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2
1. Introduction
Le séminaire sur Verlaine a relevé le fait qu’il est quasiment impossible de reconnaître un
poème de Verlaine grâce à son style, son langage ou à une certaine thématique. Sa poésie
est – comme sa personnalité – difficile à cerner, instable, inclassable, inconstante et
changeante. Son œuvre est en fait un collage surréaliste qui assemble la sensibilité du
romantisme, la rigueur formelle parnassienne, la visualité et musicalité du symbolisme et la
visualisation impressionniste. La manière la plus appropriée pour s’initier à la poésie
verlainienne est de suivre une piste chronologique, car sa vie et son œuvre sont imbriqués
l’une dans l’autre plus profondément que chez d’autres poètes.
A la recherche d’un sujet pour ce travail de séminaire j’ai choisi comme point de
départ le poème «Pierrot» car cette figure de la Commedia dell’arte m’a intéressé. C’était
un des deux poèmes que nous avons présentés lors de la séance sur le recueil Jadis et
naguère. Au cours des recherches préparatoires j’ai trouvé plusieurs autres poèmes dans
lesquels apparaissent également des personnages de la Comédie Italienne, ce qui m’a
amené à suivre cette piste et à analyser les divers figures de la Commedia dell’arte dans les
poèmes «Pantomime», «Fantoches», «Colombine», «Pierrot» et «Le Clown».
Ce travail de séminaire se constitue des parties suivantes: je parlerai d’abord
brièvement de la Commedia dell’arte, de ses personnages typiques et de son influence en
France. Les poèmes sélectionnés ont été composés à différentes périodes de la création
poétique de Verlaine: «Pantomime», «Fantoches» et «Colombine» ont été tirés de Fêtes
galantes, «Pierrot» et «Le Clown» de Jadis et naguère. Il me paraît donc nécessaire de les
présenter d’abord brièvement dans le contexte de ces recueils. Face à la quantité de textes
choisis, ce travail j’ai favorisé une analyse comparative entre les différents poèmes
sélectionnés au lieu de d’examiner un ou deux textes plus détaillé. L’analyse suivra une
piste chronologique et portera sur des aspects suivants: Est-ce que Verlaine utilise les
personnages de la Commedia dell’arte sans modification ou est-ce qu’il les transforme et
comment? Quelle est leur fonction sémantique ? Est-ce qu’il y a des rapports entre ces
différents poèmes ?
Tous les poèmes figurent dans l’Appendice I, qui suit la bibliographie. Afin de mieux
pouvoir se représenter les personnages de la Commedia dell’arte j’ai inclus des illustrations
et deux tableaux, qui se trouvent dans les Appendices II et III à la fin du travail.
3
2. La Commedia dell’ arte
La Commedia dell’arte fut née en Italie au 16e siècle sur les places des villages et s’inspira
surtout de l’art et de la culture de la Renaissance. Cette comédie des personnages regroupe
les archétypes principaux des caractères humains occidentaux et ainsi mets les gens face à
eux-mêmes. C’est un théâtre non psychologique, qui se base sur l’énergie comique des
acteurs et des situations. Dans ses canevas simplistes, l’homme se révèle tel qu’il est, avec
ses atouts et ses faiblesses. La majorité des caractères portent des masques ou des demi
masques (du haut du front jusqu’aux pommettes), qui proviennent originalement du nord
de l’Italie. L’art du comédien réside alors dans l’habileté de faire vivre son masque.
Il est attesté que le Théâtre Italien avait sa place officielle en France dès la seconde
moitié du 16e siècle. Selon Krömer (66/67) les artistes de la Commedia dell’arte, invités de
la cour française dès le fin du 16e siècle, étaient en tournée en France, leur premier pays
d’accueil. Les comédiens français et italiens commençaient à jouer sur la même scène
devant le peuple et les citoyens parisiens (Krömer:73). Malgré leur grand succès en France,
les artistes italiens avaient des difficultés à surmonter la barrière linguistique, ce qui se
répercutait de manière considérable sur l’évolution de la Commedia dell’arte en France :
Da in der neuen Umgebung nur das Spiel und das Spektakel (nicht hingegen
der Dialog italienischer Sprache und keineswegs der Dialekt) verständlich
waren, verschob sich der Akzent im Stegreifspiel zum Bravourakt einzelner
Schauspieler … Französische Szenen wurden eingeführt. So ergab sich, dass
das Gleichgewicht der Commedia dell’arte, die Unterordnung aller
Elemente unter die Ensemblewirkung verloren ging, der Schauspieler und
der Wortwitz immer wichtiger wurden.
(Krömer:73)
La tradition du Théâtre Italien était reprise et continuée dans le Théâtre de la Foire
parisienne. Les autorités françaises cependant ne leur accordèrent pas les privilèges
nécessaires pour pouvoir continuer à représenter leurs pièces. Par conséquence, ils furent
forcés de jouer dans de conditions plus difficiles que le Théâtre Français :
So durfte etwa … auf der Bühne nicht gesprochen werden, und die
Schauspieler zeigten Schilder mit ihrem zu singenden Text. Später verkaufte
die Oper Privilegien, und so konnten die Darsteller singen. Daher kam
einerseits der Bühnenzauber, andererseits der Musik besondere Bedeutung
zu. 1
(Krömer:74)
1
Le mutisme, la pantomime et la musique jouent également un rôle très important dans la poésie de Verlaine.
4
Après la dissolution du Théâtre Italien en 1697 et sa réouverture 19 ans plus tard on réalisa
bientôt que le genre de la comédie improvisée ne répondait plus aux besoins de cette
époque. On se concentra donc sur des parodies d’opéras et la Commedia dell’arte fusionna
et se dissout finalement dans l’Opéra comique en 1762.
Les écrivains français célèbres Molière et Marivaux furent profondément influencés
par la comédie italienne. Dans ses comédies Molière reprit les vices et défauts de certains
caractères de la Comédie Italienne, comme par exemple le pédantisme, la vanité,
l’hypocrisie ou l’avarice, qu’il attaquait dans ses pièces. Dans les comédies de Marivaux,
ce sont surtout les dialogues, les caractères des Amoureux et des Valets, les masques et le
déguisement qui rappellent la Commedia dell’arte.
