André Brochu
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André Brochu
HMHintroCQ145_230206 23/02/06 08:51 Page 2 sur André Brochu, écrivain: Page Micheline Cambron et Laurent Mailhot André Brochu écrivain CAHIERS DU QUÉBEC COLLECTION LITTÉRATURE André Brochu, écrivain: Page sur Table des matières Abréviations des titres des ouvrages d’André Brochu . . . . . . . . . Présentation Micheline Cambron et Laurent Mailhot . . . . . . . . . . . . . . . . . PREMIÈRE PARTIE Accès, situations Une saison dans la pensée d’André Brochu Jacques Brault . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La grande langue circonspecte, ou le Matamore récalcitrant Renald Bérubé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Qui perd gagne. André Brochu dans l’institution littéraire Lucie Robert. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . André Brochu, Un modèle pour la critique littéraire François Ricard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . DEUXIÈME PARTIE Croix, crû, croâ ; chemins de la liberté Du viscéral au jubilatoire : une écriture de lucidité Jeanne Demers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Adéodat I et sa parenté Laurent Mailhot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Question nationale et acuité critique chez André Brochu Réjean Beaudoin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Du côté de Daniel. Quelques réflexions sur l’image d’un homme tendre Liana Nissim . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La croix du Nord et le rêve d’un intello Jacques Allard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . André Brochu, écrivain: Page sur André Brochu, écrivain TROISIÈME PARTIE L’erre du poème La poésie et le reste Gilles Marcotte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . André Brochu : « La visée poétique » ou « Le poème est une parole inquiète de ses mots » Paul Chanel Malenfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figures de la voracité : la poésie d’André Brochu Pierre Nepveu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . EN GUISE DE POSTFACE Une leçon de rigueur André Major . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Bibliographie d’André Brochu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . André Brochu, écrivain: Page sur Présentation MICHELINE CAMBRON ET L AURENT MAILHOT Impossible d’imaginer le lieu vrai le lieu qui moule ensemble le corps et la pensée Il y a eu au départ la seconde inouïe qui loge l’univers j’y perds mon temps et mon espace la raison s’y fissure je ne suis pas ici comme un héros portant son soleil et sa foi et j’ai laissé au loin la gangue noire du lieu de ma naissance Élégie de lumière, André B d’André Brochu témoigne exemplairement du dernier demi-siècle. À ce titre, elle intéresse quiconque fréquente la littérature québécoise. Critique, chroniqueur et essayiste, André Brochu a modelé et modèle encore le regard critique, depuis ses débuts flamboyants à Parti pris jusqu’à ses toutes récentes chroniques actuelles de poésie et de roman. Son œuvre de poète, de nouvelliste et de romancier, particulièrement féconde depuis une décennie, sollicite les critiques parce qu’elle entretient une relation singulière avec le lecteur, qui s’y trouve toujours de quelque façon inscrit. Cette œuvre, originale par sa diversité même, n’avait jamais été abordée de manière globale. Le numéro de Voix et images , qui comporte des textes importants sur L’ André Brochu, écrivain: Page sur André Brochu, écrivain l’œuvre d’André Brochu, ne s’attarde pas aux chroniques de poésie. Rien n’y est dit non plus de la place d’André Brochu dans l’institution littéraire québécoise, pas plus qu’on n’y explicite les liens qui l’attachent aux mouvements qui ont marqué la société québécoise. Enfin, il faut convenir que l’œuvre a pris une ampleur inattendue depuis , déplaçant des séries qui semblaient aller de soi, donnant un poids imprévu à certains textes plus obscurs. Il importe donc de revenir à cette œuvre et d’en dresser le portrait mouvant. C’est le défi que relève le présent ouvrage. On y trouvera rassemblées des interventions présentées lors d’un colloque tenu à l’automne , qui explorent les multiples facettes