First Focus on EU defence
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First Focus on EU defence
Issue 1 Winter 2004 First Focus on EU defence ECONOMIC POLICIES LE « RAPPORT SAPIR » ET LE DÉBAT BUDGÉTAIRE DE L’UNION: LE COMBAT NÉCESSAIRE BY TOMAS GARCÍA AZCÁRATE , MAÎTRE DE CONFÉRENCE À L’IEE DE L’UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES André Sapir, une des chevilles ouvrières de notre Institut, a vécu une de ces merveilleuses mais rares opportunités qui se présentent parfois dans une carrière académique : participer à, et coordonner un groupe de réflexion sur le futur de l’Europe, à la croisée des chemins entre l’action, l’analyse et le conseil politique. Ma lecture de ce qu’il faut bien appeler aujourd’hui le « rapport Sapir » (ce qui représente un court-circuit injuste vu la qualité des autres participants au groupe de réflexion) pourrait se résumer en deux phrases : il y a une contradiction lourde de conséquence entre le discours officiel de l’UE et son action. Il faut mettre en accord notre action avec notre discours. Il est vrai qu’il est difficile de réprimer des larmes d’émotion devant les bons propos que nos dirigeants européens multiplient à chacune de leurs rencontres : faire de l’Europe la société la plus moderne du XXI° siècle ; développer des grands travaux publics si nécessaires ; donner l’importance qu’elle mérite à la formation et à l’éducation de la jeunesse européenne, trésor sur lequel est construit notre futur, privilégier l’emploi de qualité, développer la solidarité entre les territoires et les générations, faire que l’Europe occupe le rôle qui est le sien dans le concert des nations, contribuer à la paix dans le monde … Toutefois, les priorités politiques réelles, pas celles affichées dans les discours, sont celles qui découlent des priorités budgétaires. Les parlements sont d’ailleurs nés pour voter les impôts que les rois nécessitaient et très vite ont voulu avoir leur mot à dire sur comment l’argent était utilisé. Le budget de l’Union est concentré autour de deux politiques : la politique agricole et la politique de cohésion. Derrière les flots de bonnes intentions politiques ne se retrouvent pas aujourd’hui les moyens nécessaires pour les transformer en réalité. Voilà, pour moi, le message essentiel du rapport Sapir. Pour certains, c’est l’oeuf de Cristobal Colon diraient les Espagnols, une lapalissade diraient les Français. Et pourtant le rapport a été un fameux pavé dans la marre. Il n’a laissé personne indifférent. A ce stade de notre exposition, il est bon de partager quelques données budgétaires clés pour pouvoir ensuite prolonger le raisonnement : Le budget communautaire est plafonné à 1.24 % du PIB de l’Union. Toutefois, les prévisions budgétaires établies au Conseil Européen de Berlin prévoyait déjà une utilisation réelle en dessous dudit plafond, 1.09% en 2003 et 1.08% en 2004. Les budgets sont en réalité établis en dessous de cette prévision : le budget 2003 fut établi à 1.04%. De plus, même ce pourcentage réduit n’a pas été dépensé dans la pratique : ainsi en 2003 la Commission restitua 5 milliards d’euros correspondants aux fonds non utilisés en 2002. Pour l’année 2004, la première année d’une Union élargie, le budget a été établi à 0.98% du PIB communautaire. Comme d’habitude, le budget réalisé devrait être inférieur au budget prévisionnel. Cette diminution de l’importance relative du budget communautaire va de pair avec une croissance limitée en Europe , ce qui limite encore plus les moyens dont disposent l’Union. Cette situation me conduit à partager avec vous, vertueux lecteurs qui êtes arrivés à ce stade de mon article, les commentaires suivants: L’Union Européenne dispose de moyens limités, ridicule si on les compare avec les budgets nationaux qui tournent aux alentours des 35 à 40% du PIB. Malgré cela, son manque d’ambition politique l’empêche d’utiliser les maigres deniers dont elle dispose. Et de plus, elle n’est même pas capable de mobiliser dans la pratique les deniers alloués. Certes, la PAC est la 1ère priorité budgétaire de l’UE. Mais ce n’est pas l’existence de cette politique qui a limité le développement des autres politiques ; c’est le manque de volonté politique de construire l’Europe. Quand cette volonté a existé, par exemple avec les plans Delors I et II pour augmenter les fonds structurels, les moyens ont été trouvés et mobilisés. On ne fait pas plus d’Europe avec moins de budget, avec moins de fonctionnaires, moins de moyens financiers et humains. 