2.1 Les principaux personnages de la Commedia dell’arte
Un des aspects fondamentaux de la Comédie Italienne est qu’elle se sert toujours des
mêmes personnages et éléments scéniques, qui fournissent un cadre fixe pour chaque
représentation. Les caractères se laissent diviser en trois groupes: Le couple amoureux
(Innamorati) est au centre de l’action, puis les vieux et les précieuses ridicules (Pantolone,
Il Dottore, Il Capitano, Cassandrino), et enfin les valets (Zanni). La plupart des
personnages qui apparaissent dans les six poèmes sélectionnés font partie de ce dernier
groupe. Chacun de ces caractères – Arlequin (Arlecchino), Colombine (Colombina),
Pierrot (Pedrolino), Polichinelle (Pulchinella) et Scaramouche (Scaramuccia) – “apporte
avec son nom le pittoresque d’une grimace ou d’une cabriole” (Robichez:79).2
2.1.1 Les Amoureux
Contrairement aux autres figures de la Commedia dell’arte, les Innamorati ne se
développèrent en véritables personnages, mais ne restèrent toujours que des types. Pour
cela, ont leur a attribua différents noms, qui correspondaient souvent à ceux des artistes
eux-mêmes. On les connaît donc sous les noms suivants: Angelica, Aurelio/Aurelia,
Cinzio, Eularia, Fabrizio, Faminia, Florindo, Isabella, Lavinia, Leandro, Lelio, Lindoro,
Silvio/Silvia, Orazio, Ottavio, Ortensio/Ortensia, Vittoria et beaucoup d’autres. Il y a
toujours deux couples qui seront réunis à la fin de la pièce. Ils sont d’abord amoureux
d’eux-mêmes, puis d’amour et, seulement par conséquence, de leur amant/e. Leur langage
est courtois, flamboyant, hyperbolique, pleine de métaphores baroques et des termes
rhétoriques. Car ils ont beaucoup de difficultés à communiquer ensemble, ils dépendent
5
absolument de leurs valets et servantes. Comme Pierrot, ils ne portent pas de masques,
mais sont fortement maquillés. Leurs vêtements correspondent souvent à la mode actuel de
l’époque dans laquelle est représenté la pièce.
2.1.2. Le Docteur
Ce type de caractère fut crée par l’effet de l’air de Bologne, qui était saturé des collèges et
des docteurs gonflés de leurs titres honorifiques. Même s’il s’appelle Docteur, il est parfois
aussi philosophe, astronome, homme de lettre, cabaliste, avocat, grammairien ou
diplomate. Le veuf ou célibataire est un babillard éternel qui ne cesse de citer des phrases
en latin. Son vêtement se constitue d’une longue robe noir, un immense chapeau et un
demi masque noir, qui couvre le front et le nez et ses joues sont barbouillées de rouge. Très
souvent, il prend la fonction du père d’un/e des Innamorati.
2.1.3 Le Capitaine
C’est le personnage le plus vague et impénétrable de la Commedia dell’arte. Son origine
fut soit dans Théâtre Romain (le ‘Miles Gloriosus’ de Plaute) ou dans les figures des
mercenaires Don Juan, Pizzaro et Don Quixote, qui reflétèrent la domination militaire des
espagnols en Italie à cette époque. C’est une satire de la profession militaire. Ils se
développèrent alors en deux personnages distincts: le soldat italien et l’espagnol. Chaque
acteur ayant joué ce rôle a inventa un autre nom et origine généalogique, préférablement le
plus long que possible comme par exemple Spavento della Valle Inferna, Giangurgolo,
Rogantino, Fanfarone, Coccodrillo ou Salvador de los Virgenes Burraches, Matamore,
Sangre y Fuego, etc. Il est grand, vaniteux, extravagant, galant et habillé d’un uniforme
splendide, un grand chapeau coloré à plumes, une épée et un masque avec un long nez. Le
Capitaine pense qu’il est fort, beau et courageux, mais en réalité il n’est qu’un lâche du
type de Cyrano de Bergerac. Colombine l’utilise souvent pour humilier Arlequin.
2.1.4 Arlequin
Ce caractère, que l’on connaît également sous le nom de Harlequin ou Harlekin, a une
origine paneuropéenne. La première apparition d’un certain Hellequin est attestée dans
Philomena, une adaption d’Ovide par Chrétien de Troyes, écrit entre 1160 et 1185. Dans
cet œuvre Arlequin est décrit comme un messager du diable. Ces qualités diaboliques
remontent jusqu’aux légendes nordiques et aux Miracles du Moyen Age (Kellein:16). Son
2
Toutes les informations sur ces personnages de la Commedia dell’arte sont issues des sites internet.
6
personnage réapparaît aussi dans l’épopée La divina Commedia de Dante sous le nom de
Alechino. On le reconnaît facilement à son costume multicolore (normalement en jaune,
rouge, vert et noir) en carrés. Il porte un masque noir et une brosse en bois. L’humble
serviteur est bête, famélique, crédule, superstitieux et lâche. Arlequin est l’éternel soupirant
de Colombine et, pour cette raison, essaye de supplanter son concurrent Pierrot.
2.1.5 Colombine
C’est un des seuls bouffons féminins de la Commedia dell’arte. On l’appelle aussi
Arlecchina, Corallina, Ricciolina, Camilla ou Lisetta3. Cette malicieuse et charmante
servante est souvent courtisée par des vieillards amoureux, qu’elle attire avec sa
coquetterie. Son habit simple ressemble à celui d’Arlequin. En plus elle porte un tablier,
est coiffée d’un petit bonnet blanc et ne porte pas de masque. Selon Krömer (37) Arlequin
et Colombine sont les figurent les plus importantes de la Commedia dell’arte, car la plus
grande partie du comique remonte d’eux et leurs types se sont conservés le mieux et le plus
longtemps.
2.1.6 Pierrot
C’est le personnage le plus populaire que l’on connaît comme caractère naïf, enfantin,
muet, retenu, mais toujours gentil et sensible. Il vit dans son monde intérieur et n’est pas
un homme d’action, mais plutôt un observateur. Il eut souvent le rôle d’initiateur d’une
scène de théâtre. Tout le monde connaît son habit typique tout en blanc avec des manches
trop longues et un grand chapeau. Au lieu d’un masque sa figure est farinée, ce qui lui
donne l’avantage de disposer d’une ampleur pantomimique plus étendue. A dire de Kellein
(13) Pierrot devint populaire après l’expulsion de la Comédie Italienne en 1697 comme
caractère de la foire des ‘Paradis’ parisiens, dans lesquels il se présentait mimant et
accompagné des écriteaux avec son texte.
Molière fut le premier auteur français à présenter Pierrot dans sa pièce Dom Juan ou
le festin de pierre au Palais Royal en 1665 (Kellein:27). Un siècle plus tard, le peintre
Antoine Watteau crée une idole visuelle de lui dans son tableau célèbre Pierrot, dit Gilles4
– l’oeuvre principal de la peinture du 18e siècle –qui fait partie d’une série de tableaux avec
le titre Fêtes galantes5. Mais ce tableau, qui n’était pas mentionné du vivant de Watteau,
3
Cette servante s’appelle Lisette dans les comédies de Marivaux.
Voir Appendice III, Illustration 1).
5
Ce titre est une de plusieurs sources d’inspirations pour le cycle de poèmes de Verlaine avec le même titre.
4
7
n’influencera les arts plastiques comme nouvelle idole artistique du Pierrot qu’au seuil du
18e siècle. (Kellein:16). C’est Watteau qui forma le plus cette figure en lui attribuant une
nouvelle fonction que Kellein appelle “das schweigende Erlebnis der Gesellschaft”
(13/14). Même si Pierrot apparaît toujours au centre de ces tableaux, entouré de belles
dames ou d’acteurs dans un parc, il parait être très solitaire.
2.1.7 Polichinelle
Le plus vieux personnage de la Commedia dell’arte est connu internationalement: il
s’appelle Hanswurst en Allemagne, Kasperle en Autriche, Toneelgek aux Pays-bas, Mister
Punch en Angleterre, Karagoz en Turquie, Petrouchka en Russie ou Pendj en Perse.