de l’œuvre dans un tour d’horizon qui s’attache à la fois aux divers genres abordés, aux présupposés critiques, à la définition de la littérature qui en résulte, et à certaines œuvres phares. Sans que de manière exhaustive toutes les œuvres fassent l’objet d’un traitement particulier, le lecteur trouvera ici des clés qui lui permettront d’aborder l’ensemble des textes qui composent l’œuvre d’André Brochu. Cette œuvre naquit sous le regard d’une bonne fée, Germaine Guèvremont, qui préfaça en le premier recueil de poèmes auquel participa l’adolescent : Étranges domaines (en compagnie de J. André Contant et Yves Dubé). On y repère la présence agissante d’un ogre Hénaurme, un ogre avec le H de Hugo. Et elle fut tôt marquée par le compagnonnage : « À Céline. À maints camarades : Paul Chamberland, Pierre Maheu, JeanMarc Piotte, André Major, Jacques Brault et Laurent Mailhot », dit la dédicace du recueil Délit contre délit, paru en . Chacune de ces trois présences est à sa manière une ombre tutélaire, de même que le sont les innombrables œuvres lues, toujours saisies par le biais de l’interlocution, toujours activement interprétées par un André Brochu, écrivain: Page sur Présentation sujet qui se veut lecteur. « La lecture nous enrichit moins de son contenu précis que d’une aptitude générale à décoller de notre expérience et à nous transformer. » Les textes ici rassemblés répondent à cette haute exigence de la lecture. Sans doute parce que l’œuvre d’André Brochu fait une large place à son lecteur, à des lecteurs qui, par ailleurs, sont souvent aussi écrivains, et des meilleurs. Nous avons disposé les textes de manière à mettre en relief la cohérence de l’œuvre mais aussi le double fil qui traverse l’œuvre d’André Brochu, celui de la lecture attentive, rigoureuse, et celui de l’imagination, de l’invention verbale la plus débridée. Aussi l’ouvrage s’ouvre-t-il sur une mise en contexte de l’œuvre, sa naissance et son évolution y sont replacées dans leur cadre socioculturel, situées dans la biographie et dans l’autobiocritique de l’auteur. Intitulée Accès, situations — le clin d’œil sartrien n’est pas fortuit —, cette section comporte un essai de Jacques Brault sur les ressorts de l’écriture, la « saison natale » de l’œuvre et la tentation de l’infini qui la dynamise (« Une saison dans la pensée d’André Brochu »). Dans un témoignage, Renald Bérubé analyse avec rigueur les caractéristiques du travail d’André Brochu, qui imposa une nouvelle façon de lire les textes québécois, mâtinée de théories et ouverte à la polémique (« La grande langue circonspecte ou le Matamore récalcitrant »). Une étude de Lucie Robert revisite l’ensemble de la réception de l’œuvre comme l’engagement d’André Brochu dans diverses revues, dégage un parcours exceptionnel et exemplaire, et montre la place toute particulière qu’il occupe dans l’institution (« Qui perd gagne. André Brochu dans l’institution littéraire »). Un essai de François Ricard présente l’« art » critique d’André Brochu, appuyé sur le postulat de la spécificité de l’œuvre littéraire et aimanté d’une recherche têtue de sens (« André Brochu. Un modèle pour la critique »). André Brochu, écrivain: Page sur André Brochu, écrivain Une seconde partie, Croix, crû, croâ ; chemins de la liberté, regroupe les collaborations qui touchent à la grande inventivité linguistique, narrative, politique de l’œuvre, tout en posant en filigrane l’engagement comme un risque assumé par André Brochu. Jeanne Demers donne le ton dans une étude de la prose narrative où elle montre la place qu’y tiennent l’exacerbation la plus crue du viscéral et la jubilation langagière la plus intellectualisée (« Du viscéral au jubilatoire : une écriture de lucidité »). Analysant Adéodat I, Laurent Mailhot en dégage la charge de rupture, remontant les fils identitaires, historiques et générationnels que le récit fait se heurter et auxquels répondent des fractures génériques, narratives, lexicales et textuelles (« Adéodat I et sa parenté »). Cet horizon de rupture est explicitement relié à l’engagement nationaliste qui, selon Réjean Beaudoin, constitue « l’acte primordial de la vocation de l’écrivain », nationalisme et acuité critique coexistant dans