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Le succès de la filière porcine espagnole La péninsule Ibérique • • tlfe aUJOUrd'hUl• · 1es --d' ..<.C: _ _S ... ncnCe ._.__.,._>-..,.,..__._-=-a 5 ----�JL Jne · -UTI'e e vendredi, le ministre de l' Agri culture français, Stéphane Le Foll, s'envole pour Madrid afin de ren contrer son homologue espagnole, Isabel Garcia Tejerina. Assisteront aussi à cette réllllÎ0'.11 les ministres de l' Agriculture portugais et italien. Au menu des discussions, la préparation du sommet européen exceptionnel agricole qui aura lieu le 7 septembre, à Bruxelles, à la demande de la France, sur fond de baisse généralisée des cours des produits agricoles. Outre la gestion de la surproduction laitière européenne, qui devrait occuper une bonne par tie des discussions, la crise porcine française de vrait aussi être abordée. D'autant que la France est le premier client de l'Espagne. Elle représente désormais près du quart des exportations de la péninsule Ibérique. Une part qui ne cesse de s'ac croître selon l'lfip (Institut français du porc). Dé sormais, des grandes salaisons tricolores qui ont pignon sur rue n'hésitent plus à s'approvisionner directement en porcs espagnols, actuellement 10 % moins cher au kilo, pour la fabrication de leurs plats préparés ou les ventes à la découpe de brochettes ou grillades. La saison estivale y est fa vorable. Stéphane Le Fol! pourrait, à cette occasion, de· mander à son alter ego quelle recette miracle a permis à son pays de devenir, en moins de quinze ans, le deuxième producteur de porcs européen, au nez et à la barbe de la France. Avec plus de 47 millions de porcs produits l'an dernier (plus du double de la France), les éleveurs espagnols se classent même au quatrième rang mondial après la Chine, les États Unis et l'Allemagne. Les mau vaises langues françaises diront qu'ils ne respec tent pas les contraintes environnementales, que leurs charges sociales sont moins élevées et même que certains élevages dopent leurs cochons avec des hormones de croissance. Ce qui est totale ment interdit en Europe. La réalité est toutefois très différente ! ... refiorme d'ampleur engagée il y a quinze ans. Elle est désormais le deuxième �---acteur européen du secteur et un gros exportateur vers l'Asie. Peut-être un exemple à suivre pour la France. Stéphane Le Foll sera en visite sur place ce vendredi. Avec plus de 47 Millions de porcs produits l'an dernier (plus du double de la France), les éleveurs espagnols (cidessus à Burgos) se classent au quatrième rang mondial après la Chine, les Etats-Unis et l'Allemagne. Les avancées de la génétique Des deux côtés des Pyrénées, les spécialistes re connaissent que c'est avant tout le choix de déve loppement fondé sur le modèle de l'intégration verticale qui a permis l'industrialisation du sec teur porcin espagnol, et son essor. « Lafilière por cine espagnole a opté pour le modèle américain qui permet plus facilement de réaliser des économies d'échelle, et non le modèle européen qui privilégie les coopératives», souligne Miguel Angel Higuera, président de l'Association nationale espagnole des producteurs de porcs (Anprogapor). « Le secteur porcin espagnol a été créé par les so ciétés d'aliments du bétail. C'est ainsi le cas de l'élevage Valls Company qui était, à son origine, un fabricant de farine. n s'est ensuite diversifié dans ['aliment du bétail, puis dans toute la chaîne de pro Vendredi 28 août 2015 LE FIGARO La production est trop morcelée. Une plus grande concentration des élevages permettrait une meilleure rentabilité , ···�-· CHRISTOPHE CHARLES AVOCAT SPECIALISÉ DANS LE DOMAINE AGRICOLE, NOTAMMENT DES ELEVAGES DE PORCS -;. � >< La péninsule Ibérique • • tlfe aUJOUrd'hUl• · 1es Éric de La Chesnals - @plumedeschamps --d' ..<.C: _ _S ... ncnCe ._.__.,._>-..,.,..