Choix d`investissement et Perception des consommateurs

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Choix d`investissement et Perception des consommateurs
REPUBLIQUE FRANÇAISE
Département d’Economie et Sociologie Rurales
Unité de Grenoble
STRATEGIES PUBLIQUES DE GESTION DES RISQUES ET CHOIX STRATEGIQUES
D’INVESTISSEMENT :
HORIZON D’ENGAGEMENT DES OPERATEURS ET PERCEPTION DES CONSOMMATEURS
DANS LE SECTEUR DE LA PRODUCTION D’OGM
Thierry HOMMEL ; Michel TROMMETTER
Document de travail ; 2002-06
- 2002 -
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Stratégies publiques de gestion des risques et choix stratégiques d’investissement
Horizon d’engagement des opérateurs et perception des consommateurs dans le
secteur de la production d’OGM
Thierry Hommel, Michel Trommetter1
RESUME
D’une manière générale, l’analyse économique des choix d’investissement inter
temporels réalisés par une entreprise se donne pour objectif de déterminer, en fonction des
contraintes pesant sur le déploiement de l’activité, un rythme optimal d’investissement. Inscrit
dans cette problématique générale d’investissements inter périodiques, l’article s’interroge
spécifiquement sur la programmation séquentielle d’investissements en univers de décision
incertain ; l’incertitude considérée est relative au choix des mécanismes de gestion publique
des risques environnementaux et sanitaires que l’on pourrait imputer aux produits issus de ces
investissements, voire aux investissements eux-mêmes. Pour rendre compte de cette
incertitude sur la valeur du projet, le modèle considère une variable aléatoire dite de
« perception sociale de l’investissement ». Cette variable peut peser sur les choix publiques de
gestion des risques, sur les choix opérés par l’entreprise et les pouvoirs publics ; elle peut
ainsi remettre en cause la programmation d’investissement retenue ex ante par les décideurs in
extenso, et jouer sur le surplus final que le consommateur retire de l’innovation. L’analyse
sera conduite pour rendre compte de la situation rencontrée par un entrepreneur qui engage un
projet d’investissement visant à assurer la production d’organismes génétiquement modifiés
(OGM).
Thierry Hommel est docteur en économie et travaille au laboratoire d’économétrie de l’Ecole Polytechnique,
Michel Trommetter est chercheur à l’INRA SERD de Grenoble
Couriels : [email protected] ; [email protected]
2
Choix d’investissement et perception des consommateurs
3
Choix d’investissement et perception des consommateurs
INTRODUCTION:
D’une façon générale, la théorie standard de l’investissement en situation d’incertitude
sur la valeur finale du projet s’est développée autour de deux concepts, la valeur actuelle nette
(VAN), puis la valeur d’option (VO) (Henry, 1974 ; Arrow&Fisher, 1974). L’analyse cherche
à évaluer le niveau de risque corrélatif au projet d’investissement ; dans le cadre d’une
analyse de choix d’investissement s’intégrant dans une problématique d’innovation, nous
choisissons de décomposer les caractéristiques du risque pesant sur le projet d’investissement.
Cette décomposition retient deux catégories de variables critiques à même de peser sur la
valeur finale du projet ; la première renvoie directement au problème classique
d’investissement caractérisé par l’analyse économique : au moment d’engager le projet, les
opérateurs ne possèdent pas une information parfaite sur leur capacité à atteindre la valeur
espérée calculée de l’innovation. D’une manière générale, la situation analysée par la théorie
économique de la décision est en effet la suivante : l’information à laquelle les décideurs
publics (les gestionnaires du risque) et privés (les investisseurs) accèdent est croissante le
long des périodes de décision, l’acquisition de l’information s’effectuant de façon progressive
selon un processus d’apprentissage bayésien. Intégrée à une problématique d’investissement,
l’incertitude rencontrée s’associe à un phénomène d’irréversibilité potentielle des décisions
rendues ; l’un des risques rencontrés par un investisseur cherchant à innover réside dans
l’engagement d’actifs spécifiques, par définition vecteurs de coûts irrécupérables, et qui ne
peuvent être redéployés sans coûts par la firme ; l’engagement d’actifs spécifiques constitue
un signal fort d’engagement sur un marché, à tel point qu’il est souvent considéré comme
irréversible sur un horizon donné (Baumol et al., 1982). La croissance de l’information
permet de calculer le timing optimal de l’action – faut-il investir ou attendre ? - et le rythme
optimal d’investissement – faut-il tout investir sur une période ou « séquentialiser »
l’investissement ?
Tout autre est le problème rencontré par l’investisseur dès lors qu’une nouvelle forme
d’incertitude, sur laquelle l’information n’est pas croissante le long des périodes de décision,
vient seconder la première (Trommetter, 1993). C’est cette problématique que l’article entend
intégrer. Les firmes y ont la possibilité d’investir dans des actifs spécifiques visant à produire
des organismes génétiquement modifiés (OGM), dans un contexte de double incertitude ;
