épancht thorax - Safari en Tanzanie

Transcription

épancht thorax - Safari en Tanzanie
se former / CONDUITE À TENIR /
Epanchement
pleural liquidien
des carnivores domestiques
L
a présence d’un épanchement pleural
liquidien n’est jamais anodine pour
l’animal : elle diminue la capacité respiratoire et est la conséquence d’une
maladie ayant provoqué la modification des échanges liquidiens (encadré 1). Deux
étapes s’imposent lors du diagnostic : confirmer l’épanchement et détecter sa cause.
Les points essentiels
Etape 1
• Etude des commémoratifs ;
• inspection ;
•
•
• confirmation échographique.
Première étape : Objectiver
l’épanchement pleural
Etape 2
•
1. Suspicion clinique
se des renseignements fournis
•±
èse et étude du liquide
de ponction (+ cytologie) ;
• radiographie après ponction.
• Commémoratifs : la gravité de la fatigue et
de l’essoufflement dépend de la quantité de
liquide contenue entre les deux plèvres. La toux
est rare, particulièrement chez le chat, et d’amplitude réduite.
• Inspection : La dyspnée de type restrictif
(polypnée) est associée à une discordance. La
position d’orthopnée caractérise une amputation sévère de la fonction respiratoire.
• Auscultation : les bruits cardiaques et respiratoires sont amortis, principalement en région
ventrale.
Etape 3
• Thoracentèse ;
• traitement étiologique.
2. Confirmation radiographique
par Jean-François
Rousselot
Article reçu en janvier 2001
38
Photo 1. Cliché radiographique du thorax
en vue de profil : épanchement pleural
chez un chat atteint d’une cardiomyopathie
hypertrophique. La densité liquidienne
masque complètement la silhouette cardiaque
et les lobes pulmonaires apicaux et moyens.
Les lobes diaphragmatiques sont arrondis
et la trachée est repoussée vers la colonne
vertébrale.
Le Point Vétérinaire / N°213 / Mars 2001 /
Cliché J.-F. Rousselot
Cliché J.-F. Rousselot
Les clichés radiographiques en vues de profil
et de face (préférer l’incidence ventro-dorsale
plus performante pour la visualisation des
champs pulmonaires) doivent être de bonne
qualité (éviter les clichés flous et déclencher en
Photo 2. Cliché radiographique du thorax
en vue de face : épanchement pleural
chez un teckel. A noter les scissures lobaires
entre les lobes pulmonaires apical,
moyen et caudal droits (flèches).
fin d’inspiration) pour détecter un épanchement. La contention nécessaire à la réalisation
du cliché n’est pas sans risque pour l’animal :
il peut être judicieux de recourir préalablement
à une thérapeutique d’urgence améliorant la
capacité respiratoire. Si le dispositif radiologique le permet, la prise du cliché thoracique
avec l’animal en position debout facilite la visualisation de la densité liquidienne.
• Epanchements de faible ou moyenne quantité : la densité liquidienne se répartit d’abord
entre les lobes pulmonaires (scissures interlobaires), puis occupe un espace de taille variable
entre le poumon et la cage thoracique. Les
angles costo-diaphragmatiques s’arrondissent
et sont comblés par le liquide, le bord ventral
du cœur n’est plus visible (photos 1 et 2).
• Epanchements volumineux : la densification
liquidienne se généralise. Les structures pulmonaires et cardiaques sont masquées par le
liquide. La taille du champ thoracique augmente, le diaphragme est déplacé vers l’arrière
et les lobes pulmonaires rétractés et arrondis
se collabent vers le hile. Le déplacement dorsal
de la trachée ne peut pas être dans ce cas considéré comme un indice de cardiomégalie. Seule,
la ligne formée par le bourrelet graisseux péricardique permet parfois de repérer la silhouette
cardiaque.
3. Confirmation échographique
L’échographie thoracique est la méthode d’investigation idéale pour dépister la présence de
liquide entre les deux plèvres. Elle se réalise sur
l’animal en position debout et ne comporte pas
les risques liés à la contention nécessaire pour
l’examen radiographique.
Pathogénie
! Une faible quantité de liquide existe
physiologiquement entre les feuillets
viscéral et pariétal de la plèvre. Un
épanchement pleural liquidien est une
accumulation excessive de ce liquide. Au
niveau de l’espace pleural normal
s’effectuent des échanges liquidiens entre
les capillaires de la plèvre pariétale et les
capillaires de la plèvre viscérale et les
lymphatiques. Les différentes pressions qui
s’exercent sur la plèvre (figure 1)
aboutissent à un équilibre, assurant la
présence intrapleurale d’une faible quantité
de liquide et son renouvellement
permanent.
! Le diff érentiel de pression
hydrost atique entre les capillaires
systémiques et pulmonaires crée un
courant permanent de liquide entre les
plèvres pariét ale et viscérale. Cet
équilibre es t rompu et le liquide
s’accumule entre les deux plèvres lors
de circonstances diverses (tableau 1).
