Une mode encore invisible

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Une mode encore invisible
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26 juin 2014 | No 26 | www.gastrojournal.ch
La cuisine nikkei annoncée comme la nouvelle révolution gastronomique reste (encore) bien timide
Organe officiel de GastroSuisse
et de ses sections cantonales
Une mode encore invisible
Les restaurants les plus tendance, bien
médiatisés, figurant dans divers guides ou listes comme
«World’s 50 Best Restaurants» (voir GJ22) surfent
sur la vague nikkei.
Mitsuru Tsukada, le chef japonais du
restaurant Izumi (Genève), qui a travaillé durant six ans et demi au
Nobu, en Grèce, produit certains ingrédients sur place comme le miso
séché ou une pâte pimentée. Il a su
s’entourer de trois chefs péruviens
dans sa brigade qui lui apportent un
savoir-faire non négligeable. Le coût
des marchandises représente ici environ 30% du chiffre d’affaires.
Jasmina Slacanin
Les Nikkei sont les immigrés japonais
arrivés au Pérou à la fin du XIXe siècle. Après le Brésil, le Pérou est le
pays d’Amérique latine qui compte le
plus grand nombre d’immigrés japonais. Côté gastronomie, la fusion
entre ces deux cultures culinaires a
donné naissance à la cuisine nikkei.
Les techniques japonaises et leurs
spécialités mêlées aux incontournables ingrédients péruviens caractérisent cette gastronomie. Des cuissons
courtes, à la vapeur, préservant le
goût et les nutriments, des produits
frais, majoritairement crus, font partie des bases de cette dernière. Les
incontournables ingrédients japonais
(riz, miso, sauce et pâte de soja, poissons, algues,...) fusionnent avec les
produits péruviens (trois cent variétés de piments, pommes de terre,
maïs...).
C’est dans les années 1980 que la
«Cocina Nikkei» s’impose en tant
que genre à part entière dans la cuisine péruvienne. Dans les années
1990, grâce, notamment, au célèbre
chef péruvien Gastón Acurio, la cuisine nikkei, bien implantée à Lima,
s’exporte à très grande vitesse dans
des restaurants branchés du monde
entier. Gastón Acurio possède 37 restaurants dans onze pays. D’autres
chefs célèbres avec leur touche bien
personnelle, misent également sur
cette fusion nippo-péruvienne. Après
avoir travaillé à Tokyo, le Japonais
Nobuyuki Matsuhisa décide d’ouvrir
son premier restaurant japonais au
Pérou. C’est là que naît le Nobu style.
Le chef décide ensuite d’exporter son
Le directeur du restaurant Izumi a
cherché à se distinguer de la concurrence en proposant une cuisine originale, peu représentée à Genève. Et
c’est lors de ses voyages, à Londres
notamment, qu’il découvre la cuisine
nikkei. En août 2013, il ouvre ce restaurant sur le toit de l’hôtel et aujourd’hui, il est indispensable de réserver pour les deux services de midi
et du soir. La grande majorité de la
clientèle est genevoise. Ce sont souvent des habitués qui s’y rendent et
qui connaissent cette cuisine à travers leurs voyages.
DR
Avant de faire un tour d’horizon sur
cette mode qui a posé son empreinte,
ici et là, dans des villes européennes,
américaines ou sud-américaines, il
serait nécessaire de donner la définition de cuisine «nikkei». En Suisse,
peu de chefs savent réellement de
quoi on parle, car sous nos latitudes,
cette cuisine hybride reste marginale.
La cuisine japonaise et ses ingrédients phares est tendance dans les cuisines suisses.
concept nikkei aux Etats-Unis, à Los
Angeles. Il se fait rapidement remarquer par l’acteur Robert de Niro
qui lui propose un partenariat. Le
premier Nobu ouvre à New York en
1994. Mais le mot «nikkei» n’est pas
exploité dans la communication de
ces restaurants. On parle plutôt
d’une restauration japonaise trendy
avec des influences latino-américaines, péruviennes et argentines.
