Volume 89 (2).QXD - Canadian Journal of Public Health

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Volume 89 (2).QXD - Canadian Journal of Public Health
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La satisfaction, l’autonomie des usagers et
l’économie réalisée pour le système de santé par
l’utilisation du service Info-Santé CLSC de la
région de Québec ont été évaluées dans la période 48-72 heures suivant un appel à ce service.
Les données ont été obtenues lors d’une relance
téléphonique auprès d’un échantillon aléatoire
proportionnel de 394 appels d’usagers représentatifs de 58 676 appels au service Info-Santé. Les
résultats révèlent un taux de satisfaction élevé
chez la très grande majorité des répondants
(> 90 %) pour la majorité des 14 indicateurs utilisés
pour mesurer la satisfaction. Le délai d’attente
jugé trop long pour obtenir la communication
avec l’infirmière et l’incohérence des informations reçues d’autres professionnels pour le
même problème constituent les deux seules
sources d’insatisfaction. Une proportion de
91 % des usagers n’ont pas eu à rappeler InfoSanté pour le même problème. La majorité des
répondants (83 %) font les actions suggérées par
les infirmières et 97 % le font conformément
avec ce qui a été recommandé. Une proportion
de 89 % se disent capables de résoudre le problème s’il se présentait à nouveau. Dans
l’hypothèse de l’inexistence du service InfoSanté, une proportion de 76 % des usagers
auraient eu recours à une ressource médicale
pour résoudre le problème. Si ces personnes
mettaient à exécution leur intention, on estime
qu’il en coûterait annuellement près de deux
millions de dollars de plus au système de santé
québécois pour la seule région de Québec.
A B S T R A C T
Satisfaction, self-care and cost savings resulting from the use of CLSC’s Info-Santé service of
the Québec region have been evaluated in the
period 48-72 hours after the user’s call to the
service. Data have been collected by a telephone
survey on a random sample of 394 users.
Results show a very high rate of satisfaction with
the majority of the 14 selected indicators. The
waiting time until connection with a nurse was
the main source of dissatisfaction.
Approximately 91% of callers did not have to
call back the service for the same problem. The
majority of users (83%) carried out the actions
recommended by the nurse, and 89% felt they
would be able to handle the problem if it
recurred. If Info-Santé did not exist, 76% of service users declared that they would have visited
a doctor to solve their problem. If they had
done so, it would have cost an estimated nearly
two million dollars to the Québec Government.
MARCH – APRIL 1998
Info-Santé CLSC :
Un service efficace ?
Louise Hagan, PhD,1 Gaétan Garon, MD 2
Le service Info-Santé CLSC s’inscrit
dans un ensemble de mesures visant à
réduire l’achalandage des urgences des
hôpitaux. L’objectif général visé par ce service est d’offrir à tous les citoyens de la
région sociosanitaire de Québec, une
réponse téléphonique bilingue, facilement
et rapidement accessible, pour des besoins
d’information, d’évaluation, d’apprentissage, d’orientation et de référence dans une
approche globale de la santé et ce, 24
heures par jour et 7 jours par semaine. Il
doit être d’accès rapide.
Le service Info-Santé CLSC est établi
dans la région de Québec depuis 1984. Au
cours de l’année 1993-94, un nombre de
203 600 appels ont été traités par les infirmières.1 Au moment de l’étude, Info-Santé
CLSC était centralisé dans un point de service sous la responsabilité du CLSC
Haute-Ville de Québec et il desservait huit
des neufs territoires de CLSC de la région
sociosanitaire de Québec (03). Le service
était donc disponible à une population de
586 825 personnes réparties sur l’ensemble
de ces territoires.
Le but de l’étude est d’évaluer l’efficacité
du service Info-Santé CLSC de la région de
Québec (03) concernant trois aspects : la
satisfaction et l’autonomie chez les usagers
et l’économie réalisée.
1. Faculté des sciences infirmières et Membre du
Centre de recherche sur les services communautaires, Université Laval
2. Directeur général, CLSC Haute-Ville
Organisme subventionnaire : Régie régionale de la
santé et des services sociaux de Québec
Correspondance : Madame Louise Hagan, Faculté
des sciences infirmières, 4106 Pavillon Paul-Comtois,
Université Laval, Québec (Qc) G1K 7P4, Tél. : 418656-2131 ext. 3505, Téléc. : 418-656-7747,
C. électr. : [email protected]
MÉTHODOLOGIE
Il s’agit d’une étude évaluative descriptive réalisée sur un échantillon aléatoire
proportionnel à l’achalandage par quart de
travail (jour, soir, nuit) de 394 appels
d’usagers au service Info-Santé général
(niveau de confiance 95 %, précision 5 %).
