La politique de la Gérance immobilière municipale a

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La politique de la Gérance immobilière municipale a
6 Immobilier
Tribune de Genève | Mardi 12 mai 2015
C’est votre droit
Peut-on contester le loyer dans
une résidence pour seniors?
Vous êtes locataire ou
propriétaire? Vous avez
une question en lien avec
votre logement? Posez-la
à [email protected].
Des avocats spécialisés
y répondent chaque mardi.
Pierre
Stastny
Avocat,
Asloca Genève
Question de Régine D, de Genève:
«Je vis actuellement dans une résidence pour seniors, dans un 2 pièces
avec jardin. Le prix de cette location
a régulièrement été augmenté et mes
économies, dans lesquelles je dois
puiser, n’y suffisent plus. Puis-je contester ces augmentations vue la
baisse des taux hypothécaires annoncée dans les journaux?»
Pour répondre à cette question, il faut
déterminer si s’appliquent les règles
du droit du bail, relatives aux loyers
abusifs. Si oui, on peut s’en prévaloir
pour demander une diminution des
mensualités versées. Dans la présente
situation, notre aînée est légitimée à
penser qu’il y a un bail avec le home,
vu qu’elle paie un montant qui lui
donne le droit de vivre en un lieu délimité, comme finalement le fait un locataire d’appartement.
La question s’est posée dans un cas
zurichois soumis au Tribunal fédéral
(ATF 4A_113/2012). Le Tribunal fédéral
a considéré, dans le cas concret qu’on
était en présence d’un contrat «innommé», c’est-à-dire un contrat qui
regroupait des aspects de divers
contrats prévus par le Code des obliga-
tions (bail, mandat, vente, entreprise).
Selon le TF, pour savoir si le droit du
bail s’applique à la question du loyer
payé par le pensionnaire, encore faut-il
que l’aspect «bail» soit prépondérant
dans l’économie du contrat. Or, dans le
cas d’espèce, tel n’était pas le cas puisque, outre la remise d’un logement, de
très nombreuses prestations, qui ne
relevaient pas du bail, étaient prévues:
nettoyage, repas, service d’urgence
24h/24h, animations, soins à la personne et assistance. Ces prestations
n’étaient de loin pas accessoires. Il était
également constaté que, pour la résiliation du contrat, il y avait des particularités puisque, pour peu que le pensionnaire se conforme au règlement, la résidence n’était pas légitimée à résilier
le contrat. En bref, l’économie contractuelle tendait à penser que l’aspect de
soins et d’assistance était un élément
essentiel du contrat et même l’élément
prépondérant, plutôt que la simple re-
mise de locaux habitables contre un
loyer. Ainsi, on ne peut pas isoler les
éléments relevant du contrat de bail à
loyer de l’ensemble des éléments pris
en compte pour forger le prix de la
pension, de manière que ce dernier ne
peut pas être attaqué en s’appuyant
sur les règles de protection contre les
loyers abusifs.
En définitive, le Tribunal fédéral
a tranché un cas particulier. Mais la
question doit, à chaque fois, être regardée en fonction de l’économie contractuelle, et donc de l’ensemble des
circonstances du cas d’espèce. Si de
très nombreuses autres prestations
que celles découlant du bail (remise de
locaux habitables en échange d’un
loyer) sont prévues, on conclura que
les règles de protection des locataires
contre les loyers abusifs ne s’appliquent pas.
www.asloca.ch
La chronique de l’Uspi Genève
La politique de la Gérance
immobilière municipale a un coût
Philippe
Angelozzi
Secrétaire général
de l’UPI Genève
Dans un récent article paru dans le
magazine d’information de la Ville
de Genève Vivre à Genève, la magistrate en charge des finances et
du logement relève que le parc de
logements de la Ville étant composé de 95% de logements sociaux,
le loyer moyen d’un appartement
de 4 pièces géré par la Gérance
immobilière municipale (GIM)
s’élevait à 944 francs, contre 1449
francs en moyenne à Genève. Il est
également ajouté que, contraire-
ment à la pratique de nombreux
propriétaires privés, la Ville parvenait à assurer une stabilité des
loyers lors d’un changement de
locataires.
Une stabilité des loyers lors
d’un changement de locataires,
oui, mais aux frais de qui? Si peu
de personnes ne contesteront la
nécessité d’une sensibilité sociale
de la politique de gestion du parc
immobilier de la Ville par la GIM, il
faut cependant que tout soit dit.
Une structure déficitaire
La GIM est déficitaire depuis de
nombreuses années. Les pertes de
cette structure et de son activité de
gérance sont évidemment noyées
dans les comptes de la Ville, mais
c’est finalement le contribuable qui
les supporte. Le montant des honoraires de gérance de la GIM est
anormalement élevé, puisque le
taux des honoraires de gestion
qu’elle facture à la Ville était d’environ 6,6% en 2014. Pour comparaison, dans le secteur privé, ce taux
est d’environ 4%. Malgré ses honoraires élevés, la GIM ne parvient
pas à couvrir ses frais de fonctionnement qui sont déficitaires, depuis de nombreuses années, d’environ 2 millions de francs par an,
selon les chiffres officiels:
2011: - 2 046 156; 2012: - 1 953 822;
2013: - 1 683 262; 2014: -1 902 433.
Le fonctionnement de l’activité
de gérance pourrait soulever des
interrogations, car est-il pertinent
de maintenir une activité qui est
structurellement déficitaire?
Pour couvrir simplement ses
charges de gérance en 2014, la GIM
devrait avoir un taux de gérance de
8,3% ou diminuer ses charges de
20,6%.
Augmenter les revenus de l’activité de gérance en répercutant le
coût réel de cette entité sur les états
locatifs n’est, a priori, pas l’objectif
souhaité.
La baisse des coûts de fonctionnement de la GIM est une entreprise délicate, mais la question de
l’efficience d’une telle structure
par rapport au secteur privé doit
être soulevée.
www.uspi-ge.ch

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