27 On ne fait pas plus d’Europe en déstructurant les politiques communes existantes, en déshabillant Pierre pour habiller Jean. Que l’on me comprenne bien : je suis convaincu que la PAC doit évaluer, se moderniser, s’adapter aux demandes de la société du XXIème siècle. Ma position est donc loin d’être conservatrice. Ceux qui me connaissent savent que ce ne sont pas des mots creux. Mais la réforme ne peut pas être pilotée par des considérations budgétaires comme vecteur principal. Diminuer la dépense agricole communautaire veut souvent dire augmenter les dépenses agricoles nationales, comme le démontrent la crise de la vache folle. Avoir une politique agricole à deux vitesses, pour les riches qui pourront compléter l’addition avec de l’argent national ou régional, et pour les pauvres (en particulier pour les pays de l’élargissement) est non seulement révoltant du point de vue intellectuel mais de nature à remettre en question la libre circulation de marchandises agricoles, l’ossature du marché commun. Nous vivons une Europe malade, en crise. La Commission parlementaire la plus importante est aujourd’hui la COCOBU, Commission de Contrôle Budgétaire. Elle est plus importante que la COBU, la Commission Budgétaire. Ces deux commissions sont plus importantes que les commissions politiques. Il faudra bien qu’un jour un enfant dise tout haut certaines vérités qui ne plairont pas aux rois nus, comme le fait que les budgets doivent être mis au service des politiques, non pas les politiques au service des budgets. J’aurai beaucoup aimé que certaines de ces réflexions viennent aussi enrichir le rapport «Sapir ». J’ai la conviction qu’elles auraient contribué à renforcer son message essentiel. Au lendemain de l’échec du sommet européen de Bruxelles, les Présidents britanniques, hollandais, français, suédois, autrichiens, allemands (pays contributeurs nets au budget communautaire) ont envoyé une lettre conjointe au Président Prodi promouvant une limitation à 1% du PIB pour le budget communautaire, c'est-à-dire en diminution du seuil actuel de 1.24%. L’accord français a été obtenu grâce à la précision que cette diminution des dépenses communautaires ne devrait pas se faire au détriment des dépenses des marchés agricoles déjà fixées jusqu’à l’horizon 2012 par le Conseil Européen d’octobre 2002. On ne pouvait pas trouver meilleure (ou plutôt plus triste) caricature de la crise que traverse la construction européenne. Nous devons réussir l’élargissement, aboutir dans les négociations commerciales à l’OMC, contribuer au développement durable, aider les pays en développement non seulement avec des fonds mais en ouvrant nos marchés, construire la société de l’information, assumer les nouvelles fonctions que la nouvelle Constitution confierait à l’Union … avec moins de 1% du PIB. Ne nous voilons pas la face. Ce n’est pas le budget européen qui est en crise. C’est la volonté politique de construire l’Europe. Depuis la chute du mur de Berlin, le moteur est en panne. Les partisans d’une continuation du processus de construction européenne ne doivent pas se tromper de cible. Il n’y a qu’un seul et même combat : celui qui conduit à défendre les politiques communes en les réformant et les modernisant ; défendre la Commission Européenne en la réformant et la modernisant ; défendre un budget suffisant pour répondre ensemble aux ambitions légitimes et aux défis ; mettre en harmonie les discours et les actes. ɶ QUELQUES MOTS SUR LE « RAPPORT SAPIR » BY LYSE BOURROUSSE , IEE DE L’UNIVSERITÉ LIBRE DE BRUXELLES The report “Sapir” is a great piece of work about 180 pages from an independent group of experts of 8 different nationalities and from different economic backgrounds. Issued the 17th of July, the report was ordered by Romano Prodi in order to determine which strategy to adopt to fulfil the so-called “Lisbon agenda”: to become the most competitive and dynamic knowledgebased economy with sustainable economic growth and greater social cohesion. The report seeks to “follow the tracks” of a previous famous report written in 1986 which was very influential in designing new economic policies and paving the way for such a collective adventure. At that time, the priority was to set a stable macro economic framework