Du Pluriel dans le féminisme, une exposition documentaire

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Du Pluriel dans le féminisme, une exposition documentaire
Formation et pratiques d’enseignement en questions
Du Pluriel dans le féminisme,
une exposition documentaire interactive
Myriam RAMBACH1 (Réalisatrice transmédia à Paris, France)
Du Pluriel dans le féminisme est une exposition documentaire participative dont
la scénographie flottante et modulable soutient la notion de points de vue situés
et invite à des pratiques créatives dans les paysages du féminisme. L’article en
présente l’esprit et les enjeux, montrant que mis en place à Marseille le dispositif est parvenu à faire entrer la réflexion et le rêve dans les questions plurielles
que le féminisme apporte de manière concrète dans notre société, dans nos vies.
Proposition évolutive, il est possible de l’activer dans les institutions intéressées
par la construction d’une culture commune sur les questions de genre.
Mots clés :
exposition participative, recherche-action, féminismes, discriminations croisées, culture commune
Introduction
Construire et activer une exposition participative intitulée Du Pluriel dans
le féminisme est une manière de remédier à l’absence de culture commune sur la question du genre. Son absence, constatée dans la formation
du corps enseignant, se fait sentir dans la vie en général : dans le travail,
la famille, la politique, les médias, et aussi entre les générations. Or le
genre – concept dynamique2 dégagé par des féministes dans leurs combats concrets face au scandale de l’inégalité – ne se comprendrait-il pas
mieux si le féminisme était lui-même moins absent de la culture commune.
Ses problématisations multiples sont méconnues, en dépit de leur richesse
et leur fécondité. L’aspect conflictuel exacerbé des débats où elles sont
impliquées est en partie ce qui les rend rébarbatives et déroutantes. La
démarche de l’exposition vise à transformer cette absence en présence,
et la pluralité en richesse à partir de questions telles que : « Quelle ou quel
féministe suis-je ? », « En quoi telle ou telle notion m’éclaire-t-elle ? », et en
installant un terrain pour se les poser à plusieurs, dans l’espace public, en
un continuum qui puisse se cultiver.
Gayatri Chakravorty Spivak et Saskia Sassen en sont sans le savoir les
bonnes fées : c’est à l’occasion, en septembre 2010 à Paris, du colloque
1. Contact : [email protected]
2. Un éclairage de cette dynamique nous est par exemple donné par Spivak (2009) p. 27 :
« Le subalterne est au populaire ce que le genre est au sexe, la classe à la pauvreté, l’État à la
nation. »
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international « Le Tournant global des sciences humaines3 », où elles intervenaient, que le travail collectif autour de ce projet a pris tournure.
Dans la première partie de notre présentation, nous faisons voir l’idée d’exposition en reprenant la note d’intention élaborée au printemps 2011. Le projet
s’étant concrétisé, en deuxième partie nous relatons, grâce à des photographies, sa rencontre avec le public à Marseille fin 2011 et début 2012 en différentes configurations : une école professionnelle, une antenne du Planning familial,une maison de quartier et un centre socioculturel dans les quartiers Nord,
un centre de documentation dans un lycée de centre-ville. Dans la troisième
partie, nous tirons quelques leçons de cette première saison et clarifions le lien
entre un tel dispositif et la formation des enseignants à des savoirs en tout genre.
Dans le texte, « je » renvoie à la scénographe, principale auteure de l’article,
et « nous » aux cinq personnes4 du groupe de recherche-action Perspectives
Plurielles5, qui ont uni leur créativité et compétences pour construire ce projet collectif6.
Principe de l’exposition
Note d’intention, écrits et croquis préparatoires
C’est le propos oral d’une jeune doctorante en sociologie, Artemisa Flores
Espínola, dont les recherches traitent d’épistémologie et méthodologie
féministe7, qui nous sert d’exergue :
« Le féminisme, c’est participatif et pluridisciplinaire, c’est une pensée plurielle par essence. Il touche chacune et chacun dans son intimité, c’est un
processus en quotidienne construction. »
Il faut entendre cette parole de préambule comme un large geste d’invitation dans le projet en construction et dans l’exposition elle-même. Son
3. Les actes de ce colloque sont publiés : Caillé, A. & Dufoix, S. (2013).
4. Catherine Body est directrice du Centre d’information sur les droits des femmes et des
famille de Marseille, le CIDFF phocéen ; Béatrice Borghino est intervenante sur les questions
de genre, après avoir été, à Marseille de 1984 à 2009, chargée d’études à la Délégation régionale aux droits des femmes et à l’égalité ; Pascale De Bona-Soler est enseignante à Paris ;
Véronique Marzo est chargée de mission Patrimoine au groupement d’intérêt public (GIP)
politique de la Ville à la mairie de Marseille, après avoir été chef de projet « développement
social urbain » dans les quartiers populaires ; Myriam Rambach est réalisatrice transmédia à
Paris. Les photographies sont de Béatrice Borghino, Véronique Marzo, Myriam Rambach et
Jean-Claude Slyper. Certaines sont recadrées pour respecter le droit à l’image, en particulier
concernant les enfants.