Polichinelle est soit un valet idiot et bavard soit un maître astucieux, courageux ou poltron.
De même que Pierrot il est habillé tout en blanc, mais sa chemise est serrée d’une ceinture
en cuivre. De plus, il porte un long chapeau et un masque noir. Le caractéristique la plus
voyante est son nez crochu. Cette ressemblance à un bec de coq s’atteste aussi dans son
nom, qui est dérivé de l’italien pulcino, ce qui signifie ‘petite poule’. A l’exception de
Scaramouche, il est le seul à ne pas être amoureux de Colombine.
2.1.8 Scaramouche
Ce caractère, dont on ne connaît pas l’origine, est moins célèbre que les autres. Le
serviteur de gentilhomme aime le vin et les femmes, est lâche et fuit au moindre coup
de poing. Du point de vue de ses habits noirs de pied en cape, il s’oppose à
Polichinelle et Pierrot. Très souvent il s’associe avec Polichinelle, qu’il fait rêver
des exploits imaginaires. Il est possible qu’il se soit développé à partir du personnage
de Zorro, le bandit espagnol, qui est également habillé en noir, portant un masque
noir, mais qui est définitivement plus courageux.
8
3. Analyse des poèmes
Les trois premiers poèmes qui seront examinés font partie de Fêtes galantes (1869), le
deuxième recueil lyrique de Verlaine. Comme je l’ai déjà mentionné dans l’introduction, le
poète s’est apparemment laissé inspirer de la peinture de Watteau pour cette collection,
cela dit “on ne trouve pas dans les Fêtes galantes un Watteau vu directement par Verlaine,
mais la légende de Watteau” (Robichez:69). Les 22 poèmes mettent en valeur le plaisir
sensuel du monde de Louis XV et la fantaisie personnelle de Verlaine. Le style – beaucoup
plus souple que dans son premier recueil Poèmes saturniens – est dominé par la langue
orale, des tournures familières et des archaïsmes, qui lui donnent une allure vive. On
assiste à une atmosphère de plus en plus sombre vers la fin du recueil, mais qui n’est
jamais aussi dramatique que dans ses oeuvres plus tardives. En dehors de cela, Verlaine a
préféré dans Fêtes galantes des poèmes à mètres courts et des mots brefs.
Avant de se plonger dans l’analyse il est nécessaire de dire encore un mot sur la pièce
maîtresse «Clair de lune», le premier poème de Fêtes galantes, qui est connue comme une
des plus célèbre de Verlaine. Vue que ce poème s’appelait «Fêtes galantes» dans la version
préoriginale (Robichez:65) il est évident que ce texte introduit l’atmosphère et des
thématiques du cycle entier, dont j’aimerais mentionner les plus importants. La lumière de
la lune – un leitmotiv de la poésie verlainienne – crée l’ambiance ambiguë entre nuit et
jour dès le titre. L’atmosphère du parc nocturne – une référence à Watteau – est porteuse
d’une signification affective et symbolique. Ainsi est-il avec le monde du rêve, où on se
trouve dans un état entre vie et mort. En plus, le poème anticipe déjà la thématique du
poème «Pierrot» et sa relation avec la figure du rêveur lunaire dans la berceuse populaire
“Au clair de la lune..”. Le poème passe de l’extérieur physique du paysage à l’intérieur
psychique. Même si aucun personnage de la Commedia dell’arte n’y est mentionné à
première vue, il faut noter que les caractères d’Arlequin et de Brighella étaient le plus
souvent qualifiés de “bergamasques” (vers 2). De plus, l’apparence légère et la frivolité
évoquent l’univers de la comédie. Un autre aspect que l’on retrouvera dans les poèmes
suivants est le mélanges des cultures de la Commedia dell’arte (masques, costumes
fantaisistes, vocabulaire archaïque) et du monde aristocratique français du 18e siècle (parc,
galanterie). L’analyse suivante montrera que «Clair de lune» représente déjà tous les sujets
qui y sont thématisés.
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3.1 «Pantomime»
Le titre du deuxième poème du cycle met le lecteur in medias res, c’est-à-dire dans le
monde du théâtre et de la comédie. La pantomime, à laquelle se réfère le titre, est un art
théâtral qui rend les situations et sentiments par des attitudes, des gestes, des jeux
physionomiques sans avoir recours à la parole. Pour cela, elle est souvent aussi considérée
comme langue universelle, car qu’elle se sert de l’éloquence la plus naturelle. Dans ce
poème Verlaine décrit donc avec ses mots le non-dit des ‘artistes’, qu’ils expriment en
mimant. Les verbes reflètent ce fait: ils décrivent soit un mouvement/une action (vider,
entamer, verser, pirouetter), soit un procès intérieur/intellectuel (combiner, rêver, sentir,
entendre) Mais aucun verbe n’est lié à la parole. A cela s’ajoute que ces verbes révèlent, de
la première à la dernière strophe, un mouvement de l’extérieur à l’intérieur. Chacun des
quatre tercets ennéasyllabiques constitue une unité syntaxique et thématique. Le poème
ressemble à une description objective d’une scène de théâtre vue de la perspective d’un
spectateur. Cet aspect est souligné par le temps verbal: Les quatre ‘scènes’ se déroulent
toutes dans le présent, ce qui produit un effet de simultanéité.
Verlaine mêle ici trois caractères de la Commedia dell’arte (Pierrot, Arlequin,
Colombine) et deux de la Comédie Française (Clitandre, Cassandre). En fait, Cassandre,
un “vieillard sot et ridicule, toujours bafoué” est aussi lié à la comédie italienne, car son
nom n’est qu’une adaptation de Cassandrino de la Commedia dell’arte (ZEUS). Clitandre
par contre est un jeune primeur de la Comédie Française et figure dans une pièce de
Molière. La constellation des personnages est alternante: c’est-à-dire que dans la première
et la troisième strophe figure un couple et dans la deuxième et la quatrième un seul
personnage. Il n’y a pas d’interaction entre ces cinq personnages et ils ne se soucient pas
les uns des autres. Cela se reflète également au niveau formel: les quatre strophes ne sont
pas liées syntaxiquement. Le titre primitif «En a-parte» prend d’avantage compte du fait
que ce n’est pas “une scène de comédie, mais quatre dessus-de-porte indépendants”
(Robichez:552).
Pierrot ne ressemble pas au rêveur lunaire de «Clair de lune» ou «Pierrot», mais a
été transformé en buveur et morfal (vers 2: “vide un flacon”, vers 3: “entame un pâté”).
Selon Robichez “[l]a gloutonnerie est un des traits traditionnels de Pierrot” (552). Il ne se
montre pas du tout naïf, enfantin et retenu comme dans la Commedia dell’arte, mais
est peu embarrassé de fadaises et réaliste, ce qui est exprimé par le mot “pratique” (vers3).
Cassandre, qui se trouve ailleurs (vers 4 : “au fond de l’avenue”) est triste à cause
de “son neveu déshérité”. Mais sa tristesse n’a pas beaucoup d’influence sur les autres
10
personnages, qui ne le prennent jamais au sérieux. Le fait que Verlaine change
l’expression “verse DES larmes” en “verser UNE larme” indique également que la tristesse
de Cassandre n’est pas si grande.
