Les inondations de Nîmes en 1988
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Les inondations de Nîmes en 1988
Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Chapelle Hélène Chauveau Tiphaine Les inondations de Nîmes en 1988 Mention : Ce dossier de première année de licence de géographie est un exercice de synthèse et d'analyse dans le cadre du cours Eau & Environnement (LGO 19AB2). Nous sollicitons la bienveillance des lecteurs sur ce travail exploratoire d'étudiants en première année de géographie. 1/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Introduction Par leur violence, les inondations de Nîmes en 1988 ont marqué tous les esprits. Ce phénomène est récurrent dans cette ville puisque l’on a observé leur réapparition entre cinq à huit fois au cours des siècles. De toutes les inondations qui ont eu lieu à Nîmes auparavant, celles de 1988 ont été assez considérables. C’est l’accumulation de plusieurs facteurs tels que le climat, l’emplacement et l’aménagement de la ville de Nîmes qui détermine l’aléa. Ces inondations ont permis une remise en question de tout un système de prévention et d’adaptation des structures face aux risques causés par l’eau. En quoi les inondations à Nîmes en 1988 ont-elles eu un impact particulièrement important ? I. Nîmes : un territoire prédisposé aux inondations 1.Un climat particulier Profitant du climat méditerranéen, Nîmes reçoit peu de précipitations et bénéficie d’un été chaud et aride en période estivale. En revanche, l’automne est généralement la saison des perturbations orageuses méditerranéennes, pouvant déverser des quantités d’eau conséquentes. Sa situation topographique explique les fortes chaleurs et les inondations récurrentes. En effet située au creux des collines de garrigue, les dépressions sont souvent bloquées à cet endroit. 2.Le territoire nîmois Nîmes est située dans la plaine du Languedoc, entre le Rhône et l’Aude. Au pied de collines, l'altitude maximale sur celles au nord de la ville atteint 215 mètres (116 mètres en zone urbaine) et l'altitude minimale est de 21 mètres dans la plaine du Vistre (30 mètres en zone urbaine). Le territoire nîmois est assez particulier puisque la nature des sols est plutôt calcaire tout comme le plateau qui le domine d’une centaine de mètres. Ce plateau calcaire est emprunté par six cours d’eau appelés cadereaux. Ces ruisseaux aux torrents généralement secs, drainent les garrigues environnantes de la ville de Nîmes, en utilisant des bassins versants plutôt centralisés. Les cadereaux d’Alès/Camplanier et d’Uzès convergent en plein centre de Nîmes, ce qui favorise les inondations. (cf. : carte suivante). 2/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Les cadereaux de la villes de Nîmes 3.L’aménagement de la ville Nîmes subit une urbanisation progressive, une extension des voies de communications dans la plaine et sur les hauteurs. La ville s’est développée à partir de son centre historique contenu à l’intérieur d’une enceinte. Son centre urbain posé au pied des reliefs s’est moins développé au nord, tandis qu’il s’étalait plus facilement vers l’ouest, en délaissant quelque peu le secteur est. L’aménagement de la ville de Nîmes n’est pas assez centré sur l’écoulement des eaux puisque l’aménagement souterrain, principalement les canalisations, n’ont pas une capacité de débit suffisante, ce qui lors de fortes pluies, provoque des débordements. II. Des conséquences évidentes 1. D’importantes inondations Les jours précédents l’inondation, des pluies avaient participé à la saturation des terrains perméables de la garrigue, diminuant la capacité de rétention des eaux ruisselantes. Le 29 septembre 34mm d’eau s’étaient écoulés sur Nîmes contre 22mm d’eau le 1er Octobre. Le 3 octobre 1988, des pluies diluviennes, arrivées du nord des Cévennes, repoussées vers le sud par des entrées maritimes, sont bloquées pendant des heures sur une zone : la ville de Nîmes. Ce qui a constitué un noyau de fortes précipitations concentré sur Nîmes. (la carte suivante montre la concentration des pluies sur la ville de Nîmes). 