1. la première concerne « la faisabilité technique du projet » ; plus cette faisabilité est élevée,
plus les coûts de production d’une semence s’abaissent et plus la rentabilité espérée du
4
Choix d’investissement et perception des consommateurs
projet est élevée ; sur cette incertitude, les décideurs apprennent au cours des séquences
d’investissement selon un processus bayésien ;
2. la seconde concerne le niveau d’acceptation du projet par les consommateurs ; ce niveau
d’acceptation dépend de la perception des risques que les consommateurs ont des produits
transgéniques développés et/ou des technologies utilisées à cet effet. Concernant
l’apprentissage2 sur l’incertitude relative à l’acceptation des choix réalisés par la firme par
les « consommateurs »3, il n’existe pas de signaux exogènes enclins à améliorer la
structure d’information du décideur ; la seule information dont il dispose tout au long du
jeu est la possibilité de réalisation de l’événement; nous rendons ainsi opératoire
l’hypothèse suivante : pour chaque période d’investissement, la firme peut être affectée
par un phénomène de contestation qu’elle n’avait initialement pas prévue. En d’autres
terme, dès l’engagement du projet, la réalisation de cet événement est une potentialité
dont la réalisation est considérée possible, même si sa fréquence de réalisation et les dates
d’occurrence restent inconnues. Nous représenterons cette incertitude à l’aide d’une loi de
sur les évènements rares.
En
décomposant
l’incertitude
selon
une
approche
« lancastérienne »
(Richard&Trommetter, 1999 ; Richard&Trommetter, 2001), nous proposons donc une
approche originale de la situation rencontrée par un opérateur bénéficiant d’une information
« partiellement croissante » (Bancel&Richard, 1995) sur les risques pesant sur son projet
d’investissement. L’article sera ainsi construit autour de trois sections ; la première (1.)
apporte des précisions quant au phénomène de contestation, permettant ainsi d’expliquer
pourquoi ce risque peut être vu comme un événement aléatoire rare ; la seconde (2.) présente
le modèle de choix d’investissement en information « partiellement croissante », et montre
comment la réalisation de cet événement aléatoire, à valeur sociale de l’innovation supposée
constante, fait varier la décision d'investissement du sélectionneur, selon la date de réalisation
de cet événement et les modèles de comportement des consommateurs et de l'Etat.
2
Dans la stylisation, l’apprentissage des agents sur la faisabilité technique en t est lié à un choix
d’investissement réalisé en t-1. L’incertitude quant à elle reste exogène et concerne la capacité de la firme à
réaliser l’innovation.
3
Le terme consommateur doit être compris au sens large et désignent l’ensemble des utilisateurs potentiels des
semences transgéniques (agriculteur, industrie agroalimentaire, distributeurs et le consommateur final).
5
Choix d’investissement et perception des consommateurs
1.
L’ACCEPTABILITE SOCIALE DE L’INNOVATION
Dans cet article, nous considérons en suivant Hommel (2001) que l’acceptabilité
sociale des choix réalisés par les firmes industrielle est une variable stratégique susceptible de
peser sur la rentabilité du projet d’investissement. Cette acceptabilité se construit autour de la
représentation des risques environnementaux et sanitaires avérés et potentiels adoptée par les
consommateurs et qu’ils imputent au projet d’investissement. Dans une conception standard,
cette représentation des risques est calée sur l’obtention de connaissances sur le seul « niveau
de risque réel » ; cette connaissance s’affine via les programmes d’expertise des risques
mandatés par la puissance publique. A cette conception standard, nous préférons une
conception selon laquelle le niveau du risque perçu et le niveau de risque réel peuvent
diverger. Ainsi dans l’heuristique qualitative que certains chercheurs en psychologie
attribuent au grand public, ce ne sont plus les seules probabilités d’occurrence, mais la
« nature » des dangers qui en déterminent l’acceptabilité (Slovic, 1987) et qui oriente de la
sorte l’intérêt collectif de la prise de risque. D’une manière générale, l’heuristique4
d’évaluation attribuée dans cet article aux consommateurs dépendrait de la qualité du danger
(cf. encadré)
encadré 1 : les attributs du risque pertinent pour son acceptabilité
•
•
•
•
caractère volontaire ou subi de l’exposition,
caractère connu ou inconnu,
l’immédiateté ou non des conséquences du danger,
caractère juste ou injuste de l’exposition, qui dépend du nombre d’agents exposés, et
de l’exposition des générateurs du risque,
• le potentiel catastrophique,
• la confiance dans l’évaluation du risque pratiquée par les experts ;
Si l’on applique cette heuristique aux risques potentiels attachés au développement des
OGM, les risques encourus sont susceptibles de devenir inacceptables. En effet:
•
les collectifs opposés à l’introduction des OGM en agriculture ne se reconnaissent pas
dans l’action des pouvoirs publics, plus enclins à organiser l’expertise sur une base
quantitative, ignorant les distinctions qualitatives qui importent au public (Joly et al.,