La structure syntaxique de la prochaine strophe est renversée et légèrement altérée:
épithète + nom + verbe/objet directe. De cette manière, l’attribut “faquin” – un “terme de
mépris s’adressant à un … personnage méprisable, vaniteux, malhonnête et sot” (ZEUS) –
est mis en relief. Arlequin est caractérisé comme quelqu’un de rusé et raffiné, qui veut
enlever son amante Colombine. Le vers 9 décrit sa vivacité, son agilité et l’habileté de ses
pirouettes.
La dernière strophe se distingue considérablement des autres par plusieurs aspects. Le
caractère de Colombine est transformé : Elle n’est plus une soubrette coquette, mais semble
être plutôt passive qui ne se défend pas du tout contre l’attaque d’Arlequin. Au contraire,
elle est plongée dans ses rêves comme Pierrot, le rêveur lunaire. Contrairement aux autres
personnages elle n’agit pas et ne fait pas de pantomime. Le dernier vers, qui se termine
avec le mot “voix”, est mis en relation particulière avec le titre: Colombine n’a
effectivement pas recours à la parole, mais semble avoir intériorisé les voix d’autres
personnes. Elle ne les entend pas avec ses oreilles, mais avec son cœur.
Pour conclure on peut dire que ce poème est divisé en deux parties: dans les trois
premiers quatrains on nous présente des personnages masculins qui sont en pleine action.
Dans la dernière strophe cependant, Colombine, le seul personnage féminin, semble être à
part, car elle est plongée dans ses rêves amoureux.
3.2 «Fantoches»
Ce poème – le onzième du recueil – présente beaucoup de similarités avec «Pantomime».
On remarque d’abord que la disposition des strophes, le schéma métrique et le type de vers
sont les mêmes: Les rimes féminines et masculines sont à l’envers. Cela veut dire que les
vers octosyllabiques, qui ont le schéma aaB/ccB/ddE/ffE de «Pantomime» sont ici changés
en AAb/CCb/DDe/FFe. En plus, le titre est également associé au monde du théâtre et de
l’art dramatique. Pourquoi Verlaine a choisi le mot ‘fantoche’ au lieu de ‘marionnette’, les
deux termes étant presque synonymes? A mon avis, ce choix a été fait pour plusieurs
raisons. D’abord le mot ‘fantoche’ est emprunté à l’italien fantocchio ou son diminutif
fantochini (ZEUS) et se combine mieux avec les caractères de la Comédie Italienne. A cela
s’ajoute que la signification figurative de fantoche – un “[h]omme sans caractère ni
volonté, qui se laisse mener par autrui et ne peut être pris au sérieux” (ZEUS) – fait
11
ressortir plus subtilement le caractère des personnages. La nuance de signification entre les
deux mots est qu’un ‘fantoche’ a, par définition, toujours recours à la parole alors qu’une
‘marionnette’ peut être “articulée ou non” (ZEUS). Cela semble être paradoxal, car aucun
des personnages n’a recours à la parole. Ce n’est que le rossignol qui “clame” dans la
dernière strophe.
Il est même possible que le poète ait l’intention de jouer avec la
association phonique de ‘fantoches’ avec ‘fantômes’ afin de souligner l’effet sinistre de
ces ‘acteurs’ muets.
Une autre similarité réside dans le fait que le poème ressemble de nouveau à une
description extérieure d’une scène et chaque strophe forme une unité thématique et
syntaxique. Mais, contrairement à «Pantomime», les personnages ont fait connaissance les
uns des autres et la comédie s’est nouée. L’effet de simultanéité entre différentes actions –
mis en évidence par les verbes au présent – ressort encore mieux à travers des adverbes
(“Cependant” vers 4, “Lors” vers 7) et l’enjambement au vers 9 et 10 (“en quête/de son
beau pirate espagnol”).
Les cinq personnages Scaramouche, Pulcinella6, le docteur bolonais, sa fille et le
pirate espagnol – tous des caractères de la Commedia dell’arte – sont distribués
irrégulièrement dans ce poème: Dans la première strophe figure le couple Scaramouche et
Pulchinella, tandis que dans les strophes 2 et 3 il n’y a qu’un seul personnage et dans la
dernière seulement le rossignol. Ils se trouvent tous dans la nature, mais dans trois espèces
différentes: Scaramouche et Pulchinella “sur la lune”, le docteur Bolonais “parmi l’herbe”
et la fille “Sous la charmille”. La fille et son amant le pirate espagnol (qui est
probablement le Capitaine) représentent ici les Amoureux. Le couple Scaramouche et
Pulcinella incarnent les fantoches par excellence, car ils sont des lâches, sans consistance
ou volonté. Ils semblent bien s’entendre même s’ils communiquent par des gestes. Leur
relation est expliquée au vers 2 : “Qu’un mauvais dessein rassembla”. Ils forment donc un
couple bien rodé :
Scaramouche s’entend assez bien avec Pulchinella, autre gaillard de son acabit
(…) bras dessus, bras dessous, l’un parlant fort et gesticulant brutalement,
l’autre beuglant et sautant, faisant tournoyer son sabre autour des passants, ils
arpentent les promenades. Lorgnant les mêmes femmes et désirant les mêmes
bouteilles.
(Maurice Sand, Masques et Bouffons, tome II:259, dans Robichez :562)
6
C’est le seul personnage dont Verlaine utilise le nom italien. Mais il l’écrit différemment: Pulcinella au
lieu de Pulchinella. Ce n’est probablement qu’une faute typographique.
12
L’adjectif “noirs” (vers 3) ne se réfère pas à la nuit, dans laquelle se joue cette scène, mais
aux habits et masques de Scaramouche et Pulcinella. Les deux forment un contraste devant
(“sur”, vers 3) la lumière lunaire et créent une atmosphère mystérieuse. Elle est
comparable à celle du tableau Un soir de Carnaval (1886) d’Henri Rousseau7, même si
l’on y voit un autre couple; Pierrot et Colombine. La phrase “Le ciel s’est habillé ce soir en
Scaramouche” (Robichez:562) qui est issu de Le Sicilien de Molière (premier acte, scène
2) se réfère également à cette première strophe de «Fantoches».
L’attribut “excellent” ,en parlant du docteur Bolonais, a un sens ironique, car il est
un personnage qui n’est jamais pris au sérieux. Cueillant des plantes médicinales (“des
simples”, vers 6) il ne s’occupe pas des autres personnages, même pas de sa fille. La
troisième strophe est ponctuée par de nombreuses virgules, ralentissant le rythme de la
phrase qui s’étend du vers 7 jusqu’à la fin du poème au vers 12. Pendant que son père le
docteur cherche des plantes sa fille est en train de chercher son amant. Son jeune visage
délicat et éveillé, qui ressemble à une poupée (“piquant minois”, vers 7), rappelle le titre du
poème. Le pirate espagnol n’est cependant pas présent physiquement dans ce poème.
