dire
que vous êtes responsables d'une flotte
‘hybride’ comportant à la fois des voitures de tourisme et des utilitaires.
Pouvez-vous éclairer notre lanterne ?
David Gaudissart : « Dans notre cas, le
rapport est de 80/20, soit 20 % de véhicules de tourisme et 80% de véhicules
utilitaires, pour un total de 240 véhicules.
Qui sont ces 20 % ? Eh bien, certains collaborateurs exerçant des fonctions commerciales, des cadres et des membres de
la direction. Cela dépend en fait de leur
tâche précise au sein de l'entreprise. Selon
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le niveau de fonction, ils disposent d'un
choix plus ou moins limité – plus leur fonction est élevée, plus ce choix est large – ou
d'un budget libre pour les fonctions les
plus élevées. Il en va tout autrement pour
les véhicules utilitaires qui sont étroitement
liés à la fonction exercée, le choix de la
marque et du modèle étant exclusivement
effectué par l'entreprise. Evidemment, certains éléments interviennent, notamment
la fiabilité, l'image de la société, etc. Et cela
ne veut pas dire que l'on ne consulte pas
les salariés. En définitive, ce sont bien eux
qui conduiront tous les jours le véhicule
retenu. S'ils sont satisfaits de leur matériel,
cela ne peut que nous être bénéfique. Il
s'agit donc d'un instrument essentiel dans
le cadre d'une politique HR au sens large.
Un mot encore : pour simplifier les choses,
nous avons opté pour le leasing opérationnel pour toute notre flotte. Les seules
exceptions résultent d'héritages du passé
et sont systématiquement résorbées. »
Isabelle Briké : « Le cadre esquissé par
David me paraît familier. Chez nous, les
proportions sont légèrement différentes :
sur une flotte de 500 véhicules, la répartition est de 50/50. Nous avons aussi exclu-
ISABELLE BRIKÉ
DAVID GAUDISSART
SPIE BELGIUM
THYSSENKRUPP
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ISABELLE BRIKÉ
VOTRE CARRIÈRE
Fonction : Fleet Manager
Véhicule : Renault Mégane (« pas voiture de fonction »)
Flotte : 500
Forme de financement : leasing opérationnel
Supérieur hiérarchique direct : Purchase Manager
VOTRE CHOIX
Voiture de rêve : Aston Martin
Vacances : Italie
Boisson préférée : champagne
UNE COLONNE DISTINCTE
POUR LES ÉMISSIONS DE CO2
« Nous faisons référence dans notre short-list aux émissions
de CO2 et ce, depuis de nombreuses années. Par le passé,
cela nous a souvent valu des regards interrogateurs, mais les
temps changent. Nos conducteurs sont désormais habitués
à ce terme. Ils savent de quoi il s'agit et en comprennent l'intérêt. Il est important que tous les éléments jouant un rôle lors
du choix du véhicule soient bien expliqués. L'aspect vert ne
fait pas exception à cette règle. Il s'agit en définitive d'une
matière très sensible qui a chez nous un impact direct sur le
budget véhicules. »
LE CONSEIL AUX COLLÈGUES FLEET-OWNERS
« Soyez surtout bien clairs lors de la rédaction d'une car policy.
C'est la seule vraie manière d'éviter toute déconvenue
ultérieure. »
L'aspect vert
C'est un peu devenu la questionbateau, mais quel rôle joue l'aspect
écologique dans la gestion de vos
flottes ? Quelque chose me dit que c'est
justement l'élément utilitaire qui complique la réponse à cette question…
IB : « Exactement ! Mais permettez-moi
tout d'abord de formuler une remarque
générale : lorsque la taxe CO2 a été instaurée voici quelques années, nous avons
commencé à réfléchir au niveau interne. Il
est vite devenu évident que ce n'était
qu'un début. Anticipant les futures
mesures, nous avons donc adapté nos
I
budgets. Quant à savoir si cela joue autant
pour les utilitaires que pour les voitures de
tourisme, c'est autre chose. Nous avons
en tout cas tenté d'introduire cet aspect
‘vert’ dans ce segment. Si l'on peut par ex.
