Sur les traces de Sandor Marai à Budapest
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Sur les traces de Sandor Marai à Budapest
Spécial Salon du livre Vendredi 26 mars 2010 page 40 photos : Musée de la Littérature Petofi - Budapest ture Art nouveau, l’imposante place des Héros… —, l’effervescence intellectuelle dépeinte par Márai dans ses premiers livres est retombée. Le quartier littéraire au centre de Pest s’est rempli de magasins de mode. Devant l’Opéra, le bâtiment qui abrita un temps le café Drechsten, rendez-vous incontournable des artistes, sera bientôt converti en hôtel de luxe. Le café New York (www. boscolohotels.com) que Márai décrit comme « la citadelle de la nouvelle littérature hongroise » où l’on pouvait croiser des « critiques armés de lances » s’est transformé en (magnifique) salon de thé pour le palace du même nom. Seul le bâtiment de l’ancien café Abbazia a gardé une fibre littéraire, qui abrite désormais la sympathique Librairie des Écrivains (Andrassy ùt. 45). Reste que quelques bastions résistent : le bistrot-restaurant Firkasz (« L’Écrivaillon », Tatra ùt. 18) où les articles de journaux tapissent les murs et où un pianiste couvre les discussions braillardes. Il y a aussi le café Central (www. centralkavehaz.hu) qui a tenté de conserver cette atmosphère d’antan. La salle est bruyante, le plafond d’où pendent de grands lustres Art déco atteint les cinq mètres, d’immenses vitres laissent entrevoir l’activité de la rue. C’est là que l’on rencontre Judith Jaki. Comme son père — neveu et exécuteur testamentaire de Márai —, elle travaille à la recon- Le café Central a tenté de conserver l’atmosphère du Budapest des années 1930. O.T de Hongrie évasion naissance du travail de l’écrivain. La jeune femme explique que le regain d’intérêt pour Márai est né en France, grâce au travail de traduction des éditions Albin Michel qui, depuis 2000, sortent un nouveau livre chaque année. Au sujet de l’homme, elle parle d’un journaliste acharné, une personne de principes aussi, parfois dure. « Lors des repas de famille, raconte-t-elle, sa mère plaçait devant chaque assiette une étiquette avec la liste des sujets à ne pas aborder sous peine de voir Márai quitter la table. » Ceux-ci variaient suivant l’actualité. Mais durant la guerre, deux étaient iné- Sur les traces de Sándor Márai à Budapest L e grand écrivain de la « Mitteleuropa » a connu le succès puis l’ignorance avant une réhabilitation dans les années 2000. Dans la capitale hongroise, quelques lieux perpétuent l’effervescence culturelle qu’il dépeignait dans ses livres. Si Budapest dégage toujours un charme indéniable — la vue sur le Danube depuis la citadelle, les bains Gellert et leur architec- PRATIQUE Préparer son voyage Office du tourisme de Hongrie : 01.53.70.67.17 www.hongrietourisme.com Les ouvrages de Sándor Márai traduits en français sont publiés aux éditions Albin Michel. Y aller Avec Malev Hungarian Airlines. 4 à 6 vols Paris-Budapest par jour à partir de 129 euros A/R. Réservations : 01.43.12.36.00 www.malev.com Hôtel Le Grand Hotel Royal renoue avec son luxe d’origine L DR Ces jours-ci, dans les rues de Budapest, la plupart des librairies arborent sur leurs vitrines de grandes affiches promotionnelles où apparaissent les portraits encadrés d’illustres écrivains. Au milieu de Charles Dickens, Salman Rushdie et Jane Austen trône l’auteur phare de la Hongrie : Sándor Márai (1900-1989) dont chacun des ouvrages est aujourd’hui encore un « best-seller ». Cette popularité, l’auteur des « Braises » — qui s’est suicidé en 1989 aux États-Unis —, l’avait connue dès ses débuts, dans les années 1930. Puis vint la guerre. Farouchement antifasciste, il continua d’écrire. Mais en 1948, après l’arrivée des Russes — qu’il raconte superbement avec un mélange d’espoir et d’inquiétude dans « Mémoires de Hongrie » —, la pression fut trop forte. Márai, écrivain « bourgeois » indésirable, quitte son pays natal. Ses livres sont interdits. Son nom s’efface des mémoires. vitablement inscrits : la position des Allemands et la mort de son fils, survenue en 1939, quelques semaines après sa naissance. Sur son exil, elle ajoute que « ce qui l’a décidé n’était pas tant de ne pas pouvoir écrire ou parler, que de ne pouvoir se taire librement ». Le jour de son départ, il ne prévint personne. On sait depuis qu’il partit de l’appartement où il s’était réfugié après le bombardement de sa résidence principale (où aujourd’hui trône une statue de bronze à son effigie). De cet appartement, situé dans les hauteurs de Buda, la vue est magnifique. On aperçoit le Parlement, majestueux, qui borde le Danube, et les toits de la ville qui s’étend à l’infini. Ce fut la dernière fois qu’il vit ce panorama. Olivier Le Floc’h ors de son inauguration, en 1896, le palace fut considéré comme le plus vaste et le plus moderne hôtel du continent. Hôtel majestueux de Budapest, le Grand Hotel Royal a dû attendre le nouveau millénaire pour retrouver son prestige après six années de travaux. Et d’allier une architecture contemporaine sobre et luxueuse au charme du XIXe siècle, époque à partir de laquelle il a bâti son histoire. L’hôtel, construit dans un style Renaissance française, ouvrit la première fois ses portes en 1896 à l’occasion de la grande exposition du Millenium. Il était alors non seulement considéré comme le plus grand hôtel du continent mais aussi comme le plus moderne avec l’électricité distribuée dans tout le bâtiment, des téléphones dans chaque chambre et de nombreux restaurants. C’est d’ailleurs là qu’eut lieu la toute première projection à Budapest d’un film des frères Lumière. Situé sur la grande avenue Andrassy à quelques pas de l’Opéra et du quartier littéraire, il était le rendez-vous des grands artistes hongrois et étrangers de passage : Serge Diaghilev, Igor Stravinsky, Béla Bartók, Joséphine Baker ou Max Linder sont passés par là. Tout changea avec la Seconde Guerre mondiale. Le bâtiment fut réquisitionné et, jusqu’en 1953, n’abrita que des bureaux. Et lorsqu’il fut finalement réhabilité en hôtel en 1956, c’est un incendie qui ravagea l’édifice. Malgré une reconstruction et une réouverture en 1961, l’hôtel ne retrouva jamais son attrait d’antan. Il tomba en désuétude et ferma ses portes en 1991. Il aura donc fallu attendre 2003 pour que le Grand Hotel Royal renaisse de ses cendres grâce au groupe hôtelier Corinthia qui l’a restauré en un cinq-étoiles d’exception, récipiendaire du prix 2004 de la « meilleure architecture d’hôtel en Europe ». L’impressionnante façade tout comme la « salle de bal » principale, avec ses presque onze mètres de hauteur de plafond, sont d’origine. Le reste du bâtiment, dans un style plus contemporain, joue habilement avec le mélange des genres. L’hôtel propose quatre restaurants différents ainsi qu’un spa somptueux sur deux étages qui, avec sa piscine de quinze mètres, ses deux jacuzzis et ses différents saunas et solarium, ne démérite aucunement son nom de « spa royal ». O. l. F. Corinthia Grand Hotel Royal. Chambres à partir de 154 euros. corinthia.com