« Nous devons nous inspirer du modèle Airbus dans le ferroviaire

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« Nous devons nous inspirer du modèle Airbus dans le ferroviaire
« Nous devons nous inspirer du modèle Airbus dans le ferroviaire » (La Tribune - 01/03/2010 - p.19)
La Tribune : Vous présidez la Fédération des industries ferroviaires depuis quelques
mois. Quel regard portez-vous sur ce secteur ?
Louis Nègre : Nous avons dans notre pays de très belles entreprises, et l'industrie ferroviaire
française se situe encore sur le podium mondial. Mais nous sommes face à des mutations très
importantes. Pendant longtemps, les systèmes ferroviaires ont été des systèmes nationaux.
Nous vivons une ouverture des frontières très forte, la SNCF - historiquement vecteur
d'exportation très important pour la France - connaît certaines difficultés en ce moment, et par
ailleurs la concurrence asiatique représente une menace de plus en plus importante. Ignorer la
montée en puissance de l'Asie, et de la Chine en particulier, serait une grave erreur. Les
Chinois sont aujourd'hui présents sur quasiment toute la gamme ferroviaire, tant dans le
matériel roulant qu'au niveau de l'infrastructure. Dans les années à venir, ils arriveront en
Europe et seront un compétiteur majeur dans le rail conventionnel (trains régionaux, trains de
fret, etc.), voire dans la grande vitesse. Il nous faut absolument réagir.
La Tribune : Comment les entreprises françaises peuvent-elles réagir ?
Louis Nègre : Il faut miser sur la recherche et l'innovation. Chaque fois que l'industrie française
sera capable d'innover, elle trouvera des marchés. Il faut aussi renforcer la filière française, qui
n'aura sans doute pas la taille critique face à la Chine. Si l'on peut par exemple créer une filière
franco-allemande dans le ferroviaire, nous pèserons à deux plus lourd que seuls et dispersés.
En 2006, une déclaration commune entre les deux ministres des Transports de l'époque avait
permis de relancer le partenariat franco-allemand, Aujourd'hui, les effets de la déclaration
s'estompent.
La Tribune : Mais comment créer cette filière franco-allemande ?
Louis Nègre : Nous devons nous mettre tous autour d'une seule table, Je me suis entretenu
récemment avec le secrétaire d'État chargé des Transports sur l'idée - qui commence à germer
- de créer une grande commission ferroviaire franco-allemande pour doper le moteur. Elle
regrouperait l'ensemble des acteurs du secteur : les industriels français et allemands, les
opérateurs ferroviaires, les responsables de l'infrastructure, les autorités de régulation, les
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autorités de la sécurité ainsi que les deux États. Il s'agirait effectivement d'une commission
.étatique présidée par les ministres des Transports. Les États sont les premiers acteurs du
moteur. Sans volonté politique, nous n'y arriverons pas. Pour donner un signal politique fort,
cette grande commission pourrait idéalement être annoncée par Nicolas Sarkozy et Angela
Merkel, le président de la République et la chancelière ayant bien compris l'intérêt du couple
franco-allemand. Nous devons être forts pour exister demain, sinon nous deviendrons les
sous-traitants des autres.
La Tribune : Quel serait le but de cette commission et quand pourrait-elle être créée ?
Louis Nègre : J'espère que nous pourrons aboutir rapidement. Pour moi, il doit s'agir d'une
question de mois. La commission devrait être porteuse pour l'avenir d'une vision très
ambitieuse. Elle devrait notamment définir les objectifs majeurs que l'on se fixe à long terme,
avec trois axes de réflexion principaux : un projet industriel et stratégique franco-allemand pour
la génération à venir qui aurait vocation à s'élargir au niveau européen, l'harmonisation
réglementaire et technique, et l'évolution des marchés. Au niveau industriel, il existe déjà un
bon modèle stratégique dont on pourrait s'inspirer : celui d'Airbus dans l'aérien. Ce modèle
devrait aujourd'hui nous conduire à quelques réflexions collectives.
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