2000) ;
4
Une heuristique est une méthode de recherche (ou d’analyse) fondée sur l’approche progressive et multicritère
d’un problème donné.
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
•
les risques sont largement incertains ;
•
les conséquences des dangers craints pour l’environnement sont placées sur le long terme,
de telle façon qu’ils apparaissent peu connaissables ;
•
le potentiel catastrophique attribué aux dangers n’est pas négligeable ; il est question
d’une modification en profondeur des écosystèmes : d'une manière générale, si les
entreprises introduisent des gènes de résistance à leur propre herbicide dans des espèces
végétales naturellement envahissantes comme le colza (flux de pollen), le risque de
produire des lignées résistantes à tous les herbicides connus ne peut être totalement écarté
(Noiville et Gouyon, 2000). En sus, si des gènes de résistance à tous les herbicides connus
sont introduits dans toutes les plantes cultivées, la gestion des assolements doit être
planifiée afin d’éviter les phénomènes de multirésistances qui interdisent tout espoir de
lutte chimique contre les populations végétales contaminées (Commissariat général du
Plan, 2001).
•
les dangers en cause exposent l’ensemble de la société civile et les générations futures, et
pas seulement les générateurs de risques, ce qui soulève immanquablement de justice dans
la distribution du risque : les collectifs contestataires insinuent que seuls les motifs
économiques sont à l’origine de la volonté des industriels d’imposer leurs produits au
mépris des demandes de l’opinion. Alors que ces firmes récusent l’accusation selon
laquelle ces lignées transgéniques sont porteuses de dangers spécifiques, les sociétés
d’assurances indiquent délibérément qu’elles refusent de s’engager dans l’assurance des
OGM (Flicoteaux, 1999 ; FFSA, 2000). Qui croire dans une telle situation ?
•
les risques potentiels en cause apparaissent en tout état de cause comme subis par les
consommateurs et le public. L’absence de dimension comparative de l’expertise identifie
en sus des risques qui sont attribués aux seuls produits transgéniques (Chupeau et
Tubiana, 1999) : ainsi, aucun avantage ne semble compenser ces risques ; les avantages
sanitaires et environnementaux sont invoqués par les seules firmes, ce qui les rend sujets à
caution ;
Les firmes savent que les « consommateurs » évaluent les risques à partir d’une
heuristique qui ne correspond pas à la métrique quantitative utilisée par les experts. Les
résultats des évaluations menées dans le cadre de l’expertise scientifique et les représentations
citoyennes concernant l’innovation peuvent ainsi diverger ; alors que les séquences
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
d’investissement sont clairement établies, les réactions des consommateurs peuvent intervenir
à n’importe quel moment5. Une condition nécessaire à la réalisation de cet événement est
l’accès
des
consommateurs
aux
informations
sur
l’existence
d’un
programme
d’investissement. D’une manière générale, les textes réglementaires européens relatif à la
production d’OGM et la médiatisation forte de cette innovation technique nous permettent de
soutenir l’hypothèse selon laquelle cette condition d’accès à l’information est désormais
réalisée (Hommel et Godard, 2002).
2.
LE MODELE
2.1
Hypothèses
Dans le modèle à deux périodes, on considère un agent économique qui effectue un
investissement de recherche au cours de la première période et qui commercialise
éventuellement en seconde période. Concernant la période de recherche, la séquence
d’investissement dure T. Le coût annuel de ces investissements fixes et irrécupérables est de
C1.
L’analyse classique des choix d’investissement en avenir incertain et information croissante
(Bancel-Richard 1995), repose sur le fait que l’agent économique doit composer avec “ un ”
événement incertain. Traduit dans notre problématique où la recherche est pré-financée par
des levées de capitaux externes ; ce préfinancement suppose que la firme ait évalué en t= 0
ses “ chances de succès ” qui dépendent de la possibilité de réalisation d’un risque
environnemental et sanitaire. Ce risque est évalué à partir des méthodes d’expertises
quantitatives, qui livrent à la firme les probabilités suivantes :
•
p est la probabilité qu’il n’y ait pas de risque environnemental et sanitaire ce qui
conduit, en cas de réalisation effective de cet état de la nature (noté R1), à la
commercialisation du nouveau produit par la firme. Après la période de recherche,
le produit peut être mis sur le marché : il génère alors un profit π jusqu’à l’infini.
5
Sur la possibilité de se trouver en situation de controverse sociale sur une innovation, voir Joly et al. (2000), et
Hommel (2001).
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
•
1-p est la probabilité qu’il y ait un risque environnemental et sanitaire. Si cet état de
la nature (noté R2) est effectivement réalisé en T (information parfaite) cela conduit
à l’arrêt du programme, donc à la perte des sommes investies (T C1).
Dans notre modèle le risque est composé de différentes caractéristiques. On parlera
