Le Choix...comme Ethique Thérapeutique 1ère partie

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Le Choix...comme Ethique Thérapeutique 1ère partie
Le Choix...comme Ethique Thérapeutique
1ère partie
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Les PNListes sont toujours intéressés par tout ce qui permet de promouvoir le changement,
avec efficacité, élégance et respect de la personne. Le modèle des thérapies brèves centrées
solution ne peut que les séduire puisqu’il réunit toutes ces qualités. Yves MATHIEU
développe pour nous un aperçu global très complet sur cette approche encore mal connue en
France. Merci à lui de nous avoir confié pour publication son travail original.
La rédaction.
Yves MATHIEU est Coordonnateur Adjoint d’un Centre d’Entretiens Familiaux à
DUNKERQUE. Il est thérapeute familial et travaille avec comme référence le modèle de
BRUGES en Thérapie Brève.
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La psychothérapie est née de la rencontre de plusieurs disciplines: la médecine, la psychologie
et la philosophie.
Historiquement, la psychothérapie s’est d’emblée orientée vers l’étude des problèmes et de la
pathologie, dans le but de les éliminer. Traditionnellement, le thérapeute adoptait une lecture
diachronique pour mieux entrer dans la compréhension de l’histoire, et voir apparaître
l’émergence du symptôme.
Dans les années 60, avec l’apparition de nouvelles approches telles que: la thérapie
comportementale, la psychologie du moi, la gestalt thérapie, la thérapie familiale... «L’ici et
le maintenant» a pris une place singulière et prépondérante dans la manière d’aborder les
problèmes lors des thérapies.
Actuellement les recherches se dirigent vers l’avenir, de nouveaux paradigmes émergent, cette
nouvelle orientation s’inscrit dans le «Post-Modernisme». Le thérapeute ne s’intéresse plus à
l’émergence du problème mais aide la personne à chercher les moyens de les résoudre. Le
thérapeute peut alors aisément souligner et accentuer les points forts sans insister sur les
points faibles.
Ce type d’approche a déjà été abordé de différentes manières par des thérapeutes familiaux
connus et reconnus.
«L’orientation des thérapeutes familiaux vers la «construction d’une réalité» qui mettait en
lumière les points faibles est donc en cours de révision. Les thérapeutes familiaux sont en
train de découvrir qu’explorer les points forts est indispensable pour faire face à un
dysfonctionnement familial. Le travail de Virginia Satir, qui souligne les aspects en rapport
avec la croissance, s’oriente vers une recherche d’alternatives normales. De même le travail
d’lvan Nagy, qui souligne les connotations positives et explore le système de valeurs de la
famille. La technique de Carl Whitaker qui consiste à remettre en question les positions des
membres de la famille et à introduire une diffusion ( 1) des rôles, provient de sa croyance
qu’en sortant de ce chaos induit par l’intervention thérapeutique, les membres de la famille
peuvent découvrir les forces latentes. Les opinions de Jay Haley et de Cloe Madanes selon
lesquelles le symptôme est organisé pour protéger la famille, et les interventions paradoxales
de Mara Selvini-Palazzoli, s’appuient sur les forces de la famille...
En thérapie individuelle, Milton Erickson utilisait régulièrement le «fait» que les individus
ont un réservoir de sagesse apprise et oubliée mais toujours disponible. Il suggérait à ses
patients d’essayer différentes manières d’organiser leur expérience, sans explorer l’étiologie
ou la dynamique du dysfonctionnement. Cette quête de nouveaux modes de transaction,
valables et efficaces, s’applique aussi en thérapie familiale, car la famille est un système qui
dispose d’un répertoire de modes de fonctionnement plus vaste que celui qu’il utilise
d’ordinaire. Une stratégie consiste donc à éviter d’explorer les étayages historiques des
transactions dysfonctionnelles et de prendre un raccourci pour explorer d’autres modes de
relation plus complexes, présage d’un fonctionnement plus sain.»
(Minuchin et Fishman, 1981, pp. 268-269) Réf: L’orientation vers les solutions de W.
H.O’Hanlon et M. Weiner-Davis, pp. 15-16
On peut constater que la thérapie brève a été influencée par bon nombre de thérapeutes.
J’aborderai le travail de Steve De Shazer pour le développement de son approche sur les
thérapies orientées «solutions», puis je présenterai de manière plus approfondie le modèle de
Bruges développé par Luc Isebaert, Marie-Christine Cabié, Myriam Le Fevere De Ten Hove
et Louis Cauffman.
