Bien gérer la prescription des antibiotiques - CClin Sud-Est
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Bien gérer la prescription des antibiotiques - CClin Sud-Est
HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES LE RISQUE INFECTIEUX NOSOCOMIAL CHEZ LES PERSONNES AGÉES 1.2 Bien gérer la prescription des antibiotiques OUS LES PROFESSIONNELS DE SANTÉ, y compris les gestionnaires, ont leur part de responsabilité et donc un rôle dans le Bon Usage des Antibiotiques à l’hôpital » (1). Le bon usage des antibiotiques, qui vient de faire l'objet de recommandations institutionnelles récentes, a pour objectif principal de contribuer à la maîtrise du développement de la résistance bactérienne (l'autre principe de base de cette maîtrise est la prévention de la transmission de souches de bactéries multirésistantes entre patients). Le respect d’une démarche d’assurance qualité peut optimiser cette prescription. Quant au bénéfice pour le patient, il est évident tant au plan individuel (pour un patient recevant une antibiothérapie) qu'au plan collectif (pour la communauté des patients d'un service, d'un hôpital, de l'ensemble du système de santé) (1). «T Au niveau individuel (pour le patient) L’objectif est de satisfaire aux principes de base de la prescription antibiotique ; avant de prescrire un antibiotique, les questions suivantes doivent être posées : ◆ Existe-t-il un syndrome infectieux ? ◆ De quelle pathologie infectieuse s'agit-il, et quel est le site principal à atteindre avec l'antibiothérapie ? ◆ Quel est l‘agent microbien en cause ? Si une cause bactérienne est évoquée, quelle(s) est (sont) l’ (les) espèce(s) en cause ? La réponse à cette question résulte : • soit d'un raisonnement épidémiologique s'il s'agit d'une prescription empirique (quelles bactéries dans ce type de pathologie infectieuse ? quelles bactéries chez ce malade dans ce service, dans cet hôpital ?) • soit de l'examen des données microbiologiques disponibles au moment de la prescription : prélèvement microbiologique positif, identification et antibiogramme d'une espèce bactérienne. Ces différents éléments d'information doivent être interprétés : positivité du prélèvement n'est HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 pas synonyme d'infection, l'antibiogramme n'est pas une fiche de prescription des antibiotiques. ◆ Y a-t-il urgence à traiter par antibiothérapie ? Répondre à cette question suppose de recueillir les facteurs de gravité présent chez le patient ◆ Quels sont les facteurs intrinsèques du patient qui peuvent intervenir sur la prescription antibiotique ? On recherchera un ou plusieurs des facteurs suivants : trouble de l'absorption digestive, poids extrême, situation modifiant le volume de distribution (insuffisance rénale), neutropénie, leucopénie, allergie. ◆ La prescription antibiotique est-elle adaptée au patient ? On s’assurera de la clarté de la prescription : prescription nominative, dénomination du produit, posologie, durée du traitement. ◆ Doit-on demander un avis spécialisé avant d'instaurer l'antibiothérapie ? Une difficulté de maîtrise des conditions préalables à la prescription antibiotique devrait conduire à un avis spécialisé. Ces principes de bases devraient permettre d'éviter la plupart des erreurs de prescription des antibiotiques (Tableau III) qui aboutissent à des prescriptions inutiles, parfois en nombre important, comme le montrent différentes études (2,3,4,5,6). Au niveau collectif (pour la communauté des patients dans un service et/ou établissement de santé) Au niveau collectif la prescription d'antibiotiques a des conséquences sur : • l'écologie bactérienne du service, de l'établissement de santé, du système de santé, • la résistance bactérienne, • le coût des antibiotiques dans le budget médicaments, Concernant ces différents domaines, les objectifs à atteindre sont : 319 BIEN GÉRER LA PRESCRIPTION DES ANTIBIOTIQUES Tableau III - Les principales erreurs de prescription des antibiotiques. • Syndrome fébrile de nature non infectieuse ou non bactérien (virus, fungi). • Documentation microbiologique n'étant pas en rapport avec une infection mais avec une simple colonisation* asymptomatique. • Prescrire une antibiothérapie inefficace (bactérie résistante) ou inappropriée (car de trop large spectre). • Documentation microbiologique provenant de prélèvement sans valeur diagnostique pour une infection : ex : urines contaminées, prélèvement d'expectoration pour diagnostic d'une pneumopathie... • Prescrire une association d'antibiotique inutile. La prescription de plusieurs antibiotiques répond à des indications précises et définies et ne doit être ni systématique ni fréquente. • Posologie inadaptée (insuffisante ou trop élevée). • Durée inadaptée (non précisée, trop longue, ou trop courte). • Non respect d'une contre indication (ex : macrolides et dérivé de l’ergot de