5. http://www.cidff13.org/index.php?page=perspectives-plurielles
6. A la différence de mes camarades, je n’avais pas de culture féministe préalable, mais en
revanche une pratique d’art participatif dans l’espace public, acquise avec le collectif Name
Diffusion, une forme de la rencontre. Voir par exemple Tapis volant, jeu de cartes, dispositif de
rencontre sans hiérarchie partant de l’expression dans les langues maternelles et dans la traduction (Baruch, Iljazi, Rambach, 2006), Querrien (2011) et Trocmé-Fabre (2012).
7. L’intitulé de son thème de recherche est : « Epistémologie et méthodologie féministe : une
transformation de pratiques scientifiques ? »
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mouvement réunit en les reliant la plupart de nos mots clés. Elle trace les
grandes lignes d’une méthodologie qualifiée de féministe et semblable
à celle envisagée intuitivement et empiriquement par nous. Elle autorise
toutes les personnes à entrer dans la discussion sur un pied d’égalité, ainsi
que la prise en compte de la curiosité personnelle envers l’entourage et
soi-même comme principe constructif.
Le propos
Du Pluriel dans le féminisme se définit comme une exposition documentaire,
participative et plasticienne dont les visées sont de faire circuler et s’enrichir les connaissances sur le féminisme et la pluralité de ses courants de
pensée8, de les faire dialoguer entre eux et avec le public, de rendre sensible à leur imbrication dans l’histoire de chacun·e et l’histoire collective.
L’exposition est élaborée par Perspectives Plurielles, un groupe de recherche-action indépendant sur les croisements et l’inter-production des
discriminations de genre, de classe et de « race ». Administrativement elle
est portée par un centre d’information sur les droits des femmes et des familles9, le CIDFF phocéen, lui-même membre de ce collectif de rechercheaction.
La base documentaire, élaborée par Perspectives Plurielles, est une série
de panneaux illustrés de vignettes, de citations et de références bibliographiques, sur des personnages, des moments de l’Histoire, des notions.
Les panneaux sont proposés comme un « work in progress » non comme la
somme définitive d’un savoir, mais plutôt comme un support travaillé en
amont en vue d’appropriations et de discussions.
Quel matériel à disposition ?
L’interactivité
Les visiteurs et visiteuses sont invité·e·s à se mettre en résonance de manière personnelle avec les contenus : « Où est-ce que je me reconnais ? »
« Je me reconnais dans ce courant...»
« Quelle ou quel féministe suis-je ? »
« Est-ce que je perçois l’influence de tel ou tel courant dans ma vie quotidienne ? »
« Telle ou telle idée ou réalisation m’éclaire-t-elle ? »
Document 1 : Questionnement illustrant la notice de présentation
8. Idée inspirée à Béatrice Borghino par le travail de Louise Toupin (1997).
9. Les CIDFF (acronyme de Centre d’information sur les droits des femmes et des familles)
sont des associations membres d’un réseau national français qui conseillent et orientent le
public.
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Inscrire son nom à même les panneaux, tel était le cœur de l’idée dont
Béatrice Borghino faisait part lors de notre rencontre initiale. Se situer dans
un ou plusieurs des courants, puis noter des propositions en vue d’entamer des conversations, cette simple démarche (où se trouvent mis en présence le corps, la pensée, soi et les autres) pourrait amener les féministes à
s’ouvrir davantage à la pluralité de leurs approches respectives. Cela m’a
vivement intéressée car cette entrée, adressée à des féministes averties
par l’une d’entre elles, je l’ai entendue comme s’adressant à moi-même et
à des personnes qui, comme moi, ne réussissaient pas à entrer en matière
avec le sujet, étaient déroutées par les conflits entre féministes, ne parvenaient pas à se saisir de la dimension genre (« get a grip on gender »,
expression empruntée à Gayatri Chakravorty Spivak [2013]10).
J’ai proposé que l’idée soit soutenue et amplifiée par une scénographie
qui, dans sa structure même, sollicite l’implication. Les panneaux ne sont
pas au mur, mais au milieu d’un espace. Ils sont déplaçables. Les personnes
qui visitent vont pouvoir physiquement s’en saisir pour les lire, en sortir
des mots clés, figures ou événements, les bouger pour accentuer leur visibilité ou les mettre en discussion. En plus d’ajouter leurs questionnements
ou remarques, elles peuvent piocher dans les notes laissées par les personnes ayant visité l’exposition précédemment. Lors d’une animation, on
peut n’exposer que certains des panneaux afin de travailler seulement sur
une question particulière.
