Prévalence de l`incontinence urinaire d`effort selon le traumatisme

Transcription

Prévalence de l`incontinence urinaire d`effort selon le traumatisme
Prévalence de l’incontinence urinaire d’effort
selon le traumatisme obstétrical et la catégorie socio-professionnelle.
G. Philippe
(1)
(2)
(3)
(1)
, I. Clément
(2)
, I. Thaon
(3)
Service d’urologie C.H.U St jacques, Besançon
Service de médecine du travail du personnel hospitalier, C.H.U St jacques, Besançon
Service des maladies professionnelles, C.H.U St jacques, Besançon
Objectifs :
Au sein d’une population de femmes travaillant en milieu hospitalier
− apprécier la prévalence de l’IUE.
− identifier d’éventuelles conditions de travail favorisantes et la ou les catégories professionnelles les
plus touchées
− identifier les comportements favorables aux troubles urinaires.
− Identifier les traumatismes obstétricaux délétères
Méthode :
Durant un an, nous avons proposé aux femmes travaillant au C.H.U de Besançon de répondre de façon
anonyme à un auto-questionnaire lors de leur visite en médecine du travail.
Les données recueillies concernaient :
− l’âge, la profession, les activités de loisirs (sport, jardinage…),
− les antécédents gynéco-obstétricaux (période d’activité génitale, nombre de grossesses,
er
d’accouchements par voie basses, traumatismes obstétricaux, poids du 1 enfant et du plus lourd,
réalisation de séances de rééducation périnéale et abdominales)
− la notion de troubles urinaires durant la grossesse ou le post- partum
− les signes fonctionnels évocateurs d’incontinence urinaire d’effort
− le comportement mictionnel durant les périodes de repos et de travail
− en cas de signes fonctionnels : la prise en charge médicale.
L’incontinence urinaire d’effort a été définie par une réponse positive à l’une des deux questions suivantes :
Avez-vous déjà souffert de fuites urinaires à l’effort ? ou perdez-vous vos urines lorsque vous toussez , riez ,
éternuez , courrez , portez des charges lourdes , changez de position , ou marchez rapidement ?
Les analyses statistiques ont été réalisés à l’aide des logiciels BMDP et SAS.
Résultats :
1/ Description de la population
Après un an d’enquête, 1176 femmes travaillant au C.H.U avaient répondu à notre questionnaire.
Le tableau 1 présente les principales caractéristiques socio-professionnelles des participantes. Il
s’agit dans la majorité des cas (58,2%) de personnel soignant (infirmières, aides soignantes, puéricultrices,
infirmières de bloc ou anesthésites, kinésithérapeutes). Puis viennent par ordre de fréquence les personnels
administratifs (17,7%), le personnel ouvrier (agent de service, aide de cuisine, personnel de la lingerie,
jardinier…13.5%) et le personnel socio-éducatifs (éducatrices, orthophonistes…10.5%).
Tableau 1 : Principales caractéristiques socioprofessionnelles
n
(%)
moyenne
(SD)
1
Age (ans) ( n= 1158)
Nombre moyen d’enfants
− aucun
− un ou plus
268
891
23.1%
76.9%
Profession (n=1167)
− soignants
− administratifs
− ouvrier
− socio-éducatif
679
207
158
123
(58.2)
(17.7)
(13.5)
(10.5)
Pratique d’un sport (n=1153)
772
(67)
Jardinage ( n=1041)
531
(51)
40.36
8.54
2.01
0.83
Les antécédents gynéco-obstétricaux sont rapportés au tableau 2 : Il s’agit pour les deux tiers
d’une population de femme en période d’activité génitale mais un quart d’entre - elles est en période de périménopause ou ménopause.