Aujourd’hui, 25 enseignes Nobu
existent dans le monde entier, mais
toutes les villes n’ont pas réussi à
l’intégrer, à l’image de Paris, où le
succès ne fut pas au rendez-vous, ce
qui provoqua une faillite. «C’est peutêtre une des raisons pour lesquelles
la cuisine nikkei peine à s’imposer
dans la capitale française», argumente Nicolas Vellaton, directeur du
restaurant Izumi du Four Seasons
Hôtel des Bergues à Genève.
En Europe, la cuisine nikkei s’est fait
connaître grâce à Albert Adrià, le
frère du célèbre Ferran Adrià, qui a
ouvert l’année dernière le Pakta à
Barcelone. «Il y a toujours de la place
pour la bonne cuisine, commente Al-
bert Adrià pour expliquer le succès
de son restaurant. Et toutes les
bonnes cuisines passent par de bons
produits. Ainsi, la qualité de la nourriture japonaise mêlée aux couleurs
de la cuisine péruvienne créent ensemble une cuisine incroyable.» Ferran Adria, en quittant El Bulli, avait
même qualifié la cuisine nikkei de
révolution gastronomique. «Il voit un
potentiel dans ces deux cuisines. Il
aime le Pérou et la cuisine japonaise.
De plus, Pakta est un de ses restaurants préférés», explique le frère du
chef star.
En Europe, la ville qui mise le plus sur
cette mode nippo-péruvienne est
Londres, avec comme chef de file
Chotto Matte, ouvert récemment à
Soho.
Et qu’en est-il en Suisse? A Genève et
Zurich on trouve quelques restaurants péruviens avec ou sans cuisine
nikkei. Mais ils restent encore l’exception. Parmi les difficultés pour exploiter un tel établissement, citons
l’approvisionnement en produits péruviens. Pour pallier à ce problème,
Ainsi, à quelques exceptions près, la
cuisine nikkei n’est pas (encore) entrée dans les cuisines branchées. Les
grands chefs suisses semblent y être
peu sensibles comme en témoigne
Stéphane Décotterd du Pont de
Brent. Ce dernier a entendu parler
de cette gastronomie fusion sans
pour autant en connaître les détails.
Selon lui, en Suisse, la cuisine nikkei
n’est pas une mode. Il ne voit d’ailleurs actuellement aucune mode clairement définie mais plutôt quelques
tendances: «On a une approche différente des produits. On ose plus utiliser des produits moins nobles
comme la sardine, le maquereau ou
l’anchois dans un restaurant gastronomique. Les plats végétariens s’imposent également. Je ne sais pas si le
nikkei deviendra tendance mais il
est clair que la cuisine japonaise a
une influence importante. Personnellement, je travaille beaucoup avec
les algues et le wasabi est aussi entré dans la cuisine de nombreux
chefs.»
Selon les prévisions des tendances
pour Londres du «The Drinks Business», la cuisine vietnamienne, nikkei et le gastropub chinois domineront en 2014. Qu’en sera-t-il en
Suisse? Nikkei ou pas, l’influence
asiatique est déjà bien là.
Auf Deutsch
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La campagne à deux étages pour l’initiative sur la TVA
Quand les tenanciers motivent les clients à voter
Dans trois mois, les électeurs se prononceront sur la mise sur un pied
d’égalité des taux de la TVA. Comment l’emporter au scrutin? «Cette
votation est perdue d’avance», déclare le directeur d’une grande section cantonale. «Je ne peux vraiment
pas utiliser ces sets de table dans
ma salle à manger», estime un cuisinier réputé.
Tendre l’oreille dans la branche peut
faire peur. Certains s’avouent vaincus avant la bataille, d’autres ne savent même pas quel en est l’enjeu
(voir encadré). Mais, d’autres voix se
font aussi entendre. Casimir Platzer,
le nouveau président de Gastro-
Suisse, a fait une première allocution sur cette votation du 28 septembre lors de son élection à Flims.