Pour ce déploiement interactif, on utilise des technologies minimales, dérivées des simples papiers et crayons : post-it à coller sur les panneaux,
rubans de papier à suspendre. On a recours à l’écriture au gros feutre sur
transparent et au rétroprojecteur, un système appréciable, car il donne une
grande image lisible même en plein jour, amplifie et rend spectaculaire le
propos. Avec la possibilité de transformer l’aspect visuel du lieu, de projeter quelque chose réalisé par elle-même, chaque personne fait encore un
peu plus sienne l’exposition.
Dans la mesure où c’est un dispositif spatial pour stimuler la curiosité, la
discussion et le lien personnel avec la pensée, l’actualité et l’Histoire, on
peut envisager la perspective de couplage avec des expositions existantes,
des bibliothèques ou photothèques. Dans ce cas, en utilisant leur matériau,
on peut prolonger la démarche active d’appropriation par exemple avec
des ateliers de montage et réalisation de courts diaporamas projetés ensuite le jour même.
La scénographie
Le principe de la scénographie découle du champ sémantique de l’expression « courant de pensée » : notions de mouvance, de flux, d’influence...
Les panneaux sont en suspension grâce à des ballons gonflés à l’hélium. Ils
sont ainsi mobiles, légers, maniables. Cela leur confère une sorte de vie,
10. Titre d’une conférence de Spivak (2013), traduction M. Rambach.
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une présence émouvante. Les courants de pensées, dans cette non-fixité,
vont habiter l’espace. La pensée n’est pas inerte, et pas tout à fait immatérielle, elle a un poids, une dynamique, une résistance, que nous sentons en
l’attirant vers nous.
De manière générale, dans le choix des matériaux sont privilégiés le
souple, l’aérien, le translucide aussi, puisque autant que de geste et de
dynamique, la pensée est affaire de projection et d’éclairage.
Ayant ainsi traduit la notion de courant de pensée (dans le but d’en comprendre la signification), nous en venons, après un entretien approfondi
avec Béatrice Borghino, à valider comme parti pris scénographique la notion de paysage.
La question existentielle originaire11 – commune à tous les courants – est
inspirée par une révolte profonde contre les inégalités imposées et subies
(le « scandale de l’inégalité », mentionné dans l’appel à contributions) :
« C’est injuste ! C’est insupportable ! » Elle impulse l’énergie de départ :
« Quoi faire ? »
La question fait figure de source, surgissant en différents points en des terrains variés. Selon les aspérités, les plis des traditions – les sédimentations,
les rochers à faire bouger (Spivak 2009, p.194) –, les bâtis institutionnels et
autres configurations sociales et historiques, les cours s’orientent de différentes manières. Certains tracent des chemins communs puis se séparent,
certains se croisent. Ils peuvent avoir des zones d’influence plus ou moins
importantes.
Document 2 : Courant de pensée et paysage (croquis Myriam Rambach)
Les courants de pensées féministes génèrent aussi eux-mêmes du paysage, avec leurs figures, dates, institutions, culture. La pensée s’exprime
par des textes, des actions, des réalisations concrètes qui s’inscrivent dans
le réel et le transforment...
11. La question se pose-t-elle une fois pour toutes ou chaque fois ? Originelle ou originaire,
à ce propos, écouter Spivak (2013) : « Un geste originel, on le fait une fois pour toutes, un
geste originaire, on doit le refaire chaque fois qu’on recommence l’opération, par exemple
débrayer pour changer de vitesse avec les voitures qui ne sont pas automatiques. »
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La scénographie flottante des panneaux déplaçables donne une dimension
corporelle à la notion féministe de point de vue situé12. « Qui parle, d’où
parle-t-on ? »
Ce paysage est avant tout mental, ce qui compte, c’est d’en prendre
conscience, d’apprendre à le voir, d’en acquérir une conscience partagée,
collective, de commencer à désirer une culture commune du féminisme
et de la dimension genre13 qui aille s’élargissant et traverse les différents
mondes, celui de l’éducation, de la famille, du travail, de la politique, des
médias. C’est pourquoi nous ne donnons pas le paysage tout fait comme un
décor, mais proposons aux visiteurs et visiteuses l’action de le construire
de manière éphémère et renouvelée, à leur façon, avec leurs questionnements propres, schémas ou dessins à disposer dans l’espace14.
La scénographie tout entière incite donc à se rencontrer et à s’impliquer :
par exemple intervenir sur un panneau mobile est plus facile à deux,
construire un paysage à plusieurs est un prétexte pour faire connaissance... Les diverses contributions du public forment un environnement, et
l’on s’installe au milieu pour discuter.
Vue d’ensemble des textes des panneaux
Le féminisme dans l’exposition se décline en six temps forts qui permettent de rebondir, en donnant un peu de champ historique, sur des problématiques en écho avec l’actualité. Chaque thème se développe sur dix
à quinze panneaux. Un panneau de définitions (« histoire de mots ») ouvre
l’exposition. Le choix des thèmes a été cadré par Béatrice Borghino et a
fait l’objet d’une réflexion et d’une validation collective. Chaque thème est
traité par une auteure qui en assume la responsabilité.
