DROIT ADMINISTRATIF (sem.3)

Transcription

DROIT ADMINISTRATIF (sem.3)
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
DROIT ADMINISTRATIF
Bulletin de liaison n°7
Elisabeth CHAPERON
1 – Sujet d’examen > page 1
2 – Trame de correction du sujet théorique > page 3
3 – Trame de correction du sujet pratique > page 5
17, rue Saint-Hippolyte – 75013 Paris
Session de Mai 2012 - Licence 2
Durée de l’épreuve : 3 heures
DROIT ADMINISTRATIF (sem.3)
Traiter au choix l'un des deux sujets suivants.
Sujet théorique:
L’équilibre financier du contrat administratif dans son exécution
Sujet pratique: Commentaire d'arrêt avec questions
C.E. 26 juin 1989 Fédération des syndicats généraux de l'éducation nationale et de la recherche
Répondez aux questions suivantes après avoir lu l'arrêt (chaque question est notée sur 4 points):
1° Quel est l’objet exact de la requête de la Fédération ?
2° Que savez-vous de l’abrogation des actes administratifs ?
3 ° Sur quel fondement juridique se base le Conseil d’Etat dans cette affaire ? Quel est sa valeur
juridique ?
4 ° Pourquoi le Conseil d’Etat estime-t-il le refus d’abroger entaché d’irrégularité ?
5° Rédigez l'introduction et la conclusion du commentaire général que vous feriez de cet arrêt, et indiquer
les intitulés des parties et des sous parties que vous retiendriez .
Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 juillet 1987 et 27 novembre 1987 au
secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION DES SYNDICATS
GENERAUX DE L'EDUCATION NATIONALE ET DE LA RECHERCHE SGEN-CFDT, Union
professionnelle régionale de Midi-Pyrénées, et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule le refus
implicite opposé par le ministre de l'éducation nationale à la
1
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
demande formée le 29 janvier 1987 d’abroger les dispositions des articles 7 du décret du 11
mai 1937 portant statut des maîtres et maîtresses d’internat et 6 du décret du 27 octobre 1938 portant
statut des surveillants d’externat en ce que ces dispositions ont prévu une représentation distincte selon
le sexe au sein des conseils de discipline compétents pour ces personnels,
Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant que l’autorité compétente, saisie d’une demande tendant à l’abrogation d’un règlement
illégal, est tenue d’y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que
l’illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ; qu’en se fondant sur ce
principe, la FEDERATION DES SYNDICATS GENERAUX DE L’EDUCATION NATIONALE ET
DE LA RECHERCHE SGEN-CFDT, union professionnelle régionale de Midi-Pyrénées, a demandé le
29 janvier 1987 au ministre de l’éducation nationale l’abrogation des articles 7 du décret du 11 mai 1937
modifié et 6 du décret du 27 octobre 1938 en tant qu’ils ont prévu une représentation distincte selon le
sexe au sein des conseils de discipline des maîtres d’internat et des surveillants d’externat, au motif
notamment que ces dispositions ne seraient pas compatibles avec le principe constitutionnel garantissant
dans tous les domaines des droits égaux aux hommes et aux femmes ; que l’union professionnelle
requérante a contesté pour excès de pouvoir dans le délai du recours contentieux la décision implicite de
rejet née du silence gardé sur cette demande ;
Considérant qu’en vertu du principe qu’a posé le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
auquel se réfère le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 et selon lequel « la loi garantit à la
femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme », les femmes ont vocation à
occuper tous les emplois publics dans les mêmes conditions que les hommes, aucune distinction ne
pouvant être introduite entre les personnels de l’un et l’autre sexe dans les conditions d’exercice des
fonctions correspondant à ces emplois, hormis celles qui seraient justifiées par les conditions
particulières dans lesquelles sont accomplies certaines missions ou par la nécessité de la protection de la
femme ou de la promotion de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ;
Considérant que les dispositions sur lesquelles porte la demande instituent une composition différente
des conseils de discipline compétents pour les maîtres d’internat et les surveillants d’externat selon
qu’ils ont à connaître de faits reprochés à des hommes ou à des femmes ; qu’une telle discrimination, qui
institue une représentation séparée d’agents du sexe masculin et d’agents du sexe féminin appartenant à
une même catégorie de personnels, n’est justifiée ni par les conditions dans lesquelles les uns et les autres
exercent leurs fonctions, ni par aucun des autres motifs d’intérêt général sus évoqués ; que, dans cette
mesure, les dispositions de l’article 7 du décret du 11 mai 1937 modifié et de l’article 6 du décret du 27
octobre 1938, qui sont incompatibles avec le principe constitutionnel de l’égalité des droits accordés aux
hommes et aux femmes, sont illégales et que l’union professionnelle requérante était fondée à en
demander l’abrogation ; qu’ainsi le ministre de l’éducation nationale a illégalement refusé de déférer à la
demande à lui présentée ; (…)
NOTA BENE : Cet examen dure trois heures.
