L`Eglise Romane de SAINT L`Eglise Romane de SAINT

Transcription

L`Eglise Romane de SAINT L`Eglise Romane de SAINT
L’Eglise Romane de SAINT POINT
Guide de visite
par le père Sauteur, ancien curé
réédité et annoté par la Communauté de Communes du Mâconnais-Charolais
mai 1997
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Souvenirs de l’église de SAINT -POINT
Guide des visiteurs
Ü Les précisions manquent sur ses origines, mais
son style roman semble indiquer qu’elle fut construite
au XI° siècle (ou au début du XII°)1, probablement par le
châtelain du lieu avec la participation ou sous la direction
des moines de Cluny. En effet, elle se trouve à proximité
du château, sur le même mamelon, et fait corps avec la
chapelle seigneuriale, signalée en 1675 comme
appartenant à M. de Saint-Point (Procès-verbal de la visite
canonique du 18 juillet 1675). D’autre part, l’abbaye de
Cluny possédait dès avant l’an 1000, et surtout au XI°
siècle, des biens variés et nombreux dans tout le vallon
de St-Point- Bourgvilain, et l’on peut supposer que ses
moines n’ont pas été étrangers à la construction de
l’église.
Les absides et le clocher
Au premier coup d’œil, on remarque sa toiture en
lave, et son clocher carré à double étage avec fenêtres
jumelées, en arc plein cintre. Il est surmonté d’une flèche
pyramidale à quatre pans, éclairée par quatre lucarnes à
fronton triangulaire portant un épi fleuronné; plus haut
que ces lucarnes, à quelque 50 cm. du sommet, on peut
voir sur chacune des arêtes une tête humaine sculptée.
Ce clocher a subi des réparations (intérieures plutôt qu’extérieures) en 1765, en 1826 et 18432. En 1922, les
piliers qui le supportent du côté de la nef ont été refaits et consolidés par les soins du Ministère des Beaux-Arts.
Ces deux piliers se lézardaient et menaçaient de s’écraser. On s’aperçut qu’ils étaient constitués d’un
encadrement de pierres grossièrement taillées, à l’intérieur duquel avait été entassé n’importe comment un
amalgame peu solide de pierres et de grès. On découvrit même, au milieu du pilier de droite, à une certaine hauteur,
une espèce de trou avec des cendres au fond, comme si les ouvriers s’étaient amusés à faire du feu là au cours de
leur travail.
La même année 1922, on refit entièrement les boiseries intérieures du clocher: charpente, escalier et plateforme et l’on brûla les vieux bois. Les deux cloches actuelles sont datées de 1810 et 1824. 3
1
D’après Mr Virey, l’ensemble de l’église serait du XI° siècle, mais le 2ème étage du clocher serait du XII°
et la pyramide qui le coiffe du XIII°.
2
Réparations du clocher: vers 1765 on a refait le beffroy, ou charpente soutenant les cloches. En 1826 et
1843 on a rejointoyé une partie des pierres plus ou moins descellées, et l’on a enduit de mortier et badigeonné en
blanc les deux étages, y compris les colonnes et chapiteaux!
3
En 1990, la foudre ayant endommagé la flèche de la pyramide du clocher, la pointe a été refaite, les pierres
rejointoyées, un nouveau coq de cuivre placé au sommet. Coût des travaux: 85kF, réfection de la sonnerie des
cloches: 24kF, dons de la population: 20kF. Un message a été enfermé dans un tube placé dans le coq, dont le
texte suit: « MESSAGE: En l’an an mil neuf cent quatre vingt dix, année du bicentenaire fastueusement célébré de
la naissance d’Alphonse de Lamartine, le 12 août, jour de la fête patronale de SAINT-POINT, la foudre a frappé le
clocher de l’église paroissiale. Les travaux de la restauration du clocher ont été réalisés en juin mil neuf cent
quatre vingt onze. La générosité des sampognards a permis d’offrir à leur église un nouveau coq de clocher en
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Ü L’église elle-même a été réparée plus d’une fois, et surtout en 1765. A l’occasion de la confirmation et
de la visite de l’Evêque en l’an 1746, un projet de réparation fut établi, concernant en particulier: quatre piliers au
milieu de la nef, la couverture de laves à refaire ainsi que le grand portail, une sacristie à construire « à côté de la
petite chapelle du côté de bise », le beffroi (charpente) à « faire tout à neuf pour mettre les quatre cloches qui sont
dans le chœur ».