Les auteures ont une longue pratique de la formation des adultes pour
l’une, de l’enseignement pour l’autre. C’est guidées par leur expérience
qu’elles ont conçu les textes : commodément découpés, aérés, avec un
choix de citations explicites... De la sorte, lors d’une animation dans une
classe ou ailleurs, il est tout à fait envisageable de sortir un panneau seulement, ou quelques-uns, pour entrer en matière sur un sujet précis, par
exemple la Déclaration des droits de la femme/de l’homme, la chronologie
du droit de vote des femmes dans différents pays, quelques définitions, des
photos d’événements ou des portraits...
12. Notion clé présentée dans les panneaux du Black Feminism et du Féminisme radical, faisant référence à Delphy (1998) et à Harding (2004).
13. Spivak (2013) : « Le projet est un réarrangement non forcé du désir, qui fasse que la justice
de genre et la démocratie deviennent le sens commun. (…) La tâche est le réarrangement non
contraint du désir de produire une volonté active de justice sociale, pas seulement pour nousmêmes, mais pour les versions simultanées du globe. »
14. C’est en quoi ce travail se relie pour moi à une pratique artistique de cartographie subjective partagée, notamment aux projets de Stanley Brouwn (1961) et de Roger Welch (CCI 1980).
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Thème 1 : Le féminisme, une histoire ancienne
En France, une des personnes importantes que l’on peut rencontrer dans
cette histoire est Christine de Pisan, au XVe siècle (1364-1430). « La querelle des femmes » au XVIe siècle va conduire à une longue réflexion sur la
femme elle-même, son statut et son éducation. L’évidence de l’égalité des
sexes, une philosophie oubliée du XVIe siècle d’Elsa Dorlin (2000) cite quatre
philosophes dont Marie de Gournay (Egalité des hommes et des femmes,
en 1622) et François Poullain de la Barre (De l’égalité des sexes, discours
physique et moral, en 1673).
Pendant la Révolution française, Olympe de Gouges écrit la Déclaration
des droits de la femme et de la citoyenne en 1791. Son texte est ici présenté
avec en regard, article par article, celui de la Déclaration des droits de
l’homme. Auteure : Béatrice Borghino.
Thème 2 : Féminisme et suffragisme
En France, l’exclusion des femmes du suffrage « universel » par la République des révolutionnaires de 1789 fait naître une conscience féministe et
des revendications suffragistes comme refus de cette exclusion des droits
politiques. A chacun des trois moments révolutionnaires, 1830, 1848, 1870,
qui ont ponctué le XIXe siècle, les féministes, appelées quelquefois « de
la première vague », se sont engagées et ont rappelé haut et fort la profonde injustice de la condition des femmes que le Code civil de 1803 avait
aggravée, et leur volonté d’obtenir l’égalité des droits. Pétitions, discours
politiques, actions de force, elles se font une place sur la scène politique.
La présentation comprend une chronologie de l’obtention du droit de vote
dans différents pays. Auteure : Pascale De Bona-Soler.
Thème 3 : Radical
A partir de Simone de Beauvoir avec le Deuxième Sexe, en 1949, un féminisme plus radical apparaît : « On ne naît pas femme, on le devient. » Les
années 1970, avec « la deuxième vague », mettent à l’œuvre dans la vie quotidienne et privée les revendications jusque-là politiques et sociales, et,
inversement, les questions dites privées sont analysées comme enjeux politiques, ce dont le slogan « le privé est politique » témoigne. Cette époque
fournit, avec par exemple Christine Delphy et Monique Wittig, une très
grande richesse de publications théoriques et militantes et voit la création de nombreuses associations15 regroupées notamment au sein du MLF
(Mouvement de libération des femmes). Auteure : Pascale De Bona-Soler.
Thème 4 : Black Feminism
Il émerge dans le contexte du Mouvement des droits civiques aux EtatsUnis et se développe avec le Combahee River Collective à partir de 1973 :
15. Dont, par exemple, le MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception), le MFPF (Mouvement français pour le planning familial), le Collectif féministe contre
le viol, SOS Femmes battues.
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« La synthèse de ces oppressions crée les conditions de nos vies.16 » Angela
Davis, notamment, dans son livre Femmes, race et classe en 1982, rappelle
des données historiques encore largement méconnues et analyse les avancées théoriques et pratiques du féminisme. Dans les années 1990, Kimberlé
Crenshaw théorise la notion d’intersectionalité (effets des discriminations
conjuguées de sexe, classe et race). Les idées développées par les black
feminists, militantes anonymes ou auteures/chercheuses telles que Patricia
Hill Collins, bell hooks17, Cherríe Moraga, Gloria Evangelina Anzaldúa, Hazel Carby et bien d’autres, sont d’actualité dans le contexte français où des
questions comparables ont commencé à se poser de manière de plus en
plus vive, à la suite de l’action et des écrits de femmes venant de groupes
racisés. Auteure : Béatrice Borghino.
