ROMAN SIGNER

Transcription

ROMAN SIGNER
ROMAN SIGNER
XLVIII. Biennale di Venezia 1999. Svizzera
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Erscheint anlässlich der Ausstellung im Schweizer Pavillon im Rahmen der Biennale in Venedig 1999
Publié à l’occasion de l’exposition au pavillon suisse dans le cadre de la Biennale de Venise 1999
Pubblicato in occasione della mostra nel padiglione svizzero, allestita nel quadro della Biennale di Venezia 1999
Published for the exhibition at the Swiss Pavilion as part of the 1999 Venice Biennale
Ausstellung / Exhibition
Kommissär / Commissioner:
Vizekommissär / Vice Commissioner:
Pressebetreuung / Press support:
Photographie / Photography:
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Urs Staub
Konrad Bitterli
Oliver Wick
Stefan Rohner
Günther Schwarz, Roman Signer
Urs Burger, Arthur Clerici, Stanislav Rogowiec, Tiberio Scalbi, Roland Sutter
Aleksandra Signer, Videicompany, Aufdi Aufdermauer, Karin Wegmüller
Katalog / Catalogue
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Redaktion / Edited by:
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Roman Signer, Peter Zimmermann
Konrad Bitterli, Matthias Wohlgemuth
Jeanne Haunschild (e)
Diane de Rahm (f)
Monica Nolli-Meyer (i)
Peter Zimmermann
Aufdi Aufdermauer, Aleksandra Signer
Nievergelt Policom AG, Zürich, Peter Zimmermann Graphic Design, Zürich
Lichtdruck AG, Dielsdorf
Buchbinderei Burkhardt AG, Mönchaltorf
Herausgegeben vom Bundesamt für Kultur, Bern, im Verlag Edition Unikate, CH-8027 Zürich
Published by Swiss Federal Office of Culture, Berne, with Edition Unikate, CH-8027 Zürich
© 1999 by Bundesamt für Kultur, Bern, Roman Signer, St. Gallen, Konrad Bitterli (Text)
ISBN 3-908617-01-4
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Printed in Switzerland
INHALT / SOMMAIRE / SOMMARIO / CONTENTS
Konrad Bitterli
EREIGNIS-SKULPTUR – Roman Signer an der 48. Biennale in Venedig
.............................................................................
UNE SCULPTURE-EVENEMENT – Roman Signer à la 48e Biennale de Venise
SCULTURA EVENTO – Roman Signer alla XLVIII Biennale di Venezia
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EVENT-SCULPTURE – Roman Signer at the 48th Biennale in Venice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
INSTALLATIONEN AN DER BIENNALE IN VENEDIG / INSTALLATIONS A LA BIENNALE DE VENISE /
INSTALLAZIONI ALLA BIENNALE DI VENEZIA / INSTALLATIONS AT THE BIENNALE IN VENICE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
ARBEITEN FÜR DIE BIENNALE IN VENEDIG / PIECES POUR LA BIENNALE DE VENISE /
OPERE PER LA BIENNALE DI VENEZIA / WORKS FOR THE BIENNALE IN VENICE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
BIOGRAPHIE / BIOGRAPHIE / BIOGRAFIA / BIOGRAPHY
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
AUSSTELLUNGEN / EXPOSITIONS / MOSTRE / EXHIBITIONS
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
BIBLIOGRAPHIE (AUSWAHL) / BIBLIOGRAPHIE (SÉLECTION) / BIBLIOGRAFIA (SELEZIONE) / SELECTED BIBLIOGRAPHY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
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UNE SCULPTURE-EVENEMENT
Roman Signer à la 48e Biennale de Venise
“Quand j’arrive dans une nouvelle ville, je vais généralement à la recherche des
eaux.” 1 Roman Signer
Dans l’œuvre de Roman Signer, l’eau est peut-être le plus important des matériaux.
L’artiste a toujours été fasciné par l’élément naturel sous ses formes multiples. Il a
grandi auprès d’une rivière qui enfle et grossit sous l’effet de la pluie. Durant des
années, il a créé des œuvres qui se rapportent à l’élément aquatique. Autant dire que
l’on peut attendre beaucoup de l’invitation de Roman Signer à réaliser la contribution
helvétique à la 48e Biennale de Venise, cette ville lagunaire. Pour le Pavillon suisse,
l’artiste a créé une suite extrêmement concentrée de pièces, qui ont pour point de
départ son intérêt pour l’architecture du Pavillon, œuvre de Bruno Giacometti, et ses
fréquentes rencontres avec la “Serenissima”. Dans cet esprit, il a rassemblé des installations inspirées par le site ainsi que d’autres travaux, qui constituent un ensemble
reliant des espaces au niveau architectural et mental à la fois. Tout en s’inscrivant dans
l’évolution autonome de son œuvre, la contribution de Roman Signer à la Biennale
ouvre des perspectives multiples sur le site et son histoire mouvementée, ainsi que sur
les eaux maîtresses de la lagune.
Associées à une série de vidéo, les pièces intitulées “Kabine” (1999), “Fahrrad”
(1982/99), “Fontana di Piaggio” (1995), “Gleichzeitig” (1999), “Blaues Fass” (1999),
présentent une vue approfondie sur le travail actuel de Roman Signer. Elles
permettent en outre de faire la somme de sa production artistique.