désormais d’incertitude pour la contestation (caractéristique 1 du “ risque ”), et de niveau de
risque pour les propriétés environnementales et sanitaires des investissements (caractéristique
2 du “ risque ”). Par rapport au modèle standard, la finesse de la structure d’information sur le
risque environnementale et sanitaire va dépendre de la date d’occurrence x de la contestation
par les consommateurs des choix d’investissements réalisés par la firme. Ce processus de
contestation est représenté par une loi de poisson de paramètre λ, où 1/λ est la date moyenne
anticipée par la firme de la contestation des consommateurs. Concernant cette occurrence de
la contestation, deux cas sont possibles :
•
la contestation s’effectue après T ; cela signifie que l’état de la nature R1 s’est
réalisé. La contestation conduit à la mise en place d’un “ moratoire ” d’une durée X
sur la commercialisation du produit. Dans cette situation, le profit π est réalisé sur
[T, x], puis sur [x+X, +∞[. Durant le moratoire, un coût C2 correspondant à la
communication auprès des consommateurs sera pris en charge soit par la firme, soit
par l’Etat, selon le coût d’opportunité social de l’arrêt de la production de l’OGM ;
•
la contestation s’effectue pendant la phase de recherche [0 ; T] ; dans cette situation,
si la contestation se réalise en x (x<T), l’entreprise n’est pas dans une situation
d’information parfaite sur le risque environnemental et sanitaire. Elle doit donc
procéder à la date x à l’analyse les risques environnementaux et sanitaires. Cela
consiste à affiner la structure d’information en x, ce qui nous permet de construire
une matrice d’information partiellement croissante en x (tableau 1). Dans cette
situation, la contestation conduit, comme précédemment à la mise en place d’un
moratoire d’une durée de X années.
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
Tableau 1 : Matrice de probabilité en x
•
Non Risque en T
Risque en T
Non Risque en X
p11
p12
Σ = p1.
Risque en X
p21
p22
Σ = p2.
Σ = p.1
Σ = p.2
Σ=1
dans cette matrice, pij (avec i et j=1, 2) est la probabilité d’être dans l’état j en T sachant
que l’on est dans l’état i en x ;
•
la somme Σ = p.1 est égale à la probabilité p de non risque en T si le consommateur n’a
pas réagit avant T, et la somme Σ = p.2 est égale à la probabilité 1-p du risque en T si le
consommateur n’a pas réagit avant T ;
•
par hypothèse, on considère que x+X> T, ∀ x ∈ [0, T[. Dans le cas contraire, le moratoire
n’aurait aucun effet si la contestation se réalise avant T ;
•
par hypothèse, on a une discontinuité dans les probabilités si l’événement apparaît en T-ε
ou en T. Pour éliminer cette discontinuité, on devrait supposer que la matrice des
probabilités partielles est fonction de la date d’apparition de la contestation pour x∈[0,T].
•
du fait de la contestation, les coûts C1 seront prolongés sur x+X-T années ;
•
l’information de la firme sur le risque environnemental et sanitaire devient parfaite en
x+X ;
•
en cas de risque avéré en x+X, alors que l’état de la nature indiquait la présence d’un
risque en x, la firme, en plus de ses pertes liées à l’investissement, subi un effet
réputation qui lui coûte C3. Le coûts C3 est dépendant du fait que la firme n’a pas
suffisamment pris en compte l’information partielle dont elle disposait sur la réussite du
projet ;
•
en cas de risque avéré en x+X, alors que l’état de la nature n’indiquait pas la présence
d’un risque en x, la firme arrête le projet, mis ses pertes restent simplement liées à
l’investissement. Elle ne subit pas d’effet réputation, car elle s’est confortée à
l’information dont elle disposait en x ;
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
•
en cas d’absence de risque avéré en x+X, alors quel que soit alors que soit l’état réalisé en
x, la firme réalise des profits π sur l’intervalle[x+X, ∞[ ;
Les figures 1 et 2 assurent une représentation graphiques des hypothèses précitées :
Figure 1 : arbre de décision si la contestation apparaît avant la fin de la recherche (T)
Occurrence
contestation
Information probabilités
Partielle
conditionnelles
options de
seconde période
Poursuite
λ dt
p11
Arrêt
p12
Arrêt
p21
Poursuite
p1.
p2.
Arrêt
p22
Arrêt
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Choix d’investissement et perception des consommateurs
Figure 2 : arbre de décision lorsque la contestation apparaît après la fin de la recherche
Décision
incertitude
décision
occurrence de
La contestation
Décision
λ dt
Poursuite
Poursuite
P
Arrêt
Arrêt
1-p
2.2
0.
Arrêt
Résolution
Modèles de référence
•
En l'absence d'incertitude sur la contestation, le modèle d'investissement est donné
par :
T
∞
0
T
V 0 = ∫ − C1× e − rt dt + p × ∫ π × e − rt dt
Le critère d'investissement est donc simple, on investit dans une recherche sur les OGM si
et seulement si :
π 0* ≥ C1 ×
•
e − rT − 1
p × e − rT
ou si l’on raisonne sur les probabilités p ≥
C1(e − r t − 1)
π e−r
t
En cas de contestation possible le modèle général est donné par :
T
∞
x
p
 x + X
V (λ , X ) = ∫ λ × e −λx ×  ∫ − C1× e − rt dt + p1• Max 11 ×  ∫ − C1× e − rt dt + ∫ π × e − rt dt
 p1• 
0
x+ X
0
 x



