Europe symbole, Europe puissance E
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LE BILLET DE GÉRARD MOATTI www.societal.fr serpe sociétéd’Études, derechercheetde publicationsÉconomiques publication de la 6, rue Clément-Marot 75008 Paris Tél. : 01 56 89 01 23 Fax : 01 47 23 56 76 E-mail : [email protected] SARL au capital de 38 112 e Principal associé : Institut de l’Entreprise directeurdelapublication : Jean-Pierre Boisivon directeurdelarédaction : Gérard Moatti comitÉ Éditorial Président : Yves Cannac Alain Bienaymé, Jean-Pierre Boisivon, Jean Boissonnat, Michel Bon, Michel Brulé, Christian de Boissieu, Jean-Claude Casanova, Bernard Cazes, Bertrand Collomb, Jean-Louis Gergorin, Pierre Jacquet, Armand Laferrère, Daniel Laurent, Elisabeth Lulin, Albert Merlin, Gérard Moatti, Catherine Petit, Frédéric Tiberghien, Alain Vernholes. rÉdaction Gérard Moatti, Bernard Cazes (Livres et idées), Alain Vernholes (conseiller), Laurence Ville (conseiller), Ariane Selinger (communication), Catherine Mazure (assistante), Benoit Sarasin, Blandine Cliquet (réalisation). A contribué également à ce numéro : Josette Barrera. abonnements Tél. : 01 58 10 31 63 Fax : 01 58 10 31 82 E-mail : [email protected] Tarifs France Particuliers : 43 e TTC Institutions : 50 e TTC Étudiants : 38,70 e TTC Étranger Particuliers : 56 e TTC Institutions : 60 e TTC diffusion Presses Universitaires de France distribution Union Distribution Europe symbole, Europe puissance e n 2005, après le ralliement de Jacques Chirac au consensus des gouvernements européens sur le processus d’adhésion de la Turquie, commenceront les négociations avec Ankara. En 2005 aussi aura lieu en France le référendum sur le Traité constitutionnel de l’Union. Ce sont là deux questions différentes, qu’il importe de bien dissocier, nous répètent avec insistance le gouvernement et l’ensemble de la classe politique, gauche et droite confondues. Il n’est cependant pas sûr que tous les Français entendront ce message : on peut penser, au contraire, que beaucoup seront poussés à un vote négatif, ou au mieux à l’abstention lors du référendum, pour exprimer leur désaccord sur l’adhésion turque. Certains, sans doute, le feront pour de mauvaises raisons – disons, pour résumer, poussés par un ensemble de préjugés anti-islamiques. Mais il faut se méfier de cette mode envahissante, qui tend à stigmatiser comme « raciste » ou « xénophobe » toute expression de désaccord sur la future adhésion turque. En France comme ailleurs sur le Vieux Continent, ce désaccord peut exprimer une position politique qui n’a rien à voir avec les fantasmes culturalo-religieux, ni avec le « choc des civilisations ». La question des frontières de l’Europe a été occultée lors de l’élargissement aux pays ex-communistes, parce qu’il fallait agir « à chaud » et qu’on se trouvait devant une nécessité historique. Elle ressurgit avec la Turquie, mettant cette fois en évidence le choix entre deux conceptions de l’Europe : l’une, extensive et idéaliste, est celle de la « terre des droits de l’homme » et de l’État de droit – c’est l’« Europe symbole » ; elle justifie que tout pays réellement démocratique ait vocation à appartenir à l’Union, et que celle-ci, en l’accueillant, l’aide à consolider sa pratique de la démocratie. L’autre conception désigne un ensemble politique aussi intégré que possible, partageant des intérêts communs et une même conception de l’ordre international, et capable de peser sur les affaires du monde – c’est l’« Europe puissance ». Ceux qui adhèrent à cette seconde vision peuvent légitimement penser que le nombre de sujets d’intérêt commun diminue nécessairement à mesure qu’augmente celui des pays La question des membres. Et que l’« Europe puissance », au-delà d’un frontières de l’Europe certain seuil, cesse d’être a été occultée lors compatible avec l’« Europe de l’élargissement symbole ». Quand on leur dit que la question essenaux pays tielle de l’Union est celle du ex-communistes. « que voulons-nous faire Elle ressurgit avec ensemble ? », ils peuvent trouver incohérent qu’on la Turquie, mettant leur demande d’attendre cette fois en évidence dix ou quinze ans pour le choix entre savoir, en fonction de l’avancement des négociations deux conceptions avec Ankara, ce que sera la divergentes. vraie vocation de la construction européenne. On leur dit aussi que les règles fixant l’équilibre des pouvoirs entre pays membres (répartition des voix au sein du Conseil, nombre de députés au Parlement européen, etc.) seront nécessairement modifiées lors de l’entrée de ce nouveau pays de 70 millions d’habitants : ils peuvent trouver absurde qu’on les invite à se prononcer aujourd’hui sur une Constitution qui fixe précisément ces règles… Lors du prochain référendum sur la Constitution européenne, il faut souhaiter que le « oui » l’emporte. Mais, comme souvent en politique, un choix capital pour l’avenir peut être perturbé par un « timing » malheureux. = Après cinq années passionnantes consacrées à animer la rédaction de Sociétal, j’ai décidé de passer le relais. Je suis certain que Jean-Marc Daniel (dont vous pourrez lire dans ce numéro une très intéressante contribution) saura donner un nouveau souffle à notre revue, et je suis particulièrement heureux qu’il ait accepté cette tâche. G.M. imprimerie Bialec 95, Bd d’Austrasie BP 10 423 Sociétal N° 46 g 4e trimestre 2004