__._-=-a 5 ----�JL Jne · -UTI'e lien. Au menu des discussions, la préparation du sommet européen exceptionnel agricole qui aura lieu le 7 septembre, à Bruxelles, à la demande de la France, sur fond de baisse généralisée des cours des produits agricoles. Outre la gestion de la surproduction laitière européenne, qui devrait occuper une bonne par tie des discussions, la crise porcine française de vrait aussi être abordée. D'autant que la France est le premier client de l'Espagne. Elle représente désormais près du quart des exportations de la péninsule Ibérique. Une part qui ne cesse de s'ac croître selon l'lfip (Institut français du porc). Dé sormais, des grandes salaisons tricolores qui ont pignon sur rue n'hésitent plus à s'approvisionner directement en porcs espagnols, actuellement 10 % moins cher au kilo, pour la fabrication de leurs plats préparés ou les ventes à la découpe de brochettes ou grillades. La saison estivale y est fa vorable. Stéphane Le Fol! pourrait, à cette occasion, de· mander à son alter ego quelle recette miracle a permis à son pays de devenir, en moins de quinze ans, le deuxième producteur de porcs européen, au nez et à la barbe de la France. Avec plus de 47 millions de porcs produits l'an dernier (plus du double de la France), les éleveurs espagnols se classent même au quatrième rang mondial après la Chine, les États Unis et l'Allemagne. Les mau vaises langues françaises diront qu'ils ne respec tent pas les contraintes environnementales, que leurs charges sociales sont moins élevées et même que certains élevages dopent leurs cochons avec des hormones de croissance. Ce qui est totale ment interdit en Europe. La réalité est toutefois très différente ! ... . ..- � refiorme d'ampleur engagée il y a quinze ans. Elle est désormais le deuxième �---acteur européen du secteur et un gros exportateur vers l'Asie. Peut-être un exemple à suivre pour la France. Stéphane Le Foll sera en visite sur place ce vendredi. Les avancées de la génétique Des deux côtés des Pyrénées, les spécialistes re connaissent que c'est avant tout le choix de déve loppement fondé sur le modèle de l'intégration verticale qui a permis l'industrialisation du sec teur porcin espagnol, et son essor. « Lafilière por cine espagnole a opté pour le modèle américain qui permet plus facilement de réaliser des économies d'échelle, et non le modèle européen qui privilégie les coopératives», souligne Miguel Angel Higuera, président de l'Association nationale espagnole des producteurs de porcs (Anprogapor). « Le secteur porcin espagnol a été créé par les so ciétés d'aliments du bétail. C'est ainsi le cas de l'élevage Valls Company qui était, à son origine, un fabricant de farine. n s'est ensuite diversifié dans ['aliment du bétail, puis dans toute la chaîne de pro ···�-· -;. � duction porcine pour devenir le plus gros intégra· teur du pays, note, pour sa part, Christophe Charles, avocat spécialisé dans le domaine agricole, notamment des élevages de porcs. Le modèle de tir-t.égr(l.!.Î{JTl vertic.ale çrn.�m:iis au secteur de réaliser desinvestissëinentsimportants sansle concours de deniers publics, les banques prêtant plus aisé ment à de grands groupes qu'à des petites structu res indépendantes. » La technicité des élevages es pagnols s'est aussi améliorée en profitant des avancées de la génétique. La productivité par truie est passée à 26 porcelets par an. Aussi près des trois-quarts de la production est assurée sous forme de contrats passés entre les éleveurs et les fabricants d'aliments. Le quart res tant est entre les mains des coopératives. L'inté grateur fournit les cochons à engraisser, prend à sa charge les aliments et les produits vétérinaires. Il s'occupe aussi de l'abattage et de la commercia lisation des porcs. L'agriculteur reste propriétaire de ses bâtiments d'élevage, paie les frais d'entre tien, les salaires et les cotisations sociales. « La puissance économiqu!? du système intégré est qu'il dégage de faibles marges certes mais, à chaque maillon, du haut en bas de la chaîne, de la fabrication d'aliment jusqu'à l'abattage», recon nait Ramon Armengol, pourtant un fervent parti san du modèle coopératif, au magazine spécialisé Réussir Porc, qui a consacré un numéro très com plet sur le modèle porcin espagnol. Dans ce systè me intégré, le poids des charges d'aliments, le' plus gros poste de dépenses d'une porcherie (60% du coût de revient en moyenne en France), est mieux maîtrisé. Résultat, à 1,24 euro le kilo de porc en moyenne, soit 15 centimes de moins qu'en France, les éleveurs espagnols ne sont pas