Les réparations furent faites entre 1760 et 1765; et les frais supportés, non pas par la commune, mais
uniquement par Claude-Gabriel-Amédée de Rochefort d’Ally, « marquis de St-Point », qui fit sculpter ses armes
sur le linteau de la porte latérale, en guise de signature. Cette porte latérale fut donc faite, ou refaite, par ses soins;
et c’est lui sans doute qui fit tailler la petite fenêtre carrée située
actuellement en haut de la façade, qui fit décorer le chœur de panneaux de
plâtre, et remplacer par une grille en fer forgé la balustrade signalée en
1675 comme servant de table de communion.4
Ü Mais entrons à l’intérieur de l’église pour examiner plus
attentivement les détails intéressants,
Ce qui frappe tout d’abord les regards, ce sont ces «énormes
piliers » carrés ou rectangulaires, qui masquent complètement la vue
du chœur à ceux qui se placent dans les nefs latérales. Ces piliers, à part
ceux du transept, n’ont probablement jamais supporté de voûtes, mais
seulement la toiture très lourde. Peut-être étaient-ils primitivement
destinés à soutenir des voûtes, mais celles-ci n’ont pas du être
construites car il est invraisemblable de supposer qu’elles aient pu
s’effondrer avec des supports aussi gros et aussi rapprochés.6
Ü Les nefs sont donc plafonnées. Mais le transept possède une
coupole sous le clocher, et de chaque côté une voûte romane en berceau
plein cintre. Il se prolonge par deux chapelles: une à gauche, plus basse,
avec voûte en cintre surbaissé; et une à droite, plus élevée, avec voûte
en berceau brisé
Le chœur et le maître-autel (av 1968) 5
Ü Cette chapelle de droite, perpendiculaire à l’axe de la nef, et dédiée à Sainte Catherine, était la chapelle
seigneuriale. Elle avait son chapelain, et ses revenus particuliers, distincts de ceux de l’église. Monsieur L. Lex,
dans son « Histoire de St-Point », la fait remonter au XI° siècle. Mais sa situation à l’extrémité du mamelon du
château, sur le domaine seigneurial primitif, avec entrée dirigée vers le château, fait supposer avec assez de
vraisemblance qu’elle a dû exister seule, comme chapelle privée, avant la construction de l’église, et que l’église
ensuite fut combinée avec elle. Son style ne contredit pas cette hypothèse
cuivre, placé ce dimanche 23 juin mil neuf cent quatre vingt onze sur la flèche du clocher, après la messe, lors
d’une cérémonie d’inauguration. La marraine de ce coq a été Mme Alice DUSSAUGE née MERCIER, du bourg, et
son parrain a été Claude AVERLY, de la Collure. Fabriqué à AMANZE par M.BALLIGAND, ce coq a été mis en
place par Jean-Paul TOUTANT. Message fait à l’intention des générations futures, à SAINT-POINT le même jour,
Monsieur l’abbé SARRET de TRAMBLY étant prêtre chargé de la paroisse de SAINT-POINT, Monsieur Maurice
DARGAUD étant Maire de SAINT-POINT, et Messieurs Jean QUELIN et Henri CHASSAGNE ses adjoints. « Ad
perpetuam rei memoriam » »
4
J’ai découvert au début de 1955, sous le plâtrage d’un pilier de la nef, l’écusson des Rochefort d’Ally,
peint sur un badigeon jaune-ocre en 1765. Le plâtrage est donc postérieur à cette date, du moins pour les piliers.
5
En 1968 ont été mises au jour et restaurées les fresques qui ornent l’abside.
6
Pas de coupole sous le clocher, à la croisée du transept, mais une voûte en berceau plein cintre, ce qui est
un signe d’ancienneté dans l’art roman.
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Sous le revêtement de plâtre de la voûte, au-dessus de la porte de la sacristie actuelle, on aperçoit
d’anciennes peintures qu’il aurait peut-être mieux valu conserver ou restaurer.
Ü Sous le carrelage de cette chapelle, fermé par une grosse dalle au milieu de la partie antérieure, se trouve
le caveau des seigneurs d’avant la Révolution. Pour ne citer que deux noms, on y descendit vers 1632 Claire de
Saint-Point, et en 1773 Claude-Gabriel-Amédé de Rochefort d’Ally, le restaurateur de l’église.