 p12  x + X

×  ∫ − C1× e − rt dt  ; 0  +
+

 p1•  x



 p 22  x + X

×  ∫ − C1× e − rt dt − C 3 ; 0  dx +
+

 p 2•  x


x+ X
∞
∞
T
x

− λx
− rt
 π × e − rt dt + − C 2 × e − rt dt + π × e − rt dt ; 0 dx
×
×
−
×
+
1
e
C
e
dt
p
Max
λ

∫
∫
∫
∫
∫

 0
T
x
x+ X
T

∞
p
 x + X
p 2• Max 21 ×  ∫ − C1× e − rt dt + ∫ π × e − rt dt
 p 2• 
x+ X
 x

12
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Le modèle de l'investisseur est à présent plus complexe puisque l'on suppose que
l'existence d'une contestation peut obliger le décideur à annoncer s'il poursuit ou non ses
recherches sur les OGM en fonction d'une information partielle sur les risques
environnementaux et sanitaires, si la contestation apparaît avant la fin de la recherche.
Si l'on note les trois éléments intervenant dans la Maximisation de l'espérance d'utilité de
la fonction précédente :
A=
B=
p11
p1•

×

x+ X
− rt
∫ − C1× e dt +
x
 p12  x + X

− rt
×
e
dt
×  ∫ − C1× e − rt dt 
π
+
∫
 p1•  x

x+ X
∞
∞
p 21  x + X
×  ∫ − C1× e − rt dt + ∫ π × e − rt dt
p 2•  x
x+ X
 p 22  x + X

×  ∫ − C1× e − rt dt − C 3
+
 p 2•  x

x
x+ X
∞
T
x
x+ X
C= ∫ π × e − rt dt + ∫ − C 2 × e − rt dt + ∫ π × e − rt dt
On peut, alors, à la fois analyser le modèle de comportement de la firme et les
conséquences en terme de politiques publiques.
2.2.1. Analyse du comportement de la firme selon les différents cas proposés
Pour l’entreprise privée, le choix de se lancer dans une recherche sur les OGM va
dépendre du calcul de son utilité espérée ; celle-ci dépendra elle-même des différents critères
de maximisation qui dépendent des valeurs de A, B, et C et donc :
•
des durées de l’engagement en recherche selon les anticipation sur les risques sanitaire et
environnementaux, et
•
de l’apparition d’une contestation et des informations partiellement croissantes.
On a ainsi identifié 6 cas possibles :
1. A<0, B<0 et C<0
T
x

V0 (λ , X ) = ∫ λ × e− λx  ∫ − C1 × e− rt dt  dx +
0
 0

∞
∫λ ×e
T
− λx
T

×  ∫ − C1 × e − rt dt dx
 0

13
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Dans ce cas le projet est abandonné dès le départ du fait des mauvaises anticipations sur les
bénéfices nets quels que soient les états de la nature réalisés. Il n’existe pas de point mort π1*
2. A<0, B<0 et C>0
T
x

V1 (λ , X ) = ∫ λ × e − λx  ∫ − C1 × e − rt dt dx +
0
 0

∞
∫λ ×e
T
− λx
∞
x+ X
T
x
×  ∫ − C1 × e− rt dt + p  ∫ π × e − rt dt + ∫ − C 2 × e− rt dt + ∫ π × e − rt dt

x+ X
x
T
 0

dx


Dans ce cas, le projet est stoppé dès que la contestation des consommateurs est avérée
si elle apparaît avant que la recherche ne soit menée à terme (T), par contre le projet se
poursuit même s'il y a contestation après T. Le projet sera mis en place si et seulement si
π>π2* point mort de cet arbitrage.
3. A>0, B<0 et C>0
∞
T
x
p
 x + X
 p
 x + X
 
V 2 (λ , X ) = ∫ λ × e −λx ×  ∫ − C1× e − rt dt + p1•  11 ×  ∫ − C1× e − rt dt + ∫ π × e − rt dt  + 12 ×  ∫ − C1× e − rt dt  dx +
 p1• 
0
 p1•  x
 
0
x+ X
 x


x+ X
∞
∞
T

x
− λx
− rt
− rt
− rt
− rt
∫ λ × e ×  ∫ − C1× e dt + p  ∫ π × e dt + ∫ − C 2 × e dt + ∫ π × e dt dx
T
x
x+ X

T
0
Dans ce cas, le projet est arrêté dès que la contestation des consommateurs est avérée si elle
apparaît avant que la recherche ne soit menée à terme (T) et si l'information partielle sur les
risques environnementaux et sanitaire des OGM est négative. Par contre le projet se poursuit
dans les autres cas. Le projet sera mis en place si et seulement si π>π3* point mort de cet
arbitrage.
4. A>0, B>0, et C<0
x
T