une sorte de ferveur à l’égard de la littérature nationale (« Question nationale et acuité critique chez André Brochu »). Liana Nissim, pour sa part, montre comment un personnage secondaire de La croix du Nord, Daniel, incarne l’envers de l’anti-héros qui domine la prose narrative d’André Brochu (« Du côté de Daniel. Quelques réflexions sur l’image d’un homme tendre »). Jacques Allard, à partir du personnage de Raoul, l’anti-héros écrivain, suggère que la conception de l’intellectuel, le « bollé », mise en œuvre dans La croix du Nord se construit à même une intertextualité marquée par la figure christique et renouvelle avec humour un motif canonique de la littérature québécoise (« La croix du Nord et le rêve du bollé »). La dernière section de l’ouvrage, L’erre du poème, traite à la fois du discours sur la poésie et de la poésie d’André Brochu. Gilles Marcotte nous entraîne d’abord sur les traces du lecteur de poésie, dans un essai sur les André Brochu, écrivain: Page sur Présentation Chroniques de poésie, parues dans Voix et images puis dans Tableau du poème, qui porte autant sur le genre de la chronique tel qu’André Brochu le pratique (la simplicité comme outil polémique, maniée par « un écrivain de plein droit ») que sur l’effet créé, le critique se faisant « l’assistant du poète » (« La poésie et le reste »). Paul Chanel Malenfant propose une lecture du recueil Je t’aime, je t’écris marquée par son propre travail de poète, y voyant un véritable Art poétique ; il montre que s’y trouve énoncé un savoir sur soi qui ressortit à une visée critique et témoigne d’« une unique manière d’être et de venir au monde par l’écriture » (« La visée poétique » ou « Le poème est une parole inquiète de ses mots »). Pierre Nepveu, enfin, traverse l’ensemble de la poésie d’André Brochu pour y montrer la présence insistante du poème et du poète comme « Verbe incarné » soumis à la dévoration, comme « eucharistie », témoignage du rapport profond, terrible, que son monde poétique entretient avec le sacré (« Figures de la voracité : la poésie d’André Brochu »). En guise de postface, un texte extrait du Journal (inédit) d’André Major. Intitulé « Une leçon de rigueur », ce texte rassemble en un faisceau, pour les diffracter, les diverses lignes de fuite du présent ouvrage : l’engagement poétique et politique consenti, les exigences intellectuelles qui conduisent au refus des lieux communs et à l’exploration, à l’affrontement du « réel de l’écriture ». Ce texte, à l’image du présent recueil, appelle à d’autres travaux, qui creuseront la matière et les formes, les lumières et les ombres de l’écriture si diverse d’André Brochu. Certains thèmes récurrents, comme la dimension polémique des textes, leur charge ironique, la question linguistique, l’investissement mythique, la pratique de l’« essai-fiction » mériteraient de faire l’objet d’études larges ou détaillées, puisant à l’ensemble de l’œuvre. De même, malgré le rappel, répété mais André Brochu, écrivain: Page sur André Brochu, écrivain furtif, de l’importance des travaux d’André Brochu sur la littérature française dans le développement de la critique littéraire au Québec, l’analyse où se trouveraient comparées ses « lectures » québécoises et ses « lectures » françaises reste à faire. Il est vrai que ce sont là des projets ambitieux, démesurés dans le cadre d’une première synthèse sur l’œuvre. Nous souhaitons néanmoins que le présent ouvrage, destiné aux étudiants, aux chercheurs et aux lecteurs québécois de toutes les générations, témoigne de l’importance et de la richesse de l’œuvre, de sa contribution essentielle au développement d’une tradition critique proprement québécoise et du plaisir toujours renouvelé que nous offrent sa prose et sa poésie. *** Nous tenons à remercier Martin Robitaille, Frédéric Rondeau et Olivier Parenteau grâce auxquels le colloque à l’origine de cet ouvrage a été un succès. Nous remercions aussi le Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises (CRILCQ) et l’Université de Montréal de leur soutien, de même que Patrick Poirier pour sa présence attentive. Micheline C et Laurent M I NOTE . Voix et images, « André Brochu », no , printemps . Dossier préparé par Robert Dion.