grand corps malade
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grand corps malade
24/29 AVR 13 Hebdomadaire Paris OJD : 55996 24 RUE SAINT SABIN 75011 PARIS - 01 42 44 16 16 Surface approx. (cm²) : 369 N° de page : 100 Page 1/1 Yukonstyle mis en scène Célie Pauthe Un texte âpre et brûlant de la Québécoise Sarah Berthiaume brillamment adapté par Célie Pauthe. Dehors, le froid règne. Moins 45 degrés. "La limite entre le froid et la mort', remarque Carin, jeune métis amérindien calfeutré dans son logement. Telles sont les rigueurs de l'hiver au Yukon, Etat du Nord canadien à la frontière de l'Alaska, dont la devise, "Largerthan Ii fe", évoque le gigantisme de ses paysages. En mettant en scène Yukonstyle de la Québécoise Sarah Berthiaume, Célie Pauthe montre comment l'immensité du paysage traverse littéralement les personnages. Les comédiens Dan Artus, Flore Babled, Jean-Louis Coulloc'h et Cathy Min Jung paraissent hantés par une force qui les dépasse. Le texte alterne ainsi dialogues et monologues narratifs correspondant à des visions, la langue très vivante mêlant expressions québécoises et américanismes. Au cœur de ce monde travaillé par une spiritualité héritée de la tradition amérindienne, quatre destins se croisent II y a Yuko, une Japonaise qui partage le logement de Carin , Kate, débarquée d'un autocar en vêtements d'été recueillie par Yuko, et Dads, le père de Garin, qui noie sa mélancolie dans l'alcool en écoutant Neil Young. En arrière-fond, la pièce évoque la spoliation des Indiens - avec la quête de Carin de ses racines amérindiennes à travers le souvenir confus de sa mère disparue. Dense et précise, la mise en scène de Célie Pauthe tire le meilleur de ce texte parfois inégal mais toujours prenant. Hugues Le Tanneur Yukonstyle jusqu'au 28 avril au Théâtre cle la Colline, Pans XX", www colline fr ROND-POINT 1590016300502/GNK/ATA/2 Dubillard est maître dans l'art de dégoupiller la logique du langage pour faire exploser l'absurde grand corps malade Dans une version drolatique et enlevée de La Maison d'os de Roland Dubillard, Pierre Richard en impose en vieillard agonisant régnant sur ses valets. C 'est par une étrange continuité dans nos mémoires de spectateurs que l'on retrouve Pierre Richard, l'hommecatastrophe du cinéma français des années 70, dans le rôle principal de La Maison d'os de Roland Dubillard, mis en scène par Anne-Laure Liégeois avec I art consomme de plonger dans le même bain acide l'humour de la comédie et les noirs abysses des travers humains En fait, le véritable rôle-titre de la pièce est une maison dont on ne finit jamais de faire le tour, un dédale de marches et de couloirs, de recoins et d'enfilades de salles qui envahissent le plateau sous forme d'un escalier monumental encadré par une forêt de piliers sombres, d'où émergent les quatre acteurs dans le rôle des valets au service du maître Une vieille maison qui craque, fuit, disperse sa poussière et gémit sous les assauts du temps, qui lâche de partout. A l'image du Maître, à l'agonie interminable et néanmoins distraite par une foule d interrogations, d'énigmes, de desiderata et d'ordres donnés ou subis, selon le niveau de révolte ou d'insoumission de son armée de serviteurs. L'auteur précisant que l'ordre des scènes est facultatif, Anne-Laure Liégeois propose un découpage de la pièce habilement recentré sur les petites et les grandes vilenies que s'imposent maître et valets, comme une volée d'organes et de cellules défiant la cohérence générale d'un corps vacillant entre décrépitude et décomposition, pour tracer leur route au milieu de ruines fumantes Une danse macabre qui fait cliqueter les squelettes avec alacrité et préfère consommer les ruptures en usant de l'absurde plutôt que de s'avouer vaincue. Si Roland Dubillard est maître dans l'art de dégoupiller la logique du langage pour faire exploser I absurde et l'arbitraire des rapports humains, les acteurs de cette Maison d'os ont formidablement intégré le rythme si particulier de dialogues qui ne vont nulle part mais ne cessent jamais, quitte à prendre sans prévenir la tangente et à briser là. sans plus de façons Pourtant, le rire doit ici se faire à l'idée qu'il n'est jamais si attrayant que lorsqu'il masque des émotions profondes ou les rend moins effrayantes. C'est là, justement, que Pierre Richard nous touche au cœur dans ce rôle du Maître moribond mais lucide, telle une allégorie de l'acteur : "Comme si j'étais mort, comme si je n'étais plus que le lieu où se passe toute cette vie qui n'est pas à moi, où s'usent toutes ces choses.' Fabienne Arvers La Maison d'os de Roland Dubillard, mise en scène Anne Laure Liégeois, avec Pierre Richard. Shanf Andoura. Sébastien Bravard, Olivier Dutilloy, Agnès Pontier, jusqu'au H mai au Théâtre du Rond-Point, Pans VIII'. www.theatredurondpomt.fr tournée en mai a Cavaillon, Antibes, Angers. Château-Gontier et Châlons-en-Champagne, en juin a Lyon Eléments de recherche : THEATRE DU ROND-POINT : à Paris 8ème, toutes citations