À voir et revoir absolument Cahors exhumé des

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À voir et revoir absolument Cahors exhumé des
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guide | expositions
« Absolumental 2 »
À voir et revoir absolument
Le néologisme « absolumental » peut prêter à confusion ; il est pour tant très
bien choisi. « Absolumental 2 » constitue le second
volet d’une exposition visant
à présenter les dernières
acquisitions du musée des
Abattoirs. Parmi les œuvres
exposées, cer taines sont
cette fois-ci montrées aux
côtés de pièces issues de
la collec tion permanente
– moderne et contemporaine.
L’accrochage n’est donc ni
his tor ique ni théor ique, Jan Fabre, Nature morte à l’artiste, 2004. Les Abattoirs, Toulouse (31).
mais davantage thématique. © photographie bernard delorme /droits réservés
Un choix qui n’es t a ucunement res t r ic t if
Le précédent accrochage énonçait son propos
puisque résistant aux limites d’une définition : de façon plus didactique (l’importance accordée
le thème privilégié pointe le règne d’un « mental au cerveau et à ses représentations) ; il se trouve
absolu » dans l’art.
à présent affirmé au travers des échos que suscite
le rapprochement d’œuvres réalisées entre les
Yayoï Kusama, Dots Obsession, 1998. Les Abattoirs, Toulouse (31).
© photographie jl. auriol / yayoî kusama
années trente et aujourd’hui. Sont ainsi déclinés
les « espaces mentaux » d’artistes actuels aussi différents que Yazid Oulab (dont
la vidéo bénéf icie d’une
nouvelle présentation au sol
très efficace), Grout /Mazéas
ou Elizabeth Creseveur.
Un point commun ?
Flirter avec les limites – du
fantasme à l’automatisme
en passant par l’utopique, le
fantastique et l’obsession.
Aussi l’installation de la Japonaise Yayoï Kusama, Dots
Obsession (1998), apparaîtelle comme le point d’orgue
de l’exposition, le visiteur
y devenant lui-même sujet
aux hallucinations propres à
l’artiste.
D’un espace à l’autre,
les rapprochements proposés
sont subtils. S’ils sont d’ordre formel, le propos n’en est
jamais littéral et se trouve le
plus souvent problématisé.
La salle qui s’ouvre à droite
de l’entrée donne le la. En
son centre trône, calé sur
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deux tréteaux, le paon-cercueil de Jan Fabre pour
une Nature morte à l’artiste (2004). Au-delà d’une
inspiration entomologique qui relie l’artiste belge
à Pierre Bettencourt (Papillons de Colombie, 1961),
c’est son univers tout entier, inspiré par le monde
organique et animal, qui trouve, entre autres dans
les gouaches (1935-1953) d’Eugène Gabritschevsky,
un écho très réussi. Plus encore, l’espace mental
de l’artiste démiurge nous apparaît à présent avec
acuité : celui qui associe ses fantasmagories très
personnelles à des temps immémoriaux, comme
chez Fred Deux, dont les « paysages » où se dressent
parfois les profils des statues de l’île de Pâques
offrent un cadre magnifique à ces réflexions.
On entre et l’on sort de l’exposition au son de
La Vie en rose, qui émane de la tombe intégrée dans
l’installation de Joël Hubaut, reliquat du PsyclomClom créé aux Abattoirs en 2001. Quant aux vociférations du Dandy John Bock, elles conduisent au
film que l’artiste avait réalisé pour Le Printemps de
septembre, qui acquiert dans ce contexte une force
nouvelle.
Réjouissante, « Absolumental 2 » est aussi
stimulante, car elle donne accès à l’un des essentiels
de l’art – la capacité créative et imaginative conjuguée à la liberté de l’esprit. Il est ainsi plaisant,
et jamais vain, de rendre à cette exposition non
seulement une, mais plusieurs visites.
Brigitte Aubry
« Absolumental 2 » | jusqu’au 3 juin | musée des Abattoirs | 76, allées
Charles-de-Fitte, Toulouse (31) |
05 62 48 58 00 (accueil) / 05 34 51 10 60 | www.lesabattoirs.org | ouvert tous les
jours de 11h à 19h, sauf le lundi.
Coup d’œil…
Le temps d’un été, Olivier Debré en cinq lieux
L’insatiable voyageur que fut Debré (1920-1999)
aurait sans doute apprécié que son œuvre soit ainsi
présentée au travers des expositions organisées
conjointement par cinq musées français.
L’exigence du peintre s’impose dans l’approche
rétrospective (1944-1997) choisie à Cahors (46)
quand c’est sa prédilection pour les grands formats
qui est montrée à Angers (49). De façon cohérente, à Roanne (42) est souligné combien la Loire
fut un de ses lieux de ressourcement, alors que
le « monde » comme source d’inspiration prévaut
à Millau (12). Les monochromes sur papier impressionneront encore à Saint-Cirq-Lapopie (46).
« Olivier Debré, parcours 1944-1997 »
du 2 juin au 1er octobre | musée de Cahors
Henri-Martin (46) | www.mairie-cahors.fr
Cahors exhumé des
réserves de son musée
Le musée comme kaléidoscope de la ville et des
hommes qui l’ont créée. C’est sur ce thème que le
musée de Cahors Henri-Martin poursuit son cycle d’expositions temporaires préfigurant sa restructuration, et
il se veut cette fois-ci introspectif.
En guise d’archéologie, il exhume les « trésors »
qui dormaient dans ses réserves et nous convie
à une visite de tous les lieux communs, parfois les
plus éculés, qui fondent le mythe de Cahors depuis
le xix e siècle. Improbable juxtaposition de quelques
chefs-d’œuvre et d’objets plus anecdotiques : l’œil
de verre de Gambetta, le diable du pont Valentré…
Pas sûr qu’on les revoie de sitôt !
Le conservateur s’amuse. Avec ses collections,
qu’il prend un malin plaisir à dépoussiérer, ordonnancer,
documenter. Avec les codes muséographiques, dont il
teste les genres pour le futur musée, de la série à l’installation, sans oublier le cabinet de curiosités. Avec
son métier, présentant aussi bien une œuvre du Fonds
national d’art contemporain que l’abondante correspondance qui a permis d’obtenir son dépôt permanent. Avec son visiteur bien sûr, à qui il fait croire que
son fétiche des îles Gambier, emballé dans une caisse,
est sur le départ ; un visiteur finalement
autorisé à pénétrer dans son arrièreboutique, pleine de surprises.
Si le touriste de passage n’y
piochera, au hasard, que quelques
perles, le Cadurcien se délectera
de cette madeleine au parfum d’enfance. Mais le musée n’est-il pas
aussi fait par et pour ses habitants ?
« Une archéologie de
Cahors - Les images
de la ville » | jusqu’au
15 mai | musée de Cahors
Henri-Martin | 792,
avenue Émile-Zola,
Cahors (46) | 05 65 20 88 66 | www.mairie-cahors.fr/
musee | ouvert tous les
jours de 11h à 18h et le
dimanche de 14h à 18h.
Le Dieu Rongo, Mangareva,
archipel des îles Gambier,
antérieur à 1833.
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© photographie
nespoulous / musée de cahors henri-martin