Les sentiments amoureux de la fille sont finalement transférés sur le rossignol, qui
est chargé de chanter l’amour pour elle. Son chant “langoureux”, qu’il “[c]lame” à “tuetête” (vers12) détermine l’atmosphère de la fin du poème, qui devient plus passionnante et
mystique. Le rossignol8 – représentant métaphorique du poète – est donc le seul à
s’exprimer au moyen de sa voix. Ce dernier vers ressemble au dernier vers de
«Pantomime» car dans les deux, le poète présente des personnages qui n’expriment pas
leurs sentiments directement par la parole, mais les intériorisent ou les transposent à un
autre caractère ou une autre figure.
3.3 «Colombine»
Dans ce poème – un des derniers de Fêtes galantes – la structure faite d’enjambements, de
coupes et de virtuosité saisit l’attention du lecteur. Tandis que le poème est assez long (6
strophes), Verlaine joue avec le rythme rapide des deux mètres courts: l’impair
pentasyllabe et le pair dissyllabe. Chaque sixain est constitué de deux vers
pentasyllabiques et d’un vers dissyllabique. Les groupes syntaxiques sont divisés
systématiquement, soit entre un nom et son déterminant possessif (vers 5/6: son/Capuce,
7
8
Voir Appendice III, p. 26.
Cet animal réapparaît dans les poèmes «En sourdine» (Fêtes galantes), «Le Rossignol» (Poèmes
saturniens/Paysages tristes) et “L’ombre des arbres …” (Romances sans paroles/Ariettes oubliées, IX).
13
vers 11/12: sous/Son Masque), un nom et une préposition (vers 16 /17: devant/Une belle
enfant, vers 23/24: A bas/Les pattes) ou un adjectif et un adverbe (vers 8/9: si/Fantasque).
A part cela, il y a un grand nombre de rimes équivoques: sot/saut (vers 1/2), puce/Capuce
(vers 3/6), buisson/son (vers 4/5), aussi/si (vers 7/8), chante/Méchante (vers 15/18),
pervers/vers (vers 19/20), appas/bas (vers 22/23), des astres/désastre (vers 27/30), qui
créent des effets cocasses. Du point de vue thématique, il n’y a rien de nouveau; c’est
encore une ‘scène’ de théâtre, se constituant d’une énumération des actions des différents
personnages. Cette fois-ci, cependant, la scène entière n’est décrite que dans une seule
phrase, allant du vers 1 jusqu’au vers 24. A l’exception du mot “buisson” (vers 4), aucun
autre terme ne se réfère à la nature. La scène peut donc aussi bien se dérouler à l’intérieur
qu’à l’extérieur.
Encore une fois, les figures de la Commedia dell’arte (Pierrot, Arlequin, Colombin)
et de la Comédie Française (Léandre, Cassandre) ont été mélangées. Léandre est le seul
caractère n’ayant pas encore été rencontré ailleurs. Ce personnage amoureux et naïf est issu
des comédies de Molière. Dans la première strophe sont d’abord présentés trois des cinq
personnages: Léandre par son intellect limité (“le sot”, vers 1), Pierrot par son action (“qui
d’un saut/De puce/Franchit le buisson”, vers 2-4) et Cassandre par son habit (“sous son
capuce”, vers 5-6). Colombine, d’après laquelle est nommé le poème, figure, elle, comme
sujet actanciel dans la majorité des strophes. Pourtant, elle n’est pas appelée par son nom,
mais est désignée par l’expression “une belle enfant” (vers 17).
La virtuosité verbale dans la première strophe concerne les allitérations (Sot/Saut/
Sous/Son, CAssandre/CApuce), les assonances, les rimes cocasses (sOT/PierrOT/ /sAUT,
SON/buisSON, puce/caPUCE) et l’homophonie (sot/saut). L’esthétique du “saut” au vers 2
est une stratégie de l’imprévu qui se produit au niveau littéral (le saut de Pierrot) et au
niveau métrique (de la fin du vers 2 à la marge initiale au vers 3).
Le jeu des mots se poursuit également dans la strophe suivante avec des allitérations
(Si/Ses/Sous/Son)
et
des
assonances
(auSSi/maSque/FantaSque/coStumes/
luiSant/maSque, ArlequIN/aigrefIN). Arlequin, associé au troupeau de la première strophe
par le mot “aussi” (vers 7), n’est pas seulement un “aigrefin” (vers 8) – un “[i]ndividu rusé
et habile à duper autrui pour parvenir à ses fins” (ZEUS) – mais aussi un “fantasque”9. Ses
“yeux luisants” (vers 11) ressemblent beaucoup à ceux de «Pierrot» (“deux grands trous
où rampe le phosphore”, vers 12).
9
Dans «Clair de lune» le mot “fantasques” se réfère aux costumes.
14
Tandis que Cassandre couvre l’arrière de sa tète sous “sous son/Capuce” (vers 6), Arlequin
se cache “sous son masque” (vers 12).
La ritournelle alternée “– Do, mi, sol, mi, fa, –” (vers 13)10 dans la troisième
strophe fonctionne comme interférence entre les propos et les pensées du poème, mais
n’interrompt pas le cours de la description. L’atmosphère est très gaie et détendue: “Tout
ce monde va,/Rit, chante/Et danse” (vers15/16). Colombine, positionnée en face, est
présentée comme la chef du groupe. C’est une figure ambiguë: à la fois une “belle enfant”
(vers 17) et une femme “[m]échante” (vers 17/18)11. Il y a là aussi des allitérations
(Mi/Monde/Méchante, Danse/Devant) et des assonances (fA/vA, mI/rIt, chANte/dANse/
devANt /enfANt/ méchANte, chANTE/méCHANTE). Les “yeux pervers” de Colombine,
comparés avec “ les yeux verts/Des chattes”12 (vers 19/20), est une allusion sexuelle à ses
charmes féminins (“appas”, vers 22), dont elle use (“relevant ses jupes”, vers 32/33) pour
séduire sa troupe de soupirants. Mais elle “se refuse aux désirs qu’elle allume et ceux qui
la poursuivent sont pour le moment incapables de la fléchir” (Robichez:507). La soubrette
laisse parler ses yeux pour les mettre en garde: “A bas/Les pattes” (vers 23/24), car elle sait
que “– Eux ils vont toujours–” (vers 25).
Tout à coup le ton change: la phrase interrogative, s’étendant sur les deux dernières
strophes, parle du “Fatidique cours/Des astres” (vers 26/27), qui guident le groupe dans des
“Mornes ou cruels/Désastres” (vers 28-30). Colombine, la “belle enfant” s’est transformée
en “implacable enfant” (vers 31). Il n’est pas claire “[l]a rose au chapeau” (vers 34) de
Colombine a une signification particulière. Le jeu amoureux paraît dérisoire et bizarre, car
le groupe de ses soupirants – un sot, un acrobate, un vieillard et un aigrefin – est un
“troupeau/De dupes” (vers 35/36), ce qui est la métaphore finale du poème.
10
11
12
Verlaine l’utilise aussi dans les vers 5 et 12 de «Sur l’herbe».
Cela rappelle les deux types de femmes adorées par Verlaine: d’un côté sa cousine Elisa et sa femme
Mathilde, qui étaient jeunes et innocentes et de l’autre côté sa mère et ses amantes, qu’il ne pouvait pas
toujours supporter.