L’échantillon est représentatif du nombre
total d’appels traités à Info-Santé pour la
période de décembre 1995 à mars 1996,
soit 58 676 appels. Un sous-échantillon
aléatoire proportionnel (n = 97 appels
d’usagers) a aussi été constitué pour permettre l’analyse de conformité entre les actions
et les orientations suggérées par l’infirmière
lors de l’appel initial de l’usager et les
actions déclarées faites par ce dernier suite
à l’appel au service Info-Santé.
Les données ont été recueillies lors d’une
entrevue téléphonique de relance d’une
durée moyenne de 13 minutes, à l’aide
d’un questionnaire d’entrevue structuré et
préalablement testé selon les règles d’usage
pour assurer le maximum de validité et de
fiabilité.
La satisfaction de l’usager a été évaluée à
partir de 14 indicateurs reflétant la qualité
de deux aspects du service : la relation
interpersonnelle entre l’infirmière et
l’usager et le processus du traitement de
l’appel. Ces indicateurs sont les suivants :
l’accessibilité, la courtoisie, l’empathie, le
respect de la personne, le partenariat, le
support, la sécurisation, la disponibilité, la
compréhension du problème de l’usager,
l’adéquation des solutions proposées, la
communication, la cohérence, la fiabilité et
la précision des informations et la réponse
au besoin d’information de l’usager. Le
niveau de satisfaction globale de l’usager à
l’égard du service Info-Santé a également
été évalué.
CANADIAN JOURNAL OF PUBLIC HEALTH 125
SATISFACTION, AUTONOMIE ET ÉCONOMIE
L’autonomie de l’usager fait référence
aux apprentissages (connaissances et
habiletés) résultant du traitement de
l’appel par Info-Santé.
L’économie réalisée fait référence à l’estimation des coûts épargnés au système de
santé québécois. Cette estimation est basée
sur les coûts unitaires des services de santé
et des services professionnels.
RÉSULTATS
Le profil des répondants
Les personnes ayant participé au sondage
sont majoritairement des femmes
(femmes = 83 % vs hommes = 16 %). La
moyenne d’âge des personnes interrogées
est de 36,5 ans (médiane : 33 ans ; écart
type = 13,5 ans ; étendue = 16 à 90 ans).
Une proportion de 7 % sont des personnes
âgées de 65 ans et plus. La plupart (74 %)
vivent avec un conjoint ainsi qu’avec des
enfants (69 %). La majorité des personnes
(51 %) a complété des études secondaires,
28 % ont fait des études collégiales et
21 % possèdent une formation universitaire. Les personnes qui font appel au service pour elles-mêmes sont généralement
(68 %) inquiètes de leur condition et se
perçoivent comme étant très ou assez
malades (83 %). Dans 53 % des cas, l’utilisateur du service Info-Santé est un intermédiaire, c’est-à-dire une personne qui
appelle à l’intention d’un membre de la
famille (98 %)—un enfant de trois ans et
moins assez souvent (25 %).
Une proportion de 68 % des raisons
d’appels consistent en une demande de
conseils reliés à des manifestations de signes
et symptômes spécifiques à un système
physiologique particulier : le système
gastro-intestinal (27 %), le système respiratoire
(13 %), l’ORL (yeux, oreilles, nez, gorge)
(9 %), le système cutané (9 %) et finalement
le système ostéo-articulaire (8 %).