3/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Les précipitations du 2 au 3 octobre 1988 dans le Gard En quelques heures environ 90 m3 d’eau se sont déversées sur les gorges du Gardon et les bassins du Vistre et du Rhony. Les bassins versants des cadereaux reçurent plus de 15 millions de m3 d’eau, ce qui provoqua des ruissellements démentiels sur la ville. A onze heures le dispositif Orsec est activé (Organisation des secours). Dans les rues le niveau de l’eau atteindra parfois les trois mètres. Les casernes et l'État major des sapeurs pompiers étant peu à peu inondés, les secours ont dû s’organiser rapidement, notamment en ayant recours aux hélicoptères. A la fin de la journée, cent quarante hélitreuillages ont été effectués. En parallèle, une grande chaîne d’entraide s’est mise en place, suite à cela, cinq cent sauvetages terrestres ont eu lieu. 2.Un bilan lourd Huit personnes ont péri dans la catastrophe du 3 octobre 1988. On a aussi déclaré une disparition et constaté que cinquante personnes ont été blessées. Nous supposons que le nombre de victimes aurait pu être moins élevé si les habitants de Nîmes avaient été prévenus à temps. En effet, des images de personnes bloquées dans leur voiture attestent d’un cruel manque 4/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org d’information. Au-delà des pertes humaines, on a répertorié d’importants dommages matériels : deux mille logements sinistrés, parfois des portes et des fenêtres arrachées par le débit de l’eau , trois mille voitures détruites, des voies ferrées et des routes détériorées, des coupures d’électricité et des réseaux téléphoniques, quarante et une école fermées. Les dégâts ont été estimés à environ sixcent millions d’euros. Les sinistrés les plus chanceux ont pu regagner leur habitation vers la fin du mois de Décembre. III. Remèdes aux inondations : les projets proposés et les travaux effectués Il faut savoir qu’après les inondations de 1958, cinq grands barrages écrêteurs de crues avaient été construit. Apparemment ces constructions n’ont pas été suffisantes pour éviter celles de 1988. M. Jean Bousquet (Maire de Nîmes de 1983 à 1995), a donc engagé une commission d’experts pour remédier aux inondations. Des projets divers ont été présentés, comme la création de grands barrages, de tunnels ou encore des aménagements pour faciliter l’écoulement naturel. Mais pour des raisons financières et pratiques ces solutions ont été évincées. Une autre proposition a ensuite été faite par une commission hydraulique : le Plan de Protection Contre les Inondations (PPCI). Ce projet implique de nombreux travaux tels que l’aménagement des cadereaux se situant en aval jusqu’au Vistre ainsi que ceux situés en amont, la réalisation de « passages hydrauliques » sous la voie ferrée, le Boulevard Allende et l’autoroute pour évacuer l’eau. La création de différents bassins a aussi été envisagée, comme des bassins de compensation installés en aval de l’autoroute A9, permettant de réduire le débit d’eau de l’écoulement en aval, ou encore l’implantation de bassins de retenu sur l’amont des cadereaux pour stocker les eaux pluviales. La commission hydraulique a également évoqué l’installation de canalisations à plus grande capacité de débit sous le centre ville puisqu’au moment des inondations, les canalisations étaient bien trop petites pour évacuer une aussi grande quantité d’eau. Après réflexion, les travaux prévus par le PPCI s’avérant trop coûteux et trop longs à réaliser, ne seront pas effectués. Dans le but de réagir rapidement, la ville a choisi de réaliser des bassins en amont pour permettre de réduire les pics de crue de manière radicale et c’est avec le temps que le nombre de travaux a considérablement augmenté. En 2007, on comptait dix-huit bassins de rétention adaptés à l’imperméabilité du milieu urbain permettant de recueillir les apports importants d’eaux pluviales et par conséquent d’éviter le ruissellement, on recensait aussi quatre bassins de compensation, trois bassins en aval et trois bassins de dégravement permettant d’éviter au maximum l’action érosive. Un grand bassin de stockage a été élaboré pour limiter fortement les risques de débordement par les égouts lors de fortes pluies. L’eau est donc déviée vers un bassin de stockage puis une fois la