“J’ai peut-être une autre idée de la sculpture. Elle s’est développée progressivement
à travers mes actions. Je m’y suis toujours senti sculpteur. Il s’agit toujours de
problèmes dans l’espace, d’événement dans l’espace, de temps qui se déroule.” 2
Une conception de la sculpture
Sur la prairie de la Karlsaue à Kassel, l’artiste aligne, à 50 centimètres d’intervalles,
des piles de feuilles de papier blanc pour la machine à écrire, chaque pile comprenant
1’000 feuilles. Il construit ainsi une ligne dans l’espace, en même temps qu’une
sculpture minimaliste au sol, qui rythme le pré par son alternance d’intervalles et de
points plastiques. La structure, cependant, n’est pas conçue comme un objet
statique; il s’agit bien davantage du premier état, provisoire, d’une sculpture
polymorphe. Chacune des 300 piles de papier est équipée d’un explosif et d’une
capsule d’allumage; elles explosent toutes en même temps. Une déflagration, un
nuage de fumée: et voici les 300’000 feuilles propulsées, voltigeant en l’air,
transformant la rigoureuse ordonnance au sol en une paroi blanche, luisant de mille
facettes et retombant doucement en planant. Durant un bref instant seulement,
l’artiste a suscité une forme éphémère dans l’espace, une conformation qui
tourbillonne furieusement, puis retombe lentement sur le sol pour s’y déposer,
comme un champ irrégulier de milliers de feuilles de papier. L’ordonnance d’origine
se trouve transférée vers un autre état, vers une structure chaotique en quelque sorte.
Une chute lente a suivi la force abrupte de l’explosion et la propulsion dans les airs;
un vol méditatif est survenu après la
violente poussée dynamique. Avec virtuosité, l’artiste met en scène les contrastes les
plus extrêmes, notamment des mouvements et des énergies opposés: propulsion
dans les airs et descente en vol plané, concentration et extension.
Comme il le répète inlassablement, Roman Signer s’est toujours considéré comme
sculpteur. Bien que ses créations soient éphémères, il se définit comme tel, même
lorsqu’il crée ses nombreuses actions devant un public, notamment la fameuse action
qui vint conclure la documenta 8/1987.
Sa sensibilité de sculpteur se manifeste clairement dans cette action – Roman Signer
préfère la notion “d’événement”. La sculpture des années soixante tendait à un élargissement des représentations traditionnelles de la forme plastique – la “dématérialisation de l’art” et le fait de rendre visible des processus et des actions en marche.
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A partir de là, en 1971, Roman Signer se consacre surtout à des travaux liés à l’objet
qui donnent à voir les forces de la nature avec une minutie quasi scientifique. Dans
sa démarche artistique, sorte de recherche plastique fondamentale, il s’intéresse
aux potentialités énergétiques inhérentes à la nature et aux propriétés physiques de
substances aussi familières que le sable, la pierre ou l’eau. Cependant, il traduit aussi
en structures éphémères le feu, les fusées, les explosions, ou alors il utilise leur
énergie du moment pour déformer, respectivement pour transformer, des tables, des
chaises, des lits, des tabourets, des bicyclettes, des maquettes d’hélicoptères ou des
tonneaux. Avec les années, ces objets quotidiens constituent une sorte de répertoire,
sélectionné avec précision, comptabilisé, où l’artiste vient puiser pour des
combinaison chaque fois renouvelées. En outre, il se sert de la photo ou du film pour
fixer ses sculptures éphémères, de sorte que ces techniques ont constitué avec le
temps un domaine autonome de sa production.
Dans l’œuvre de Roman Signer, une attitude prédomine sur le plan artistique:
apporter de nouvelles dimensions aux traditions du “Process Art” et redéfinir
l’organisation de la forme sculpturale. Sa notion de la sculpture élargit les catégories
transmises par la tradition en introduisant l’instant du mouvement, l’étalement dans
l’espace, ainsi que la dimension temporelle.
Espace et temps: la structure du travail
Une structure de travail spécifique est à la base de toute la production de Roman
Signer. Elle se divise, comme les états de la matière, en trois phases nettement
distinctes: 1. L’organisation de l’œuvre, le potentiel de transformations formelles possibles – dans l’action de la documenta l’alignement des piles de papiers –, 2. Le processus proprement dit, soit la transformation de ce potentiel en tant qu’action – la
propulsion en l’air et la chute des feuilles –, 3. Les traces du processus achevé – soit
les papiers éparpillés sur le sol en tant que forme en soi. Par conséquent, cette
structure de travail comporte aussi bien le potentiel, possibilité de mouvements
énergétiques à venir, que la transformation en tant que forme éphémère et la trace
d’un événement révolu. Des instants dynamiques et statiques, passés ou futurs, ne
sont pas à comprendre comme des contraires, mais comme les états d’un seul et
même travail.