Cette similarité maléfique entre femme et animal est également thématisée dans «Femme et Chatte», le
premier poème de la section Caprices des Poèmes saturniens.
15
Les deux poèmes suivants sont tirés du recueil Jadis et naguère (1884), un des derniers
cycles de Verlaine. Il s’agit d’un mélange disparate qu’il publia dans une période de
déchéance afin de rembourser ses dettes. Composés à diverses époques de sa vie, les
poèmes ne comptent pas parmi les plus célèbres. Les deux adverbes ‘jadis’ et ‘naguère’ du
titre tiennent compte du fait qu’il s’agit d’une collection poétique rétrospective. Le cycle,
qui compte une cinquantaine de poèmes, est divisé en deux parties (Jadis/Naguère), dont la
première est subdivisée en trois sections. Dans la première de ces sections, Sonnets et
autres vers, se trouve, en plus de «Pierrot», le texte clé «Art poétique», qui met en lumière
certains postulats fondamentaux de Verlaine.
3.4 «Pierrot»
Cette pièce lyrique est la deuxième de la section Sonnets et autres vers. Verlaine la dédia
au poète Léon Valade (1841-1884), un de ses premiers amis littéraires (Robichez:631). Ce
poème fut exclu de la première parution, probablement à cause de la “verhaltenen Erotik
Pierrots” (Kellein:61), avec la quelle Verlaine ne voulait apparemment pas choquer son
public. Bien que le pièce fasse partie du cycle Jadis et naguère, il appartient
thématiquement plutôt à Fêtes galantes, car il fut déjà composé en 1868, une année avant
la publication de ce recueil.
Ce poème présente une similitude avec «Colombine» en tant que le titre est
également nommé d’après un personnage de la Commedia dell’arte, ici Pierrot, qui n’est
plus appelé par son nom dans le poème. La régularité de la forme traditionnelle du sonnet
est contrebalancée d’un côté par le renversement des rimes féminines et masculines et de
l’autre côté par un alexandrin désarticulé. C’est-à-dire que la césure est placé entre des
mots qui sont traditionnellement indissociables; entre un nom et son possessif
(sa//chandelle, vers 3) et entre une préposition et son complément (sous//les morsures, vers
8). De plus, l’expression “a l’air …” est dissocié de son attribut “D’un linceul” (vers 6/7) et
il y a un contre-rejet (“de sorte/Qu’il”, vers 7/8). De nouveau, chaque strophe correspond à
une unité syntaxique.
Du point de vue thématique le texte se base sur l’opposition entre la figure du
Pierrot traditionnel, présenté à l’imparfait, et la figure transformée en “spectre” au
présent13. Pour le premier quatrain Verlaine s’inspira du Pierrot lunaire qui figure dans la
première strophe de la berceuse populaire (le “vieil air”, vers 1) «Au clair de la lune»14:
13
14
Cette opposition temporelle reflète également celle du recueil Jadis et naguère
La chanson fut composée d’Aloysius Bertrand au début du 19e siècle.
16
1
2
3
4
Au clair de la lune,
Mon ami Pierrot.
Prête moi ta plume
Que j’écrive un mot.
5
6
7
8
Ma chandelle est morte
Je n’ai plus de feu ;
Ouvre-moi ta porte
Pour l’amour de Dieu.
Le JE poétique exprime son chagrin (“hélas”, vers 3) à cause de la disparition de ce
Pierrot d’autrefois, auquel il attribue des connotations positives (“riait”, vers 2, “gaîté”,
vers 3). Le nouveau Pierrot, dont la présentation occupe le reste du poème, est lié avec des
connotations négatives, dysphoriques et macabres. Même s’il “semble hurler” (vers 8),
personne ne répond à ses “signes fous” (vers 11). Pierrot est une figure de cauchemar, une
incarnation de la mort hideuse et du pourrissement, qui sont omniprésents dans les mots
“mort” (vers 3), “spectre, mince” (vers 4), “froid” (vers 6), “linceul, béante ” (vers 7),
“ver ” (vers 8), “grands trous” (vers 12), “effroyable” (vers 13), “moribond” (vers 14) et
même dans les assonances des phonèmes du mot ‘mort’ (“pORte” vers 2, “empORte” vers
6, “sORte” vers 7 ou “mORsures” (vers 8) et “phosphORe” (vers 12).
En ce qui concerne les couleurs, les oppositions traditionnelles (blanc = positive =
vie et noir = négatif = mort) ne sont plus valables, car Verlaine a mêlé les notations de la
lumière (“clair” vers 4, “éclair” vers 5, “manches blanches” vers 10, “phosphore” vers 12,
“la farine” vers 13) avec la blancheur de la mort (“pâle” vers 6, “exsangue 14” vers 14).
Les perceptions auditives, visuelles et sensitives produits par l’“éclair” (vers 5), le “vent
froid”15 (vers 6), son hurlement imaginaire (vers 8) et le bruit d’oiseau (vers 9) contribuent
également à cette atmosphère inquiétante. Il s’agit là probablement d’un hibou, qui est
réputé pour son cri et auquel on attribue d’ailleurs une connotation maléfique.
Comme il fut remarqué plusieurs fois au cours de cette analyse, Verlaine semble
avoir une affinité particulière pour l’expression des yeux de ses personnages. Les
descriptions dans «Colombine» (“Ses yeux luisant sous//son masque”, vers 11/12) et dans
le poème suivant «Le Clown» (“Ses yeux ne vivent pas dans son masque d’argile.//Ils
luisent bleus …”vers 7/8) sont étonnamment similaires à celle du vers 12: “Ses yeux sont
deux grands trous où rampe du phosphore”. Le phosphore est une “lumière intense, brève
et diffuse” (ZEUS) qui ressemble beaucoup à celle de la lune, qui est un leitmotiv de Fêtes
galantes.
15
Cela rappelle le “vent mauvais” (vers 6) du poème «Chanson d’automne» dans la section Paysages tristes
des Poèmes saturniens.
17
3.5 « Le Clown »
Le huitième poème de la section Sonnets et autres vers de Jadis et naguère est dédié au
poète et polémiste Laurent Tailhade (1859 -1919) et fut composé une année avant
«Pierrot», en 1867. Cette pièce peut être considéré comme stade préliminaire de «Pierrot»
vue que Verlaine y réutilise tous les éléments formels, stylistiques et thématiques.
Dans ce sonnet régulier, la ponctuation souligne syntaxiquement l’unité thématique
de chaque quatrain, comme on l’a déjà constaté dans «Pantomime» et «Pierrot». Verlaine
y décrit différents types de clowns, dont un, qui n’est pas nommé, est le “maître à tous”
(vers 4). Qui est-ce clown? Il n’est pas difficile de le déduire à partir de la description de
ses vêtements (“blanche armure de satin” vers 6), son masque (“masque d’argile” vers 8,
“le fard et les onguents” vers 9) et ses yeux (“Vides et clairs ainsi que des miroirs sans
tain” vers 7, “ne vivent pas” vers 8, “Ils luisent bleus” vers 9): il s’agit indéniablement de
Pierrot.