En 1966, l’Institut de Recherche Mentale (M.R.I.) a mis en place un programme de thérapie
brève centré sur les problèmes. John Weakland, Richard Fisch, Paul Watzlawick ont fixé le
nombre de séances à 10. Le projet était de se centrer sur le problème et de le résoudre avec le
moins de séances possible.
L’équipe part de trois postulats de base:
1. Les changements continuels de notre vie et de notre milieu nous amènent à devoir
constamment affronter des difficultés.
Une difficulté devient un problème persistant lorsqu’elle a été gérée de manière inadéquate et
que, la difficulté n’étant pas résolue, l’on s’acharne à répéter les mêmes solutions encore et
encore... (faire encore plus de la même chose).
Indépendamment de son origine, de sa nature et de sa durée, un problème ne persiste que dans
la mesure o il est maintenu par le comportement de la personne, ou les interactions entre
celle-ci et son entourage.
3. Si le comportement qui alimente le problème est éliminé ou modifié de manière appropriée,
le problème disparaît ou devient une simple difficulté.
Il apparaît que «le problème est dans la solution».
Après un passage à Palo Alto, Steve De Shazer et lnsoo Kim Berg décident de s’installer à
Milwaukee, dans le Wisconsin. Ils fondent le Centre de Thérapie Familiale Brève (B.T.F.C.).
C’est en 1982 qu’ils ont commencé à développer une nouvelle approche thérapeutique centrée
sur la solution, partant de l’idée que la classe des problèmes est différente de la classe des
solutions, et sur la conviction que le patient détient la solution.
Les personnes sont expertes de leur thérapie, elles apportent des solutions partielles
incomplètes, leurs propres solutions. Les personnes ont des ressources et des ébauches de
solution, elles ont des compétences. La tâche du thérapeute est de les faire émerger. Il est plus
utile et plus efficace de prendre les solutions des personnes plutôt que de donner des solutions
de thérapeute.
La thérapie c’est: «amplifier les solutions»
Leur pragmatisme les a également conduits à dégager trois règles de base:
1. Si ce n’est pas cassé, ne réparez pas, ou si ça marche, ne réparez pas.
2. Une fois que vous savez ce qui marche, faites-le davantage.
3. Si ça ne marche pas, ne recommencez pas, faites autre chose.
En résumé: «la solution est dans la solution».
Bien entendu, le travail de Steve De Shazer ne s’arrête pas là. Des outils pratiques ont été
développés pour utiliser au mieux cette nouvelle approche.
Celle-ci a été reprise, affinée puis développée par l’équipe qui a mis en place le «Modèle de
Bruges».
Des Etats-Unis vers l’Europe,
une modélisation culturellement utilisable.
Depuis 1989, Marie-Christine Cabié, Luc Isebaert, Myriam Le Fevere De Ten Hove et Louis
Cauffman travaillent à l’élaboration d’outils plus exploitables dans notre culture européenne,
avec notamment la clef de voùte de leur réflexion qui est de donner dans toute intervention
thérapeutique différents choix possibles aux personnes reçues en entretien.
En complémentarité de la vision cartésienne qui ne prend en compte que la réalité interne,
Luc Isebaert précise, dans la ligne d’une conception écosystémique, que l’individu est
toujours inclus dans la réalité environnante.
REALITE
ACTION
CHOIX
décisionnel
PERCEPTION
SENS
réaction sémantique
Euhérésis
Eusémie
INDIVIDU
1 (*) Diffusion: Dans ce texte, la traduction semble être littérale, alors que dans le contexte
(connaissant la façon de travailler de Carl Whitaker) il est souhaitable de penser: Confusion.
Ce schéma montre la frontière entre la réalité et l’individu, et la dichotomie classique depuis
Aristote entre perception et action : nous percevons constamment la réalité et nous agissons
constamment sur celle-ci.
Ce que nous faisons d’abord lorsque nous percevons la réalité, c’est lui donner un sens. C’est
la «réaction sémantique» de Korzybski, d’abord indifférenciée entre la logique et l’affectif...
puis conceptualisée avec des différenciations de niveaux (cf. Bowen, La différenciation du
soi).
Ce que nous faisons ensuite, c’est opérer un choix décisionnel avant d’agir. C’est «choisir ce
que je vais faire» (consciemment ou non).