raisonnablement se contenter d'une motorisation inférieure, on le fera. Le fait est que
ceux qui négligent actuellement cette
question en ressentiront à l'avenir les
conséquences fiscales. »
DG : « Comme notre flotte est davantage
axée sur l'utilitaire, il s'avère assez difficile
de lui conférer un cachet vert. Il faut aussi
d'abord penser aux tâches spécifiques
de ces véhicules et pour les utilitaires,
c'est sensiblement plus complexe que
pour les véhicules de tourisme. »
F&B : Peut-on en conclure, indépendamment de votre cas personnel, qu'il
s'agit là d'une problématique qui va
s'amplifier dans le cadre de la gestion
d'une flotte ?
DG : « J'en suis convaincu. J'essaie toujours d'acheter des véhicules particuliers
en pensant à l'aspect écologique. On
constate aussi sur le terrain que chez la
plupart des gens, les avantages psychologiques s'estompent. »
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IB : « Le tout est de leur faire comprendre
qu'il existe certains avantages très
concrets. C'est une situation gagnantgagnant pour tous. Je fais en outre
tester aux gens un maximum de modèles.
Un moteur 1.6 litre actuel n'a plus rien à
voir avec ceux d'il y a quelques années. »
Pratique
I Comment gérez-vous votre flotte utilitaire au quotidien ? Tous les véhicules
doivent-ils par ex. revenir chaque soir
sur le parking de l'entreprise ?
DG : « Chez nous, non. Chaque véhicule
a son propre chauffeur et celui-ci rentre
chez lui avec. Le véhicule reste également
chez lui le week-end. L'important est que
pendant ces deux jours, on ne peut en
aucun cas l'utiliser. Il s'agit d'un outil de travail et il doit donc être utilisé comme tel.
On constate que ces règles sont parfaitement suivies. »
IB : « Nous connaissons les deux situations, pour une raison évidente : seuls
20 % ont un chauffeur fixe. Les autres
sont ce que l'on appelle des véhicules
de chantier. C'est d'ailleurs dans cette
catégorie que l'on rencontre des problèmes. On constate une tendance accrue
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sivement opté pour le leasing opérationnel
même si, ici encore pour des raisons historiques, cela ne concerne pas 10 % de
notre flotte. Pour les véhicules particuliers, nous recourons à plusieurs catégories - 5 au total. Pour les 3 catégories inférieures, je procède deux fois par an à une
sélection des véhicules qui seront proposés. Pour les catégories supérieures, les
conducteurs peuvent faire leur propre
shopping. Attention : les budgets sont les
budgets et il ne saurait être question de les
dépasser. »
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DAVID GAUDISSART
VOTRE CARRIÈRE
Fonction : Fleet Manager
Véhicule : SEAT Leon (« pas voiture de fonction »)
Flotte : 240
Forme de financement : leasing opérationnel
Supérieur hiérarchique direct : responsable HR
VOTRE CHOIX
Véhicule de rêve : « Sportif, sans être extravagant »
Vacances : « Essentiellement des minitrips »
Boisson préférée : vin
LE CONSEIL AUX COLLÈGUES FLEET-OWNERS
« L'écologie est essentielle et va encore gagner en importance –
tenez-en compte. »
Fleet&business I 162 I FEVRIER-MARS 2008 I
à ‘refiler’ certains problèmes – une déclaration d'accident par ex. – à l'utilisateur suivant. Le même problème survient aussi
pour les entretiens. Pour bien gérer ces
situations, nous comptons sur le sens des
responsabilités du chef de chantier
concerné. »
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I La discipline des conducteurs estelle différente lorsqu'il s'agit de véhicules de tourisme ?