Ces travaux se caractérisent par une chronologie de la progression en cours de
création, toutes les phases étant reliées par des rapports précis. Ainsi, le plan initial
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se laisse entrevoir, au niveau des idées, dans l’exécution ultérieure, tout comme le
potentiel d’un événement permet de reconstituer par anticipation l’action et les traces
du processus écoulé. Dans chaque œuvre, la présence des objets utilisés force l’imagination à se mouvoir du visuel au mental, et opère avec la différence entre la perception concrète, la privation même de cette perception et la reconstruction du perçu
dans la représentation: “C’est la transparence même de l’événement qui permet à la
réalité de l’action de devenir invraisemblable. Dans un processus de la perception visuelle directe, se dissimule le doute irrationnel quant à la perception réelle des choses.” 3
Contrairement à la tradition du “Process Art”, l’artiste détermine le moment de la
transformation en tant que démarche sculpturale. Dans la relation du passé et du
futur, il définit le temps comme une des dimensions inscrites de la forme sculpturale:
Le travail de Roman Signer présente un spectre finement différencié de structures
temporelles, à commencer par l’“Aktion mit einer Zündschnur” (1989), d’une durée de
35 jours, jusqu’à l’action richement orchestrée, composée de plusieurs parties, à
l’occasion de la réouverture du Kunstmuseum de St. Gall (1987), en passant par
l’action centrée sur le moment qui vint conclure la documenta 8/87 et finalement, son
installation ultra rapide “Vitesse: 2’000 mètres/seconde” (1992): “Déroulement,
simultanéité, durée, soudaineté, continuité, densité et rythme déploient toute une
somme de modes temporels.” 4
Le prolongement de la sculpture par la dimension temporelle aboutit en outre à une
extension déterminée dans l’espace. La dématérialisation et la temporalité de la forme
sculpturale permettent de rythmer et de mesurer des espaces insoupçonnés jusqu’ici,
comme dans l’“Aktion mit einer Zündschnur” déjà citée. Du 11 septembre au 15
octobre 1989, Roman Signer pose une mèche à explosif, qu’il laisse se consumer, à
partir de sa ville natale d’Appenzell jusqu’à son domicile actuel à St. Gall, soit sur une
distance d’une vingtaine de kilomètres. Le cordon est placé le long des rails du
chemin de fer; il se compose de plusieurs longueurs de cent mètres chacune, telles
qu’on les trouve dans le commerce, reliées toutes ensemble à une caisse métallique
d’explosifs remplie de poudre noire. La flamme avance lentement à l’intérieur de la
mèche isolée contre l’humidité, et seul un petit nuage de fumée, à peine perceptible,
signale sa paisible progression. A chaque point d’assemblage de la mèche, le feu, en
avançant, allume une brève flamme pointue, pour reprendre ensuite son parcours
tranquille à l’intérieur du cordon qu’il consume. En passant constamment de la violence
lors de l’explosion à l’imperceptible progression de la braise dans la mèche, l’artiste
reconstruit l’espace et le temps. Dans ces dimensions pourtant mesurables avec une
précision technique, il introduit une subjectivité entièrement nouvelle. De la
concentration extrême à l’extension infinie, de la violence instantanée à la durée
douloureuse. “Il y a beaucoup de lenteur dans la marche de mes travaux. Une mèche
est lente elle aussi. Et puis il y a des déroulements très rapides: quelque chose
tombe sur le sol, quelque chose crève ou explose, ou prend feu. Il y a là derrière le
phénomène de
la force soudaine. L’altération d’un état me fascine au plus haut degré. Lorsqu’un
mouvement lent s’inverse brusquement, comme dans le cas d’une explosion, ainsi la
combustion lente de la mèche et subitement l’éclatement. C’est vraiment une sculpture, une sculpture temporelle, une combinaison de l’extrêmement lent et de l’ultra
rapide.” 5
La sculpture “Aktion mit einer Zündschnur” ne se borne pas à exprimer formellement
le thème du cheminement qui structure l’espace et du temps; Roman Signer la
conçoit aussi comme une métaphore du voyage, de la vie qui va, tout simplement.
Elle englobe le méditatif comme l’éruptif, l’intemporel comme l’éphémère; elle devient
pour l’artiste, qui accompagne longuement l’action, une expérience limite sur le plan
psychique et physique. En introduisant la dimension temporelle, Roman Signer
parvient ainsi à organiser un espace d’une dimension insolite. Ce faisant, il transpose
sur un autre plan un problème fondamental de la sculpture classique – l’espace en
tant que mode de cerner les vides et les volumes. Le caractère du monument
traditionnel se trouve élevé au niveau d’une structure globale. La dématérialisation de
l’objet et l’extension temporelle ont pour effet que la statique et l’objectivité de la
sculpture se dissolvent totalement dans l’invasion des structures spatio-temporelles.
Cabine: l’artiste est présent et absent
Ouverture foudroyante: on entre le Pavillon suisse et l’on découvre soudain la
réplique fantomatique d’un être humain prisonnier d’une caisse grandeur nature.
L’artiste est présent et absent: Roman Signer a imaginé une cabine à l’entrée, qui
cible avec précision le cœur même de sa création artistique. Lors des Biennales
précédentes on pénétrait à travers l’entrée aménagée avec grandeur et l’on se
rendait, après avoir passé la table de réception, sous un couloir couvert dans la cour
et vers les salles d’exposition, mais cette fois, Roman Signer a délibérément détruit
cette succession tranquille par son intervention. En effet, l’atrium ouvert contient un
travail, à la présence directe duquel nous ne pouvons guère nous soustraire.
“Kabine” (1999), dans l’entrée du pavillon, est une simple caisse ouverte, en bois, de
3,20 mètres de longueur, 2 mètres de hauteur et 1,40 mètres de largeur. De l’extérieur, elle fait penser à un de ces corps stéréométriques neutres de l’art minimal, mais
un coup d’œil à l’intérieur révèle aussitôt la différence fondamentale avec le purisme
minimaliste. Au fond de la cabine, en effet, l’artiste a placé une table et une chaise. A
l’avant, entre le sol et le plafond, il a tendu une poutre de bois portant trois boîtes remplies de couleur noire. Elles sont équipées de capsules explosives et reliées les
unes aux autres. L’artiste s’assied derrière la table, les mains posées sur le plateau; il
porte un vêtement protecteur et un casque. Un mécanisme d’allumage déclenche
aussitôt l’explosion: avec une détonation violente, la couleur est propulsée hors des
boîtes, comme du magma volcanique, elle asperge l’intérieur de la cabine, tandis que
le corps et la table apparaissent en image négative sur la paroi postérieure et que les
mains se trouvent également reproduites en négatif sur la table. Une fois de plus,
Roman Signer confronte des mouvements différents: l’explosion violente, dirigée
contre sa propre personne et non sans risques – une brève étincelle –,
l’éclaboussement de couleur qui la suit immédiatement, aveuglant intégralement le
champ de vision.
Et enfin, le lent processus d’assèchement de cette couleur. Sans qu’intervienne le
moindre pinceau, l’action “explosive” devient une peinture dans l’espace, un
autoportrait de l’artiste prisonnier de son propre travail. En outre, Roman Signer
analyse
avec un humour sous-jacent la situation à l’entrée du pavillon: l’artiste est présent à la
table de réception, sa réplique spectrale semble accueillir chaque visiteur personnellement – et ceci même après l’ouverture officielle de la Biennale.