La thérapie intervient aux interfaces entre la réalité environnante et l’individu, au niveau de la
perception d’une part et de l’action d’autre part. Elle est efficace lorsqu’il y a un changement
au niveau du sens et au niveau du choix, si l’individu peut donner à la réalité un sens auquel
une souffrance n’est pas rattachée, et s’il peut choisir d’agir différemment au niveau de la
réalité.
Il est très utile de donner un sens de choix non-symptomatique à une action telle que
reconsommer de l’alcool, par exemple.
Une personne qui, aussi longtemps que le verre est plein, ne peut résister à le boire à chaque
fois est classée comme alcoolique. Quand celle-ci a le choix, il n’y a plus de problème
d’alcoolisme. Ce qui est important, voire primordial, c’est la notion de choix. Ceux qui sont
abstinents ont choisi de l’être.
A Bruges, dans le service psychothérapeutique de Luc Isebaert, en sept ans: 60 % d’abstinents
et 25 % de consommateurs modérés. Ces personnes ont été reçues en deux groupes distincts :
un groupe d’abstinents et un groupe de contrôle de la consommation.
«Depuis 1985, nous avions introduit deux protocoles, l’un visant l’abstinence, l’autre la prise
de boisson contrôlée. A l’époque, l’équipe décidait de celui qui devait être appliqué, sur la
base de critères reconnus. L’un de ces critères voulait qu’une rechute prouvait l’incapacité du
patient à contrôler sa consommation. Il était alors orienté vers le groupe des abstinents. En
1987, un patient fut admis pour sa troisième rechute dans la même année. Lors des
hospitalisations précédentes, il avait été dirigé vers le groupe des abstinents. Au cours d’une
réunion d ‘équipe, il nous sembla au moins aussi logique de dire qu’il avait montré son
incapacité à rester abstinent, que son incapacité à contrôler sa consommation. Dès lors, il ne
nous parut plus possible de lui conseiller quoi que ce soit. Nous en avons conclu qu’à l’avenir
nous laisserions les patients décider eux-mêmes. La dépendance paraissant caractérisée par
l’impossibilité de choisir, notre objectif devint de les aider à recouvrer la liberté de faire leur
propre choix.»
Marie-Christine Cabié, Luc Isebaert «Pour une thérapie brève»
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Eusémie
du Grec Eu: bien, bon et seme: signe, signification
Avant de pouvoir choisir de nouvelles actions, la personne peut être orientée vers de
nouveaux champs de signification. En replaçant le comportement symptomatique dans un
cadre plus large, le thérapeute permet au patient de développer de nouvelles significations. En
décodant différemment, la personne pourra choisir d’avancer dans des directions différentes.
Laurent est un jeune homme de 21 ans, vivant chez ses parents. Il fréquente un hôpital de
jour; il est étiqueté schizophrène.
Il a été adopté à l’âge de 2 ans, sans que les parents sachent qu’il était reconnu déficient
intellectuel. Il ne marchait pas, ne parlait pas, mais le père et la mère pensaient que ce retard
venait de son passé institutionnel.
Après la maternelle et beaucoup de problèmes comportementaux, un diagnostic est posé par
un médecin: enfant psychotique, caractériel, ayant des troubles de la personnalité et du
comportement. Les parents se sont sentis trompés, ils ont essayé d’aider leur enfant, en vain,
et ont décidé de le placer en institution spécialisée (en internat de semaine).
A 20 ans, Laurent est revenu vivre au domicile. Des difficultés sont apparues nettement à ce
moment-là, des altercations violentes opposaient Laurent et son père. La violence s’est
installée, verbale puis physique. Nous nous sommes rencontrés au Centre d’Entretiens
Familiaux du Littoral (CEFL) pour réfléchir et travailler sur ce thème.
Différentes significations peuvent être proposées: en tenant compte de l’aspect physiologique,
certains thérapeutes pourraient réaménager le traitement neuroleptique - seul l’aspect maladie
serait pris en compte. D’autres distingueraient un conflit oedipien qu’il faudrait traiter par une
longue analyse individuelle. Certains verraient également un problème de frontières
transgénérationnelles non repérées.
A cela peut s’ajouter la vision des parents : Monsieur pense que sa femme en fait trop pour
Laurent et que lorsqu’il pose des limites, son fils ne les supporte pas - Madame pense que son
fils est limité et que son père est trop rigide : il lui en demande trop... Quant à Laurent, il dit
qu’il ne comprend pas et qu’il n’arrive pas à se contrôler.