Plèvre pariétale
Plèvre viscérale
Capiilaire sytémique
Espace pleural
Capillaire pulmonaire
Pression hydrostatique
1 à 10 mL
Cliché J.-F. Rousselot
liquide
Photo 3. Coupe échographique petit axe
transventriculaire abord droit : épanchement
pleural chez un chien. Une zone anéchogène
entoure les deux ventricules (VG : ventricule
gauche, VD : ventricule droit).
Elle est constituée par une quantité
importante de liquide (EP). Le feuillet
médiastinal antérieur est bien visible.
Pression osmotique
Pression intra-pleurale
négative
Drainage lymphatique
Formation
Résorption
Résultante des forces : sens de passage du liquide
Figure 1. Pressions assurant un passage permanent de liquide à travers
la plèvre normale.
Cliché J.-F. Rousselot
Mécanisme
Photo 4. Coupe échographique grand axe
abord droit : épanchement pleural
chez un chat atteint d’une cardiomyopathie
hypertrophique. Le liquide pleural (EP)
facilite l’exploration du cœur qui présente
un épaississement marqué du septum
interventriculaire et de la paroi libre
du ventricule gauche (VG). Les oreillettes
(AG et AD) sont dilatées.
Causes organiques
Augmentation
de pression hydrostatique
Insuffisance cardiaque, hernie
diaphragmatique, néoplasies, etc.
Baisse de pression osmotique
Hypoprotéinémies, néoplasies, etc.
Modification de perméabilité capillaire
Inflammations, infections,
traumatismes, néoplasies
Augmentation de pression
intra-pleurale négative
Obstruction sévère
des voies aériennes supérieures
Tableau 1. Principales causes d’accumulation de liquide entre les deux plèvres.
Encadré 1.
!!
/ N°213 / Mars 2001 / Le Point Vétérinaire
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se former / CONDUITE À TENIR /
Affections
Explorations
les plus utiles
Caractères du liquide
et cytologie
Origine cardiaque chez le chien
Phase terminale des cardiopathies
décompensées droites ou globales
Echocardiographie auscultation
cardiaque, ECG
Liquide séro-hémorragique
transsudat modifié
L’ascite a précédé
l’épanchement pleural
Origine cardiaque chez le chat
Cardiomyopathies
(décompensation gauche)
Echocardiographie, auscultation
cardiaque, ECG
Liquide séro-hémorragique
ou chyle
transsudat modifié
L’épanchement pleural
est aussi fréquent que
l’œdème pulmonaire
Absence d’ascite
Origine néoplasique chez le chien
Envahissement des séreuses,
compression ou inflammation
dues à la tumeur
Echographie thoracique,
radiographie après ponction,
scanner
Transsudat modifié ou chyle
Cytologie très utile
Nombreuses localisations
et types tumoraux
possibles
Idem chien
Liquide séro-hémorragique
ou chyle
Echographie thoracique,
radiographie après ponction
Transsudat modifié ou sang
La hernie diaphragmatique
est fréquente et la
radiographie la met
difficilement en évidence
Examen général (fièvre)
Radiographie (souvent
un seul hémitorax atteint)
Exsudat, liquide clair
ou chyliforme (PIF)
Cytologie, bactériologie,
sérologie
CIVD
Etude de la coagulation
Sang non coagulable
Origine néoplasique chez le chat
Grande fréquence
des lymphosarcomes médiastinaux
Origine traumatique
Hernie diaphragmatique,
torsion d’un lobe, rupture vasculaire
Origine infectieuse
Pyothorax
Origine toxique
Intoxication par anticoagulants
Autres origines
Syndrome néphrotique, MAI,
pancréatite, thoracocentèses
répétées, thrombose
de la veine cave, etc.
Commentaires
Association fréquente
avec épanchement
abdominal
Origine idiopathique
Réduction importante des cas rencontrés dans ce groupe grâce aux renseignements fournis par l’échographie et la cytologie
Tableau 2. Principales causes des épanchements pleuraux.
Type
Apparence
Analyse
Cytologie
Transsudat
Clair, limpide
vaguement jaunâtre
TP < 15-25 g/L
PS < 1 015
Cellules pauvres (< 1 000)
Macrophages
Lymphocytes
Cellules mésothéliales
Transsudat modifié
Modérément trouble,
pâle, jaune rosé à rouge
TP < 35 g/L (25-45)
PS entre 1 015 et 1 025
Cellules pauvres (1 000 - 7 000)
Macrophages, lymphocytes
Cellules mésothéliales
Neutrophiles non dégénérés
Exsudat
non septique
Trouble, ambré à rouge
TP > 30 g/L (30-70)
PS > 1 018
Cellules riches (5 000 - 20 000)
Neutrophiles, macrophages
Lymphocytes
Cellules mésothéliales
Exsudat
septique
Trouble à floconneux
Jaune/vert/brun/rouge
Nauséabond
TP > 30 g/L (30-70)
PS > 1 018
Cellules très riches (5 000 - 300 000)
Neutrophiles dégénérés
Trace de bactéries phagocytées
dans les neutrophiles et les macrophages
Chyle
Blanc laiteux à rosé
TP > 30 g/L
PS > 1 018
Cellules moyennes (400 - 20 000)
Petits lymphocytes
Neutrophiles non dégénérés
Macrophages
Hémorragie
Sang
TP > 30 g/L
PS non mesurable au réfractomètre
Cellules riches (5 000 - 20 000
ou < 25 p. cent du sang périphérique)
Similaire à l’image
différentielle
Néoplasie
Toutes les formes
au-dessus possibles
Idem
Mise en évidence de cellules tumorales,
à l’exception des hémangiosarcomes
et des chémodectomes
Tableau 3. Caractéristiques des liquides de ponction. TP : protéines totales, PS : poids spécifique, comptage cellulaire : 1000 = 1 x 109/L.