“Kabine” se range dans un vaste groupe d’œuvres comprenant “Selbstbildnis aus
Gewicht und Fallhöhe” (1972), “Figur” (1988), “Hand” (1992) ou “Porträtgalerie”
(1993). A chaque fois, l’artiste – plus exactement son corps ou certaines parties de
son corps – laisse des traces sous forme de réplique en négatif, qui témoignent de
sa présence et respectivement de son absence. Dans la “Porträtgalerie” composée
de plusieurs parties, l’artiste, protégé par son survêtement et son casque, se penche
très bas sur un tonneau de métal tout en déclenchant avec le pied une mise à feu. Une
détonation violente, de la couleur blanche jaillit comme un jet d’eau, arrose le casque
et le survêtement en empêchant l’artiste de voir à travers sa visière. Le portrait perd
son visage, son véritable propos. Il va répéter ce processus par trois fois, avec
chaque fois un autre tonneau en alternant les couleurs blanc et noir. L’action devient
un rituel énigmatique, une sorte d’éblouissement autodestructeur – fixé seulement
dans les tonneaux éclaboussés et dans une séquence photographique qui en serait
partie intégrante. L’aspect ludique de l’événement momentané se fige dans une
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image spectrale. Par la violence du geste, la représentation du portrait se condense
en un impressionnant “monument instantané”.
Serait-ce une métaphore pour l’humanité en cette fin du XXe siècle? C’est bien le sentiment oppressant que nous laisse “Kabine” – malgré son allure d’aimable bienvenue.
Bicyclette: dynamique et statique
de l’absurde, si caractéristique de l’œuvre de Roman Signer. La mise en scène de
“Fahrrad” dans une ville comme Venise, où on ne trouve justement pas de
bicyclettes, atteint un point d’absurdité – dans la réalité comme au sens figuré.
“Dans ma jeunesse, ces vélos m’ont porté sur des collines ou des montagnes, par
la suite j’ai parcouru les forêts et les chemins campagnards. Cela m’a toujours
énormément fasciné. En 1982, j’ai exposé à Utrecht, en Hollande; ce sont peut-être
les cyclistes de là-bas qui m’ont si incroyablement impressionné. J’ai aussi vécu
une expérience antérieure, qui compte encore beaucoup pour moi: j’ai eu la chance
d’être invité une fois par un ami à Pékin. J’ai ainsi passé deux semaines à parcourir
Pékin à bicyclette. […] C’est en 1982/83 que j’ai commencé mon premier travail
comportant une bicyclette. J’en ai seulement fait des photographies pour moi. J’ai
pédalé autour de deux colonnes et j’ai défini cette action comme une sculpture.” 6
“Mon premier travail avec le Piaggio était relié à l’eau: j’avais posé sur l’arrière un
bidon rempli d’eau. L’eau s’écoulait en courbe sur la route à travers un trou percé,
puis j’ai sillonné la région avec le Piaggio. C’était pour ainsi dire une fontaine
mobile, une ‘Fontana del Piaggio’.” 7
“Gelbes Band”, tel est le titre de la pièce réalisée en 1982 sur le thème de la
bicyclette dans le foyer délabré du Kunstmuseum de St. Gall avant sa restauration.
Roman Signer fait plusieurs tours en pédalant autour de deux colonnes monumentales.
Sur son porte-bagages, il a fixé un rouleau de ruban en plastique jaune, qui se déroule pour entourer les deux colonnes et marquer du même coup le chemin parcouru.
Le déplacement dans l’espace est ainsi rendu visible et se matérialise en tant que
structure spatiale, en tant que sculpture.
Deux ans plus tard, l’artiste développe cette idée pour une exposition au Städtisches
Bodensee-Museum de Friedrichshafen. Toujours à bicyclette, il enroule un ruban autour
de quatre colonnes et ce faisant il délimite un carré dans l’espace par son
mouvement tournant. Une fois l’action terminée, le vélo appuyé contre une colonne et
le ruban de couleur entouré plusieurs fois autour des colonnes permettent en leur
qualité de traces de la démarche une reconstruction directe du processus qui s’est
déroulé précédemment. Roman Signer va modifier cette action dans la cour du
Pavillon suisse: “Fahrrad” (1982/99). Cette fois cependant, il fera le tour d’une
colonne seulement. Le déplacement sera néanmoins rendu visible, figé toutefois sur
une position ponctuelle dans l’espace, dans une image tridimensionnelle d’une
immobilité parfaite. La dynamique du processus est encore plus nettement mise en
évidence dans la statique concentrée de l’objet ainsi réduit. Elle suscite une
impression d’absurdité, dont la signification réside précisément dans la contradiction
insurmontable entre la dynamique et la statique, en développant cette qualité obstinée
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Fontana di Piaggio: monument du mouvement
La “Fontana di Piaggio” de Roman Signer est repartie en voyage: après avoir passé
huit jours à Langenhagen en 1995, elle a été montrée en 1997 à Münster, en
alternant les lieux, dans le cadre de l’exposition “Skulptur.Projekte”. Elle se prépare
cette année à faire une halte prolongée à Venise, parquée dans la cour intérieure du
Pavillon suisse. La succession des lieux visités, respectivement le chemin parcouru,
représentent un aspect essentiel de l’œuvre, qui souligne sa mobilité, tout en mettant
en évidence l’absurdité d’une fontaine itinérante: “Au fond, c’est une fontaine
roulante. […] J’imagine aussi une construction où un puissant rayon d’eau jaillirait
vers le toit de la cabine. Toute la cabine se mettrait à sonner et résonner. Ce qui