V (λ , X ) = ∫ λ × e − λx ×  ∫ − C1 × e − rt dt + p 
1 •

0

0
p


2 •

p
p
21
2
x X
p
∞
rt
rt
11  +
×  ∫ − C1 × e − dt + ∫ π × e − dt
p
x+ X
1 •  x
∞
 x + X
rt
rt
×  ∫ − C1 × e − dt + ∫ π × e − dt
 x
x X

+

x X
p
rt 
12  +
×  ∫ − C1 × e − dt 
p

1 •  x

+


T
∞
 p22  x + X
 
x 
rt 
rt
×  ∫ − C1 × e − dt − C 3  dx + ∫ λ × e − λ ×  ∫ − C1 × e − dt dx
+

 p2
 x
 
 0

T
14
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Dans ce cas, il y aura arrêt du projet uniquement si la contestation apparaît après la recherche
T. Dans ce contexte, le projet sera accepter si et seulement si : π>π4* point mort de cet
arbitrage
5. A>0, B<0, et C<0
∞
T
x
 p x + X

 p x + X
V (λ, X ) = ∫ λ ×e−λx × ∫ − C1×e− rt dt + p1•  11 ×  ∫ − C1×e−rt dt + ∫ π ×e−rt dt  + 12 ×  ∫ − C1×e−rt dt  ]dx+


x+ X
0

 p1•  x
 p1•  x
 0
∞

T
+ ∫ λ ×e−λx × ∫ − C1×e−rt dtdx
T

0
Dans ce cas, le projet est arrêté dès que la contestation des consommateurs est avérée et que
les deux conditions suivantes sont réunies : la contestation apparaît avant que la recherche ne
soit menée à terme (T) et l'information partielle sur les risques environnementaux et sanitaire
des OGM est négative. Dans les autres cas, le projet se poursuit. Il y aura alors arrêt du projet
uniquement si la contestation apparaît après la recherche T. Dans ce contexte, le projet sera
accepter si et seulement si : π>π5* point mort de cet arbitrage
6. A > 0, B > 0, C > 0
T
∞
x
p
 x + X
V (λ , X ) = ∫ λ × e − λx ×  ∫ − C1 × e − rt dt + p1•  11 ×  ∫ − C1 × e − rt dt + ∫ π × e − rt dt
 p1• 
0
x+ X
0
 x


 p12  x + X

×  ∫ − C1 × e − rt dt 
+
 p1•  x


+


∞
p
 
 x + X
 x + X
 p
p2•  21 ×  ∫ − C1 × e − rt dt + ∫ π × e− rt dt  + 22 ×  ∫ − C1 × e− rt dt − C 3  dx +
 p2• 
 
 p2•  x
x+ X
 x

∞
∫λ ×e
T
− λx
∞
x+ X
T
x
×  ∫ − C1 × e− rt dt + p  ∫ π × e − rt dt + ∫ − C 2 × e− rt dt + ∫ π × e− rt dt