Fuentes L.-F. Manual of small animal cardiorespiratory medecine and surgery. BSAVA Ed. 1998:288.
40 Le Point Vétérinaire / N°213 / Mars 2001 /
Les abords gauche et droit permettent de visualiser facilement les zones anéchogènes ou hypoéchogènes qui caractérisent la présence de
liquide. Les feuillets médiastinaux antérieur et
postérieur sont facilement reconnaissables et
“dansent”dans le liquide, sous l’effet conjugué
des mouvements respiratoires et cardiaques
(photos 3 et 4). Cet examen renseigne en outre
sur la quantité de liquide, son épaisseur et son
homogénéité (aspect plus ou moins hypoéchogène). L’épanchement péricardique se collecte
autour de l’apex du cœur et disparaît à sa base :
il ne doit pas être confondu avec l’épanchement
pleural.
Deuxième étape :
rechercher la cause
de l’épanchement
Le diagnostic différentiel est une étape longue
et délicate (tableau 2).
La synthèse entre les renseignements fournis
par l’examen clinique et plusieurs investigations
complémentaires conditionne le succès de cette
étape.
• Parmi les nombreuses possibilités offertes,
l’échographie thoracique occupe une place prépondérante. Elle permet dans de nombreuses
circonstances de déterminer la cause de l’épanchement.
• La thoracocentèse et l’étude du liquide de
ponction est utile lorsque l’examen échographique n’a pu être réalisé ou lorsque celui-ci
n’a pas permis d’aboutir au diagnostic. La thoracocentèse s’effectue à gauche et à droite entre
le 6e et le 8e espace intercostal, juste au-dessous de la jonction chondrocostale. Le liquide
peut être un transsudat (transparent, pauvre
en cellules et en protéines), un transsudat
modifié (séro-hémorragique, plus riche en cellules et en protéines), un exsudat (aspect
variable, forte cellularité, très riche en protéines), du sang, du chyle ou un liquide chyliforme (tableau 4).
• Les grands progrès réalisés dans le domaine
de la cytologie la rendent souvent indispensable,
en particulier pour mettre en évidence et caractériser des processus néoplasiques.
• La radiographie après ponction permet d’étudier les structures thoraciques préalablement
masquées par l’épanchement.
Conduite pratique lors de suspicion clinique
d’épanchement pleural liquidien
Radiographie thoracique
Echographie thoracique
Confirmation de l’épanchement
Confirmation de l’épanchement
et recherche de la maladie responsable
Ponction évacuatrice
Ponction éventuelle
Examen du liquide
Examen du liquide
Radiographie après ponction
Figure 2.
Troisième étape : traiter
1. Thoracocentèse
Lorsqu’un volumineux épanchement pleural
met en péril la vie de l’animal, il est essentiel
d’effectuer une thoracocentèse pour évacuer le
liquide. Le drainage thoracique est indispensable lors de pyothorax.
2. Traitement étiologique
Le traitement de l’épanchement pleural dépend
essentiellement du mécanisme physiopathologique qui a abouti à sa formation.
Conclusion
L’émergence de l’échographie a bouleversé la
conduite à tenir devant un épanchement pleural (figure 2). Elle remplace la radiographie
pour confirmer la présence de liquide et s’intercale avec bénéfice entre l’examen clinique et
l’examen du liquide de ponction pour rechercher la cause de l’épanchement liquidien. ■
En savoir plus
En savoir plus
- Martel P. “Conduite à tenir devant une détresse
respiratoire”. Point Vét. “Les urgences chez les carnivores
domestiques”1998;29(numéro spécial):497-503.
- Jongh O, Cadoré J.-L. “Pleurésies et épanchements
pleuraux chez le chat”. “Pathologie respiratoire des
carnivores domestiques”.1995;27(numéro spécial):
523-529.
- Mitaux-Maurouard S. “La thoracentèse et le drainage
thoracique”. “Les urgences chez les carnivores
domestiques”1998;29(numéro spécial):555-560.
Contact
! Jean-François Rousselot
42, Route de Chartres
78 190 Trappes
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