Dans le premier quatrain le JE poétique adopte le ton d’un metteur en scène de
théâtre, qui donne des didascalies aux acteurs sur scène (“adieu”, “”bonsoir”, “arrière” vers
2, “Place” vers 2) dans le mode impératif. Le marqueur déictique “Voici” (vers 4) est
l’équivalent verbal du lever du rideau pour présenter les trois types célèbres de “bouffons
vieillis” (vers 2) Bobèche, Paillasse et Gille. Ils appartiennent à différentes périodes de la
Comédie Burlesque:
De ces trois types de pitres, Gille, immortalisé par le tableau de Watteau, est le
plus anciennement connu en France. Niais et poltron, il apparaît sur les tréteaux
de la Foire dès la fin du XVIIe siècle. Cent ans plus tard, Paillasse, venu
d’Italie … devient le grand maître des parades à la porte des spectacles
populaires. Bobèche … joue le même rôle sous l’Empire et la Restauration,
mais ce nom … a d’abord été celui d’un authentique bateleur dont la popularité
tenait en partie à son irrévérence en matière politique.
(Robichez:635)
Ces trois clowns doivent céder leur place à Pierrot, le “parfait plaisantin” (vers 2) et
“clown agile” (vers 4). On ne peut pas le comparer aux autres clowns, car il n’a pas les
caractéristiques typiques d’un véritable bouffon traditionnel; non seulement il est “grave,
discret, hautain” (vers 3), mais également “[p]lus souple qu’Arlequin et plus brave
qu’Achille” (vers 6). Comme ce héro de la mythologie grecque, Pierrot porte une “armure
de satin”. Cela est une figure d’oxymoron, mais plutôt du point de vue de la qualité
matérielle que de la couleur.
18
L’atmosphère, détendue dans la première strophe, devient de plus en plus amère et tendue
dès le vers 7. La description de ses yeux (vers 7 à 9), qui est une combinaison des termes
du champ lexical de la mort et de la lumière, ressemble à celle de «Pierrot» (vers 12). Ses
yeux sont comme “des miroirs sans tain” (vers 7), ce qui est une comparaison intéressante.
Cela signifie que, contrairement à un véritable miroir, celui-là est transparent d’un côté.
Pierrot peut alors observer son public derrière ce ‘miroir’ sans qu’il en s’aperçoive. Le
public cependant n’est pas capable de voir la tristesse et la solitude à l’intérieur de Pierrot,
car il se voit reflété soi-même dans ses yeux. Le sourire de Pierrot (vers 12), vu sous
l’angle des deux derniers vers, a l’air affiché et ironique. Les gens entourant Pierrot sont
en contraste avec lui: Ils sont dévalorisés du point de vue de leur statut social (“la
canaille”, vers 13), leur intellect, leur apparence physique (“bête et laid”, vers12) et leur
odeur (“puante”, vers 13). Le deuxième hémistiche du vers 13 (“sainte des Iambes”) se
réfère au poème Iambes (1839) d’Auguste Barbier, dans lequel celui parle de “la sainte
canaille” qui “chante l’héroïsme des combattants de juillet ” (Robichez:635).
Pierrot joue un double jeu: D’un côté il divertit le public, de l’autre côté il “hait”
ces gens qui l’applaudissent. Il n’est pas un clown ou un bouffon traditionnel, mais un
“histrion” – un terme qui fait référence aux acteurs romains, qui jouaient des farces et des
satires. On atteste finalement que, comme tous les autres personnages que l’on a rencontrés
dans les poèmes précédents, Pierrot ne parle pas, mais s’exprime seulement par des gestes
et la mime.
A la fin de cette analyse, pour être complète, j’aimerais encore faire la remarque suivante:
Du point de vue du titre, on pourrait également inclure à première vue le poème «Pierrot
gamin» de Parallèlement dans cette analyse. Ce recueil, publié à 1889, parut dans les
dernières années de la vie de Verlaine, qu’il passa isolé et abandonné après la mort de sa
mère et d’un de ses amants. Le poète trouva son inspiration pour ce cycle dans l’érotisme
et ses passions intimes. Formellement ce poème ressemble à «Colombine»: Ce sont six
strophes à six vers, le même schéma métrique. En plus, le premier hémistiche du vers 1
(“Ce n’est pas … ”) est similaire au premier vers de «Pierrot» (“Ce n’est plus …”). Mais
au niveau du contenu on remarque dès la première strophe que ce Pierrot n’a plus
beaucoup affaire avec le personnage traditionnel de la Commedia dell’arte ou le rêveur
lunaire tel que Verlaine le décrit dans les autres cinq poèmes :
19
1
2
3
4
5
6
Ce n’est pas Pierrot en herbe,
Non plus Pierrot en gerbe,
C’est Pierrot, Pierrot, Pierrot.
Pierrot gamin, Pierrot gosse,
Le cerneau hors de la cosse,
C’est Pierrot, Pierrot, Pierrot !
Il ressemble plutôt à la figure de Gavroche, un “[g]amin de Paris, gouailleur, malin et
brave coeur” (ZEUS). Il s’agit donc plutôt d’une allusion à l’homosexualité du poète et son
attirance pour les jeunes garçons comme Rimbaud et Lucien Létinois. Ce poème ne se
prête thématiquement pas à une analyse dans le cadre de ce travail de séminaire.
20
4. Conclusion
Avant de tirer une conclusion qualitative de l’analyse des poèmes et de répondre aux
questions posées dans l’introduction, j’aimerais résumer quelques aspects quantitatifs et
formels. Pour mieux les mettre en exergue, je les ai rassemblés dans un tableau synoptique,
qui montre pour chaque poème le nombre de strophes, le nombre de vers par strophe, le
type de vers, le schéma métrique et l’apparition des différents personnages de la
Commedia dell’arte:
poème
«Clair de lune»
«Pantomime»
«Fantoches»
«Pierrot»
«Le Clown»
«Colombine»
«Pierrot gamin»
personnages
bergamasques
(Arlequin, Brighella)
Arlequin,
Pierrot,
Colombina,
Cassandre, Clitandre
Scaramouche, Pulcinella, le docteur, sa
fille, le pirate
espagnol (= le Capitaine)
(Pierrot, titre)
strophes
3
vers/strophe
4/4/4
type de vers
10 syllabes
schéma métrique
AbAb/CdCd/EfEf
4
3/3/3/3
8 syllabes
aaB/ccB/dde/ffE
4
3/3/3/3
8 syllabes
AAb/CCb/DDe/FFe
4
4/4/3/3
11/12 syllabes
(Le Clown, titre),
(Pierrot), Bobèche,
Paillasse, Gille,
Arlequin, Achille
(Cassandre),
Arlequin, Pierrot,
Léandre, Cassandre
(Pierrot gamin, titre)
4
3/3/4/4
12 syllabes
Abba/AbbA/ccD/eeD
(sonnet renversé)
aBBa/aBBa/CCd/EdE
(sonnet classique)
6
6/6/6/6/6/6
2x 5 syllabes
+ 1x 2 syllabes
6
6/6/6/6/6/6
7 syllabes
AAbCCb/DDeFFe/
GGhIIh/JJkLLk/
MMnOOn/PPqRRq
aaBccB/ddEffE/
ggHiiH/jjKllK/
mmNooN/ppQrrQ
Cette vue d’ensemble amène à plusieurs conclusions: Du point de vue du nombre de
strophes, du nombre de vers par strophe et du schéma métrique on peut regrouper (à
l’exception de «Claire de lune») les poèmes par paires: «Pantomime» et «Fantoches»,
«Pierrot» et «Le Clown», «Colombine» et «Pierrot gamin». A cela s’ajoute que dans
chaque paire, les rimes féminines et masculines sont à l’envers. En ce qui concerne les
personnages, on remarque que Pierrot (qui apparaît dans cinq poèmes) et Arlequin (qui
figure dans quatre poèmes) sont les caractères les plus souvent mentionnés, soit
directement, soit indirectement par le titre ou des descriptions.