descendus dans la rue. Contrairement à leurs ho mologues français, qui, à 1,39 euro le kilo, tra vaillent à perte, ils réussissent à dégager une mar ge avec un prix de vente 10% moins élevé. Celle ci s'élève à 11,3 centimes d'euro par kilo, selon un rapport du ministère de l' Agriculture catalan. Ramon Armengol est aussi vice président de la coopérative lvars d'Urgell, située non loin de Lé rida en Catalogne, la région espagnole du porc où sont produits plus des deux tiers des cochons exportés. Lérida est comme Plérin en Bretagne, le lieu physique où est fixée la tendance nationale des prix du porc. Mais à la différence de l'indica teur breton, la cotation ne peut être suspendue. Si acheteurs et vendeurs n'arrivent pas à se mettre d'accord, ils appliquent un modèle statistique qui permet d'avoir un prix de référence toutes les se maines quoi qu'il arrive. Dans ces grands élevages, le bien être animal et l'environnement ne sont pas négligés. Par >< exemple, l'élevage de 3800 truies du· groupe Optimal Pork Production (OPP), basé près de Lé rida; sert de vitrine. Les truies y sont élevées en semi-liberté et non confinées. Un concept que l'Espagne a déjà exporté au Brésil, en Italie et en Pologne. Le lisier est recyclé sous forme de gra nulés destinés à l'engrais. «Trois modèles s'affrontent» Autre atout de la filière porcine espagnole, elle s'est dotée d'une association professionnelle en 2008 qui regroupe tous les maillons de la chaine, de l'élevage à la grande surface de vente. L'une de ses actions est de promouvoir le cochon espagnol à l'étranger. Cela porte ses fnùts. «L'année 2014 s'est soldée par un record des exportations espa gnoles avec un excédent commercial de 3 milliards d'euros de la filière porcine, se réjouit Alberto Herranz, directeur d'Interporc. Cela représente un des secteurs les plus importants de 1 'économie espa gnole. » L'interprofession a dû redoubler d'imagi nation pour aller chercher de nouveaux marchés à l'export, qui représentent désormais 42 % des dé bouchés de la production nationale. Avec une nouvelle destination en vogue: l'Asie. Les expor tations ont ainsi bondi de 37 % vers la Chine, de 86 % vers le Japon, de 101 % vers les Philippines et de 258 % vers la Corée ! « Au total, entre 2013 et 2014, ces quatre destinations représentent 17% des volumes exportés sur la période», poursuit Alberto Herranz. Une façon de contourner l'embargo russe. Et de compenser aussi la baisse du marché intérieur de plus 10 % en quatre ans. Cette dernière reste toutefois soutenue, grâce à. des habitudes de consommation liées à la culture du pays. La péninsule Ibérique est connue pour ses bars à tapas qui proposent, à toute heure de la journée, de nombreux produits à base de porc, dont le fameux chorizo. Les Espagnols dégustent, sous.toutes ses formes, 46,3 kilos de viande de porc par an par personne, 14 kilos de plus que les Français qui trouvent pourtant que « tout est bon dans le cochon ». À l'heure où, en France, les professionnels pri vilégient la carte du marché intérieur, ils pour raient aussi s'inspirer du modèle espagnol. Ce modèle d'intégration verticale existe bien, mais de façon très marginale. « Trois modèles de filiè res porcines s'affrontent, constate Christophe Charles. Celui maîtrisé par la grande distribution, avec notamment Leclerc ou lntermarché, un autre par les coopératives comme Cooper! ou par les in dustJiels comme Bigard, enfin, celui contrôlé par des groupements d'éleveurs indépendants. Chacun des acteurs tire la couverture à lui sans cohérence globale de filière. En outre, la production est trop morcelée. Une plus grande concentration des éleva ges permettrait une meilleure rentabilité. » Reste que la filière porcine française vit dans sa bulle depuis plusieurs décennies. « Elle ne dispose pas d'un observatoire efficient des marchés étran gers ni d'un comité d'orientation stratégique de la filière», regrette Christophe Charles. Sa visite en Espagne aidera-t-elle Stéphane Le Foll à trouver des solutions à la crise ? ll y a urgence, mais la balle est aussi dans le camp des acteurs de la chaî ne qui n'ont pas su la réorganiser suffisai:runent pour l'adapter à la concurrence internationale.•