Fiche Alain Fournier - Site de l`association des AET

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Fiche Alain Fournier - Site de l`association des AET
Alain Fournier
1947-2004
AU 59, AI 60-61
Alain Fournier, dit Camille, est né le 19 décembre 1947 à Tours (Indre-et-Loire)
et mort le 1er novembre 2004 à Paris, des suites d'un cancer. Son homonymie avec l’auteur du
Grand Meaulne était difficile à porter en littérature, il signera ses œuvres du nom A.D.G.,
initales de Alain Dreux Gallou, noms de famille de deux de ses grands-parents.
Il fera deux ans dans les écoles militaires préparatoires,
une première année (1959-1960) à Autun qui lui inspirera plus tard
un livre1 et une seconde (1960-1961) à Aix-en-Provence.
Avec son BEPC, il deviendra employé de banque,
bouquiniste, brocanteur puis journaliste, romancier, scénariste de
bandes dessinées.
Alain Fournier a surtout été connu pour ses romans de
série noire édités par Gallimard où il utilise parfois avec outrance
des expressions argotiques. Il y a affiché sans complexe, comme
dans ses chroniques, sa sensibilité d'extrême droite. En 1972, il
publie une chronique berrichonne, La Nuit des grands chiens
malades, portée au cinéma par Georges Lautner. Suivent Cradoque's Band, un hommage à
Louis-Ferdinand Céline puis les Trois Badours, publié sous le pseudonyme d'Alain Camille
(et depuis réédité sous le nom d'A.D.G.) et Berry story. En 1977, il imagine dans le Grand
Môme, le retour d'Augustin au pays perdu, hommage et parodie du chef-d'œuvre de son grand
aîné. En 1980, il écrit Pour venger pépère, un roman à suspense et, en 1981, il s'essaie à un
court récit de 100 pages, la Nuit myope, qualifié de « cent pour cent littéraire » par Jean
Cochet, qui serait une « sorte d'épopée dérisoire d'un rêveur velléitaire ».
En 1981, Alain Fournier – A.D.G. part s'installer en Nouvelle-Calédonie où il
connaît le succès à la sortie de son roman historique Le Grand Sud, consacré à la colonisation
de l'île. Par contre, d’autres romans policiers, où il attaque les indépendantistes canaques,
n’auront pas la qualité de ses œuvres précédentes. N’ayant plus d’inspiration, il retourne en
métropole en 1991. Il travaille pour le journal Minute qui le licenciera. Ce n’est qu’en 2003
qu’il écrit un nouveau roman policier se déroulant en Australie, Kangouroad movie. La
maladie le gagne et son dernier roman, J'ai déjà donné... aux Editions Le Dilettante, sort à
titre posthume en 2007.
Comme journaliste, Alain Fournier a travaillé dans les journaux suivants : Réveil
socialiste, Révolution 70, Actual-Hebdo, Minute, Combat calédonien, Rivarol, Le Figaro
littéraire.
A.D.G. a écrit des scénarios pour la bande dessinée, notamment dans Pilote, et
pour des feuilletons télévisés (Chéri Bibi adapté du roman de Gaston Leroux et diffusé 1973,
Les mystères de New York écrit en collaboration avec Jean-Pierre Richard et diffusé en 1976).
1
Itinéraire Adégesque
« Donc me voilà, pâle couillon, un matin d’octobre 1959, douze ans au dernier père Noël, qui prenait le train avec PapaMaman pour Autun dans la Saône et Loire, maintenant Soixante et Onze ! Le train, c’est une très chouette aventure et malgré
nos 75% de réduction comme famille nombreuse, on ne le prenait pas souvent. Content donc j’étais, jouissif pour tout dire,
avec ma petite valise en carton bouilli pleine de gâteaux, bombecs et chocolats.
On m’avait aussi payé une très belle trousse de toilette en simili cuir vert contenant de merveilleux ustensiles décorés de noir.
Je l’avais montrée à mes petits copains avant de partir. Ce qu’ils en bavaient ! Déjà je devenais le Dieu de gosses du coin.
Eux allaient rester à Tours, comme des couillons, tandis que moi, je courais vers la Gloire, la Guerre, l’Armée.