Thème 5 : Féminisme d’Etat
Il se développe au cours du XXe siècle dans de nombreux pays dont la
France, mettant en œuvre des réformes institutionnelles au sein des organisations nationales et internationales, visant à la fois plus d’égalité et une
meilleure prise en compte des femmes dans la société.
Thème 6 : Études de genre et féminisme18
En chemin, nouveaux apports
À chaque sortie, l’exposition présente une artiste invitée afin, d’une part,
de donner visibilité à une relecture de l’histoire de l’art par le prisme du
genre et, d’autre part, de créer un contrepoint non verbal dans cet espace
où il y a beaucoup à lire. Pour commencer, il s’est agi du travail de la sculpteure Hélène Rémy, créatrice des contrepoids en céramique des panneaux
et sollicitée comme conseillère technique. Il est prévu que des actions ou
institutions féministes rencontrées en chemin adjoignent une contribution
documentaire. À ce titre, la première production est un opuscule sur l’association marseillaise Schebba19.
Et en Suisse ?
Le lectorat suisse aura constaté que l’on part du contexte historique français. Quel intérêt pour un public helvétique ? Faudrait-il un travail préalable
pour se mettre en phase ou simplement laisser les réactions advenir ? L’important est de garder à l’esprit que l’une des visées est de faire connaissance avec les contextes où l’exposition se déploie, au bénéfice d’une
16. Manifeste du CRC (1977).
17. Bell hooks demande à ce que sont nom soit écrit sans majuscules.
18. Les thèmes 5 et 6 sont encore sous forme d’esquisse, finalisation et impression prévue
pour le printemps 2014.
19. Schebba est une association de femmes pour la défense des droits dans le 14e arrondissement de Marseille, au cœur des quartiers Nord, créée en 1986. Il nous semble que la
philosophie de leurs combats est proche du Black Feminism. http://www.vivreensemble.org/
spip.php?article72
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culture commune qui de la sorte s’élargit. Dans notre groupe, certaines
ayant des attaches en Suisse romande, nous souhaitons entrer en matière
sur comment les questions féministes en traversent l’histoire, la culture et
la société, d’autant que les études de genre y sont dynamiques. De quelle
manière leurs avancées se diffusent-elles dans la vie quotidienne ?
Document 3 : Panneaux flottants et variations actives (dessins Pierre Rambach).
La mallette de l’exposition
Motivée par le désir de découverte, l’exposition a été pensée pour pouvoir circuler à la demande. Comme nous l’avions espéré, elle tient dans
une mallette légère. Celle-ci comprend une quarantaine de panneaux en
tissu fin, une copie de ceux-ci sur fiches cartonnées format A3 recto verso,
une provision de ballons non gonflés, le système d’attaches, les fournitures
d’atelier. On y trouve également les productions issues des ateliers précédents : guirlandes et textes courts, vidéos, le livret sur l’association Schebba. La bombonne d’hélium et le gonflage des ballons se commandent au
coup par coup sur place. Il n’y a pas obligation de suspendre tous les panneaux à la fois. Nous recommandons de présenter suspendu à l’hélium un
seul courant complet, et 2 à 4 panneaux par courant pour les autres, et par
ailleurs l’intégralité des textes sur A3 cartonnés. On peut aussi installer les
pans de tissu sans ballon avec du fil et des pinces à linge. L’exposition peut
fonctionner avec ou sans médiation spécialisée, donner lieu à des ateliers
d’études animés soit par les rédactrices des panneaux, soit par d’autres
personnes. Des séances d’émergence du savoir à plusieurs (qui sait quoi
du sujet, quelles questions l’on se pose), propres à évaluer le niveau de
connaissances communes et à le hausser, peuvent s’y tenir.
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Document 4 : Mallette et aperçu des éléments
Itinéraire à travers quelques propositions
À l’École de la 2e chance, du 17 au 21 octobre 2011
C’est une école qui accueille des élèves en décrochage scolaire en vue
de les amener par une pédagogie adaptée à connaître une autre issue que
l’échec. Elle est située dans le 15e arrondissement, un quartier pauvre loin
du centre-ville. Le lieu est néanmoins prestigieux, le bâtiment est une structure de brique et de verre posée sur les pavillons bas d’un ancien abattoir.
