Reportage ( PDF 350Ko ) - Architecture Hospitalière
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1-MAGAZINE ARCHI - N°10-28,5x22,5-FRANCE_Mise en page 1 02/05/14 17:17 Page25 Médipôle Lyon Villeurbanne : un nouveau pôle hospitalier d’importance sur la métropole lyonnaise Le futur Médipôle Lyon Villeurbanne va regrouper les activités de la Mutualité française du Rhône et du groupe Capio. Ce Médipôle donnera naissance à l’un des plus importants projets hospitaliers aujourd’hui en Europe. Il s’inscrit dans une concentration accélérée des opérateurs hospitaliers confrontés à une obligation de moderniser leurs infrastructures qui débouche sur une double conséquence : la diminution du nombre de sites et l’augmentation de leur taille. La Mutualité va ainsi intégrer à ce projet ses cliniques de Lyon, de l’Union et du Grand Large ainsi que l’établissement de SSR les Ormes. De son côté, le groupe Capio va regrouper les activités de la Clinique du Tonkin et de son centre de SSR Bayard. Ces deux entités, pourtant très différentes, ont donc choisi de mettre leurs ressources en commun pour assurer leurs travaux de modernisation et de développement. La Mutualité Française et le groupe Capio espèrent ainsi répondre de façon plus adaptée aux besoins de la population en partageant leurs compétences et leurs ressources. Pour réaliser ce projet d’envergure, les maîtrises d’ouvrage ont décidé d’unir leurs partenaires respectifs. Setrhi-Setae, qui intervient régulièrement aux côtés du groupe Capio, est une société de maîtrise d’œuvre spécialisée dans la conception d’établissements de santé et collabore majoritairement avec des partenaires privés. Son équipe regroupe près de 60 experts collaborateurs architectes, ingénieurs, programmistes, économistes ou techniciens. L’agence SUD Architectes (siège social Lyon), partenaire de la Mutualité Française du Rhône, regroupe une équipe multidisciplinaire d’architectes, d’urbanistes, de designers d’intérieur et d’ingénieurs. Active en France et à l’international, SUD dispose des compétences et des connaissances adaptées à la ville contemporaine. Son expertise touche différents domaines : l’urbanisme, le logement, le tertiaire, l’industrie, l’éducation, le commerce, le loisir, le design et, bien sûr, la santé. Pour SUD et Setrhi-Setae, ce projet représente l’occasion unique d’allier leur expérience et leurs compétences afin d’intégrer au mieux ce nouveau Médipôle dans le tissu urbain villeurbannais. Présentation avec Pierrick Lelard, architecte associé, directeur pôle Santé pour Sud Architectes, et Christophe Cruvellier, directeur du développement au sein de Setrhi-Setae. 26 La société Setrhi-Setae... Christophe Cruvellier : Setrhi-Setae a pour cœur de métier la conception de bâtiments de santé sur l’ensemble de la France. Près de 90% de nos opérations concernent des établissements privés de santé. Ainsi, nous intervenons majoritairement dans la conception de cliniques équipées de zones de bloc, de maternité ou de réanimation, des établissements fortement orientés MCO (Médecine et Chirurgie Obstétrique). Nous collaborons notamment au regroupement des trois cliniques du groupe Courlancy de Reims, un projet pour lequel nous entretenons un partenariat avec l’architecte rémois Jean-Michel Jacquet. Nous participons également au regroupement des cliniques de Nouméa, à la restructuration et à l’extension en site occupé de la clinique de la Sauvegarde de Lyon ou encore au regroupement des cliniques de Melun. Outre la réalisation du Médipôle Lyon Villeurbanne, nous collaborons avec le groupe Capio sur la conception de ses établissements d’Orange et de Domont. Nous avons aussi participé à des partenariats publics privés, à l’image de la Cité Sanitaire de Saint-Nazaire ou à la conception - construction du pôle de santé de Villeneuve-sur-Lot. 1-MAGAZINE ARCHI - N°10-28,5x22,5-FRANCE_Mise en page 1 02/05/14 17:17 Page26 Architecture hospitalière - numéro 10 - Médipôle Lyon Villeurbanne Comment accompagnez-vous les grands groupes privés dans leurs différents projets ? C.C : Globalement, nous accompagnons la plupart des grands groupes privés dans leur politique immobilière, de leurs premières réflexions relatives au choix du site, de l’étude de trafic et du bilan financier, jusqu’à la programmation et au dimensionnement du bâtiment, au regard des données dont nous disposons et des objectifs de la maîtrise d’ouvrage. Pour ce projet d’entreprise, nous