La satisfaction des usagers à l’égard du
service Info-Santé
Le tableau I présente les résultats
observés sur l’ensemble des 14 indicateurs
de satisfaction utilisés. On observe une très
grande satisfaction (> 90 %) des usagers
sur plus de 85 % des indicateurs. L’accessibilité et l’incohérence perçue par les
usagers de l’information reçue d’autres
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TABLEAU I
La satisfaction des usagers à l’égard du service Info-Santé
Les indicateurs de la satisfaction
% totalement ou plutôt en
accord avec l’énoncé*
La relation interpersonnelle entre l’usager et l’infirmière
Délai d’attente raisonnable
Courtoisie
Empathie
Respect de la personne
Partenariat
Support de l’intervenante
Sécurisation
Disponibilité
42
100
99
100
91
94
98
100
La qualité du processus du traitement de l’appel
Compréhension du problème
Solutions convenables
Facilité de compréhension des informations et conseils
Cohérence des informations reçues
Précision des informations et conseils
Quantité convenable d’information
98
98
100
55
99
95
La satisfaction générale à l’égard du service Info-Santé
Ferait encore appel au service Info-Santé pour un autre problème 100
Cote moyenne (%) de satisfaction générale à l’égard du
service Info-Santé (mesurée sur échelle 0 à 10)
89
* Les pourcentages sont arrondis
professionnels consultés pour le même
problème constituent les deux seules
sources d’insatisfaction. La satisfaction
globale à l’égard du service Info-Santé est
de 89 %.
L’autonomie des usagers
L’autonomie fait référence à la capacité
d’auto-soin développée par l’intervention
éducative de l’infirmière d’Info-Santé. Elle
est évaluée à partir de la perception des
usagers.
Une proportion de 88 % des répondants
(N = 345) ont affirmé que le service InfoSanté a été la première ressource consultée
pour résoudre le problème. Nous présentons ici la synthèse des faits saillants des
résultats de l’étude :
• 94 % affirment qu’Info-Santé les a
motivés à faire par eux-mêmes tout ce
qu’ils étaient en mesure de faire pour
résoudre le problème;
• 34 % acquièrent de nouvelles connaissances et 53 % confirment ce qu’ils
savent déjà;
• 100 % jugent les informations et les
conseils faciles à comprendre;
• 91 % n’ont pas eu à rappeler Info-Santé
pour le même problème depuis l’appel
initial;
• 86 % ne ressentent pas le besoin de consulter une autre ressource pour résoudre
le problème;
REVUE CANADIENNE DE SANTÉ PUBLIQUE
• 89 % s’estiment capables de régler euxmêmes le même problème s’il se présentait de nouveau.
• 83 % mettent en application les actions
recommandées (85 % prévention
secondaire);
• 97 % appliquent les actions de soins et
traitements pour contrôler les signes et
symptômes et 23 % déclarent faire les
actions de surveillance des signes et
symptômes;
• 84 % consultent à court terme une
ressource médicale (médecin généraliste
54 %) pour résoudre le problème
lorsque recommandé par l’infirmière;
Les variables le plus souvent associées
aux actions sont l’âge et la scolarité. Les
liens statistiques observés sont toutefois
trop faibles pour avoir une portée pratique
pour l’intervention à Info-Santé.
L’économie réalisée
L’économie réalisée est estimée à partir des
intentions exprimées par les usagers. Nous
avons en effet demandé à l’ensemble des
répondants d’indiquer vers quelles ressources
ils se seraient dirigés si Info-Santé n’existait
pas. Les résultats révèlent que le service
d’urgence est encore la première ressource
envisagée (31 %) en l’absence du service
Info-Santé. La deuxième ressource envisagée
est le médecin de famille ou médecin
généraliste (27 %), suivie du CLSC (6 %)
VOLUME 89, NO. 2
SATISFACTION, AUTONOMIE ET ÉCONOMIE
ou de la clinique externe d’un hôpital (6 %).
Le recours à un médecin spécialiste n’est pas
souvent mentionné (4 %). Un faible pourcentage (6 %) n’aurait pas consulté une
autre ressource de toute manière. Enfin,
dans certains cas, les gens auraient consulté
d’autres types de ressources telles un pharmacien (5 %) et d’autres (7 %) auraient eu
recours à un parent ou à un ami. Quelle que
soit la nature du lieu physique de la
ressource envisagée, il semble y avoir un
dénominateur commun dans les intentions
des usagers du service Info-Santé : en
l’absence du service Info-Santé, une proportion de 76 % auraient consulté une ressource
médicale, le plus vraisemblablement un
omnipraticien dans l’une ou l’autre des
structures du système de santé (urgence,
clinique externe, cabinet privé).
