recueille l`approbation de la majorité. Cependant la seconde

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recueille l`approbation de la majorité. Cependant la seconde
NOTES DE FIN DE DOCUMENT
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recueille l’approbation de la majorité. Cependant la seconde explication,
de par sa pertinence, mérite d’être approfondie.
12. « … le cas intéressant de Miguel Allende… » : deux documents récemment
découverts relatent l’histoire mystérieuse et intrigante de Miguel Allende,
Espagnol du XVIe siècle et explorateur malgré lui. Curieusement,
ces deux documents furent retrouvés dans les caves d’un monastère irlandais.
Le premier texte est une transcription d’audience du tribunal de l’Inquisition
de la ville de Grenade. Il est daté de 1513 mais semble se référer à des
évènements ayant eu lieu plusieurs mois auparavant :
Nous, l’Inquisition chargée de réprimer l’apostasie et les dépravations
de l’hérésie, en la cité de Grenade, le vingt-neuf mai de l’an de grâce 1513.
Suite à la déposition d’un paroissien, nous soupçonnons fortement le
dénommé Miguel Allende, citoyen de Grenade, d’avoir fait œuvre de sorcellerie
en vue de conserver une jeunesse surnaturelle.
En conséquence de quoi, nous avons convoqué cet homme à des fins
d’interrogatoire. Plusieurs jours durant, il n’a cessé de professer sa foi sur
la croix et de nier que sa jeunesse fût de nature perverse. Las de ses simulacres,
nous avons eu recours à des méthodes plus persuasives. Après quelques heures
de supplice et malgré plusieurs os brisés, le suspect a persisté à clamer
son innocence. Nous avons alors mandé sa fille, âgée de seize ans, et l’avons
longuement questionnée en sa présence. Tandis que les pinces et les fers
rougissaient dans le feu, Allende a finalement avoué s’être baigné dans des
eaux miraculeuses lors de son expédition dans le Nouveau Monde, lesquelles
eaux lui auraient procuré une jeunesse et une vigueur éternelles. Grandement
impressionnés par la capacité et la promptitude à guérir de l’inculpé, nous
l’avons successivement brûlé, noyé, fouetté et soumis à diverses tortures,
dont la « garrucha » [également connue sous le nom de « mancuerda », méthode
consistant à attacher les membres de l’accusé avec des cordes et à les étirer
sur un chevalet. – Ed.].
Ci-après, le procès-verbal des déclarations sous serment de Miguel Allende :
Quel âge avez-vous ?
Quarante-trois ans.
Voilà vingt ans que vous paraissez cet âge, et mêmes vos blessures les plus
graves guérissent d’un jour à l’autre. Est-ce grâce à la sorcellerie ou à une forme
quelconque de magie noire ?
Je suis un fidèle Chrétien. Jamais je n’ai pratiqué la sorcellerie ou la magie
noire.
Expliquez-vous.
Il y a dix-neuf ans, je partis à la conquête du Nouveau Monde avec
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Christophe Colomb. Après m’être égaré lors d’une de nos expéditions, je fus
capturé par les indigènes. J’appris les rudiments de leur langage, et ils me
parlèrent d’une rivière qui donnait la jeunesse éternelle à quiconque se baignait
dans ses eaux. Je leur demandai de me montrer cet endroit, et ils acceptèrent
de m’y conduire. En cours de route, je prêchais l’Évangile pour exhorter ces
sauvages à abandonner leurs pratiques hérétiques et se prosterner devant la
Croix. Je voulus leur apprendre à prier et à se vêtir comme des chrétiens, mais
ils refusèrent de m’écouter.
Au terme d’un long voyage, nous atteignîmes une rivière large et tranquille.
On me mena alors à une source. Je m’y baignai et ressentis aussitôt une
profonde paix. C’est au cours de cette baignade que m’apparut la Vierge Marie.
Après m’avoir donné sa bénédiction, elle m’ordonna de retourner en Espagne
afin de prendre soin de ma fille, et me fit promettre de ne parler à personne de
ces eaux miraculeuses.
Où se trouve cette rivière ?