Toutes ces visions ne sont pas fausses, et pourtant elles ne sont en ce qui me concerne pas
utiles dans la situation, mon objectif principal étant d’offrir la possibilité à Laurent et à ses
parents d’avoir le maximum de «cartes» afin de pouvoir prendre celles qui leur semblent
utiles :
* carte autonomie,
* carte contrôle - ce petit moment incontrôlé montre tous les efforts effectués pour se
contrôler tout le reste du temps,
* carte vérification d’amour - jusqu’o
mes parents peuvent-ils m’aimer?
En reformulant et en faisant émerger les ressources de la famille, des solutions efficaces se
font jour.
Par exemple, à la fin de l’entretien, Monsieur donne une lecture différente à la violence: en
s’opposant à lui, son fils cherche à s’autonomiser. Son épouse admet également cette vision et
propose de travailler l’autonomisation de son fils.
Laurent, quant à lui, propose des solutions concrètes pour contrôler la montée de sa violence;
s’il sent la colère arriver, il s ‘engage à essayer de se détendre en :
- prenant un bain,
- /ou en allant faire une promenade à bicyclette,
- et/ou en écoutant de la musique,
- et/ou en demandant son traitement.
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Euhérésis
du Grec Eu: bon et haeresis: choix
Au-delà de la définition littérale, l’Euhérésis resitue le thérapeute dans une notion d’aide (ou
d’utilité) avec pour tâche de permettre aux patients de retrouver une liberté d’action, et surtout
de trouver des alternatives à la production de leurs symptômes.
Cette autre vision permet également au thérapeute de rester centré sur l’objectif de la
personne.
La liberté d’action passe inévitablement par la liberté de choix des actions que la personne
peut ou veut entreprendre.
Le thérapeute peut, dès le premier entretien, créer un contexte de choix. Le client pourra
amener à la thérapie les personnes qu’il juge utiles (père, mère, frère, cousin, ami...). Ces
invitations pourront, selon le choix du patient, être régulières ou ponctuelles. Ces situations
lui permettront également de décider de choisir ce qu’il attend de ces séances singulières.
Dans la mesure du possible, cela s’applique aussi au rythme des entretiens. Cependant, dans le
cas d’une personne dépressive, il est conseillé de proposer au début un ou deux rendez-vous
rapprochés, afin que la personne ne se sente pas rejetée - ensuite, dès que cela est possible, lui
laisser le choix.
L’autre aspect essentiel à la concrétisation du Modèle de Bruges est de créer un contexte de
choix dans le «contenu», c’est-à-dire de laisser à la personne le choix de l’objectif ou des
objectifs à atteindre. Si plusieurs objectifs sont définis, lui laisser le soin d’établir un ordre de
priorité.
Hector et Mélanie viennent me voir pour violence conjugale. Ils sont envoyés par une
collègue psychiatre pour travailler sur ce problème.
Au premier entretien, deux objectifs sont dégagés : le couple souhaite réfléchir sur la violence
et l’espace intime de chacun. Ils décident d’agir en priorité sur le deuxième point. A la séance
suivante, ils ont trouvé des solutions pour mieux respecter l’intimité de l’autre. le couple
explique que, lorsqu’un désaccord survient, Mélanie a tendance à se renfrogner, tandis
qu’Hector veut à tout prix la consoler. L’effet est souvent désastreux. Ils décident d’arrêter
cette escalade en se séparant, chacun dans une pièce, pour vivre leurs sentiments
individuellement et faire le point.
Les résultats ont été rapides, en respectant leur espace intime, le couple n’en arrivait plus aux
mains. Je les félicite en leur faisant remarquer que l’objectif fixé au premier entretien est
largement dépassé et leur propose de continuer à faire ce qui marche !...
Lors d’un entretien o le client se plaint de tout, des objectifs peuvent être dégagés par les
projections dans l’avenir. Cette partie de l’entretien permet au patient d’imaginer les
changements que son ou ses choix vont produire dans sa vie. Je lui demande alors d’imaginer
une séance qui pourrait se dérouler... un mois, six mois, un an plus tard.
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C’est un outil inventé par Insoo Kim Berg, développé par Steve de Shazer. Cette formulation
amène le client à parler concrètement du changement qu’il souhaite voir s’opérer, à se
représenter un possible changement et, en se projetant dans un avenir sans problème, à
déterminer un objectif orienté vers le futur, donc vers des solutions.
... Imaginez que les miracles existent.
...Pendant une prochaine nuit: un miracle se produit.