C’est le premier déploiement en vraie grandeur, et « ça marche »... et
même plus d’une fois ça s’envole... les ballons d’hélium ont un rêve de
liberté, quelques-uns nous échappent et vont se coller sous la verrière,
dix mètres plus haut, ou mieux, rejoignent les nuages. Le côté technique
donne un prétexte aux hommes pour visiter l’exposition. Ces messieurs
demandent ensuite des ballons pour leurs enfants, nièces et neveux. Nous
reviendrons plus loin sur l’intérêt éveillé chez les hommes. Les couleurs
vives semblent égayer tout le monde, même de sévères personnes visiblement maltraitées par la vie. Toujours légèrement en mouvement du fait des
souffles du bâtiment, l’installation charme. À notre grand soulagement, la
plupart des personnes se mettent à caresser les panneaux de tissu puis à
se plonger dans leur lecture. Des féministes âgées sont émues de voir leur
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histoire honorée. En effet, l’exposition met en valeur le travail accompli par
la « deuxième vague » et offre un lieu pour sa transmission orale, permettant dans une certaine mesure de dépasser les oppositions entre générations. Pour certaines d’entre elles, le Féminisme Noir est une découverte.
Photo 1. L’exposition peut parfois prendre l’apparence d’un léger désordre
alchimique, avec des jeux d’ombres, de lumières et des transparences. Nous
souhaitons cultiver ce caractère. Le but poursuivi est en effet de donner
une ambiance sympathique, voire onirique, stimulant l’esprit et la curiosité.
Une ambiance qui éveille des sensations, pour changer les repères, faire
bouger les lignes de séparation, donner accès à une autre dimension qui
permette de dépasser les positions figées.
Une des visiteuses, infirmière en psychiatrie, signale qu’elle trouve pertinente cette approche gestuelle et tactile qu’elle utilise dans sa pratique
professionnelle avec des patient·e·s devenu·e·s en incapacité d’apprendre.
Photo 2. Les contrepoids de céramique émaillée créés par Hélène Rémy
intéressent cette jeune fille, écolière de la 2e chance, qui veut devenir créatrice de bijoux. Cela conforte l’idée de présenter à chaque nouvelle sortie
un travail artistique. Bientôt peut-être les approches de genre en histoire de
l’art feront-elles partie de la culture commune ?
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Photo 3. Un groupe de chômeurs et chômeuses en stage d’adaptation visite
l’exposition. Un monsieur dit : « Mon père, qui est mort, est celui qui m’a expliqué le racisme et cette exposition sur le Black Feminism m’a fait, direct,
repenser à tout ça. J’ai la chair de poule et les larmes aux yeux. » Béatrice
Borghino (à gauche) en prend note sur un ruban de papier. Un autre visiteur (au premier plan à droite sur la photo) écoute et observe attentivement
ce qu’il se dit et se passe. L’approche « discriminations croisées » semble
autoriser des hommes à s’exprimer sans avoir besoin d’un préambule tel
que : « Je ne suis pas une femme mais... »
Est-ce le fait d’exposer les idées du féminisme dans leur diversité et historicité, couplé avec la demande de réagir à la question : « Dans quel courant
je me reconnais, quel féministe suis-je ? » Toujours est-il que l’on n’entend
plus les hommes se défendre avec des « mais, moi, je ne suis pas comme
cela, je ne suis pas macho » ou « oui, mais vous, les femmes, vous... » Ils
semblent parvenir à réfléchir sur ce qu’ils ont de féministe, non plus sur
en quoi celui-ci les heurte, parvenir à envisager l’enjeu global des questions posées par les féministes. Cela semble les intéresser de formuler des
idées et les mettre dans le pot commun des post-it. L’idée féministe que « le
privé est politique », par exemple, semble leur parvenir sous un nouveau
jour. Comme l’une de nous le relèvera en conclusion, l’exposition dédramatise le sujet.
Au Planning familial, 26 octobre 2011
Dans la foulée le Planning familial demande à prendre les panneaux et
les ballons pour la soirée d’inauguration de son nouveau local. Celui-ci,
situé près du centre-ville dans le 3e arrondissement, est agréable et de
très belle facture. Il y a foule, au long de la soirée élu·e·s et responsables
de tous bords politiques se succèdent à la tribune car tous ont contribué
à la rénovation. L’expo ici est plus décorative que documentaire. Nous testons le dispositif public d’écriture et projection en direct, utile pour faire
connaissance.
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Photo 4. Au Planning familial, messages, témoignages ou dessins projetés
en direct. Ici, une invitée présente son association : « Autres regards, pour
plus de droits aux travailleurs et travailleuses du sexe20. »
À la maison de quartier Frais Vallon, centre municipal d’animation,
9 mars 2012
Situé dans un quartier pauvre, dans le 13e arrondissement, le centre existe
depuis l’origine de la cité dans les années soixante.
