Europe symbole, Europe puissance E

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Europe symbole, Europe puissance E
LE BILLET DE GÉRARD MOATTI
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Gérard Moatti, Bernard
Cazes (Livres et idées), Alain
Vernholes (conseiller), Laurence
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(communication), Catherine
Mazure (assistante), Benoit
Sarasin, Blandine Cliquet
(réalisation). A contribué
également à ce numéro :
Josette Barrera.
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distribution
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Europe symbole,
Europe puissance
e
n 2005, après le ralliement de Jacques
Chirac au consensus des gouvernements
européens sur le processus d’adhésion de
la Turquie, commenceront les négociations
avec Ankara. En 2005 aussi aura lieu en France le
référendum sur le Traité constitutionnel de l’Union.
Ce sont là deux questions différentes, qu’il importe
de bien dissocier, nous répètent avec insistance le
gouvernement et l’ensemble de la classe politique,
gauche et droite confondues. Il n’est cependant pas
sûr que tous les Français entendront ce message :
on peut penser, au contraire, que beaucoup seront
poussés à un vote négatif, ou au mieux à l’abstention
lors du référendum, pour exprimer leur désaccord
sur l’adhésion turque.
Certains, sans doute, le feront pour de mauvaises raisons – disons, pour résumer, poussés par un ensemble de préjugés anti-islamiques. Mais il faut se méfier
de cette mode envahissante, qui tend à stigmatiser
comme « raciste » ou « xénophobe » toute expression de désaccord sur la future adhésion turque. En
France comme ailleurs sur le Vieux Continent, ce
désaccord peut exprimer une position politique qui
n’a rien à voir avec les fantasmes culturalo-religieux,
ni avec le « choc des civilisations ».
La question des frontières de l’Europe a été occultée
lors de l’élargissement aux pays ex-communistes,
parce qu’il fallait agir « à chaud » et qu’on se trouvait
devant une nécessité historique. Elle ressurgit avec la
Turquie, mettant cette fois en évidence le choix
entre deux conceptions de l’Europe : l’une, extensive
et idéaliste, est celle de la « terre des droits de
l’homme » et de l’État de droit – c’est l’« Europe
symbole » ; elle justifie que tout pays réellement
démocratique ait vocation à appartenir à l’Union, et
que celle-ci, en l’accueillant, l’aide à consolider sa pratique de la démocratie. L’autre conception désigne
un ensemble politique aussi intégré que possible, partageant des intérêts communs et une même conception de l’ordre international, et capable de peser sur
les affaires du monde –
c’est l’« Europe puissance ».
Ceux qui adhèrent à cette
seconde vision peuvent
légitimement penser que le
nombre de sujets d’intérêt
commun diminue nécessairement à mesure qu’augmente celui des pays
La question des
membres. Et que l’« Europe
puissance », au-delà d’un
frontières de l’Europe
certain seuil, cesse d’être
a été occultée lors
compatible avec l’« Europe
de l’élargissement
symbole ». Quand on leur
dit que la question essenaux pays
tielle de l’Union est celle du
ex-communistes.
« que voulons-nous faire
Elle ressurgit avec
ensemble ? », ils peuvent
trouver incohérent qu’on
la Turquie, mettant
leur demande d’attendre
cette fois en évidence
dix ou quinze ans pour
le choix entre
savoir, en fonction de l’avancement des négociations
deux conceptions
avec Ankara, ce que sera la
divergentes.
vraie vocation de la construction européenne. On
leur dit aussi que les règles
fixant l’équilibre des pouvoirs entre pays membres (répartition des voix au
sein du Conseil, nombre de députés au Parlement
européen, etc.) seront nécessairement modifiées lors
de l’entrée de ce nouveau pays de 70 millions d’habitants : ils peuvent trouver absurde qu’on les invite à
se prononcer aujourd’hui sur une Constitution qui
fixe précisément ces règles…
Lors du prochain référendum sur la Constitution
européenne, il faut souhaiter que le « oui » l’emporte. Mais, comme souvent en politique, un choix
capital pour l’avenir peut être perturbé par un
« timing » malheureux. =
Après cinq années passionnantes consacrées à animer la rédaction de Sociétal, j’ai décidé de passer le
relais. Je suis certain que Jean-Marc Daniel (dont vous pourrez lire dans ce numéro une très intéressante contribution) saura donner un nouveau souffle à notre revue, et je suis particulièrement heureux
qu’il ait accepté cette tâche. G.M.
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Bialec
95, Bd d’Austrasie BP 10 423
Sociétal N° 46
g
4e trimestre 2004