À plusieurs jours de marche vers le nord, dans une région que Christophe
Colomb n’avait encore jamais explorée. Les Espagnols que j’interrogeai à mon
retour m’affirmèrent qu’ils ne connaissaient pas cet endroit. Si vous consentez
à me prêter un crayon, je retracerai l’itinéraire qui y conduit, de sorte qu’un
explorateur puisse retrouver ces eaux.
Êtes-vous prêt à renier toute forme d’hérésie et à certifier que vous n’avez
jamais pratiqué la sorcellerie ?
Moi, Miguel Allende, jure devant Dieu et ses évêques ici présents d’être
un bon et fidèle Chrétien. J’abjure l’hérésie sous toutes ses formes. Je certifie
n’avoir jamais eu recours à la sorcellerie ni à la magie noire. Je jure ne m’être
jamais compromis avec les hérétiques. Je jure de suivre, de respecter et de
défendre les préceptes de la foi catholique tels qu’ils sont enseignés et observés
par l’Église.
Après avoir recueilli ce serment, l’archevêque décida d’absoudre Allende,
sous réserve qu’il ait dit la vérité pure et simple, et à condition qu’il retourne
dans le Nouveau Monde sous l’égide d’un missionnaire afin de conduire
une nouvelle expédition jusqu’à la source de jouvence, de sorte que d’autres
personnes puissent profiter des bienfaits de ses eaux.
Comme il avait solennellement promis de rester à Grenade afin de
s’occuper de sa fille, Allende implora l’archevêque de lui permettre d’établir
une carte détaillée indiquant très précisément le chemin de la source, au lieu
d’embarquer à destination de San Juan Bautista [l’actuel Porto Rico – Ed.].
L’archevêque lui ordonna néanmoins de partir dès le lendemain et s’engagea
à veiller personnellement sur sa fille jusqu’à ce qu’il revienne avec une jarre
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d’eau miraculeuse. Ainsi, Allende respecterait le serment fait à la Vierge Marie
puisque sa fille demeurerait sous bonne tutelle pendant son absence.
La mission de Ponce de León échoua, et Allende fut considéré comme perdu,
mais certains paroissiens affirmèrent qu’il revint à Grenade trois ans plus tard,
sous le couvert d’un déguisement. Apprenant que sa fille était morte en couches
alors qu’elle se trouvait sous la protection de l’archevêque, on raconte qu’il
devint fou de douleur et de chagrin. Depuis ce jour, nul ne le revit.
Fait en présence de l’archevêque de Grenade par le soussigné,
Juan Diego de Rivera, notaire de son excellence l’archevêque.
Le second document concernant les voyages d’Allende dans le Nouveau
Monde est une lettre rédigée à la plume par Ponce de León lui-même, dans
laquelle il décrit l’arrivée d’Allende. En voici le contenu :
Ayer arrivó de Grenada el Guía de quién me escribisteis… uno de los
marineros viejos me dijo que el hombre le daba cuenta de un hombre
quien servía bajo Colón hace más de quince años, aunque no puede créer
que es la misma persona. De acuerdo con vuestras órdenes, instruyé a uno
de mis soldados a provocarle en la taberna la noche pasada, y hoy día
la herida que hace unas horas sangraba libremente ya se ha puesto nada
más que un cicatriz blanquito.
Hier, le Guide dont vous m’aviez parlé est arrivé de Grenade… un vieux
marin m’a dit que l’homme en question lui rappelait quelqu’un qui avait
servi sous les ordres de Colomb quinze ans auparavant, bien qu’il ne
puisse évidemment s’agir de la même personne selon lui. Conformément
à vos instructions, j’ai ordonné à l’un de mes soldats de chercher querelle
à cet homme dans une taverne, hier soir. La profonde blessure qu’il lui
a infligée à cette occasion ne se réduisait plus ce matin qu’à une fine
cicatrice blanche.
Ces deux documents incitent à penser que la quête de cette mythique
« fontaine de jouvence » repose en fait sur un mensonge fort élaboré, émanant
d’un homme qui, dans son désespoir, a vu là un moyen d’échapper aux griffes
de l’Inquisition. L’un des hommes de Ponce de León fait allusion à Allende dans
son journal, et ce à plusieurs reprises, mais sans entrer dans les détails
de l’histoire.
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