La liste analytique des activités principales par sous-centre et par établissement
pour l’année financière terminée le 31 mars
1995, 2 le budget annuel 1995-96 3
d’Info-Santé et les statistiques de la
RAMQ4 ont servi de base pour comparer le
coût unitaire moyen d’une visite à l’urgence
et en clinique externe avec le coût unitaire
d’un appel à Info-Santé : visite à l’urgence
(52,39 $), clinique externe (15,41 $) et
Info-santé (10,63 $). L’honoraire du
médecin n’étant pas comptabilisé dans ce
montant puisqu’il s’agit d’un coût défrayé
par la RAMQ, nous y avons ajouté le coût
minimal pour un examen ordinaire variant
de 10,00 $ à 15,75 $ selon le lieu de pratique du médecin. Le coût du traitement
d’un appel par l’infirmière d’Info-Santé est
de 6,00 $ (taux horaire moyen/nombre
d’appels pour chaque heure).
L’économie réalisée sur une période de
quatre mois a été extrapolée pour une période d’un an. Elle a été calculée en tenant
pour acquis que l’échantillon est représentatif de la population visée, soit la clientèle
ayant utilisé le service Info-Santé sur cette
période de quatre mois. Ainsi le dénominateur de référence ne serait donc plus de
236 personnes (60 % de l’échantillon = 394 appels) mais plutôt de plus ou
moins 35 206 personnes (60 % de la population visée, N = 58 676 appels) soit le
nombre de personnes utilisant le service
Info-Santé CLSC et recevant uniquement
des informations et/ou conseils de la part
de l’infirmière sans être explicitement
MARCH – APRIL 1998
référées à d’autres ressources professionnelles médicales. Ces personnes utilisent
donc en principe une seule ressource du
réseau : Info-Santé CLSC. En se référant à
la répartition des intentions des usagers
telle que décrite précédemment, nous
avons calculé les coûts associés aux recours
évités à d’autres services et ressources du
réseau : 10 913 visites à l’urgence
(680 862,07 $), 2 042 visites en clinique
externe (51 887,22 $), 9 646 visites en
cabinet médical privé (141 796,20 $) et
2 112 visites aux services courants d’un
CLSC (21 120,00 $). Ceci représente une
facture totale de 895 665,49 $. Les coûts
d’utilisation du service Info-Santé par
24 713 personnes ayant reçu des conseils
sans avoir à recourir à une ressource médicale (10,63 $, coût unitaire d’un appel à
Info-Santé) sont de 262 699,19 $. On
constate donc une économie totale de
632 966,30 $ pour une période de quatre
mois et une économie annuelle de
1 898 898,90 $. Cette économie annuelle
de près de deux millions de dollars est de
plus une estimation plutôt conservatrice
car elle ne tient pas compte des consultations possibles auprès d’un médecin spécialiste, ni de la récurrence des visites
médicales reliée au suivi souvent recommandé aux usagers pour évaluer l’évolution
de la situation.
DISCUSSION
Les sujets de la présente étude ont été
sélectionnés par un procédé d’échantillonnage aléatoire proportionnel au nombre
d’appels par quart de travail pour le service
Info-Santé s’adressant à la population en
général. D’emblée, il faut souligner
qu’Info-Santé général s’adresse à une clientèle qui exclue les personnes inscrites aux
services d’accessibilité 24/7 (maintien à
domicile), la ligne spécialisée MTS provinciale, la télésurveillance pour les personnes
âgées et le service alerte et coordination des
urgences. Il n’est donc pas surprenant de
constater que le profil des répondants ne
correspond pas nécessairement au profil de
certains groupes de la population en
général, notamment la population des personnes âgées de 65 ans et plus (7 % dans
l’étude et 12 % dans la population). De
plus les personnes qui appellent à Info-
Santé sont plus scolarisées que la population en général (21 % dans l’étude vs près
de 10 % dans la population). Info-Santé
général ne rejoint donc pas nécessairement
les clientèles les plus utilisatrices des services
d’urgence ou des autres ressources du
réseau. Il faut en conséquence nuancer les
résultats concernant les recours évités.