Au niveau qualitatif, c’est la figure de Pierrot que Verlaine exploite le plus parmi les
personnages de la Commedia dell’arte: En effet ses descriptions occupent le plus grand
nombre de vers dans les poèmes analysés. Il est le seul personnage que le poète a
21
transformé dans ses poèmes. Tous les autres caractères ont été repris tel qu’on les connaît
de la Comédie Italienne. Pour cela, Pierrot est le seul personnage qui a une véritable
fonction sémantique pour dans poésie verlainienne. Elle est décrite le plus explicitement
dans «Pierrot». Le Pierrot transformé et le Pierrot traditionnel sont, à mon avis, des
allusions, le premier pour la poésie de Verlaine telle qu’il la postule dans «Art poétique» et
le deuxième pour la poésie traditionnelle de cette époque. C’est-à-dire que le JE poétique,
qui exprime dans ce poème sa préférence pour le ‘vieux’ Pierrot est une métaphore pour le
milieu littéraire autour du poète, qui admirait la poésie formelle et n’appréciait pas l’œuvre
novateur de Verlaine. Verlaine est représenté par la figure cauchemardesque du ‘nouvel’
Pierrot, qui est à l’agonie – une image hyperbolique pour l’effort du poète de recevoir de
la reconnaissance et d’appréciation pour son œuvre artistique. Le combat contre le
pourrissement par le “ver” est probablement un jeu de mot avec ‘vers’. C’est une allusion
en forme de synecdoque représentant l’art poétique traditionnel, contre laquelle Verlaine se
prononça avec son oeuvre. Mais cette fonction sémantique de Pierrot comme représentant
du poète ne se trouve pas seulement chez Verlaine:
Spätestens am Zeitpunkt der Wende zu unserem Jahrhundert wird der Pierrot
fraglos zur Chiffre für die Künstlerexistenz, seine Ausgeschlossenheit aus der
Gesellschaft, seine resignativ-melancholische Distanz, die Clownsrolle, die er
mit traurigem Lächeln spielen muss. Pierrot ist deshalb stets der Künstler
selber, dieser wiederum Hoffnungsträger und Identifikationsfigur für alle
Menschen, die ihn ebenso bewundern wie sie in ihrer bürgerlichen
Geborgenheit vor seiner Geworfenheit in die Welt schaudernd
zurückschrecken.
(Kellein:7)
Ce personnage de la Commedia dell’arte devint alors un symbole de l’esthétisme dans la
poésie française. D’autres poètes ont également dédié leurs textes à Pierrot comme par
exemple Baudelaire dans son poème en prose «Le Vieux Saltimbanque» (Petits Poèmes en
Prose, section Le Spleen de Paris, 1864) ou Théodore de Banville dans ses Odes
Funambulesques (1857). Il ne faut surtout pas sous-estimer l’importance des arts plastiques
comme sources inspiratrices de Verlaine. Il est indéniable que la figure du Pierrot, qui était
aussi populaire dans la peinture à cette époque, apporta une contribution importante :
Pierrot gehört wie keine andere Figur der frühen französischen Rokokomalerei
einem geschichtsfernen Grenzland zwischen wildem Aussenraum und
verträumten Parks an. Er war als Zeitgenosse lesbar, und seine Rolle lässt sich
verklären, weil sie erotische Schüchternheit und, durch das flickenlose, weisse
Kostüm, eine gewisse Reinheit beinhaltet.
(Kellein: 43)
22
Au début du vingtième siècle même des compositeurs comme l’Autrichien Arnold
Schönberg avec Pierrot Lunaire (1912) ou le Russe Igor Stravinsky dans Petruschka
(1911) l’ont mis en musique.
Il semble que, dès la fin du 16e siècle – lorsque Pierrot s’est développé comme un
des personnage de la Commedia dell’arte – jusque à nos jours cette figure avec sa
physionomie, sa mimique et sa gestuelle n’a pas perdu de son actualité. Pourquoi nous
fascine-t-il toujours? Est- il en réalité question de nous? Sommes-nous les Pierrots?
Pierrot ne change pas le monde, mais nous le montre seulement en nous présentant nousmême dans le miroir de ses yeux.
23
5. Bibliographie
Editions:
Verlaine, Paul. Fêtes galantes – La Bonne Chanson – Romances sans paroles – Ecrits
sur Rimbaud. Paris : Garnier-Flammarion, 1976.
Verlaine, Paul. La Bonne Chanson – Jadis et naguère – Parallèlement. Paris:
Gallimard, 1979.
Ouvrages sur Verlaine :
Bercot, Martine. Verlaine, 1896-1996. Actes du colloque international des 6-8 juin
1996. Paris : Klincksieck, 1998.
Robichez, Jaques. Paul Verlaine. Œuvres poétiques. Paris : Editions Garnier Frères,
1969.
Autres ouvrages :
Kellein, Thomas. Pierrot. Melancholie und Maske. München, New York: Prestel, 1995.
Krömer, Wolfram. Die italienische Commedia dell’ arte. Erträge aus der Forschung:
Band 62. Darmstadt: Wissenschaftliche âme, 1990.
Références
<<http://zeus.inalf.cnrs.fr>>. Le Trésor de la Langue Française informatisé (TLFi),
version du 10.12.2002.
Sites internet:
<<http://tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/UVLibre/9900/bin57/commedia.htm>>. Les
personnages de la commedia dell’arte, 26.2.2003.
<<http://shane-arts.com/Commedia%20Stock%20Characters%20Comico.htm#>>. The
Commedia dell’Arte homepage, 21.04.2003.
<<http://www.geneve.ch/heg/campus/travaux/id/sites/2002/bouffon/representation/menu
2/theatre/theatre.htm>>. Le bouffon dans le théâtre, 04.03.2003.
24
6. Appendice I : Poèmes
25
26
Appendice II : Les personnages de la Commedia dell’arte
27
Appendice III : Illustrations
Tableau 1)
Antoine Watteau, Pierrot, dit Gilles, vers 1718/19, huile sur toile, 184,5 x 149.5 cm,
Musée du Louvre, Paris, (Kellein:12).
28
Tableau 2)
Henri Rousseau, Un soir de Carnaval, 1886, huile sur toile, 116 x 89 cm, Philadelphia
Museum of Art, (Kellein:63).
29
Arlequin
Colombine
Pierrot
Polichinelle
Le Docteur
Scaramouche
Le Capitaine
Les Amoureux

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