Aucun document n’est autorisé
Votre copie ne doit pas dépasser six pages Le correcteur ne lira pas votre copie au-delà.
2
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
CAV - L 2 - EXAMEN DU TROISIEME SEMESTRE
DROIT ADMINISTRATIF - SESSION DE MAI 2012 – Trame de correction
Sujet théorique L’équilibre financier du contrat administratif dans son exécution
Introduction (6/20)
L’introduction se bâtit autour de la définition des termes du sujet, de l’énoncé de la problématique puis de
celui du plan.
L’exécution est la réalisation effective des dispositions d’une convention. Le sujet porte sur le régime
juridique des contrats administratifs.
Le contrat administratif est un contrat synallagmatique, avec comme en droit privé, un jeu réciproque de
droits et d’obligations. En droit privé, chaque partie est créancière des prestations de l’autre et que de
celles là ; le débiteur ne peut s’exonérer qu’en cas de force majeure.
En droit public, problème est différent car le cocontractant participe à la mission d’intérêt général que
l’administration a en charge. L’exécution du contrat peut se dérouler dans des hypothèses qui n’avaient
pas été prises en compte par les stipulations contractuelles. Or le cocontractant doit continuer à exécuter
le contrat, sauf à compromettre la continuité du service. Il ne peut suspendre de lui-même ses prestations
sauf impossibilité absolue. Bénéficiant cependant du droit à l’équilibre financier, le problème se pose de
savoir à quelles conditions et dans quelle mesure, le cocontractant de l’administration peut, en sus d’une
rémunération prévue au contrat, percevoir un complément qui permettra le rétablissement total ou partiel
de l’équilibre financier. Or les causes sont variées : décision administration, aléa économique, aléa
technique et ne dépendent pas toujours de la volonté de l’administration contractante.
I Rupture indépendante de l’administration contractante (7/20)
A Théorie de l’imprévision (l’aléa économique)
C.E. 1916 Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux
Conditions : - circonstances imprévisibles
- étrangères à la volonté des parties
- bouleversement de l’équilibre financier du contrat
- temporaire (déséquilibre permanent est assimilé à un cas de force majeure- résiliation de la
convention C.E. 1932 Compagnie des Tramways de Cherbourg)
Conséquences : - poursuite de l’exploitation
- indemnisation partielle
B Théorie des sujétions imprévues (l’aléa technique)
Surtout dans les marchés de travaux publics
Conditions : - sujétions techniques imprévisibles
- surenchérissement anormal ; charge financière anormale
Conséquences : indemnisation totale
3
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
II Rupture dépendante de l’administration contractante (7/20)
Celle-ci dispose de prérogatives de puissance publique limitées par les droits reconnus au cocontractant
essentiellement en matière financière.
A En tant que partie au contrat ou le pouvoir de modification unilatérale
Contraire à l’article 1134 du Code civil
C.E. 1902 Compagnie nouvelle du gaz de Deville les Rouen ;
C.E. 1983 Union des transports publics urbains et régionaux
Si la modification porte atteinte à l’équilibre financier, le cocontractant a droit à une indemnisation
totale (surcoûts, profits perdus, dommages et intérêts supplémentaires en cas de modification non
justifiée, obtenir la résiliation)
B Théorie du fait du prince
Application rare. « Introuvable théorie » ?
La transformation des conditions d’exécution est due à la personne publique contractante qui agit en
dehors des pouvoirs découlant des règles générales applicables au contrat administratif ; elle exerce une
compétence étrangère à sa qualité de partie au contrat (en dehors de toute faute). En général le
cocontractant subit, comme tout le monde, une aggravation de sa situation . Il faut que la décision mette
en cause l’objet même du contrat ou en modifie un élément essentiel pour que le cocontractant ait droit à
une indemnisation intégrale.
Conclusion au choix mais brève.
4
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
CAV- L 2 - EXAMEN DU TROISIEME SEMESTRE
DROIT ADMINISTRATIF - SESSION DE MAI 2012 - Trame de correction
Sujet pratique: Commentaire d'arrêt avec questions
C.E. 26 juin 1989 Fédération des syndicats généraux de l'éducation nationale et de la recherche
Répondez aux questions suivantes après avoir lu l'arrêt (chaque question est notée sur 4 points)
1° Quel est l’objet exact de la requête de la Fédération ?
- Annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre sur la demande du 29
janvier 1987 d’abroger les articles 7 du décret du 11 mai 1937 et 6 du décret du 27 octobre 1938 Demande faite dans les délais de recours contentieux (1point)
- Au motif qu’il seraient devenus incompatibles du fait d’un changement des circonstances de droit
(principe constitutionnel d’égalité homme/femme posé par les préambules des 1946 et 1958) - (3 points)
2° Que savez-vous de l’abrogation des actes administratifs ?
Un acte administratif peut disparaître, sortir, de l'ordre juridique de trois manières différentes : être
annulé, retiré ou abrogé.