D’une part, si les personnes qui appellent à
Info-Santé général étaient effectivement
celles qui, en général, consomment plus
régulièrement les services les plus coûteux,
il est possible que l’estimation de
l’économie réalisée ait été différente de celle
présentée ici. D’autre part, on peut aussi
s’interroger si Info-Santé général rejoignait
davantage les personnes potentiellement
moins outillées (en faisant référence à la
scolarité) pour résoudre elles-mêmes leurs
problèmes de santé, ces personnes auraientelles déclaré dans les mêmes proportions,
être plus en mesure de solutionner ellesmêmes leur problème après un appel à
Info-Santé. Les personnes interrogées dans
la présente étude représentent davantage
une certaine partie de la population qui a
recours à un service de première ligne pour
s’éviter des démarches souvent inutiles et
pour mettre à profit leur potentiel de participation à la résolution des problèmes de
santé mineurs et courants.
Nous n’avons aucune raison a priori de
croire que l’échantillon soit biaisé quant à sa
représentativité pour les périodes d’achalandage du service Info-Santé général. Il faut
par ailleurs questionner le fait que pour
chaque usager sélectionné, il n’y avait qu’un
essai pour le rejoindre faute de quoi l’usager
éligible suivant était sélectionné. Un total de
1 152 appels de relance téléphonique ont
ainsi été faits. De ce nombre, 758 se sont
avérés impossibles au moment prévu pour
diverses raisons, dont la principale est
l’absence de l’usager au moment de la
relance ou la présence d’un répondeur téléphonique (N = 586). Un nombre de 172
personnes ont été rejointes, mais pour
diverses raisons, elles ne pouvaient participer
à l’étude. Parmi celles-ci, une seule s’est dite
insatisfaite globalement du service
Info-Santé et 11 ont souligné une insatisfaction. Même si les autres 160 personnes
rejointes qui n’ont pu participer à l’étude
avaient déclaré être très insatisfaites du service Info-Santé, elles n’auraient pas changé
CANADIAN JOURNAL OF PUBLIC HEALTH 127
SATISFACTION, AUTONOMIE ET ÉCONOMIE
les résultats globaux sur la satisfaction
puisqu’elles ne constituent que 14 % de
l’ensemble (N = 1 152) des appels de
relance. Quant aux 758 personnes non
rejointes, aucun indice ne nous permet de
croire à leur insatisfaction du service InfoSanté. Elles peuvent par ailleurs présenter
des caractéristiques particulières telles être les
personnes les plus occupées et les personnes
qui s’absentent plus souvent et plus
longtemps de leur domicile. Au total, 53
périodes de relances téléphoniques ont été
réalisées par l’intervieweuse (16 en matinée,
10 en après-midi et 27 en soirée). Cette
répartition des périodes de relance avait pour
but de maximiser les chances de rejoindre le
plus de personnes éligibles possibles.
Les résultats observés dans cette étude
évaluative sont en général très positifs et ce
tant pour la satisfaction des usagers que
pour leur capacité d’auto-soin. Le taux de
satisfaction des usagers du service
Info-Santé de Québec s’apparente largement à ceux observés dans les études évaluatives des services Info-Santé d’autres régions
du Québec tels que relatés dans le document intitulé « Portrait des services existants et synthèse des évaluations
antérieures.»1 Ces études évaluatives ont
également été faites par des relances téléphoniques auprès d’échantillons aléatoires
de tailles variables (96 à 1 200 sujets).
Dans la présente étude, on observe
cependant un taux d’usagers assez insatisfaits du délai d’attente et de la cohérence
des informations reçues pour le même
problème de la part d’Info-Santé comparées
à celles reçues de d’autres ressources professionnelles. Dans le premier cas, l’insatisfaction reliée au délai d’attente (moyenne de la
durée d’attente perçue = 12 minutes) n’est
pas surprenante. Les gens s’attendent
vraisemblablement à une réponse plus rapide si on se réfère à la proportion de personnes inquiètes et nerveuses au moment de
l’appel. Quant à l’insatisfaction à l’égard de
la cohérence des informations reçues, il faut
apporter certaines réserves. L’information
recueillie est très subjective et rien ne nous
permettait d’établir si les personnes ont
posé les mêmes questions aux différentes
personnes consultées. Il faut néanmoins
considérer cette information comme
importante puisque si les usagers ont la perception qu’ils reçoivent des informations et
128
des conseils contradictoires, sans doute
seront-ils moins enclins à consulter une
ressource qui leur est moins familière et
dont ils connaissent moins la valeur.
Qu’en est-il de la validité des résultats sur
l’autonomie ou la capacité d’auto-soin ?