A ce caveau se rattache un fait dont l’authenticité semble au moins douteuse, et que Lamartine lui-même
raconte, dans le « Manuscrit de Ma Mère ». Voici ce qu’il dit: « Une jeune marquise de Saint-Point, dont on avait
pris l’évanouissement prolongé pour la mort, venait d’être ensevelie dans un cercueil ouvert sous la voûte du
caveau, et la pierre qui le ferme sous les pieds du prêtre dans le chœur était scellée sur son sépulcre. Le soir de son
enterrement, le sonneur de cloches, en venant tinter l’angélus, entendit des gémissements sous les dalles. Il
s’enfuit éperdu et alla raconter au château sa terreur. Le mari et les serviteurs éplorés accoururent. La voix
souterraine frappa leurs oreilles: on enleva la pierre scellée, on descendit dans le caveau, on trouva la morte
vivante. On la rapporta dans les bras des siens à sa demeure; jeune et belle, elle donna de longues années de
félicité à son mari avant de redescendre pleine de jours dans son sépulcre. J’avais souvent entendu dans mon
enfance le sonneur lui-même et sa vieille femme raconter ce miracle, dont ils avaient été les témoins, et dont les
anciens du village se souvenaient comme eux.» 7
Ü La sacristie actuelle, accolée à la chapelle seigneuriale, et couverte en tuiles fut construite en 1852. On
y conserve le « calice de Lamartine » , ainsi dénommé parce qu’il appartenait jadis à la chapelle du château de
Monceau, à Prissé, propriété de Lamartine. Ce calice fut donné à Mr de Montherot pour l’église de Saint-Point
entre 1895 et 1900, au temps de l’Abbé Buttet.
Ü La chapelle basse qui prolonge le transept à gauche n’est pas très ancienne, en dépit de son air vétuste
dû à l’humidité. Lors de la visite canonique du 18 juillet 1675, elle n’existait pas. On signale seulement dans le
procès-verbal, avec les deux chapelles des absidioles, deux armoires au chœur servant à ranger les objets du culte
(donc, il n’y avait pas de sacristie), et un autel « dans la nef de gauche, devant le premier pilier ». (Cet autel aurait
été dans la chapelle si celle-ci avait existé). En 1746, on projette de construire une sacristie «qu’il y manque », « du
côté de bize ». Cette chapelle basse est sans doute la sacristie en question, bâtie au cours des réparations
générales qui se terminèrent en 1765.
Le sol en fut d’abord garni de dalles, mais en 1841 on remplaça les dalles par un plancher pour cause
d’insalubrité. En 1845 on parle de pratiquer une ouverture dans la voûte pour installer un poêle destiné à lutter
contre l’humidité. Enfin, en 1852, on abandonna cette sacristie pour en construire une nouvelle de l’autre côté.
Ü L’abside et les deux absidioles, .aux murs très épais, sont couvertes de voûtes en cul-de-four. Ces
voûtes, ainsi que les murs inférieurs dans les absidioles ont été vers 1765 décorées de moulures en plâtre
encadrant des panneaux de couleur bleue. Les vitraux du chœur représentent, à gauche l’Archange de
l’Annonciation, et à droite Sainte Hélène découvrant la vraie croix ; ils ont été donnés à l’église en 1899,
respectivement par Gabrielle et Hélène de Montherot petites-nièces de Lamartine, à l’occasion de leur première
communion; et ils portent les armes des familles de Montherot (aigle) et de Lamartine (feuille de trèfle). Le maîtreautel actuel doit provenir de l’ancienne église Saint-Nizier de Mâcon; il aurait été acheté en 1792 par la
municipalité de Saint-Point. Vers 1895, l’abbé Buttet, curé de la paroisse, remplaça les dalles du chœur par un
carrelage en céramique. Quant à 1a grille de communion elle porte .sur son petit médaillon central la date 1765.
7
La marquise enterrée vivante « sous les pieds du prêtre dans le chœur » dit Lamartine! ... C’est bien dans
la chapelle des seigneurs, mais cette chapelle avait jadis un autel au fond et une balustrade à l’entrée, ce qui
explique un peu l’emploi du mot « chœur ».
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L’absidiole de droite constitue la chapelle de la Sainte Vierge, et contient dans une niche, au-dessus de
l’autel, une Vierge à l’Enfant que l’on croyait en plâtre doré, mais qui, en
réalité, est en bois plâtré et doré.
Ü L’absidiole de gauche renferme une vieille statue en bois aux mains
curieuses qui font penser à des râteaux: c’est celle de Saint Amable,
personnage probablement identique à Saint Amateur ou Saint Amour, premier
évêque d’Autun. Il est invoqué, paraît-il, par les jeunes filles prolongées qui
désirent se marier !.. En 1675, cette chapelle était appelée « chapelle du
Rosaire », bien que dédiée à Saint Jean, parce qu’elle abritait un vieux tableau
du Rosaire. Saint Amable, probablement apporté d’ailleurs, a dû y être installé
postérieurement à cette date.