serait aussi en quelque sorte une fontaine mobile que l’on pourrait ‘garer’ aux
endroits voulus.” 8
“Fontana di Piaggio” se compose, comme son titre l’indique, d’un triporteur bleu d’eau
avec un moteur à deux temps de la marque Piaggio. En fait, il sert surtout à la livraison
des denrées dans les rues étroites des villes italiennes. Le Piaggio, qui se fabrique
encore à Gênes, est en quelque sorte l’archétype du véhicule de livraison dépourvu
du moindre luxe superflu. Il ne possède qu’une petite cabine pour le conducteur avec
un toit de tôle et un pont arrière également couvert. L’artiste a détourné de sa
fonction cet engin simple et unique par sa forme pour en faire une fontaine mobile. Il
a simplement installé à l’arrière une cuve métallique. Un tuyau de caoutchouc noir
amène l’eau d’une hydrante à l’intérieur de la cuve, dans laquelle l’eau est comprimée
par une tuyère. Sous pression, elle jaillit violemment sur le capot en faisant un bruit
de tambour sur la tôle. Le jet comprimé se décompose en une multitude de gouttes,
il forme un nuage d’embruns, puis l’eau retombe dans la cuve. De là, elle clapote à
travers un tube au bout de la cuve puis retombe à l’extérieur du véhicule en formant
une courbe douce. Sur le sol, l’eau se rassemble en ruisselet et finit par disparaître
dans la bouche d’égouts. Dans “Fontana di Piaggio”, l’artiste en virtuose sculpte
l’objet liquide, il en donne à voir les caractères inhérents à travers les états les plus
divers, tels que jet vigoureux, gouttes rebondies, rideau d’embruns fugaces, surface mouvante, petit ruisseau coulant en méandres… On perçoit en outre une autre
dimension propre à la “forme” momentanée de l’eau, à savoir une structure sonore:
bruit du jet, des gouttes, clapotements… Comme une caisse de résonance, le capot
de la cabine amplifie les diverses qualités sonores. Le déroulement du processus dans
le temps est commun à l’eau et au son. Il englobe une fois de plus des vitesses
diverses – mouvements rapides lorsque l’eau jaillit de la tuyère, mouvements lents
quand elle coule au niveau du sol. Un autre niveau temporel, virtuel cette fois, s’ouvre
encore dans la “Fontana di Piaggio”. Il concerne le voyage de la fontaine d’un lieu à
l’autre, du domicile de Roman Signer à St. Gall, en passant par les expositions de
Langenhagen et Münster, et finalement à Venise, où la fontaine demeurera garée dans
la cour du Pavillon pour la durée de la Biennale, comme un événement permanent.9
actuellement, “Fontana di Piaggio” exprime un rapport privé et néanmoins un nouvel
aspect historico-culturel. Amené par bateau et garé dans les Giardini, le mémorial du
Piaggio peut également se concevoir comme un monument à la ville de Gênes. Cette
ville, où l’ancien triporteur est encore fabriqué aujourd’hui, fut autrefois une grande
puissance commerciale et la rivale historique de la “Serenissima” dans le bassin
méditerranéen… Or, s’il est une ville en Italie où le Piaggio ne marque pas le paysage
quotidien, où il n’assume aucune fonction véritable, c’est certainement Venise et c’est
là justement que Roman Signer a placé son monument à la voiture et à l’eau, aussi
paradoxal
que complexe: “Signer est indiscutablement un virtuose de la simplicité complexe, de
l’ironie, de l’absurde, bref, du grotesque élevé au niveau du sublime.” 12
Simultanément: mise en forme plastique
Dans la “Fontana di Piaggio”, la très ancienne tradition culturelle de la fontaine
rencontre une conquête relativement nouvelle, celle du trafic motorisé. Avant
l’introduction de l’amenée d’eau, les fontaines étaient des lieux d’importance centrale.
La présence d’une fontaine signifiait la vie. C’est pourquoi, depuis très longtemps
déjà, ces endroits étaient signalés par de riches installations. En dépit du mouvement
de l’eau toutefois, la fontaine appartient au domaine de la statique; elle est le lieu où
l’eau est rassemblée. Au contraire, le véhicule sert à avancer, à changer
constamment de
lieu. L’oeuvre joue précisément sur l’incompatibilité entre la statique de la fontaine et
la dynamique du moyen de locomotion. D’une part, elle marque un élargissement
rafraîchissant, une conversion contemporaine de l’ancienne tradition de la fontaine.10
D’autre part, elle célèbre mélancoliquement la mémoire du Piaggio, cet archétype
merveilleux de la locomotion motorisée. La déclaration d’amour à l’eau et au Piaggio
est caractéristique de la relation étroite, intime, que Roman Signer entretient avec les
matériaux de son travail, avec “ses” objets.
“Il faut tout d’abord savoir que le Piaggio est un moyen de locomotion très utile, et
ce n’est qu’après que nous comprendrons ses autres possibilités. Il m’est difficile
d’expliquer ce que le Piaggio signifie vraiment pour moi. […] Le Piaggio est une
construction fantastique, je dirais même géniale. Si nous étions obligés d’aller à
pied, une telle idée nous serait peut-être venue à l’esprit.” 11
Roman Signer a déjà consacré plusieurs œuvres à son véhicule pétaradant, notamment
“Piaggio” (1992) ou “Piaggio mit Fass” (1993). A l’endroit où elle se trouve
A l’inverse de la “Fontana di Piaggio” avec sa vivacité jaillissante, les installations du
Pavillon suisse dégagent une impression de calme insolite. Pourtant ces travaux sont
aussi nés dans le mouvement et la violence, en particulier l’installation “Gleichzeitig”
(1999) dans la première salle.