x
x+ X
T
 0

dx


Dans ce cas, on n'arrête jamais le projet. On acceptera donc de mettre en place le projet si et
seulement si π>π6* point mort de cet arbitrage.
15
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Le comportement de la firme dépendra donc des anticipations de profits et de leur hiérarchie
par rapport aux points morts de la décision.
La firme décidera de mettre en place un programme de R&D sur les OGM, en fonction des
coûts et des bénéfices attendus, i.e. une des six configurations proposées précédemment.
Ainsi, la décision de lancer une recherche sur des variétés OGM sera prise si et seulement si
ses profits anticipés π sont supérieurs aux points morts définis préalablement sachant que :
π2*>π3*>π6*>π0* par contre on ne peut pas classer par rapport à π4* et π5*, sauf à dire que
π4*<π5*.
2.2.2. Les conditions de réalisation des différentes options
Dans ce contexte décisionnel, on peut implicitement faire en sorte que l’investisseur
anticipe le modèle de comportement des pouvoirs publics, conscients par exemple des enjeux
environnementaux, et soucieux de mettre en place une approche en terme de Principe de
Précaution et de maximisation du bien être social. Dans ce contexte, nous voyons que s’il y a
risque certain avéré , i.e. si la recherche va à son terme T et si l’état défavorable est réalisé,
alors l’entreprise stoppe tout développement de son innovation, le coût de la poursuite étant
supérieur au coût d’opportunité de l’arrêt. En effet, l’entreprise sait que l’Etat aura à cœur
d’intervenir dans la décision et donc de faire payer le responsable (Principe Pollueur Payeur,
taxes, etc.). Les cas qui nous intéresserons le plus seront ceux où la contestation se produit
avant la fin de la recherche obligeant la firme à prendre sa décision de poursuite ou d’arrêt en
information partiellement croissante. Dans ces cas, les variables qui vont influer sur la prise
de décision des entreprises sont : C1, C2, C3 et X [modification des points morts de la
décision du modèle de comportement des entreprises, selon leur niveau et de la possibilité
d’endogénéïser certaines variables, (Richard – Trommetter 2001)] qui sont des variables sur
lesquelles les pouvoirs publics peuvent intervenir par la réglementation. Ainsi, on peut
montrer que des décisions d’investissement peuvent être inversées, avec une analyse sur les
valeurs relatives de C1, C2 et C3 et X:
α. Pour que A<0, ce qui implique automatiquement que B <0, on a :
C1 ≥
− p11e − r ( x + X )
− p11 e − rX
=
π
π = C1 *
( p11 + p12 )(e − r ( x + X ) − e − rx )
( p11 + p12 )(e − rX − 1)
16
Choix d’investissement et perception des consommateurs
C1* est fonction décroissante de X, plus le moratoire est long et moins les coûts de recherche
ont besoin d’être important pour que l’on arrête la recherche en cas de contestation avant T.
β. Pour que A>0 et B<0
C3 ≥
p21 π e -r(x + X) + C1(e − r ( x + X ) − e − rx )( p21 + p22 )
= C 3 * qui est une fonction décroissante de
p22
x sur l’intervalle [0,T] et de X
γ.
Enfin pour que C <0 on a :
C2 ≥
e − rT + e − r ( x + X ) − e − rx
e − r ( x + X ) − e − rx
π = C 2 * , pour x∈]T, +∞]
Dans ce contexte, si l'état cherche à minimiser les risques liés aux recherches sur les OGM, il
possède une panoplie d'outils qui vont principalement avoir un impact sur les coûts de
l'entreprise :
•
L'Etat ne peut pas vraiment intervenir sur C1, excepté une modification de la
législation qui modifierait les étapes de déconfinement, i.e. en augmentant T ou par
une modification de la durée du moratoire X, donc un rallongement du délai de
recherche. Une telle décision prise unilatéralement par un pays pourrait se révéler
anticoncurrentielle en cas de non risque (rallongement inutile) et conduire à la
délocalisation des recherches vers des pays moins contraignants, d’où le protocole
Biosécurité pour que les pays les moins contraignants le fasse en “ connaissance de
cause ”. La valeur C1* est indépendante de la date d’apparition de la contestation et
conduit à l’arrêt du projet dès qu’il y a contestation avant la fin de la recherche T
sans prendre en compte l’information partiellement croissante. Dans ce cadre le
Principe de Précaution, quelle que soit la version du principe considérée6
6
Dans son acception abstentionniste, le principe de précaution est compris comme un principe invitant à ne pas
autoriser une technique ou une activité tant qu’on ne dispose pas des preuves de leur innocuité. Ainsi, sous ce
jour, le principe de précaution prolonge paradoxalement la justification positiviste de l’action et conduit, dans
une situation d’incertitude sur la dangerosité, à une politique d’abstention (Godard, 1997). Dans son acception
proportionnée, le principe de précaution est censé guider l’action des pouvoirs publics face à des risques graves
et/ou potentiellement irréversibles. Son application impose alors aux autorité le respect de procédures et de
17
Choix d’investissement et perception des consommateurs
(abstentionniste ou proportionnée) n’est pas vraiment appliqué, puisque les solutions
proposées par les scientifiques, même si elles restent partielles ne sont pas intégrées
dans la prise de décision. Dans ce contexte, le principe appliqué est un principe de
décision qui ne fonde pas sa décision de poursuite ou d’arrêt en cas de contestation
sur les connaissances scientifiques du moment. Il n’est pas un principe de précaution
proportioné, ni même un principe de précaution pris dans son acception positiviste.
•
Par contre si l'Etat a un vrai souci de précaution proportionnée, il devra intervenir
pour que les recherches stoppent en cas d'informations partielles négatives sur le
projet de l'entreprise état de la nature de probabilité p1•). Dans ce cadre, il pourra
intervenir sur X (augmenter la durée du moratoire) ou sur C3, pour que le modèle
passe par exemple du cas VI, poursuite du projet quelle que soit l’information
partielle, au cas III arrêt de la recherche en cas d’information partielle négative pour
les OGM. Pour modifier la décision de poursuite ou d’arrêt, l’Etat doit augmenter le