Ü Une autre statue ancienne est celle de Saint Donat Patron de 1a
paroisse. Elle est le bois doré, et se trouve fixée au pilier gauche du transept,
St Donat
St Amable
sur la face qui regarde la grand‘nef. (Avant le XVI° siècle, le Patron de la paroisse était
Sanctus Poncius.)
Ü Contre ce pilier, du côté du chœur, s’appuie le banc du château ou « banc de
Lamartine ». C’est une stalle très simple, à trois places, qui a été occupée régulièrement
par les châtelains successifs. C’est là que se mettait Lamartine pour assister aux offices
religieux, avec les membres de sa famille. mais de son temps, les curieuses barres de bois
cintrées destinées à rendre le dossier plus confortable (?) n’existaient pas. Lamartine, diton, ne s’agenouillait pas dans cette stalle, mais s’y tenait debout dans les moments où
l’assistance était à genoux; et comme il était de
haute stature, sa tête alors dépassait la hauteur
du dossier.
Nous ne parlerons pas ici de la religion
de Lamartine mais nous signalerons en passant
qu’il invitait à sa table son curé chaque dimanche, coutume qu’il avait
héritée de sa mère et que ses successeurs ont conservée comme une
tradition familiale.
Ü Dans les nefs latérales de l’église, on peut voir deux tableaux
peints par Madame de Lamartine, femme du poète, et représentant, à
gauche, Sainte Geneviève, et à droite, Sainte Elisabeth reine du Portugal
Une autre toile intéressante est celle que l’on aperçoit en haut de
Le banc de Lamartine
la nef centrale, au-dessus de l’arcade du transept. C’est la « Vierge aux
Quatre Saints », peinte par Armand Leleux d’après Il Pinturicchio. Elle est ainsi datée: « Sainte Marie du Peuple, à
Rome 1837 ». Au sommet, une plaque porte l’inscription . « Donné par l’Etat, en 1870 »; et Lamartine, directement
ou indirectement, n’est sans doute pas étranger à cette donation (i1 est mort en
1869).
Ü Au fond de l’église, à gauche de la porte d’entrée, se trouve encore une
antiquité intéressante: une petite stalle armoriée que certaines gens appellent par
erreur « fauteuil de Lamartine ». C’est un prie-Dieu du XVll° siècle, en bois
sculpté, orné d’un écusson dont la figure a été effacée par le temps... et les
frottements ! Avant 1895, il se trouvait dans le chœur de l’église et devait servir au
curé de la paroisse. Primitivement, c’était peut-être la stalle du châtelain.
Ü Le portail gothique est un souvenir direct de Lamartine. En 1840, l’église
fut agrandie de la travée du fond. (Le raccord de cette travée avec le reste de
l’édifice se voit bien à l’extérieur sur les murs et sur le toit, et même à l’intérieur audessus des deux piliers intéressés), et Lamartine y apporta sa contribution
financière, mais voulut donner à son église une porte ogivale, en accord avec le
La stalle armoriée
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style du tombeau (pas avec celui de l’église!). En effet, en 1847, l’Abbé Bouton, curé, note à la fin de son registre
paroissial: «Cette année a été couverte la portion ajoutée à l’église commencée dès l’année précédente. La taille de
la porte est un don de Mr Alphonse de Lamartine Prix, 300 fr. ». En haut de la façade, au-dessus de 1a fenêtre
ronde qui surmonte l’entrée gothique, on remarque une petite fenêtre carrée dont l’encadrement en pierre porte
sur son linteau l’inscription: « Per ardua virtus», (La vertu suit des chemins ardus). Cet encadrement, daté 17611840, provient d’une fenêtre ancienne et a été placé là lors de l’agrandissement de l’église.
Ü Faisons maintenant le tour extérieur de l’église. Du côté du château et autour de l’abside et des
absidioles, le crépissage dessine, à mi-hauteur du mur, une large bande horizontale appelée « litre ». Elle est en
léger relief derrière le chœur; sur le mur latéral, elle se distingue par sa couleur plus foncée. Cette bande
seigneuriale marquait, paraît-il, les droits particuliers des châtelains sur l’église qu’ils avaient fait bâtir ou
restaurer. Sur les murs de l’abside et des absidioles, on devine l’emplacement et la forme des fenêtres primitives,
remplacées depuis par d’autres: il y en avait trois au chœur et une au centre de chaque chapelle. L’abside a deux
contreforts, et chaque absidiole en a un, placé sur le côté et non au centre.