abordons tous les sujets avec les dirigeants de l’établissement. Aujourd’hui, par leurs performances en matière de DMS et de taux de rotation, certains des bâtiments sur lesquels nous sommes intervenus, témoignent que les praticiens peuvent exercer dans des conditions optimales tout en développant une prise en charge satisfaisant pleinement le patient. Nous nous servons de ces références comme benchmark dans l’approche des nouveaux projets et des discussions avec les équipements de l’établissement. Une fois le capacitaire de l’établissement défini, nous déterminons la surface nécessaire pour accueillir le nombre de postes souhaités. Par la suite, nos architectes spécialisés dans les process et les prises en charge des patients étudient et schématisent les flux internes afin d’optimiser les interactions entre les services et les distances parcourues par le personnel et les patients. Enfin, Setrhi-Setae fait partie du groupe d’ingénierie française Artelia au sein duquel nous sommes le pôle spécialisé dans le secteur privé de la santé. À ce titre, nous employons des ingénieurs en interne pour tout ce qui a trait à la conception technique des cliniques. Il s’agit d’une conception très spécifique, différente d’une zone technique d’hôpital. Pour SUD Architectes, qu’a apporté la collaboration avec Setrhi-Setae ? Pierrick Lelard : Ce partenariat est très enrichissant car il nous permet de bénéficier du savoir-faire de Setrhi-Setae en matière de conception hospitalière primaire, notamment dans le secteur privé. Cette collaboration fonctionne également grâce à la complémentarité de Setrhi-Setae et de SUD Architectes, qui apporte son expérience en matière de conception et de mixité d’entités diverses à l’échelle de la ville. En tant qu’architectes, notre rôle est de schématiser les réflexions de Setrhi-Setae autour du fonctionnement de l’établissement, pour réaliser un plan et une ébauche de bâtiment. Au-delà de l’intérêt que représente la fédération autour d’un projet d’entreprise commun, la confrontation de nos idées autour de l’organisation et de la conception est tout aussi enrichissante. Ce fonctionnement est bénéfique pour tous et nous éloigne des stéréotypes de la construction hospitalière, avant tout, par une importante activité de benchmark de la part de Setrhi-Setae, nous permettant de définir les moyens dont nous disposons pour améliorer les procédures de prise en charge. Parallèlement, SUD Architectes apporte sa vision architecturale pour définir quelles solutions peuvent être envisagées au regard de l’intégration du projet dans le site. Grâce à ces échanges, nous faisons évoluer le projet quotidiennement et satisfaisons pleinement le maître d’ouvrage. Notre collaboration autour d’un projet novateur est efficace surtout dans un secteur de santé privé qui recherche des solutions innovantes pour proposer de la qualité à moindre coût. Quel a été votre rôle dans ce projet autour du Médipôle Lyon - Villeurbanne ? C.C : Le premier élément important auquel nous avons participé dans ce projet est le choix du site parmi les différentes possibilités qui s’offrait à nous pour l’implantation de ce Médipôle. Lors de notre travail sur la maîtrise d’œuvre, nous avons abordé les avantages et les inconvénients des deux sites concurrents : un site existant sur Décines et un site potentiel sur Villeurbanne. Lors de nos études nous nous sommes assurés que certains critères comme le trafic et les flux autour du site ou l’espace disponible nous permettraient de réaliser ce bâtiment de plus de 50 000m2. Nous avons également privilégié le site le plus avantageux en matière d’accessibilité. Globalement, notre approche a été la plus objective possible avec pas forcément un point de vue commun pour tous les acteurs concernés. Ainsi, à l’époque de nos premières conclusions, le terrain le plus intéressant était déjà celui de Villeurbanne, qui formait un triangle et était particulièrement bien positionné. Cependant, il nécessitait le rachat à un bailleur privé d’un hectare au centre du site. Or, ce rachat n’étant initialement pas prévu, cette situation rendait ce terrain difficilement exploitable. De son côté, le site de Décines offrait des avantages certains en matière de disponibilité, mais il souffrait de lacunes importantes en matière d’accessibilité et de visibilité. Finalement, nos conclusions concernant le site de Villeurbanne ont rassemblé les deux maîtres d’ouvrage