Cette variable a été mesurée à partir de la
perception des usagers. Les résultats
généralement positifs à l’égard de la capacité de prise en charge chez les usagers interrogés dans la présente étude s’apparentent
aux résultats observés dans les autres études
évaluatives réalisées antérieurement dans
d’autres régions de Québec.1 Quel intérêt
l’usager aurait-il à déclarer une réalité factice ? Le fait que la très grande majorité des
usagers affirme être satisfaite du service
Info-Santé milite en faveur de la véracité de
leurs affirmations à l’égard de leur capacité
d’auto-soin suite à l’appel.
Finalement, l’estimation d’une économie
potentielle de près de deux millions de dollars
annuellement pour la seule région de Québec
à partir de l’analyse des intentions des usagers
doit être regardée avec réserve. Certes, cette
donnée présente une limite au niveau de la
validité puisqu’il est difficile d’évaluer la
probabilité des actions résultant des intentions. Quelle distance y a-t-il en effet entre
l’intention et l’action ? On ne peut y répondre de façon précise d’autant plus que la population étudiée n’est pas nécessairement
celle qui utilise le plus les diverses ressources
professionnelles. Mais si on considère l’état
de nervosité et d’inquiétude avoué par plus
de 67 % des usagers et le faible pourcentage
(5,6 %) d’usagers ayant affirmé ne pas avoir
eu l’intention de consulter une autre
ressource même si Info-Santé n’avait pas
existé, on peut au moins croire qu’une bonne
proportion des personnes relancées auraient
consulté cette autre ressource pour réduire
leur inquiétude en agissant rapidement sur le
problème et en obtenant réponses à leurs
questions. Ces économies potentielles sont
non négligeables.
CONCLUSION
Cette étude descriptive révèle que le service Info-Santé de la région de Québec
atteint de façon générale ses objectifs de satisfaction et de développement de la capacité
de prise en charge chez les usagers de la
population en général. Par sa contribution
REVUE CANADIENNE DE SANTÉ PUBLIQUE
spécifique, le service Info-Santé semble
réduire les coûts associés au recours systématique à des ressources médicales
lorsqu’ils ont besoin de conseils pour participer à la solution d’un problème de santé.
La nature des intentions des usagers en
l’absence du service Info-Santé met en évidence le caractère complémentaire du
médecin omnipraticien et du service
Info-Santé. Il semble donc qu’en première
ligne, le service Info-Santé soit un service
pertinent dans le contexte actuel où les
ressources doivent être utilisées de façon
coordonnée, rationalisée et en complémentarité avec les autres ressources disponibles
du réseau.
Dans le contexte économique actuel, ce
type de service est vraisemblablement
appelé à se développer tant en première
ligne, c’est-à-dire comme premier contact
de l’usager avec le réseau de la santé, que
comme service de deuxième et troisième
lignes pour le soutien et l’éducation à la
santé des personnes souffrant de problèmes
de santé chroniques. Dans une perspective
de plus grande efficience, il serait nécessaire de poursuivre la recherche évaluative
en portant un regard critique plus direct
sur divers aspects du service, notamment,
sur sa structure (centralisée et décentralisée), sur le processus du traitement de
l’appel (évaluation du problème soumis,
communication et fonction éducative),
ainsi que sur la compétence réelle des
usagers à appliquer les conseils fournis par
l’infirmière suite à un appel à Info-Santé.
BIBLIOGRAPHIE
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téléphonique 24/7. Portrait des services existants
et synthèse des évaluations antérieures. Ministère
de la Santé et des Services sociaux, rapport écrit
par Lise Dunnigan, Service de l’évaluation de la
couverture de la qualité des services, Direction de
l’évaluation, 1995;77p.
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liste analytique des activités principales par souscentre et par établissement pour l’année financière terminée le 31 mars 1995. Coûts unitaires
des services (visite à l’urgence, visite en clinique
externe). MSSS, 1995.
3. Info-Santé CLSC -CLSC Haute-Ville de Québec
Budget annuel 1995-96. Coût unitaire d’un
appel à Info-Santé. 1996 (non-publié).
4. Régie de l’assurance maladie du Québec. Les statistiques de la RAMQ sur les coûts des services
professionnels pour la période du 1er janvier 1995
au 31 décembre 1995. Québec, 1995.
Reçu : 20 décembre 1996
Accepté : 9 juin 1997
VOLUME 89, NO. 2