Ü Les trois toitures semi-circulaires en lave reposent sur une corniche portée par des modillons
sculptés aux figures diverses: les trois premières du côté du château, représentent un diable, un objet curieux et
indéterminé, un bucrane (ou crâne de bœuf); les trois derniers, à côté de la nouvelle sacristie, un oiseau aux ailes
étendues, un masque humain, un autre bucrane: ceux du milieu sont pour la plupart simplement décorés de
cannelures.
Le contrefort de la chapelle de la Sainte Vierge porte un cadran solaire bien visible, mais dont l’aiguille
n’existe plus
Ü La porte latérale d’entrée a un linteau en arc surbaissé sur lequel sont sculptées les armes conjuguées
des familles de Saint-Point (un lion) et de Rochefort d’Ally (six merlettes), surmontées d’une couronne de
marquis. Ce linteau a certainement été taillé au cours des réparations de 1765.
Ü A droite de cette porte latérale, à l’extrémité des 2e et 3e marches de l’entrée et contre le mur de la
chapelle Sainte-Catherine, se dresse une pierre tombale portant l’inscription suivante: « ICI REPOSE LE CORP
DE M. VINCENT GENILLON ENCIENT CURE DE S. POIN AGE DE 91 (ans), 1848. » Ce prêtre était curé de SaintPoint au moment de la Révolution. Après avoir prêté le serment constitutionnel il fut pendant quelques années
«Président de l’Administration Municipale du Canton de Tramayes», puis fut déposé pour manque de zèle
révolutionnaire: il manquait de sévérité à l’égard des ennemis de la Révolution et des prêtres réfractaires, et
continuait d’exercer le culte!.. Entre temps, dès 1793, il s’était lancé dans le trafic des biens ecclésiastiques et
autres biens confisqués par la Nation: il avait acheté, par exemple, la cure de Saint-Point (plus un domaine et une
maison dans le bourg), la cure de Saint-Léger-sous-la-Bussière, un terrain appartenant à la cure de Tramayes. Et
surtout avec deux associés, les citoyens Batonnard, marchand à Mâcon, et Vachier, il avait acheté l’abbaye de
Cluny! Pour tirer parti de cette dernière acquisition, un peu encombrante, le trio commença par vendre des
meubles, décorations et objets d’art; puis ne trouva rien de mieux que de faire démolir la célèbre église abbatiale
pour bâtir à la place une rue et des maisons! (1800-1801).
Ü On peut voir à Saint-Point quelques vestiges de l’abbaye de Cluny: la table de pierre placée sous les
tilleuls du château, dite « table d’Abélard »; la Vierge et la croix de pierre du Xle siècle situées au bas du jardin de
la cure de 1840 (poste actuelle), et qui furent apportées à Saint-Point par Genillon.
Ü Retiré à Saint-Point après la tourmente révolutionnaire, l’Abbé Genillon passa ses dernières années
dans une maison qu’il avait achetée, à 200 mètres environ du bourg, au lieudit Le Rocher: c’est la plus grosse des
trois ou quatre maisons qu’on aperçoit, de 1a plate-forme de l’église, à gauche du petit chemin qui grimpe à l’est
contre la montagne Elle est habitée actuellement par M. Chambon. On y peut voir aussi quelques débris de Cluny
notamment deux colonnes et des pierres sculptées décorant les angles de la toiture.
Vincent Genillon, assagi, rendit là le dernier soupir en 1848, muni des Sacrements de l’Eglise, après avoir
légué 600 francs à l’église de Saint-Point et 800 francs à l’Hospice de Cluny, et après avoir demandé, en signe de
repentir et de pénitence pour ses erreurs et ses mauvais exemples, d’être enterré sous les marches de la petite
porte de l’église, de façon à être foulé aux pieds par ceux qui entrent. Ce repentir lui fait honneur, mais il est tout
de même regrettable que l’abbaye de Cluny, monument unique au monde, ait été démolie par les ordres d’un excuré de Saint-Point.
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Ü Nous n’avons rien dit encore du tombeau de Lamartine, qui pourtant, bien placé près de la façade de
l’église, attire aisément les premiers regards des visiteurs. Le fronton porte l’inscription biblique: « Speravit anima
mea », Mon âme a espéré. A l’intérieur, on voit sur un autel de pierre un buste du poète, et devant l’autel une
statue funèbre de Mme de Lamartine. Sur le socle de cette statue sont écrits ces mots: « I1 est plus doux de
s’associer aux deuils des grands hommes qu’à leurs gloires. Leurs douleurs sont à ceux qui les aiment, leurs
gloires appartiennent à tous. Adam Salomon, 1864 ».