coût C3. Pour ce faire, l'Etat pourra par exemple imposer une responsabilité de
l'entreprise en cas de risque et l'obliger à payer les coûts de dépollution (Principe
Pollueur Payeur). Ainsi, le coût C3 serait à la fois lié à la perte de réputation de
l'entreprise et à l'intervention publique. Pour fixer le montant de ce coût
supplémentaire pour la firme, la firme anticipe que l’Etat va le calculer de manière à
s’assurer de l’arrêt du programme quelque soit x. Cela risque de conduire à refuser
des projets potentiellement efficaces économiquement. Une autre option serait de
contraindre le niveau de la taxe à la date de contestation, ce qui revient à
endogénéïser le montant demandé à l’entreprise en cas de risque environnemental et
sanitaire.
•
Si la recherche est aboutie et que la contestation des consommateurs survient ensuite
(x>T), alors dans un souci de maximisation du bien être social, dans le cas où les
OGM seraient à la fois économiquement efficace et sans risque (hypothèse que nous
pourrons relever par la suite, mais qui ne fera qu’accentuer le coût pour l’entreprise,
il faut limiter les effets de C2, puisque la contestation est plus liée à un phénomène
de manque d’information que de réalité sociale. En effet, un C2 trop élevé peut être
considéré comme socialement irrationnel et donc devra être partiellement ou
règles méthodologiques comme la cohérence, la proportionnalité et le choix de mesures réversibles déployées
après comparaison (Godard, 1997 ; Belvèze, 1999 ; Commission européenne, 2000 ; Kourilky et Viney, 2000).
18
Choix d’investissement et perception des consommateurs
totalement pris en charge par l'Etat, pour assurer la continuité de l'exploitation des
OGM.
Dans ce contexte, nous supposons que la firme va anticiper que l’occurrence de la
contestation des consommateurs avant la fin de la recherche va conduire l’Etat à mettre en
place un Principe de Précaution proportionné (obligeant la firme à modifier les conditions de
sa recherche en cas d’information partielle défavorable) et non pas un principe de décision
déconnecté des connaissances scientifiques et imposerait l’arrêt des recherches uniquement du
fait de la contestation, ce qui a priori ne serait pas un comportement socialement optimal.
2.3. Choix de l’entreprise et PP
Dans un objectif didactique, nous allons à présent étudier le cas le plus simple pour
l’entreprise, i.e. il n’y a pas de coûts pour l’entreprise si la contestation intervient après T
(élimination des conditions sur π4* et π5*). Nous allons analyser les conditions pour qu’une
entreprise qui n’a pas anticipé les risques à la fois de la mise en œuvre d’une contestation par
les usagers de l’innovation et d’autre part la mise en œuvre d’un principe de précaution
conforme à ce que l’on peut en attendre de la part des décideurs publics.
L’entreprise choisira son investissement dans la technologie, si et seulement si la valeur de
ses profits attendus sont dans l’intervalle de confiance qui dépend de la réaction des
consommateurs et des Etats : π2*>π3*>π6*>π0*.
Dans ce contexte, nous avons vu que l’entreprise mettra en place un projet de recherche sur
les OGM selon ses anticipations sur la réaction des consommateurs et de l’Etat face à cette
réaction. Si l’entreprise anticipe une absence complète de réaction ou marginale, on sera dans
les cas 6 et 0, dans lesquels la recherche est favorisée mais où les conditions de participation
sont déjà plus limitées pour l’entreprise. Le simple fait de considérer une possible contestation
et une réaction de l’état conduit à réduire l’intervalle dans lequel on décide d’engager la
recherche.
Le risque pour l’entreprise est d’avoir une mauvaise évaluation des modèles de comportement
des autres acteurs. Ainsi par rapport aux modèles généraux, d’équilibre partiel, sur les choix
d’investissement, qui intègrent des incertitudes techniques, l’introduction d’une incertitude
sur la perception de l’incertitude technique par les acteurs va avoir une influence assez forte
sur la décision d’investissement, comme le montre les simulations ci après.
19
Choix d’investissement et perception des consommateurs
Conclusion et perspectives
Nous avons construit un modèle de choix d’investissement dans le cas où la technologie
conduit à des incertitudes sur la réalisabilité technique de l’innovation. Par rapport aux autres
modélisation, nous avons vu que cette incertitude technique est double, à la fois sur la
faisabilité classique et sur l’introduction de risque environnementaux et sanitaire. Dans ce
contexte non spécifique aux OGM, les variables de contestation et d’implication de l’Etat
(Principe Pollueur Payeur) ont conduit à la constitution de normes de sécurité des diverses
installations.
Dans le cas des OGM, une des difficulté est liée au caractère reproductible des plantes et de
leur dissémination dans l’environnement. La norme est alors pour le consommateur « le
risque 0 », ce que ne peut garantir l’industriel (aujourd’hui).
Dans ce contexte, nous avons vu qu’une analyse des caractéristiques techniques mais
également comportementales des différents acteurs est nécessaire pour comprendre la
décision. L’approche en terme de caractéristiques proposée par Richard et Trommetter (2001)
se trouve renforcée dans des cas où il existe une incertitude (sur la date du passage d’un
modèle de 2 à trois périodes avec une information partiellement croissante) ; Recherche ,
Résultat Arrêt ou poursuite ; Recherche, résultat partiel, poursuite ou arrêt ; Résultat finaux
poursuite ou arrêt.
Une erreur dans l ‘anticipation de la réaction de l’Etat qui voudrait imposer un principe de
précaution et conduirait donc aux points morts π2* ou π3* serait préjudiciable pour
l’entreprise qui aurait anticipé le modèle n°6 et qui en cas d’échec se retrouverait obliger de
payer dans le cadre d’un principe Pollueur – Payeur.
Ainsi, la recherche sera d’autant plus respectueuse du Principe de Précaution que les menaces
de la part des consommateurs et de l’Etat seront crédibles et bien intégrées dans le modèle de
comportement des entreprises.
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