pluie arrêtée retourne vers les égouts. En plus du PPCI, d’autres actions ont été mises en place, comme la constitution d’un règlement d’urbanisme adapté aux risques d’inondation, (règlement permettant d’informer la population des zones inconstructibles, des hauteurs minimales de plancher à respecter, des endroits à l’étage des habitations pour se réfugier), des mesures préventives sont aussi apparues pour que la population soit mieux informée des risques, ou encore la création d’un système d’observation des pluies et d’alerte (qui deviendra le plan ESPADA en 2005). Ce dispositif permet de veiller sur la sécurité des nîmois par anticipation des risques de crues. Cela permet ainsi de mieux gérer les situations à risques. Il semblerait évident de remettre en cause les différents aménagements effectués puisque des inondations se sont encore produites en 2005. Cette fois-ci, la ville de Nîmes a fait appel à l'État pour financer en partie son projet. Les démarches aboutissent puisqu’en 2007 a lieu la signature du PAPI (Plan d’Action de Prévention des Inondations). 5/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Visite du chantier du cadereau d'Alès Actuellement, le PAPI a été renommé : le programme CADEREAU, mais garde les mêmes enjeux que le PPCI. Il s’agit d’un Choix d’Aménagement Durable d’Evitement du Risque d’Ecoulement Aérien Urbain qui repose sur 4 grands principes : une meilleure gérance de l’espace nîmois et par conséquent un meilleur aménagement qui prend en compte les failles du territoire. Cette action se traduit par un Plan de Prévention des Risques d’Inondation ou PPRI, qui vise à favoriser la mise en place d’une politique de prévention des risques plus efficace. Ce programme a pris en compte le manque d’information des Nîmois. Désormais, la population est mieux prévenue en cas d’éventuelle inondation notamment grâce au plan d’Evaluation et de Suivi des Pluies en Agglomération pour Devancer l’Alerte (ou plan ESPADA). Ce dispositif permet de surveiller les précipitations grâce à des images radars et des caméras placées dans la ville de Nîmes. La quantité d’eau tombée est transmise par radio numérique dans plus de trente stations d’observation. Le plan ESPADA permet donc d’anticiper les risques de crues et ainsi d’éviter la mise en danger des nîmois. Le programme CADEREAU comporte également une part d’aménagement autour des cours d’eau pour limiter l’écoulement et favoriser l’infiltration (voir photo ci-dessus : Visite de chantier du cadereau d’Alès). Un certain engagement financier de la part de l’Etat, de la région et du département est essentiel au bon déroulement du programme cadereau. En effet, la ville de Nîmes ne peut pas prendre en charge la totalité des dépenses. Conclusion Par leur violence les inondations de Nîmes ont permis une véritable prise de conscience sur la nécessité de lutter contre ce qui fut considéré comme « un phénomène apocalyptique ». De ce fait, des initiatives ont été prises pour éviter, ou tout du moins limiter, les risques de récidives. Des projets ont du être rejetés par soucis économiques et des créations moins onéreuses on été mise en place dans l’immédiat. C’est au fil du temps que des aménagements plus complexes ont abouti. Cependant, nous pouvons nous interroger sur les limites de ces différents dispositifs, puisque des inondations se sont reproduites (notamment le 9 septembre 2002 et le 8 septembre 2005). Malgré la prise de conscience et les travaux effectués, la ville de Nîmes reste prédisposée aux inondations. 6/7 Université de Rouen – Département de géographie - Eau & Environnement – LGO 19AB2 www.georouen.org Bibliographie VINET Freddy (2003) Crues et inondations dans la France méditerranéenne, Nantes, éd. Du temps, 224p. Direction de la communication (2008) Du PPCI au programme CADEREAU, http://www.nimes.fr/ France 3 (2008) Émission spéciale inondations du 3 octobre, 1988, http://ma-tvideo.france3.fr/ Dailymotion (1988) Il y a 20 ans, Nîmes sous les eaux (archives http://www.dailymotion.com/video/x6y6hg_il-y-a-20-ans-nimes-sous-les-eaux-a_news Sdis 30) Météo France, 3 octobre 1988 : Catastrophe de Nîmes http://www.languedoc-roussillon.ecologie.gouv.fr/ 7/7