Cette chapelle funéraire contient dans son caveau les corps d’Alphonse de Lamartine, le poète, de sa mère
Mme des Roys de Lamartine, de sa belle-mère Mme Birch, de sa femme, de sa fille Julia, de son fils Alphonse mort
à l’âge de 19 mois, et de sa nièce Valentine de Cessiat de Lamartine.
Un détail inédit: pendant les travaux de construction, du tombeau, Lamartine, en le désignant d’un geste,
aurait dit un jour à un certain Geoffroy Myard, mort en 1913 à l’âge de 89 ans: « Tu vois, Geoffroy, ici on viendra en
pèlerinage!». Cette réflexion prophétique fut rapportée bien des fois par ledit Geoffroy à M. l’abbé Roiseau, curé
de Saint-Point de 1902 à 1935 et actuellement archiprêtre de Tramayes. D’autres personnes qui ont connu
G.MYARD rapportent aussi le fait, avec quelques variantes.
Ü A gauche ce la chapelle funéraire de Lamartine se trouve le caveau des familles de Noblet et de
Montherot, descendants directs de Suzanne de Lamartine, sœur du poète, qui épousa Jean-Baptiste de
Montherot. Hélène de Montherot, sa petite fille, épousa à son tour le Comte Jean de Noblet, et eut pour fils le
Comte René de Noblet, propriétaire actuel du château.
Nous ne dirons rien ici du château, car les visiteurs y trouveront, avec d’aimables explications, des
photographies ou cartes postales annotées qu’ils pourront emporter comme souvenirs.
Contentons-nous, dans cette plaquette, de parler de l’église et de ce qui s’y rapporte, de ce qui l’entoure
ou de ce qu’on peut voir de sa plate-forme.
Cette plate-forme ou terrasse, c’est l’ancien cimetière. Il est considéré par les Beaux-Arts comme site
classé, servant de cadre digne d’être conservé à l’église et au tombeau de Lamartine. Il a été utilisé comme cimetière jusqu`en 1896, et fut remplacé alors par un nouveau cimetière qu’on aperçoit en direction du sud, près
de la route de Tramayes. On peut lire, sur les registres de sépulture, et signées car l’Abbé Buttet, les annotations
suivantes: « Jean-Baptiste Chuzeville, cultivateur, ancien jardinier de M, de Lamartine, inhumé le 18 juin 1896,
dernier enterré dans le vieux cimetière, en face de la grande porte de l’église.». Et après « Antoinette Chassagne,
femme Mansiat, première personne enterrée dans le nouveau cimetière, au coin sud-est, le 14 octobre 1896 ».
La cure qu’avait achetée l’Abbé Genillon se trouvait derrière l’abside de l’église, en bas du vieux
cimetière, sur la terrasse du parc du château. Il n’en reste pas trace, sauf le puits. En 1840-41, on construisit une
nouvelle cure, qui est devenue la poste depuis la Loi de Séparation, en 1905. Située en bordure du vieux cimetière,
au sud de l’église cette nouvelle cure de 1840 domine le bourg, et son emplacement est fort bien choisi. On peut
dire que c’est à Lamartine surtout qu’on la doit.
Voici à ce sujet, comme aussi au sujet de la situation des curés de 1800 à 1840, quelques notes consignées
par l’abbé Bouton dans les registres paroissiaux:
1837. «Cette année, 25 janvier, arrivée d’un nouveau curé, nommé depuis le milieu de l’année
précédente.., Mr de Lamartine, qui avait reçu la visite du nouveau curé dans le courant de l’année 1836, avant
son départ pour Paris, s’empressa à son retour de procurer un presbytère, mais les choses ne se firent que
lentement. Il logea en attendant dans une maison de M. l’abbé Genillon située au milieu du bourg, autrefois
auberge et qui le redevint après sa sortie. »
1840 « Cette année au mois de mai fut commencé le nouveau presbytère. Le curé plaça 4 francs sous la
première pierre angulaire. »
« Cette année au mois de septembre, le curé vint occuper la maison de Mr de Lamartine dite l’ancienne
cure.»