seigle...). • Antibiotique inefficace sur le germe responsable de l’infection. • Absence de diffusion de l’antibiotique au site de l’infection. ◆ Préserver l'écologie des services de gériatrie qui devrait être le plus proche possible d'une écologie communautaire (extrahospitalière). L'antibiothérapie peut y contribuer (7,8,9) en : • évitant tout monolithisme : prescription d'un antibiotique unique pour de multiples indications pendant une durée prolongée, • utilisant des molécules dont le spectre d'activité antibactérienne est adapté au plus près aux espèces bactériennes identifiées ou probables dans la pathologie infectieuse à traiter, • disposant d'un suivi sur la nature et le volume des antibiotiques prescrits en gériatrie, • examinant l'utilité de chaque innovation en antibiothérapie dans le domaine spécifique de la gériatrie. ◆ Ne pas faire de la gériatrie un des « hauts lieux » de la mutirésistance aux antibiotiques (8). Là encore, la gestion de l'antibiothérapie n'est qu'un des facteurs contribuant à la réalisation de l'objectif. On pourra : • limiter l'utilisation de molécules dites « à large spectre » qui réalise une pression de sélection importante favorisant l'émergence d'espèces saprophytes naturellement résistantes (Acinetobacter, Stenotrophomonas maltophila/, Burkholderia cepacia...). 320 • ne pas sous-doser les antibiotiques en particulier ceux utilisés pour traiter les infections à B.M.R. En effet, certaines B.M.R. (Pseudomonas aeruginosa) voient le développement de mécanismes de résistance favorisé par les faibles doses d'antibiotiques (doses inférieures à la CMI). ◆ Limiter le coût de l'antibiothérapie : • maîtriser les indications de prescription des antibiotiques. En particulier, on veillera à éliminer des situations « floues » conduisant parfois à une antibiothérapie systématique prescrite à titre de « couverture » face à une fièvre non investiguée ou à un risque infectieux mal évalué. • disposer d'information sur le coût des différents traitements possibles dans une même situation • tenter de prendre en compte et d'évaluer un coût d'antibiothérapie global qui va au delà du coût des produits (coût des modalités d'administration/possibilité d'administration en relais ambulatoire etc.). ◆ Améliorer la qualité de la prescription en implantant des protocoles d’antibiothérapie (7,9) pour les situations les plus fréquemment rencontrées (infections urinaires, infections respiratoires) et les évaluer régulièrement. Bibliographie 1 - Le bon usage des antibiotiques à l'hôpital, recommandations pour maîtriser le développement de la résistance bactérienne. ANDEM/C.T.I.N. (Novembre 1996). 2 - CROSSLEY K, HENRY K, IRVINE P, et al. Antibiotic use in nursing homes: prevalence, cost, and utilization review. Bull. N. Y. Acad. Med. 1987, 63: 510-518. 3 - KATZ DR, BEAM TR, BRAND F, et al. Antibiotic use in the nursing home. Physicians practice patterns. Arch. Intern. Med. 1990, 150: 1465-1468. 4 - MONTGOMERY P, SEMENCHUK M, NICOLLE LE. Antimicrobial use in nursing homes in Manitoba.J. Geriatr. Drug Ther. 1995, 9 (3): 55-74. 5 - WARREN JW, PALUMBO FB, FITTERMAN L, et al. Incidence and characteristics of antibiotic use in aged nursing home patients. J. Am. Geriatr. Soc. 1991, 39: 963-972. 6 - ZIMMER JG, BENTLEY DW, VALENTI WM, et al. Systemic antibiotic use in nursing homes. A quality assessment. J. Am. Geriatr. Soc. 1986, 34: 703-710. 7 - JONES SR, PARKER DF, KIEBOW ES, et al. Appropriateness on antimicrobial therapy in long term care facilities. Am. J. Med. 1987, 83: 499-502. 8 - NICOLLE LE, STRAUSBAUGH LJ, GARIBALDI RA. Infections and Antibiotic Resistance in Nursing Homes. Clinical Microbiology Reviews 1996, 1:1-175. 9 - PICKERING TD, GURWITZ JH, ZALEZNIK D, et al. The appropriateness of oral fluoroquinolone prescribing in the long term care setting. J. Am. Geriatr. Soc. 1994, 42: 28-32. HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES Lexique AFNOR biofilm Association Française de Normalisation. Association ayant pour mission de coordonner les programmes de normalisation en France et d’encourager la diffusion et l’application des normes. Ensemble de micro-organismes et de leurs sécrétions macromoléculaires qui sont présents sur la surface d’un matériau (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination). antisepsie bionettoyage Opération au résultat momentané permettant, au niveau des tissus vivants, dans la limite de leur tolérance, d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NF T 72 101). Procédé de nettoyage, applicable dans une zone à risques, destiné à réduire momentanément la biocontamination d’une surface. Il est obtenu par la combinaison appropriée d’un nettoyage, d’une évacuation des produits utilisés et des salissures à éliminer, de l’application d’un désinfectant. cas acquis antiseptique Selon AFNOR NF T 72 101, un antiseptique est un produit ou un procédé