Roman Signer relie l’architecture claire du pavillon et son plafond, élégante
construction d’ingénieur, avec l’ordonnance rigoureuse des dalles du sol au moyen
d’un travail qui met en évidence l’instant de la chute libre. Dans ce but, l’artiste utilise
la structure d’éclairage zénithal, qui fut introduite ultérieurement, pour y suspendre
117 pesantes boules bleues en fer. Elles sont attachées à une barre métallique avec
des ficelles munies d’une capsule inflammable et forment ainsi une trame régulière de
9 fois 13 éléments. Au sol, sous chaque boule, un bloc d’argile est posé. Les blocs
forment ensemble un champ de 9 fois 13 carrés et reflètent au niveau du sol la
structure du plafond. Toutes les ficelles sont allumées et brûlent en même temps: les
boules tombent simultanément sur les plots et s’enfoncent dans la glaise qui, en
séchant lentement, fixe la trace des événements “chute” et “choc”. La lente
dessication de la terre déformée succède au mouvement bref de la combustion de la
ficelle ainsi qu’à la rapidité de la chute. Ici encore, on reconstruit mentalement ce qui s’est produit en se
basant sur les traces du processus achevé, à savoir les restes de ficelle roussie qui
pendent à la construction du plafond, les boules de fer enfoncées dans les plots
d’argile. En outre, le processus complet est enregistré par une camera vidéo et filmé
au ralenti. Le compte rendu filmé reproduit la représentation, les boules, toutefois,
19
ne tombent pas “simultanément” comme le suggère le titre de l’œuvre, mais avec un
très léger décalage dans le temps. La camera montre ce qui échappe à l’œil en
raison de l’extrême rapidité de l’action. Le moyen technique compense la perception
visuelle et permet une infime différentiation entre plusieurs processus temporels
identiques en soi. La technique dépasse donc la perception humaine ce qui nous
ouvre des perspectives absolument angoissantes.
Un potentiel extraordinaire d’extension au niveau des idées est investi dans les
éléments et les matériaux utilisés. La boule, avec la perfection de sa forme plastique,
permet des associations contradictoires: concentration et mouvement, caractère ludique et symbole guerrier. Les arsenaux de la puissante flotte vénitienne ne se trouvaient-ils pas tout près des Giardini d’aujourd’hui? La couleur bleue présente, d’autre
part, un côté imagé, caractéristique de la préférence de Roman Signer pour le rouge
et
le bleu. En fin de comptes, elle s’oppose au fer et développe grâce à cela une poésie
visuelle autonome. L’argile aisément déformable contraste avec la dureté du métal.
Ce matériau par excellence de la création plastique fait allusion au travail manuel
classique, à la formation d’objets à partir d’une masse amorphe. Avec une ironie
discrète, Roman Signer semble se livrer à un commentaire sur la représentation
traditionnelle de la sculpture, d’autant plus que la forme définitive se livre à travers le
processus aléatoire et finalement ingouvernable.
“Il ne m’a jamais suffit de faire quelque chose de fermé; j’ai toujours recherché le
changement. Soit que je l’aie introduit personnellement ou que j’aie laissé faire la
nature. […] Il s’agit d’un processus de travail, au même titre qu’un sculpteur qui
taille une pièce dans un bloc de marbre.” 13
Comme c’est le cas si souvent dans la création de Roman Signer, les décisions
esthétiques se limitent aux conditions fixées par le cadre, à l’intérieur desquelles la
forme se construit d’elle-même. Déjà dans ses plus anciens travaux de 1972, l’artiste
a mis à l’épreuve ce potentiel de la mise en forme et de la conservation de celle-ci.
Ainsi “Selbstbildnis aus Gewicht und Fallhöhe” n’est pas un portrait au sens usuel; le
travail est de nouveau le résultat d’un processus: l’artiste a sauté d’une hauteur de
45 centimètres sur un bloc de terre glaise encore humide, en laissant sur l’argile les
empreintes de ses pieds. Cet ancien autoportrait tient lieu littéralement de définition
artistique d’un emplacement et proclame, exactement comme “Kabine”, la présence à
travers la non-présence. Sur le plan des idées et de l’actualité, “Gleichzeitig” est issu
de cette chute répétée.
20
Le tonneau bleu: une tranchée dans le champ
Un étroit passage conduit de la grande salle où se trouve l’installation “Gleichzeitig”
vers la salle des sculptures plus petite. Ce corridor sert d’espace d’introduction,
d’une part parce qu’on y présente une documentation vidéo sur les œuvres de l’artiste.
D’autre part, Roman Signer utilise ce couloir comme rampe de lancement pour
l’installation dans la dernière salle. A la combinaison de structures architecturales –
long corridor débouchant sur un espace carré – Roman Signer a réagi par
l’installation “Blaues Fass” (1999), dans laquelle un mouvement d’une énergie
violente vient heurter un champ concentré. Une rampe est installée dans le corridor à
cheval sur la porte. A partir de là, un tonneau bleu, rempli de l’eau, roule dans la salle.
Celle-ci est équipée d’un sol en contreplaqué recouvert de milliers de minces tiges
de bois d’une hauteur d’un mètre. Le tonneau massif y creuse une tranchée en
culbutant les tiges délicates. L’action du tonneau qui roule et renverse les tiges
demeure visible en tant que traces dans le champ.
A maintes reprises, Roman Signer a créé des installations dans lesquelles un
mouvement orienté venait frapper un champ statique . La plus récente d’entre elles
date du printemps 1999: c’est la “Sandinstallation” dans le “haus bill”. Après avoir
répandu un champ de sable dans un cabinet d’exposition, l’artiste se fraie, au moyen
d’une pelle à neige, un chemin de la porte à la fenêtre opposée, puis il abandonne
son outil devant la vue ouverte vers l’extérieur, en guise de témoignage du processus
achevé.
Cependant, il peut se produire qu’un mouvement en rencontre un autre. Ainsi, à la
Kunsthalle de Wil en 1993, l’artiste a actionné deux tonneaux au moyen d’un allumage
et les a fait rouler sur deux rampes opposées, de manière qu’ils se heurtent
violemment. Leur avance se trouve brusquement stoppée par le choc de la rencontre;
les deux tonneaux se brisent chacun dans une direction différente avant de
s’immobiliser pour finir. La collision, incident quotidien dans notre univers mobile, se
trouve simulée par l’artiste comme dans une mise en scène de laboratoire et parvient
à incarner l’emblème général de la destruction. A l’opposé de ce violent
carambolage, choc survenu dans une recherche artistique de laboratoire, l’installation
intitulée “Blaues Fass” manifeste une poésie douce. Elle engendre des images qui
nous rappellent des culbutes enfantines dans les hautes herbes ou encore ces
grandes moissonneuses qui taillent une large tranchée dans les blés mûrs et dorés.