Le terme « enfant de troupe », s’il contient le mot enfant, s’est adjoint celui de « troupe », qui lui enlève de sa puérilité et lui
donne un ton guilleret et martial dont je ne me lassais pas ! J’aurais voulu leur dire à tous ces cons dans le train qui j’étais, ce
que je serai : d’abord sept ans dans cette école Militaire Préparatoire, puis peut-être Saint-Cyr et… les galons, le baptême du
feu… Quand je vous dis qu’à douze ans, on est cow-boy. »
Les œuvres d’Alain Fournier dit Camille et A.D.G.
1969 : Lettre ouverte à un magistraillon (Micberth, Illustrations de Bernard Deyriès).
1971 : la Divine Surprise (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1429, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 545)
1971 : les Panadeux (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1443, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 518)
1972 : la Marche Truque... (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1473, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 554)
1972 : la Nuit des grands chiens malades (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1482, rééd. en coll. « Carré
Noir », n° 197 sous le titre Quelques messieurs trop tranquilles, rééd. en coll. « Folio », n° 2224) – adapté au
cinéma sous le titre Quelques messieurs trop tranquilles
1972 : Cradoque's band (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1493, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 373)
1972 : les Trois Badours (Gallimard, coll. « Série Noire » n° 1544 , rééd. en coll. « Folio policier », n° 229) Pour la première édition, A.D.G. utilise le pseudonyme Alain Camille.
1973 : Berry Story (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1586)
1974 : Notre frère qui êtes odieux... (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1662, rééd. en coll. « Carré Noir », n°
566, rééd. en coll. « Folio policier », n° 171)
1974 : Je suis un roman noir (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1692, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 468)
1976 : L'otage est sans pitié (Gallimard, coll. « Super noire », n° 43)
1977 : le Grand Môme (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1717) – Titre qui était un hommage discret à son
homonyme Alain Fournier
1977 : Juste un rigolo (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1721, rééd. en coll. « Carré Noir », n° 506)
1980 : Pour venger pépère (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1806, rééd. en coll. « Folio policier », n° 153)
1980 : les Enquêtes de l'inspecteur Alfred Beaugat (Dargaud, coll. « Pilote ») – Scénario de textes d'A.D.G.,
dessins de Loro et North – Réunit : Une Aventure de l'inspecteur Alfred Beaugat, le Sale Grand Meaulnes,
l'Inspecteur Beaugat monte à Paris et Fripe-futaille contre Lèche-douzils
1981 : la Nuit myope (Balland, coll. « L'Instant romanesque », rééd. en 2003 chez Christian Durante, coll.
« Poche-numérique »)
1981 : Balles nègres (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1825)
1982 : On n'est pas des chiens (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 1862, rééd. en coll. « Folio policier », n° 189)
1987 : Joujoux sur le caillou (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 2089) « roman calédonien » de politiquefiction dédié à Jean-Marie Le Pen
1987 : le Grand Sud (Jean-Claude Lattès) roman d'aventures néo-calédonien
1988 : Les Billets Nickelés (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 2124)
1988 : C'est le bagne ! (Gallimard, coll. « Série Noire », n° 2134)
2003 : Kangouroad movie (Gallimard, coll. « la Noire ») thriller australien
2007 : J'ai déjà donné (Le Dilettante, 278pp)
La presse
Libération. Mercredi 03 novembre 2004
Mort d'un emmerdeur
CB007 | Lundi 26 mars 2007 à 23:31 |
L'auteur de polars, facho pour faire «chier», arrête les frais.
Par Bruno ICHER
«J'ai souvent entendu dire que le cancer est une maladie longue et
douloureuse. C'est surtout une maladie chiante», disait ADG à Libération
il y a un an tout juste. Le «foutu crabe» a finalement eu raison du
romancier, dans la nuit de lundi à mardi, à Paris. Né un 19 décembre
(comme Manchette) 1947, ADG était revenu sur la scène littéraire en
2003, avec Kangouroad Movie à La Noire (Gallimard), après un silence
de près de quinze ans. Les amateurs n'avaient pas oublié ce drôle de type
gouailleur, provocateur dans l'âme et le plus politiquement incorrect de
tous les auteurs de polars. Reporter à Minute, secrétaire général de
rédaction du Rivarol, ami intime de Le Pen et abonné aux fêtes Bleu-Blanc-Rouge, ADG
avait cessé d'être fréquentable au début des années 80. Auparavant, il avait été l'alter ego de
Jean-Patrick Manchette et l'un des principaux artisans du néopolar français.