Photo 5. Une tablée de dames à la maison de quartier de Frais Vallon. Au
premier plan un panneau montrant Cherríe Moraga et Gloria Evangelina
Anzaldúa (1981), deux personnalités féministes chicanas. Sur le panneau,
on lit notamment : « Le féminisme Chicana/Xicana, aussi appelé Xicanisma,
se donne comme tâche d’analyser les rapports sociaux, politiques, économiques des femmes mexicaines, latines, hispaniques ou métisses sur le
territoire des Etats-Unis. »
(...) « En dehors des oppressions que sont le racisme et le sexisme, le Féminisme Noir veut prendre en compte, en même temps, l’oppression économique. » (...) « La conscience des multiples appartenances de sexe, de
"race", de classe amène à faire ressortir l’existence d’enjeux spécifiques
aux femmes de couleur ignorés jusque-là par le mouvement féministe
dominé par des non-Noires. Ainsi, Angela Davis (1983), proche du Black
20. La prostitution est un des sujets de clivage chez les féministes.
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Du Pluriel dans le féminisme, une exposition documentaire interactive
Panther Party, relève qu’alors que les femmes blanches étaient contraintes
aux avortements clandestins, les Africaines-Américaines, elles, étaient victimes d’un programme de stérilisations contraintes. »
A ce panneau deux réactions ont été accrochées, par des personnes distinctes : « Il y a des pays où les femmes n’ont pas de liberté et ne peuvent
pas s’exprimer. » « La France ? »
Photo 6. A cette journée organisée par la mairie une
jeune femme est venue vêtue d’un voile intégral
sombre. On sait à quel point c’est un sujet sensible
en France. Cela m’a interpellé comme une provocation et stupéfaite, trouvant qu’elle faisait preuve à la
fois d’audace et de culot. Béatrice Borghino (de dos
à droite) ayant entamé la conversation avec elle sur
les panneaux du Black Feminism, cette personne lui
a dit : « C’est la première fois que j’entends des féministes avoir ces positions. » Cela se comprend à la fois
comme : « C’est la première fois que j’entends des féministes faire référence au Féminisme Noir » et « c’est
la première fois que je perçois une reconnaissance de
points de vue différents du féminisme français dominant ». Elle raconte aussi que quelqu’un de sa famille
lui avait dit : « Tu y vas dans cette tenue ? Tu es folle,
elles vont te jeter ! »
Photo 7. « Le droit à la parole, 9/3/2012 ». Un petit garçon de 8 ou 9 ans venu
avec sa mère s’invente comme activité de faire un reportage en dessin sur
la journée. Perspective d’une future culture commune sur les questions de
genre ? Nous avions prévu la présence d’enfants et cela semble fonctionner. Une des conversations a couru sur ce que les dames enseignent à leurs
enfants, en termes de partage des tâches ménagères, de cuisine... L’une explique qu’elle transmet à sa fille des tours de main bien spécifiques, tandis
qu’à ses fils les recettes basiques du quotidien... Garçons et filles ne sont
donc pas traités pareil, mais pas question de laisser les garçons devenir
« des machos » qui se feraient servir...
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Myriam Rambach
Formation et pratiques d’enseignement en questions
Au centre socioculturel l’Agora, du 12 au 16 mars 2012
Actif depuis de nombreuses années, il dispose depuis peu de locaux neufs.
Situé à la Busserine, 14e arrondissement, quartier pauvre bordé par une
voie rapide, c’est un haut lieu de culture et de résistance aux difficultés,
« une formidable école de régénération culturelle de nos territoires sinistrés, un laboratoire sociologique d’une importance capitale, maintes fois
cité dans de nombreuses études », écrit de lui le Collectif Inter Quartier21.
Béatrice Borghino et moi-même nous tenons dans la salle, prêtes à encourager les réactions. À propos des panneaux Féminisme d’Etat, qui mentionnent
Yvette Roudy, première ministre du Droit des femmes, une dame me fait
cette réflexion : « C’est la femme qui est un grand Ministère... la Santé : avec
la médecine traditionnelle et naturelle ; l’Economie : pour remplir le panier
(elle réfléchit tellement pour les économies, l’électricité, etc.) ; l’Education :
la mère c’est la première école, et elle enseigne aussi l’éducation civique ;
et encore le Ministère du Travail, celui de l’Intérieur, de l’Extérieur... »
Photo 8. « Il faut montrer la femme arabe musulmane. Il faut dire que la
femme arabe musulmane a fait beaucoup pour la France. Dans les hôpitaux, par exemple... Et il faut parler de leurs filles, qui ont fait des études,
qui ont un master 2 et n’ont pas de travail, et pas de RESPECT. »
Photo 9. Une association vient dans l’expo tenir un atelier d’alphabétisation et de français sur le thème « Parlez-nous de femmes remarquables
des contrées d’où vous venez. » Elles citent des chanteuses engagées « qui
dénoncent les problèmes dans les couples » et des femmes politiques. Sur
l’un des post-it, nous lisons une preuve de l’intérêt suscité par les panneaux : « Peut-on en avoir un exemplaire pour chez nous et nos enfants ? »
21. http://collectifinterquartiers.over-blog.com/
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Du Pluriel dans le féminisme, une exposition documentaire interactive
Durant cette semaine passée à l’Agora22, un certain nombre de personnes
nous ont exprimé leur déception du féminisme institutionnel de France ;
j’ai nettement vu ce que relevaient dans les Féministes et le garçon arabe
Nacira Guénif-Souilamas et Eric Macé (2004) : « L’ambivalence du modèle
républicain assimilationniste [qui] n’en finit pas d’appeler à une "intégration" qui est toujours à prouver, tant est fort le soupçon de "communautarisme" qui pèse sur les populations de culture musulmane, sans jamais
par ailleurs s’attaquer sérieusement aux discriminations qui minent
la société française. » (C’est nous qui soulignons.)