Le monde des choses: images et métaphores
“Kabine”, “Fahrrad”, “Fontana di Piaggio”, “Gleichzeitig”, “Blaues Fass”: les titres de
Roman Signer sont d’une sobriété inhabituelle. On retrouve ce caractère élémentaire,
cette économie manifeste, dans les objets utilisées pour ses sculptures: caisses de
bois avec table et chaise, bicyclette, ruban de plastique, eau, Piaggio, boules bleues,
plots de terre, un tonneau bleu, des tiges de bois. Avec cela, on a fait le tour de tout
son répertoire de “matériaux”, à quelques exceptions près: un kayak, des raquettes,
un hélicoptère, un ventilateur. Ces objets semblent tous familiers; ils entretiennent un
rapport au monde à la fois direct et peu spectaculaire. Toutefois, Roman Signer
n’utilise généralement pas “ses” objets conformément à leur fonction usuelle, mais il
les soumet à des processus complexes ou à des expériences explosives qui ont le
pouvoir de libérer un potentiel inhérent au monde des choses, stratifié en
significations multiples. Sous l’effet de la transformation artistique, ce qui nous est
familier devient brusquement étranger, l’objet fonctionnel nous semble inepte ou
complètement absurde. Dans le monde quotidien, l’œuvre de Roman Signer dévoile
un sens caché aussi réjouissant que vertigineux et terrifiant.
Ce potentiel d’associations, riche en images comme en métaphores, existe
naturellement dans les choses. Or, c’est justement par cette conjoncture que le
travail de Roman Signer se distance de la tradition du “Process Art”. A la fin des
années soixante, ce qu’on appelait “New Sculpture” s’efforça de refouler les niveaux
de significations possibles au profit de la dynamique propre à la matière pure et de
l’autonomie
de la forme. Roman Signer, au contraire, admet de nouveau la possibilité d’éveiller
des images marquantes, archétypiques, ainsi que des métaphores visuelles complexes. Ses matériaux de travail sont pénétrés par des expériences personnelles, ils
sont intimement reliés à son propre vécu, aux souvenirs d’enfance dans sa patrie
d’Appenzell, à la puissance de l’eau de la Sitter et aux entreprises artisanales des
environs.
“Il faut que je m’occupe de l’éphémère. Peut-être est-ce un sentiment tragique que
je porte en moi, l’absurde, l’insensé, l’inutile de nos actions humaines? ” 14 Par
l’introduction de la dimension temps, par la visualisation de la fuite du temps, les
œuvres de Signer deviennent des sculptures instantanées, des symboles
contemporains
de la vanité: “Les gouttes, les explosions marquent des instants dans lesquels
personne ne peut exister.” 15 Sur cet emplacement dressé entre la présence et
l’absence, l’artiste crée des symboles d’énergies constructives et de forces
destructives aussi fugaces qu’attachants, aussi absurdes qu’impressionnants.
Avec des moyens minimes, en se bornant à “charger” le monde des choses profanes,
Roman Signer engendre une nouvelle forme de la métaphore, exemplaire de l’art
contemporain. Sa création se rattache à la tradition du “Process Art” et le relie aux
stratégies contemporaines, avec les hybrides souvent cités de l’art et de la vie. La
vive fascination que son œuvre exerce sur la génération actuelle des artistes tient à la
radicalité de la recherche artistique ainsi qu’à la réévaluation déterminante du
concept de sculpture des années soixante. Car Roman Signer n’étend pas seulement
la sculpture à la dimension temporelle – en introduisant le temps réel dans l’art, il le
relie à la vie —, mais il dégage aussi d’importantes dimensions sur le plan métaphorique
et existentiel. Celles-ci se condensent dans l’événement artistique, dans la
confrontation corporelle avec les forces de la nature déchaînées, constructives aussi
bien
que destructives. Dans ce genre de travaux, dont “Kabine” demeure exemplaire, le
potentiel se décharge dans l’instant de l’explosion, le passé se fige dans le moment.
L’artiste a personnellement diagnostiqué comme une “convoitise” la provocation des
forces naturelles et la confrontation directe avec le danger: “Je m’intéresse au danger,
à l’approcher de tout près. Quoiqu’il en soit, c’est presque une convoitise, je dois
simplement faire cette expérience, il faut que je traverse ce tunnel, que je prenne ce
risque, que je passe par ce trou d’aiguille.” 16
Provoquée par la prise de risque directe dans l’action, marquée par la participation à
une expérience concrète, l’œuvre de Roman Signer a acquis de la densité et s’est
chargée d’un poids existentiel. Par le choix précis des objets habités par le vécu, par
les sculptures qui font éclater les dimensions, la notion plastique contemporaine se
rattache à l’accomplissement de la vie. L’œuvre de Roman Signer se définit au point
d’intersection entre la sculpture contemporaine et l’emblème existentiel. Or c’est
précisément à partir de cette superposition délibérée qu’elle agit en ouvrant la voie
aux stratégies complexes de l’art contemporain.
Konrad Bitterli
21
Annotations
1 Entretien entre Roman Signer et Susanne Jacob, dans: Kaspar König, éd.: Skulptur.Projekte in Münster
1997, Münster: Westfälisches Landesmuseum, 1997, p. 391.
2 Entretien entre Roman Signer et Lutz Tittel, dans: Lutz Tittel, éd.: Treffpunkt Bodensee: Drei Länder –
drei Künstler, Friedrichshafen: Städtisches Bodensee-Museum, 1984, p. 83.