et un consensus s’est formé autour de ce terrain qui offrait une belle visibilité et une grande accessibilité. Après le choix du site, nous sommes intervenus sur les groupes de travail et l’étude des spécificités médicales. En tant que maîtrise d’œuvre, nous avons donc été chargés de mettre en place ces groupes de travail rassemblant les futurs utilisateurs. Plus généralement, notre mission dans ce type de projets privés est d’échanger avec les différents acteurs concernés, et de les questionner sur leur vision et leurs attentes relatives à leur futur établissement. Ainsi, nous définissons avec eux quels pourraient être les axes fondamentaux en matière de logistique, de restauration et d’organisation des soins. Nous interrogeons la direction générale pour définir la manière dont elle souhaite organiser cet établissement. Avec cette méthode, lorsque nous abordons des aspects comme l’organisation des services, nous pouvons composer entre notre fonctionnement habituel et les exigences des praticiens, et entretenir le dialogue avec les utilisateurs, le bâtiment que nous concevons restant, avant tout, leur outil de travail. C’est la raison pour laquelle nous nous efforçons de mettre en place et d’animer les groupes de travail afin que nous puissions proposer rapidement, après quelques réunions, un projet adapté aux attentes de la maîtrise d’ouvrage et de leurs collaborateurs. 27 1-MAGAZINE ARCHI - N°10-28,5x22,5-FRANCE_Mise en page 1 02/05/14 17:17 Page27 Le choix du terrain a-t-il influencé le programme hospitalier ? La Mutualité du Rhône et le groupe Capio sont deux entités très différentes sur le plan hospitalier. Lors de nos premières réflexions, les maîtrises d’ouvrage nous avaient commandé deux entités architecturales et fonctionnelles distinctes, rendant ainsi le projet particulièrement complexe. Finalement, il a été convenu qu’une mutualisation servirait mieux la lisibilité du projet. Nous avons donc conçu un bâtiment unique comportant les différentes unités et l’administration de chaque organisation. Le groupe Capio assume les activités de chirurgie et du plateau « chaud », tandis que la Mutualité gère les opérations de SSR et de médecine. L’espace réduit de ce terrain de 5 hectares nous a permis de faire accepter plus facilement aux personnels de Capio et de la Mutualité le fait qu’ils devaient aborder leur collaboration de manière plus imbriquée. Le bâtiment est organisé afin que l’on retrouve sur un même niveau soit les activités mutualistes, soit les activités du groupe Capio. L’ensemble des fonctions supports, comme la logistique par exemple, se fait à l’échelle du bâtiment et les flux sont distribués aux installations mutualistes comme à celles du groupe Capio. Ce fonctionnement est très intéressant et témoigne du fait que, progressivement, les maîtres d’ouvrage ont adopté cette organisation, favorisant l’efficacité de la prise en charge et de l’accueil du patient. La taille du bâtiment a permis la mise en place d’organisations assez exceptionnelles par plateau. Sur un niveau, nous pouvons installer six services d’hébergement, soit 180 lits. Le premier niveau est ainsi capable d’accueillir l’ensemble des installations du bloc opératoire, de l’ambulatoire, tous les lits « chauds », ainsi qu’un service d’hébergement et de chirurgie. Ce qui apparaissait comme une contrainte, au départ, se révèle être à l’origine d’un gain majeur en matière de fonctionnalité. Par ailleurs, un bâtiment de consultation devrait être implanté sur l’axe Léon Blum. Cette « Maison Médicale » a fait l’objet de propositions de notre part en ce qui concerne l’organisation interne du bâtiment et ses liaisons fonctionnelles avec le Médipôle. En tant que maîtrise d’œuvre, notre rôle est d’être force de proposition pour la maîtrise d’ouvrage, mais nous devons également l‘accompagner dans son cheminement et ses réflexions en interne, afin qu’elle s’approprie la solution la plus adaptée. 