Au centre de documentation du lycée Victor-Hugo,
du 20 au 30 mars 2012
La documentaliste fait venir la mallette, installe des éléments de l’expo à
sa guise dans le CDI et fait travailler les lycéen·ne·s, qui réalisent d’autres
panneaux et des films avec leurs téléphones portables, dont deux sont
envoyés à « Buzzons contre le sexisme23 ». Comme restitution le groupe
constitué invite les membres marseillaises de Perspectives Plurielles, leur
présente les travaux, pose des questions. Le proviseur, qui est présent, exprime un vif intérêt : autour d’un sujet épineux se sont créés une ambiance
décontractée et du dialogue entre les élèves.
Ce qui ressort de la première saison
Analyse du groupe Perspectives Plurielles
Pour Véronique Marzo, les remarques notées sur les post-it et les guirlandes
apportent la preuve de l’esprit très pédagogique – participatif et ouvert – de
l’exposition, qui fait entrer la réflexion et le rêve dans les questions plurielles
qu’apporte le féminisme concrètement dans notre société, dans nos vies.
Pascale De Bona-Soler, auteure des panneaux Radical et Suffragisme, prolonge cette observation : il faut remarquer le changement de registre entre,
d’une part, des panneaux d’expo théoriques, historiques et, d’autre part,
les réactions et commentaires notés par les publics femmes, qui sont très
ancrés dans l’actualité, le vécu quotidien. Ce changement de registre pourrait apparaître comme un décalage, alors qu’au contraire il est la meilleure
preuve de l’efficace interactivité recherchée par le dispositif de l’exposition. Cela montre bien comment les personnes se sont approprié les textes,
qu’elles ont transformés et contextualisés en problématiques personnelles.
Catherine Body, pour le CIDFF, note que le Black Feminism, illustré entre
autres par la photo d’Angela Davis, a suscité de nombreuses accroches et
réactions. Le sentiment de se reconnaître et d’avoir accès à un féminisme
qui n’est pas celui habituellement présenté a sans doute facilité l’intérêt
du public.
22. Cf. reportage illustré d’Henda Bouhalli (2012) dans Med’in Marseille.
23. http://teledebout.org/
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Myriam Rambach
Formation et pratiques d’enseignement en questions
Pour ma part, j’ai pu accéder aux bases d’une compréhension du féminisme et des études de genre, libérée de préjugés de toutes sortes. Je suis
« entrée dans la danse ». Mettre en pratique la scénographie dans tant de situations nous a rendues toutes expertes dans son maniement. Cela permet
d’en jouer en la stylisant et d’élaborer, par exemple, une version « mini-hélium » plus adaptée pour des ateliers autonomes ponctuels.
De cette première saison, l’ensemble de Perspectives Plurielles retient que
l’exposition fonctionne réellement comme terrain d’éducation mutuelle,
provoque un dialogue sincère et dédramatise les controverses liées au(x)
féminisme(s).
De la transmission au pluriel
Au moment où l’on se pose la question, éclairée par l’ensemble des articles de la présente revue, des enseignements du genre, ne serait-il pas
judicieux d’enseigner l’histoire du féminisme, des combats, de tout temps
pluriels, des femmes pour l’égalité ? Une méthode elle-même féministe
s’impose, c’est-à-dire pas seulement académique et magistrale, du haut
vers le bas, mais aussi participative, prenant en compte le point de vue
situé. Chacun·e, vivant ces questions de façon très concrète, doit pouvoir
trouver sa place et, en expert·e de la chose, apporter sa contribution aux
débats.
Catherine Body, Béatrice Borghino, Pascale De Bona-Soler, Véronique Marzo
et Jean-Claude Slyper ont collaboré à l’écriture de l’article.
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Références
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outil documentaire. Résumés des interventions en ateliers (p. 95). 6e Congrès international
des recherches féministes francophones. Lausanne. http://www3.unil.ch/wpmu/rff2012/
files/2012/05/ATELIERS_R%C3%A9sum%C3%A9s.pdf
Bouhalli, H. (2012, 20 mars). Toutes les femmes sont blanches, tous les Noirs sont hommes,
mais nous sommes quelques-unes à être courageuses. Med’in Marseille. http://www.medin-marseille.info/spip.php?article1824.
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de vue. Subjectivité et rapports sociaux. Cahiers du Genre, 53. Paris.
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de l’Aube. Cité par S. Tissot (2005, 25 mars). Note de lecture. Les mots sont importants.
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bBSw
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