Croquants Berrichons. C'est Roger Giroux, traducteur de Lawrence Durrell, qui le
découvre en 1971 et qui l'incite à publier son premier roman à la Série Noire, la Divine
surprise, à quelques semaines d'intervalle avec la sortie du premier Manchette, l'Affaire
N'Gustro. L'année suivante, trois romans signés ADG paraissent, toujours en Série Noire : la
Marche truque, les Panadeux et la Nuit des grands chiens malades, première incursion dans
l'univers rural de Touraine, son pays natal. L'irruption du roman noir dans les humides
contrées berrichonnes, où les personnages ne boivent pas du bourbon mais du montlouis, lui
vaut un succès immédiat. Son style aussi, en héritage direct des Simonin, Blondin, Malet et,
naturellement, Céline, fait merveille. L'année suivante, il publie Berry Story, la suite des
aventures des croquants Berrichons aux prises avec une communauté hippie. Dans la foulée, il
enchaîne avec un de ses probablement meilleurs romans, L'otage est sans pitié, où un
directeur de banque se séquestre lui-même pour cambrioler son établissement, et surtout Je
suis un roman noir, déambulation d'un auteur de roman policier rattrapé par la noirceur de son
univers.
Entre-temps, ADG aura eu le loisir de régler ses comptes avec ses racines dans le Grand
Môme, suite explicite du Grand Meaulnes d’Alain Fournier. Il faut dire que le vrai nom
d’ADG est Alain Fournier. Une preuve d’humour un peu particulière de ses parents (de
gauche) qui conduira le jeune Alain à, en premier lieu, prendre un pseudonyme (Alain Dreux
Galloux, initiales ADG), puis à s’engager comme enfant de troupe « pour les emmerder » et
enfin au FN.
Durant ces années prolixes, celui qui se définit lui-même comme «un réac pur et dur»
se forge une réputation d'infréquentable. Dans les années 80, brouillé avec la plupart de ses
amis de gauche, il pousse le bouchon jusqu'à se fâcher aussi avec ses amis d'extrême droite.
Après une engueulade homérique avec la quasi-totalité de la rédaction de Minute, il plaque
tout et part en Nouvelle-Calédonie en 1981, où il tombe amoureux à la fois du pays et d'une
jeune femme du coin. Là, il découvre le Far West. «Il y avait les cow-boys, les Indiens et
même le 7e de cavalerie...» De là-bas, il n'a aucun mal à vendre à son ami Louis Nucéra, alors
directeur de collection chez Lattès, un projet de saga de la Nouvelle-Calédonie, le Grand Sud.
Dès les premiers événements, il en abandonne l'écriture, après publication d'un premier tome,
pour créer un hebdomadaire anti-indépendantiste. Cet organe de presse douteux lui vaut la
haine de la moitié de l'île, et ses trois autres romans, pas très bons selon l'auteur lui-même, lui
ferment définitivement les portes des maisons d'édition parisiennes.
Colère. Il ne remet les pieds en métropole qu'en 1991. Un divorce douloureux en cours,
une dépression épaisse comme un ciel d'hiver en Touraine et, pour finir, le diagnostic d'un
cancer. S'il décide de se remettre à écrire, c'est sur un coup de colère. Quand Gallimard
célèbre le cinquantenaire de la Série Noire, il est l'un des rares à ne pas avoir été réédité. «Un
comble pour un gars qui est toujours resté fidèle à la collection.» Il se lance alors dans
Kangouroad Movie, périple australien poilant. «J'avais décidé de fabriquer une supercherie :
un polar australien que j'aurais découvert et traduit. Une fois le texte publié, j'aurais annoncé
que j'en étais l'auteur. Comme ça, pour les emmerder.»
Il y a un an tout juste, ADG parlait de se réacclimater à la France, de réapprendre son
écriture. Il parlait d'un prochain roman où il voulait faire mourir son premier héros, Sergueï
Djerbitskine, alias Machin : «Je me suis fâché avec l'ami dont je me suis inspiré pour le
personnage. Je lui réserve un chien de ma chienne. Pour l'emmerder.» Le roman ne verra
sans doute jamais le jour, mais la mort d'ADG nous emmerde bien.
La rédaction de cette fiche a été réalisée en particulier à l’aide des sites Internet Wikipedia, des Editions Le
Dilettante et de l’association Pour venger ADG.