28 Comment abordez-vous l’intégration du projet dans son environnement ? Aujourd’hui, nous menons un important travail d’urbanisation sur la partie de Villeurbanne qui constitue l’environnement du projet, du quartier Grand Clément jusqu’au boulevard périphérique. Nous devons restructurer le site et redonner un aspect urbain et plus résidentiel à l’ensemble de ce quartier qui est aujourd’hui très industriel. Dans le cadre de cette intégration du projet au sein de son environnement, nous avons participé à une réunion, qui a été très enrichissante et qui s’est parfaitement déroulée, avec les représentants des conseils de quartier. En règle générale, un bâtiment de santé est toujours bien accueilli par la population. De plus, étant situé en centre-ville, le Médipôle générera une activité bénéfique aux commerces de proximité et au quartier dans son ensemble. L’idée globale du projet architectural est de développer une architecture résidentielle plus qu’hospitalière, en donnant à ce bâtiment un aspect d’immeuble de logement et non pas d’hôpital. Nous avons surnommé ce bâtiment les « 3 Nefs », étant donné qu’il se décompose en trois éléments soutenus par un socle de deux niveaux assez important, symbolisant le concept « d’architecture domestique ». Le socle comporte les installations du plateau technique, des soins intensifs et autres, alors que les parties supérieures accueillent les zones d’hébergement. Un point également important réside dans l’encadrement du terrain qui est cerné par la voie Léon Blum, très structurante sur la ville de Villeurbanne, et par la rue Frédéric Fays, qui va également bénéficier d’une restructuration plus urbaine, ainsi que par une ligne de Tramway. Nous avons fait le choix de placer le bâtiment à proximité de la rue Frédéric Fays, afin de faciliter la restructuration et l’ouverture de l’hôpital sur l’axe Léon Blum et sur la ville. Cette orientation nous permet aussi de minimiser les nuisances dues à la circulation du périphérique à proximité. Nous allons notamment collaborer avec la société Arcadys dans le cadre d’études de trafic. Son ouverture sur la ville… Le Médipôle sera un bâtiment imposant de 26 mètres de hauteur pour 170 mètres de long et 80 mètres de large. En comptant le bâtiment de consultation, cette construction représentera près de 60 000 m2. Nous avons donc longuement abordé les différents types d’accès rendus possibles par les rues structurantes. Le projet comporte ainsi des accès logistiques et des accès dédiés en périphérie de la rue Frédéric Fays et à l’intérieur du terrain, afin de concevoir un fonctionnement proche d’une rue de commerce en ville, par exemple. Nous avons donc fait en sorte que la dialyse, les urgences, les laboratoires, l’imagerie médicale ou le SSR disposent d’un accès dédié tout en y ajoutant une entrée principale. Nous développons également un élément de parvis tourné sur la rue Léon Blum, faisant office de place et permettant d’accéder à l’entrée du bâtiment. À l’intérieur, nous avons développé une conception de rue centrale irriguant l’ensemble des unités. Au regard de la taille et de la largeur du bâtiment nous faisons pénétrer la lumière naturelle par le biais de six patios imposants qui apportent un éclairement naturel des étages supérieurs, jusqu’aux niveaux semi-enterré. Le bâtiment a été posé sur une douve, ce qui permet d’aérer son rez-de-chaussée afin de faciliter l’apport de lumière dans les différents services situés en sous-sol, notamment la logistique. Nous avons été sollicités pour travailler la toiture et définir un geste architectural qui renforce l’aspect domestique et résidentiel tout en trouvant des percements aux niveaux des hébergements, comme pour une zone de logement. À cette idée architecturale générale s’ajoutent des formes et des volumes différents qui s’harmonisent, ainsi que des pleins, des vides et un découpage conceptuel du bâtiment. 1-MAGAZINE ARCHI - N°10-28,5x22,5-FRANCE_Mise en page 1 02/05/14 17:17 Page28 Architecture hospitalière - numéro 10 - Médipôle Lyon Villeurbanne Quel a été le rôle de l’architecte au conseil de la ville de Villeurbanne ? Nous avons collaboré et nous poursuivons notre collaboration avec l’architecte Nicolas Michelin qui est en charge de l’aménagement du quartier de Grand Clément. Nous organisons des réunions régulières au sein du Grand Lyon et nous progressons par étape pour trouver un terrain d’entente avec leurs services, notamment le service juridique, ainsi qu’avec M. Michelin qui est l’architecte en chef de l’ensemble du projet. Cela nous permet d’échanger avec des acteurs qui se questionnent davantage sur le projet, avec plus de recul que les acteurs directement concernés par ce dernier, ce qui est particulièrement intéressant pour nous, d’un point de vue architectural. Nicolas Michelin est à la fois architecte et urbaniste, il dispose donc d’une très bonne vision globale de la ville. En laissant de côté le fonctionnement