3 Roland Wäspe: “Spuren der Zeit. Zur kunsthistorischen Situierung der Skulptur von Roman Signer”,
dans: Konrad Bitterli, Lutz Tittel, Roland Wäspe: Roman Signer. Skulptur, St. Gall: Kunstmuseum,
1993, p. 22.
4 Gerhard Mack: “Roman Signer”, dans: Kritisches Lexikon der Gegenwartskunst, Munich, n°. 30/1995,
p. 6.
5 voir note 2, p. 84.
6 voir note 2, p. 83.
7 Entretien entre Roman Signer et Peter Liechti, dans: Laurence Gateau, éd.: Roman Signer. Mon voyage
au Creux de l’Enfer, Thiers: Creux de l’Enfer, Centre d’art contemporain, 1993, p. 6.
8 idem, p. 7.
9 Le même Piaggio a été utilisé ultérieurement dans d’autres travaux, de sorte que son voyage passe
également par Thoune et Thiers. Voir à ce sujet idem.
10 Roman Signer a déjà réalisé une série de projets avec de l’eau pour des espaces publics et il a
renouvelé la tradition de la fontaine pour l’époque contemporaine. Voir à ce sujet Elisabeth KellerSchweizer: Roman Signer. NICHT ausgeführte Projekte für den öffentlichen Raum, St. Gall: Typotron,
1994.
11 voir note 7, p. 6, 11.
12 Colin de Land: “In Sachen Roman Signer”, dans: Parkett, n° 45/1995, p. 156.
13 Entretien entre Roman Signer et Gerhard Mack, dans: Mack, 1995, voir note 4, p. 14.
14 idem, p. 15.
15 voir note 4, p. 10.
16 voir note 2, p. 90.
22
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Miriam Bers: “Roman Signer – Über Faszination und
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in: David Maas, Ed.: Station Deutschland, Berlin:
Künstlerhaus Bethanien, 1996, p. 14–15.
Renate Damsch-Wiehager: ”Roman Signer in der Villa
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Roman Signer, Jean Tinguely, Esslingen: Galerie der
Stadt Esslingen, Villa Merkel, 1996, p. 14–31.
1997
Marie-Theres Suermann: “Roman Signer”, in: Nike,
München, No. 34/1990, p. 41–42.
Hannelore Paflik-Huber: Kunst und Zeit. Zeitmodelle in
der Gegenwartskunst, München: Scaneg, 1997,
p. 52–56.
Max Wechsler: “Roman Signer. Der Sprengmeister als
Konstrukteur”, in: Das Kunst-Bulletin, Bern, No. 6/1992,
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1993
Pascal Pique: “Roman Signer. Expérimentation”, in:
Blocnotes, Paris, No. 3/1993, p. 29.
Konrad Bitterli: “Roman Signer. An explosive self-portrait”,
in: Flash-Art, Mailand, Vol. XXVI, No. 170/1993, p.
76–77.
1995
Konrad Bitterli: “Roman Signers skulpturale Ereignisse”,
in: Parkett, Zürich, No. 45/1995, p. 122–126.
Susanne Jacob: “Roman Signer – Wasser. Zwischen
Versuchsanordnung und Ereignis-Skulptur”, in: Kaspar
König, Ed.: Skulptur.Projekte in Münster 1997, Münster:
Westfälisches Landesmuseum, 1997, p. 390–395.
Colin de Land: “In Sachen Roman Signer”, in: Parkett,
Zürich, No. 45/1995, p. 154–156.
1998
Francesco Bonami, Ed.: Unfinished History, Minneapolis:
Walker Art Center, 1998, p. 88.
1999
Gerhard Mack: “Die Linie und die Gewalt. Anmerkungen
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Thomas, Ed.: Christian Herdeg, Tumi Magnússon, Roman
Signer, Bernard Tagwerker, Zumikon: haus bill, 1999,
p. 54–65.
Jean-Yves Jouannais: “Roman Signer: Prometheus’
Rückstand”, in: Parkett, Zürich, No. 45/1995, p.
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Christoph Doswald: “Skulpturale Versuchsanordnungen”,
in: Parkett, Zürich, No. 45/1995, p. 129–131.
Pia Viewing: “Bruch oder Kontinuität”, in: Parkett, Zürich,
No. 45/1995, p. 142–143.
Max Wechsler: “Aktion mit einer Zündschnur: Exkursion
einer Explosion”, in: Parkett, Zürich, No. 45/1995,
p. 144–146.
1996
Konrad Bitterli: “Roman Signer. Lineare Strukturen in
Raum und Zeit”, in: Grenzgänge der Zeichnung.
Jahrbuch ’96, Nürnberg: Institut für moderne Kunst, 1996,
p. 78–84.
1997
Max Wechsler: “Roman Signer. Aktion mit einer Zündschnur”, in: Paolo Bianchi Ed.: Atlas der Künstlerreisen,
Kunstforum International, Ruppichteroth, Vol. 137/1997,
p. 256–259.
Zeitschriften (Auswahl) / Selected Periodicals
1977
Fritz Billeter: “Roman Signers Spiel mit Energie und dem
Elementaren”, in: Das Kunst-Bulletin, Bern, No. 10/1977,
p. 17–22.
1981
Rudolf Hanhart: “Roman Signer, Filminstallation”, in:
Mitteilungsblatt der Kunstgesellschaft Zürich, Zürich,
No. 3/1981, p. 17–19.
1983
Bernhard Bürgi: “Roman Signer”, in: Das Kunst-Bulletin,
Bern, No. 10/1983, p. 12–15.
1987
Armin Wildermuth: “Aktionskunst in Aktion. Ein Bericht
aus Kassel”, in: Bulletin der Kulturwissenschaftlichen
Abteilung der Hochschule St. Gallen, St. Gallen,
No. 17/1987, p. 5–6.
1988
Tina Grütter: “Roman Signer – Skulpturen”, Begleittext
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