IB : « Un véhicule utilitaire reste tout de
même très différent d'un véhicule particulier, c'est évident. Au sein du groupe
des véhicules de société, on se montre
moins négligent avec les voitures de tourisme, d'autant plus que nous avons ici
instauré un outil bien particulier. Pour déterminer les dommages en fin de contrat, les
conducteurs peuvent en effet recourir à un
expert indépendant. Cela évite non seulement pas mal de discussions mais apprend
aussi aux conducteurs ce que l'on peut
vraiment qualifier d'usure normale d'un
véhicule. Cette possibilité existe depuis
près de 5 ans et nous en récoltons désormais de plus en plus les fruits. Nous partons aussi du principe que les conducteurs reçoivent un montant fixe de
COLLABORER AVEC UNE SOCIÉTÉ
DE LEASING PROACTIVE
« Au départ, nous collaborions avec plusieurs sociétés de
leasing, pour ensuite ramener leur nombre à 3. Puis, suite à une
reprise, elles sont de fait devenues 2. Ce choix a été mûrement
réfléchi : c'est un nombre suffisant pour que la concurrence
joue pleinement, tout en permettant de garder une vue globale
et claire. On leur demande en fait, comme à tout autre partenaire, de faire correctement leur travail. L'informatique permet
beaucoup de choses, mais il ne faut pas en abuser pour se
soustraire à ses responsabilités. J'aimerais parfois bien disposer plus rapidement d'un papier, d'un document ou d'un e-mail.
J'entretiens aussi de nombreux contacts avec mes partenaires de la société de leasing. Le fait que ceux-ci fonctionnent de manière proactive s'avère essentiel pour une gestion
efficace. »
l'entreprise. Si les dommages sont supérieurs, ils doivent payer la différence. Ces
informations figurent clairement dans notre
car policy, sur l'intranet. Il suffit de les
consulter. »
DG : « Il est important que nos chauffeurs
comprennent que nous ne leur demandons pas l'impossible. Je comprends fort
bien que l'utilisation d'un véhicule utilitaire
ne soit pas toujours évidente. Nos collaborateurs travaillent souvent avec des huiles
et d'autres produits, et l'on ne peut pas
demander que tous ces véhicules soient
toujours dans un état de propreté irréprochable. Mais il m'arrive de leur en parler. Ils
peuvent aller au car-wash deux fois par
mois et ils doivent donc le faire. »
Réseaux
Quel rôle le salon de l'auto joue-t-il
pour vous ?
DG : « Le Salon de l'Auto de Bruxelles est
important car il permet de se faire une
idée des modèles disponibles et de vérifier
quelles marques offrent les meilleurs produits. C'est alors que l'on peut découvrir
ce qu'il y a de mieux pour notre personnel,
qu'il s'agisse de voitures de tourisme ou de
véhicules utilitaires. »
I
IB : « Certes, mais les choses sont tout de
même un rien différentes pour les véhicules particuliers. Il y a toujours bien une
promotion en cours, quel que soit le
moment de l'année. Ce n'est pas pour
cela que j'attends chaque année le salon.
Ce qui m'intéresse, ce sont les réseaux. Je
profite aussi de cette période pour examiner une nouvelle fois soigneusement les
conditions de l'année à venir. »
Question subsidiaire : comment
voyez-vous l'avenir de votre flotte ?
Souhaitez-vous mettre l'accent sur de
nouveaux éléments ? Bref, quelle direction faut-il prendre ?
IB : « Il est important que notre flotte
s'élargisse de façon systématique. Je souhaite à l'avenir continuer à insister sur l'aspect écologique et viser autant que possible la déductibilité de 75 %. »
DG : « Notre flotte a progressé de 10 %
par rapport à l'an dernier et nous suivons
donc aussi cette tendance. Je pense que
plus une flotte augmente, mieux l'on peut
évaluer les effets de certaines mesures
et, si nécessaire, corriger le tir. »
I
Michaël VANDAMME