de l’hôpital, il parvient à se focaliser sur l’intégration du bâtiment dans le quartier. Actuellement, nous évoquons avec lui les matériaux que nous pensons utiliser, l’effet que nous recherchons et le traitement des couleurs. Les intentions d’urbanisation que nous fournit M. Michelin sont analysées et étudiées, puis nous vérifions que ces propositions sont cohérentes au regard du budget fixé par la maîtrise d’ouvrage. Par la suite, nous pouvons les intégrer au projet ou en rediscuter lors de la réunion suivante. Comment se déroule l’avancement du programme ? Nous avons établi un premier programme comprenant un besoin capacitaire, assorti d’un bilan de surface, d’un coût de travaux puis d’un coût global, etc. Nous nous assurons que ce programme soit compatible avec le budget et le business plan du maître d’ouvrage. Nous retravaillons cette première proposition, qui satisfait rarement l’ensemble des acteurs concernés, jusqu’à atteindre un programme acceptable par tous. Ensuite, nous entamons la phase d’esquisse du projet, et l’élaboration du programme détaillé qui nous permet de rencontrer les utilisateurs. Ces derniers ont parfois des demandes plus exigeantes ou différentes de ce qui avait été envisagé préalablement par les directions. Avec les différentes informations et attentes recueillies, nous affinons notre programme. Actuellement, nous avons finalisé notre programme détaillé qui devrait donner lieu, très rapidement, au lancement d’un APS (Avant-Projet Sommaire) et d’un permis de construire. Quelle a été l’implication des acteurs politiques locaux visà-vis de ce projet ? Les mairies de Villeurbanne et de Décines se sont grandement impliquées dès les débuts du projet. Elles ont notamment été présentes lors du choix du terrain car ce projet représente des enjeux colossaux. Ce projet s’inscrit-il dans une démarche de développement durable ? Il s’agit d’un point important de ce projet sur lequel nous travaillons beaucoup, et ce dès les premières étapes de conception. Cet élément aborde grandement les consommations futures de l’établissement et sa maintenance. Traiter l’aspect de développement durable ne se résume pas à traiter le bâtiment, mais aussi la vie sociale et l’environnement de l’hôpital. Quels éléments vont contribuer à améliorer le confort du patient ? Nous abordons largement les process de prise en charge des patients. Actuellement, le confort du patient se caractérise plutôt par la qualité du service apporté au patient et sa prise en charge que par la qualité de la chambre et de son équipement. Aujourd’hui, le développement de l’ambulatoire aidant, l’hôpital a tendance à accélérer les processus de prise en charge. Ainsi, nous favorisons la marche en avant du patient pour une prise en charge rapide et de qualité. Notre contribution pour améliorer cette prise en charge et le confort se fait donc par une réflexion accentuée autour de l’ambulatoire. Le pôle ambulatoire du Médipôle disposera d’un fonctionnement « marche en avant » qui reprend toutes nos dernières avancées en la matière, et adapté aux différents types de prise en charge ambulatoire. Aujourd’hui, les meilleurs taux de satisfaction sont obtenus dans des établissements où la prise en charge du patient est rapide et efficace. Nous avons également réalisé un important travail sur l’apport de lumière naturelle dans les différentes zones du bâtiment, notamment les chambres, car cet élément a son importance pour le bien-être et le confort du patient. Une grande partie des zones d’attente a une vue sur les patios végétalisés. Outre la gestion des flux et l’apport de lumière, nous allons développer une prise en charge très innovante dans le domaine de la néonatalogie. Cette unité novatrice permet d’apporter les soins nécessaires au nouveau-né, avec un monitorage permanent, tout en le laissant dans une chambre avec sa maman plutôt que d’être placé dans une bulle de verre située dans une unité différente. Cela symbolise le principe de confort apporté au patient : favoriser la qualité des soins et le rapport humain. Comment définiriez-vous la réussite d’un tel projet ? Cette réussite se résume par les deux axes majeurs que sont la proximité pour le patient et la performance pour le personnel soignant. Pour respecter ces lignes directrices, nous avons traité l’aspect patient avec de nombreuses « adresses » indépendantes, lisibles et accessibles depuis l’extérieur, en périphérie du bâtiment, ou