...Le miracle, c’est que le ou les problèmes pour le(les)quel(s) vous êtes venus nous voir est
(sont) résolu(s). vous ne savez pas que cela a eu lieu, puisque vous dormiez...
....Comment le lendemain, et les jours suivants, allez-vous vous en apercevoir ?...Qu’est-ce
qui aura changé pour vous pour les autres?...Comment votre entourage va-t-il s’en apercevoir
?...
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Leess ttââcchheess..
A la fin de certaines séances, il est possible de prescrire des taches. Elles reprennent en partie
l’entretien. Par exemple, après la question Miracle, nous pouvons demander à la personne de
faire, deux journées par semaine, comme si le miracle avait eu lieu :
Soyez attentif aux réactions de votre entourage...Quels sont les changements que cela procure
?...
Il est important de proposer plusieurs tâches, de laisser le client décider s’il va les faire ou pas,
lui préciser qu’il peut en inventer d’autres.
Quoi qu’il fasse, le client ne se sent pas en défaut, il ne peut que coopérer. A charge pour le
thérapeute de le féliciter du ou des choix qu’il aura effectués.
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Dans le modèle de Bruges, le double lien thérapeutique est une tâche à deux niveaux qui a
pour objectif de placer le patient dans un contexte dans lequel il ne peut faire qu’un bon
choix.
Le premier niveau consiste à contrôler un symptôme ou une partie de celui-ci.
Le deuxième niveau est une action que doit faire le patient lorsqu’il n’a pas pu, ou pas voulu,
effectuer le premier niveau de la tâche. L’action qu’il doit alors entreprendre s’apparente à
une récompense, un plaisir à se faire ou à procurer à l’entourage.
Paul et Nicole viennent au CEFL suite à une tentative de suicide de Madame. Nicole est
déprimée car son mari a eu une aventure et l’a «avoué» à son épouse. Nicole est très
angoissée lorsque son mari part à son travail.
Après une réflexion autour des exceptions au comportement symptomatique, il s’avère que
Nicole arrive à prédire lorsqu’elle sera plus ou moins angoissée. Elle repère que lorsque Paul
est attentionné, jovial, elle supporte mieux la situation. Paul se présente comme un épicurien
averti.
La tâche que nous proposons réunira tous ces ingrédients. Je propose à Nicole de prédire
chaque matin son pourcentage d’angoisse sur une échelle de O à 10 , 0 étant: «je vais être très
angoissée», 10: «je ne vais pas l’être du tout»
Si la prédiction est juste, elle aura un double bénéfice : d’une part elle va peu à peu
s’apercevoir qu’elle peut avoir un certain contrôle sur l’angoisse, puis elle aura le sentiment
de pouvoir anticiper sa journée.
Si la prédiction est mauvaise, elle doit alors préparer un bon petit plat pour son mari. Là aussi
des bénéfices secondaires apparaissent. Pendant la préparation du repas, son esprit est occupé
et l’angoisse diminue. Ensuite, pendant le repas, le mari étant gourmet se détend et devient
plus jovial. L’après-midi est moins difficile à supporter car Paul est plus proche de Nicole.
L’intérêt de cette tache est que Nicole ne peut qu’en tirer bénéfice, et le couple trouve à
nouveau plaisir à être ensemble. En ce qui concerne Nicole, le fait de contrôler un tant soit
peu son angoisse l’aide à progresser. Avoir un impact sur la relation du couple l’aide
également à atteindre son objectif
Certains patients ne font pas la tâche jusqu’au bout, l’ignorent, n’arrivent pas à l’effectuer ou
la jugent inopérante, voire ridicule. Loin de penser à de la résistance de leur part, nous
trouvons ces informations importantes. Ces indications nous permettent de réfléchir sur notre
relation dans le processus thérapeutique. Le thérapeute a peut-être proposé des taches trop
impersonnelles ou un changement trop rapide.
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Bibliographie
- Marie-Christine Cabié. Luc Isebaert. «Pour une thérapie brève. Le libre choix du patient
comme éthique en psychothérapie.» Ed. Erès, Ramonville Saint Agne - 1997
- Steve de Shazer. «Différence». Ed. Le Germe Satas. Bruxelles- 1996
- W.H. O’Hanlon M Weiner-Davis.»L’orientation vers les solutions. Une approche nouvelle
en psychothérapie». Ed. Le Germe Satas. Bruxelles - 1995
(NdE : nous avons publié des comptes-rendus de lecture régulièrement sur les ouvrages
concernant les thérapies brèves centrées solutions dans les précédents numéros de
METAPHORE)