Définition : l’abrogation est l’acte qui met fin pour l'avenir à une loi ou à une acte administratif unilatéral.
Conséquence du principe de mutabilité des règlements (C.E.1961,Vannier) ou des services publics, c’est
un procédé familier, normal qui permet aux autorités administratives de modifier, d'adapter à tout
moment, en toute liberté, pour de simples raisons d’opportunité, la réglementation qu'elle édicte. Elle peut
être totale ou partielle, expresse ou tacite.
Cette liberté peut se transformer, dans certains cas, en une obligation d’abroger. (1point)
Régime juridique de la demande d’abrogation (3 points)
- Antécédent : CE 1930 Despujol : en cas de changement de circonstances ayant motivé un règlement,
tout intéressé peut demander à son auteur de le modifier ou de l’abroger et, en cas de refus, saisir le juge .
Qu’en est-il quand le règlement est irrégulier dès sa signature et qu’il n’a pas fait l’objet d’un recours
contentieux dans les deux mois ? L’exception d’illégalité que peut alors soulever un requérant a des
conséquences limitées à son propre cas et laisse subsister le règlement lui-même. De là l’intérêt de
reconnaître le droit pour les administrés d’en demander l’abrogation et le devoir pour l’administration de
leur donner satisfaction .
- L’article 3 du décret du 28 novembre 1983 obligeait l’administration a faire droit, sans condition de
délai, à toute demande d’abrogation d’un règlement irrégulier, que cette irrégularité ait existé dès
l’origine ou qu’elle résulte d’un changement de circonstances . Mais ce décret était-il lui même régulier
(le pouvoir réglementaire peut-il remettre en cause une solution posée par le CE alors que c’est le CE qui
contrôle l’exercice du pouvoir réglementaire cf. CE 1959 Syndicat général des ingénieurs-conseils ) ?
(point bonus)
- L’arrêt C.E. Ass. 1989Alitalia reprend les termes du décret mais les élève au niveau d’un PGD. Un
particulier peut demander l’abrogation d’ un règlement irrégulier à tout moment, sans condition de délai
et le refus implicite ou explicite d'abroger est susceptible de faire l'objet d'une annulation contentieuse.
5
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012
Centre Audiovisuel d’Etudes Juridiques des Universités de Paris
C’est-à-dire, toute autorité administrative saisie d’une demande d’un administré doit abroger un
règlement irrégulier que celle-ci date de sa signature ou qu’elle soit due à un changement de circonstances
de droit ou de fait postérieur .
- Article 1 de la loi du 20 décembre 2007 : cette obligation d’abroger s’impose désormais à
l’administration en dehors de toute demande .
- C.E. 6 mars 2009 Coulibaly : abrogation d’un acte individuel créateur de droit ne peut exister que dans
les 4 mois et pour irrégularité (sauf demande du bénéficiaire)
3 ° Sur quel fondement juridique se base le Conseil d’Etat dans cette affaire ? Quel est sa valeur
juridique ?
Fondement : les préambules de 1946 et 1958 à valeur constitutionnelle (1point)
Valeur juridique (3 points)
- La notion de «bloc de constitutionnalité» (le corps même de la Constitution et le
préambule de la Constitution c’est-à-dire : la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen de 1789, Le préambule de la Constitution de 1946, les PFLR, la Chartre de
l’environnement 2004).
- La décision C.C. 71 - 44 D.C. du 16 juillet 1971, Liberté d’association est un texte fondateur.
- L'unité juridique du bloc constitutionnel : l’arrêt C.E. Sec 12 février 1960, Société Eky,
pose le principe selon lequel toutes les normes constitutionnelles ont même valeur
juridique .
4 ° Pourquoi le Conseil d’Etat estime-t-il le refus d’abroger entaché d’irrégularité ?
- dés lors que le décret est devenu irrégulier du fait d’un changement de circonstances de droit
- obligation d’abroger sur demande - un nouveau PGD posé par le juge administratif (ne pas
confondre avec les PFLR ! ) – sans doute 1ère application de la jurisprudence Alitalia (du 3 février
1989 !).
Bien faire attention que l’étudiant ait compris que le syndicat conteste la constitutionnalité d’un décret
plus de 50 ans après sa parution du fait d’un double changement des circonstances de droit :
- la création d’un nouveau PGD par le juge administratif ouvrant l’obligation d’abroger à la suite de toute
demande dès lors qu’il existe un changement dans les circonstances de droit, même 50 ans après
- ici le changement dans les circonstances de droit consiste en la valeur reconnue à des principes posés
par des textes élevés au rang de source constitutionnelle après leur parution.
5° Rédigez l'introduction et la conclusion du commentaire général que vous feriez de cet arrêt, et
indiquer les intitulés des parties et des sous parties que vous retiendriez .
Introduction :
Faits
Problématique
Enoncé de plan , par exemple
I Les décrets et la constitution et II Les décrets et l’abrogation
6
Droit administratif et institutions administratives - Licence 2 en Droit - S3 - BL n°7
Année universitaire 2011/2012