utilisé pour l’antisepsie dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé sont sélectifs, cela doit être précisé. Ainsi, un antiseptique ayant une action limitée aux champignons est un antiseptique à action fongicide. Le caractère acquis d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée dans un service a été réalisé et si celui-ci est négatif. La découverte d’une telle bactérie au cours du séjour plus de 48 à 72 heures après l’admission chez un patient antérieurement négatif laisse présumer que la bactérie a été acquise par transmission au cours du séjour. bactéricide Produit ou procédé ayant la propriété de tuer les bactéries dans des conditions définies (AFNOR, Comité Européen de Normalisation). Produit ou procédé ayant la propriété d’inhiber momentanément les bactéries dans des conditions définies (AFNOR). Le caractère importé depuis un autre établissement d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée du patient dans le service a été réalisé et si celui-ci est positif. La découverte d’une telle bactérie chez un patient moins de 48 à 72 heures après l’admission laisse présumer que la bactérie a été transmise antérieurement par rapport au séjour actuel. biocontamination colonisation (colonisé) Contamination d’une surface (biologique ou inerte) ou d’un fluide par des micro-organismes véhiculés par l’air (contamination aéroportée ou aérobiocontamination), par des êtres vivants (la contamination par contact avec les mains en est la modalité majeure) ou par les objets. (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination) Présence d’une bactérie dans un site qui en est normalement exempt, mais cette bactérie n’est responsable d’aucun symptôme local ou général d’infection ; exemple : présence d’une bactériurie isolée à Staphylococcus aureus dans les urines sans aucun signe d’infection urinaire. bactériostatique 364 cas importé HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 désinfectant nettoyage Produit ou procédé utilisé pour la désinfection, dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé est sélectif, ceci doit être précisé. Ainsi, un désinfectant ayant une action limitée aux champignons est désigné par : désinfectant à action fongicide (AFNOR NFT 72 101). Opération d’élimination des salissures (particulaires, biologiques, liquide,...) avec un procédé faisant appel dans des proportions variables les unes par rapport aux autres, aux facteurs suivants : action chimique, action mécanique, temps d’action de ces deux paramètres et température. désinfection nettoyage-désinfectant ◆ Opération au résultat momentané permettant d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus indésirables portés par des milieux inertes contaminés, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NFT 72 101). L’usage du terme « désinfection » en synonyme de « décontamination » est prohibé. Produit présentant la double propriété de détergence et de désinfection (Société Française d’Hygiène Hospitalière). ◆ Terme générique désignant toute action à visée antimicrobienne, quel que soit le niveau de résultat, et utilisant un produit pouvant justifier in vitro des propriétés autorisant à le qualifier de désinfectant ou d’antiseptique. Il devrait logiquement toujours être accompagné d’un qualificatif et l’on devrait ainsi parler de : • désinfection des dispositifs médicaux (= du matériel médical) • désinfection des sols, • désinfection des surfaces par voie aérienne, • et même désinfection des mains ou d’une plaie (Société Française d’Hygiène Hospitalière et Comité Européen de Normalisation). ◆ Élimination dirigée de germes destinée à empêcher la transmission de certains micro-organismes indésirables, en altérant leur structure ou leur métabolisme indépendamment de leur état physiologique (CEN) HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 porteur (portage) Présence d’une bactérie dans un site où sa présence est habituelle sans qu’elle soit responsable d’infection ; exemple : présence de Staphylococcus aureus dans les narines ou dans d’entérobactéries dans les selles. précautions standard Ensemble des précautions d’hygiène qui s’appliquent à tout patient sans tenir compte de l’existence d’une éventuelle infection. Ces précautions intègrent la protection du personnel vis à vis des liquides biologiques, la prévention des accidents d’exposition au sang et les bonnes pratiques d’hygiène visant à limiter la transmission des micro-organismes hospitaliers lors des soins. Les précautions standard concernent l’hygiène des mains, les techniques de soins, le nettoyage et la désinfection du matériel de soins, l’entretien des locaux , de la vaisselle et du linge, la prévention des accidents d’exposition aux liquides biologiques dont le sang. L’application des précautions standard est indispensable à l’efficacité d’une politique de contrôle des infections nosocomiales. 365