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1841 « L’ancienne cure de Saint-Point, vendue a l’ancien curé d’alors, Vincent Genillon, est restée en
son pouvoir jusqu’en 1834, époque à laquelle elle fut par cet Ecclésiastique vendue à Mr de. Lamartine,
propriétaire du château de Saint-Point. La paroisse, ainsi spoliée de l’ancienne habitation de ses pasteurs, les
logeait forcément, tant bien que mal, en maison de loyer, tant dans l’ancienne cure qu’en d’autres, dont la
dernière située au milieu du village, ne convenaient nullement. En 1837, le changement de curé fut aussi
l’occasion d’une amélioration du sort des prêtres à Saint-Point. Mr de Lamartine, voulant procurer au
nouveau curé, qu’il honorait de son estime, et même, selon son expression, de son amitié, un logement plus
convenable, engagea les administrateurs municipaux à voter, sur leurs revenus communaux, une augmentation
de fonds pour construire un presbytère, et non réparer seulement la maison qu’ils avaient achetée au bas du
village. Il fallut toute l’influence du protecteur du curé pour déterminer les votants; ce ne fut même qu’après
plusieurs réunions et délibérations, qu’offrant lui-même une somme de 1000 francs pour faire l’acquisition du
local ( = terrain, emplacement), il détermina les votes dans son sens. L’adjudication, au bout de deux ans, fut
tranchée au mois d’avril 1840; et Jean Lacondemine, charpentier-entrepreneur à Pierreclos, fut chargé de la
construction du presbytère, sur l’emplacement de deux vieilles habitations appartenant, l’une à Claude
Jacquet, acquise par la commune, et l’autre à Aimé Albert, achetée par Mr de Lamartine, et cédée gratuitement
pour augmenter l’emplacement et faire la cour du presbytère. Il fut commencé aux environs du 20 mai 1840, et
ne fut terminé de manière à être habitable qu’à la fin de 1841. Ce fut dans le courant de novembre que le curé
auteur de ce mémoire quittant l’ancienne cure qu’il avait occupée pendant un an, vint enfin se fixer dans le
nouveau presbytère après l’avoir béni sans solennité. »
Lamartine donna donc pour cette cure le terrain, et les matériaux d’une vieille maison achetée de ses
deniers; en compensation il demanda à la commune de se charger de l’entretien de son tombeau à perpétuité.8
Ü La vieille cure ne fut pas démolie tout de suite. Malgré sa vétusté elle était encore solide et elle servit
d’école libre de filles, tenue par les Sœurs du Saint-Sacrement d’Autun, de 1861 à 1891. A cette date, Valentine
de Lamartine, nièce et héritière du poète, qui a laissé dans le pays une grande réputation de bonté et de charité,
fit bâtir une nouvelle école sur un terrain lui appartenant, dans le prolongement du jardin du château et à côté
de la cure de 1840, dont le chemin seul la sépare. Aussitôt après, dans l’hiver 1891-92, elle fit démolir les anciens
bâtiments d’école dont le puits, appelé « puits des Sœurs » subsiste encore à l’extrémité de la terrasse du parc du
coté du bourg.
Ü Puis vinrent les années orageuses de la Loi de Séparation. L’école libre fut fermée en 1902 par ordre
préfectoral. La cure, à la construction de laquelle avaient collaboré Lamartine, la commune et la « fabrique », fut
définitivement considérée comme propriété communale et transformée en poste ; et le curé, expulsé en 1905,
s’installa dans l’école abandonnée par les Sœurs, et qui n’échappa à la loi de spoliation que parce qu’elle
appartenait uniquement au château.
C’est cette école qui est restée la cure depuis. Elle est toujours mise gracieusement à la disposition des
curés de Saint-Point par les châtelains qui ont à cœur de perpétuer ici le culte lamartinien et de conserver les
bonnes traditions. Les anciennes salles de classe ont été transformées en salle de théâtre par M. l’abbé Loiseau
vers 1910 puis munies de bancs en gradins par M. l’abbé Pouly au début de 1937.
Ü Jetons maintenant un regard au loin sur le paysage. De la terrasse de l’église, la vue s étend au sud sur
tout le vallon de Saint-Point, qui prend naissance à Tramayes, chef-lieu du canton situé sur le col qui relie les
deux montagnes.
Ü Sur la chaîne de gauche, on aperçoit le sommet de la «Mère Boîtier », point culminant du Département,
altitude 761 mètres.
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Vers la fin de sa vie, Lamartine, craignant d’être obligé de vendre même le château de Saint-Point, et ne
voulant pas que son tombeau devienne la propriété d’une famille étrangère, fit don à la commune du tombeau et
de son emplacement, avec charge de l’entretenir à perpétuité.
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Ü Devant la « Mère Boitier », sur une croupe qui lui sert de contrefort, entre le hameau de la Chanalle et
les quelques maisons de Gorze, un large chemin herbeux marque l’emplacement d’une ancienne voie romaine.