Les clients et les tenanciers jouent ici
des rôles principaux. Si les tenanciers assument leur rôle, cette votation ne peut être perdue! Le calcul est
vite fait: la restauration suisse a quotidiennement des contacts avec largement plus de 2 millions de clients.
Ce sont chaque jour plus de 2 millions de possibilités de rendre attentif au traitement inégalitaire de la
restauration. Jusqu’au jour J, il y a
donc 200 millions de possibilités dont
la restauration peut profiter – ou elle
peut laisser passer sa chance.
La récolte de signatures en faveur de
l’initiative a prouvé que c’est possible: jamais, dans l’histoire de la
Suisse, un débutant sur la scène politique n’a fait une percée aussi réussie – en l’espace de quelques mois, la
branche avait réuni le nombre de signatures nécessaires pour l’initiative.
Depuis lors, le matériel pour la première partie de la campagne pour la
votation est prêt chez GastroSuisse et
dans les sections cantonales. Mais
ce matériel orienté sur les établissements traditionnels du pays ne motive pas encore à aller voter. Une
«mise en place» sera nécessaire afin
de permettre, au cours des prochains
Société des Cafetiers, Restaurateurs et
Hôteliers de Genève
La fin du domaine
skiable des 4 Vallées
A partir du 30 juin de cette année, les
stations de Verbier, Nendaz, Veysonnaz et Thyon ne seront plus liées par
la convention qui les unissait depuis
2006, suite à la dénonciation de l’accord unissant les quatre stations par
TéléVeysonnaz. Les différentes destinations qui composaient le plus grand
domaine skiable de Suisse et le troisième d’Europe n’ont pas pu trouver
de terrain d’entente, a annoncé «Le
Nouvelliste». A la base de la dénonciation, un désaccord entre TéléVeysonnaz et Thyon 2000 concernant le
montant de la répartition de la caisse
alimentée par les skieurs passant
d’une station à l’autre. Alors que le
tourisme alpin chute d’année en année, cette perte pourrait coûter cher
aux quatres stations valaisannes.
Le Flon pourrait avoir
un nouveau «food court»
L’entreprise Mobimo envisage de développer un concept de «food court»
dans le quartier du Flon. L’idée, tirée
de la restauration américaine, est de
réunir dans une seule salle de restaurant plusieurs établissements. Ainsi,
les clients désirant manger ensemble,
mais pas la même chose, pourraient
être comblés. Le plan prévu dans le
quartier lausannois comprendrait quatre restaurations différentes dont la
salle commune serait mise à leur disposition par l’entreprise immobilière.
Pour la création de ce pôle de subsistance, un investissement total de
500 000 francs a été prévu, annonce
«24 Heures».
Le Vieux-Manoir
divise les villageois
mois, aux tenanciers de toute la
Suisse de convaincre leur clients. pg
Un enjeu clair
Chez Mac Donald’s, lors de la commande, on demande au client s’il
mange sur place ou s’il emporte sa
nourriture. Sa réponse détermine
le bon de caisse:
• Celui qui emporte le repas, paie
un taux réduit de 2,5% de TVA.
• Celui qui mange sur place, paie
un taux de 8%. Cette différence
choquante a donné vie à l’initiative
de GastroSuisse du 28 septembre.
www.gastrosuisse.ch
Premier Relais & Châteaux de Suisse,
l’hôtel Vieux Manoir arrive à un tournant de son existence, annonce «Le
Temps». Pour survivre, l’établissement
cinq étoiles doit s’agrandir, se doter
d’un SPA, etc. Mais suite à un désaccord avec les habitants de la commune et à une communication lacunaire, le projet pourrait bien avorter et
l’établissement disparaître. Dimanche,
la commune consultera la population
pour essayer de trouver une solution.