while fostering cohesion within the Union. Stability and cohesion were pretty much at the top of agenda, and successfully achieved by the advent of a Single market in 1993, the common currency in 2000 and an expanded Community budget targeted to regional policies. Thus, the report proposes a new model of growth based on a common diagnostic of the current economic situation. The underperformance of EU growth has widened the gap between the European and the American standards of life. Our level of PIB per capita has stagnated at 70% of the US level. If, the EU has improved macroeconomic stability during the EYES ON EUROPE - PRINTEMPS 2004 - NUMERO I ECONOMIC POLICIES 28 1990’s, it has failed to deliver a satisfactory growth performance. Our traditional economic model is brought into question, strained by rapid changes such as population ageing, new technologies and globalisation. Mass production generating economies of scale, industrial structure dominated by large firms with stable markets and long term employment patterns are no more the driving force of our economies. changes of our economies. Discussed throughout all the Member States, it is criticized by politicians both negatively and positively. The most negative opinions assimilated it to provocation and criticised, the unrealistic and naïve proposals coming from just a “bunch of just academics”. But one should not forget that those academics brought together their strong expertise in European public policies. This report argues that Growth is our common challenge to sustain our model of development. Without recovering Growth, the sustainability of our achievements such as cohesion, stability would vanish. Thus, Europe needs a new system of economic policies which would help to restore growth and solve today’s contradictions. For instance, a “hot” issue would be now to tackle fiscal policies as a tool to enhance growth while maintaining the overall stability of the system (and commitments such as reducing the deficit spending …) In such a context, enlargement is not the main reason to implement the reforms, but an additional factor which puts pressure on the process to recover growth. “The pace of economic change in Europe is accelerated by enlargement”. Indeed, the Recommendations advanced by the Group, although independent, were far from being disconnected from the political context. The Prodi Commission is now writing a final document to plan the next financial perspectives (2007/2013) which will be a kind of testimony for the next commission. Unfortunately, budget issues will keep on being the main concern for the next Commission and the Member States, with the side effect of obscuring the debate on growth. That’s why by putting forward growth as a programmed and desirable aim, the report can be viewed as a breakthrough. It brings a new frame for the discussion on budgetary matte What is needed now is more opportunity for new entrance, greater mobility of employees within and across firms, more retraining, greater reliance on market financing, higher investment in both research and development, and higher education. The common diagnostic reaches the conclusion, that the linking problem between EU 15 and EU 25, is growth deficit. Since the end of the 1980s, the slowdown of our economies contrasted with the accelerated growth rate of the Eastward states. Today, the biggest challenge of those states is to catch up the development level of the EU 15 rate. Thus, the report aims at giving a coherent plan to catch up Growth. It provides real and independent proposals with different degree of realism. The group was not constrained by any political considerations and the likelihood of passing the proposals in actual political setting was not examined. That’s why some proposals are more elaborated than the others. “Free” ideas are launched such as the green cards for non EU workers. The political context such as the debates on Constitution, the Intergovernmental conference, the Cancun failure, affected the “perception” of the report. Its reception was mixed. On the whole, it was warmly welcomed by all the reform oriented decision makers, academics, and those who wants to break the status quo in the EU. On the contrary, it was denied by those who “close their eyes” to the realities and modern EYES ON EUROPE - PRINTEMPS 2004 - NUMERO I ECONOMIC POLICIES 29