(Sur la photographie ci-incluse, la voie romaine et la Mère Boitier se trouvent juste au-dessus du bourg, plus
exactement au-dessus de l‘Ecole- Mairie)
Bourg, Voie romaine et la Mère Boitier
Ü De l’église, on peut voir aussi, à peu près, l’endroit où habitait, selon l’opinion commune, le « tailleur
de pierres de Saint-Point ». C était en direction nord-est, derrière le hameau de Joux, à mi-hauteur de la chaîne de
montagnes, à l’angle gauche d’un grand mamelon triangulaire accolé à la chaîne et recouvert en partie de genêts;
on aperçoit là un petit bosquet de sapins, et une maisonnette actuellement inhabitée; la cabane du tailleur de
pierres se trouvait par derrière, à la naissance d’un petit vallonnement. Sur la photographie «église et château»
reproduite ici, c’est l’emplacement marqué approximativement par la pointe du plus haut sapin situé à gauche de
l’école. Le registre des sépultures de 1852 porte la mention suivante : « 7 mars 1852, sépulture de Claude Matray,
dit Claude des Huttes, tailleur de pierres de Saint-Point, âgé de 46 ans.» Sa tombe, malheureusement, n’a pas
laissé de trace dans le vieux cimetière: on n’y planta sans doute qu’une simple croix de bois, qui n’a pas duré
longtemps!
Ü Tout le vallon de Saint-Point est fort pittoresque avec le petit bourg blotti au fond. Comme point final à
cette brève description, permettez un hommage -quelque peu ironique! - à la rivière qui coule dans notre vallon...
ou qui n’y coule pas, car un document de 1666 signale déjà qu’elle est « à sec plus des deux tiers de l’année! ».
L’auteur de cette remarque y va sans doute un peu fort, en résumant ainsi ses impressions. Mais en tous cas,
pendant une bonne partie de l’été 1950, son lit a été complètement asséché au point que la boue s’était durcie
même dans les creux. C’était tout de même exceptionnel!
Un fleuve minuscule,
Le petit Valouzain.
Dans lequel une puce
Pourrait prendre son bain
S’efforce en vain
D’Arroser tous les jardins:
Le résultat c’est rien !
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RESTAURATION DE L’EGLISE
Situation en 1961
Les toitures de lave ont été refaites de Juillet 52 à Juin 53, sauf celle de la chapelle basse de gauche (côté
nord).
En Mai 53 on a découvert, sous les panneaux de plâtre de la voûte du chœur, des peintures anciennes fort
abîmées.
En 53, 54 a été réalisée une installation électrique entièrement invisible.
En Janvier-Février 57, les artisans de St-Point ont fait autour de l’Eglise des caniveaux avec drains endessous, pour recueillir l’eau des toits et assécher la base des murs.
En Octobre-Novembre 58, ils ont refait complètement les plafonds des trois nefs.
En Janvier Février 1960, électrification des cloches, pose d’un carrelage ancien dans la chapelle basse de
gauche; en remplacement d’un plancher pourri placé sommairement sur le sol en terre battue; aménagement et
ameublement de cette chapelle pour les messes de semaine en hiver; réparation de l’autel de St-Amable, dont la
table en bois vermoulu a été remplacée par une table en aggloméré; réparation du mur de soutènement de la
terrasse de 1’église.
En 1961, réparation intérieure de la sacristie (plafond refait ainsi que les enduits des murs, fenêtre neuve,
porte et boiseries repeintes).
Et ce n’est pas fini !... Il reste à s’occuper des vieilles peintures du chœur, de l’ensemble des murs aux
enduits délabrés, et de la toiture non réparée de la chapelle basse de gauche, toiture certainement imbibée de pluie
et qui maintient un peu d’humidité dans la chapelle.
Situation en 1997.
Le chœur a été restauré, le clocher réparé après les méfaits de la foudre de 1990, le tombeau de Lamartine
restauré également en 1988.
SOURCES CONSULTEES
Sources écrites: Histoire de Saint-Point, par L. LEX; Nouveau Guide de Saint-Point, par Louis
CHAUMONT, 1907; les archives paroissiales.
Sources orales: les anciennes familles du pays: M le Comte René de NOBLET, propriétaire du château; et
M. l’abbé ROISEAU, archiprêtre de Tramayes, qui fut curé de Saint-Point, de 1902 à 1935, et qui a connu plusieurs
contemporains de Lamartine.
CET ANTIQUE EDIFICE DOIT ETRE REPARE; TOUT EN GARDANT SON STYLE, IL SERA RENOVE.
VEUILLEZ APPORTER VOTRE OBOLE POUR AIDER A LE BIEN RESTAURER ! Merci.
Photo Desroches, Tramayes.
un modillon de l’abside: objet
inconnu...
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