depuis la rue intérieure. Concernant le bâti, les plateaux sont regroupés par spécialité et fonctionnent à l’horizontale. Les flux importants sont gérés de manière simple et indépendante. Enfin, les hébergements rassemblés en pôles de deux unités de 30 lits aboutissent à un fonctionnement et un environnement relativement classiques. Des études de trafic sont réalisées pour valider les flux et nous assurer de la facilité de déplacements, à l’intérieur comme à l’extérieur du bâtiment. Au niveau technique, et de la conduite du projet, l’expertise des directeurs de projet et l’appui de toute une équipe dédiée en back office garantissent la cohérence et un suivi rigoureux de l’opération à tous ses stades d’avancement. La marche en avant se réalise par étapes, de manière très structurée, avec des phases importantes de validation et un maître d’ouvrage constitué de deux organes décisionnaires. Pour le bâtiment, notre expérience de plusieurs opérations de taille approchante nous donne un peu de recul. L’architecte travaille beaucoup à donner une échelle humaine au bâtiment à l’extérieur comme à l’intérieur. La conception se fait en plusieurs étapes. Nous définissons le bâtiment, le concept architectural, la fonctionnalité et la technique. Une fois ces éléments clarifiés, nous retravaillons l’insertion générale de la structure et son ambiance. 29 1-MAGAZINE ARCHI - N°10-28,5x22,5-FRANCE_Mise en page 1 02/05/14 17:17 Page30 Architecture hospitalière - numéro 10 - Médipôle Lyon Villeurbanne Quelle est votre vision de l’hôpital de demain ? Christophe Cruvellier : L’hôpital de demain sera l’endroit de dernier recours pour les pathologies importantes, au sens où elles nécessiteront des interventions lourdes. La grande majorité des actes chirurgicaux seront réalisés par des cliniques assimilées à des centres ambulatoires. Des opérations de construction que nous dimensionnions à 15 000 ou 20 000 m2 il y a quatre ans, ne dépassent plus les 5 000 m2, peuvent fermer le week-end et mettent en œuvre une marche en avant complète du patient et des processus très optimisés. Néanmoins, ces structures fonctionneront plus efficacement si elles demeurent à proximité d’un établissement majeur, capable de prendre en charge les cas plus lourds ou complexes. Cette « déshospitalisation » d’envergure vers laquelle nous nous dirigeons, devrait réduire de manière significative les besoins en matière d’espace et une reconfiguration très importante. Le secteur privé anticipe ce phénomène, les établissements publics doivent s’inscrire également dans cette démarche en cherchant à rationaliser leur immobilier. La deuxième évolution majeure qui caractérisera l’hôpital de demain est la flexibilité absolue de sa structure. Cependant, l’opposition entre construction modulaire et construction « en dur » est, pour moi, un faux débat. La construction modulaire n’est pas moins chère et reste moins qualitative qu’une construction en dur. Le vrai défi est de concevoir une enveloppe dure, au sein de laquelle l’évolutivité puisse être complète. A titre d’exemple, une des solutions proposées notamment par Setrhi-Setae est d’installer les locaux de l’administration à proximité du service d’hospitalisation de jour, afin de répondre aux besoins grandissants de l’activité ambulatoire en supprimant certains locaux administratifs secondaires. Les technologies font de l’activité chirurgicale un acte de moins en moins intrusif et de plus en plus rapide. L’immobilier doit s’adapter à cela. Pierrick Lelard : Il est très difficile de répondre à cette question malgré le nombre de personnes qui y réfléchissent. Il sera forcément de plus en plus orienté vers l’ambulatoire. De son côté, la technicité des appareils va continuer à augmenter. L’imagerie médicale est de plus en plus intéressante et permet d’obtenir de nombreuses réponses dans des délais très brefs. Les salles d’opération vont, elles aussi, évoluer dans ce sens dans le futur. Les appareils deviennent de plus en plus petits, libérant ainsi de l’espace. Que va-t-il advenir de ces surfaces dans l’avenir ? L’hôpital de demain sera un bâtiment qui ressemblera de moins en moins à un hôpital et qui sera très intégré dans la ville avec une dimension hôtelière et de vie différente de l’hôpital traditionnel. Il s’inspirera des malls anglo-saxons, un lieu de passage avec boutiques et diverses activités. C’est toute la ville qui viendra se fondre dans l’hôpital ! 31