Tableau 2 : Antécédents gynéco-obstétricaux
n
(%)
Période génitale (n=1103)
− en période d’activité génitale
− grossesse en cours
− accouchement < 1 an
− péri-ménopause ou ménopause
746
13
70
274
(67.6)
( 1.2)
( 6.4)
(24.8)
Nombre de grossesses (n=1159)
− Nullipares
− 1 ou plus
260
899
Accouchements par voie basse (n=1140)
− Aucun
− 1 et plus
Traumatismes obstétricaux : (n=820)
− épisiotomies
− déchirures
− forceps
Poids du premier enfant (n= 883)
Poids moyen en grammes
Femmes ayant eu un 1er enfant de plus de 4000 g
Poids de l’enfant le plus lourd (n=883)
Poids moyen en grammes
Femmes ayant eu un enfant de plus de 4000 g
moyenne
(SD)
(22.4)
(77.6)
2.27
1.07
320
820
(28.1)
(71.9)
2.03
0.89
416
241
179
51.8%
31.3%
23.1%
3189
521
41
( 4.6)
3428
490
106
(12.0)
67.6 sont en période d’activité génitale pour une moyenne d’âge de 40 ans , avec en moyenne 2
enfants et 2 accouchements par voie basse.
83.1 % ont eu une lésion périnéale ( déchirure ou épisiotomie)
2/ Prévalence et facteurs de risque de l’IUE dans notre échantillon
2
Notre étude montre que la fréquence de l’incontinence urinaire d’effort (IUE) augmente avec l’âge
(p<0.0001) et le nombre d’enfants (p<0.0001).
Et que la prévalence de l’IUE varie significativement avec la période d’activité génitale (p=0.0004).
Elle est significativement plus importante durant la grossesse, en péri-ménopause et ménopause. Elle ne
semble pas plus importante chez les femmes de notre étude ayant accouché dans l’année qui a précédé
l’enquête. Peut être en raison d’une meilleure prise en charge de l’IUE dans le post-partum actuellement.
Tableau 3 : prévalence des troubles périnéo-sphinctériens
n
(%)
Incontinence urinaire d’effort (n=1159)
- Non
- Oui
635
524
(54.8)
(45.2)
Dysfonction périnéale (n=1152)
- Non
- Oui
677
475
(58.8)
(41.2)
Les facteurs de risque d’IUE : âge, grossesse et ménaupose
Tableau 4 : fréquence de l’IUE en fonction de la période d’activité hormonale
Période d’activité génitale (n=734)
Grossesse en cours (n=13)
Post-accouchement (n=70)( – un an)
Péri-ménopause et ménopause
IUE
n (%)
294 (40.1%)
OR et IC 95%
Référence
7 (53.8%)
1.75 [0.58-5.25]
28 (40.0%)
0.99 [0.60-1.65]
155 (57.2%)
45% de notre population présente des symtômes d’ IUE.
Sur ces 45%, les femmes les plus touchées sont soit en période de grossesse soit en péri-ménopause ou
ménopause ce qui démontre l’importance des variations hormonales dans la pathologie périnéosphinctérienne.
IUE et traumatisme obstétricaux
La prévalence de l’IUE augmente significativement avec :
− le nombre de grossesses (p<0.00001), et le nombre d’accouchements par voie basse
(p<0.0001),
− avec les antécédents de traumatismes du périnée : épisiotomies (p=0.0005), déchirure
périnéale (p<0.0001), et forceps (dans le cas des forceps le risque reste à la limite de la
significativité (p=0.08), probablement en raison du petit nombre de cas de femmes ayant
subie cette manœuvre dans notre population).
Troubles urinaires durant la grossesse ou l’année qui suit l’accouchement : facteur prédictif d’une
IUE ? ils doivent nous alerter.
3
L’existence de troubles urinaires dans l’année qui suit l’accouchement est associée à une plus grande
fréquence d’IUE (Odds ratio avec intervalle de confiance à 95% : 3.5 [2.52-4.82]). De même l’existence de
trouble urinaires pendant la grossesse semble également un élément prédictif ( Odds ratio : 3.03 [2.064.46]).
LE POST- PARTUM , EVOLUTION DES PRATIQUES :
Il est à noter l’évolution positive des pratiques en ce qui concerne la prise en charge du post-partum . Nous
retrouvons 45.16% de femmes de moins de 30 ans ayant eu une rééducation périnéale (simple ou couplée
avec une rééducation abdominale) contre 22.78% des femmes de 40 ans et 12.59 % des femmes de 50 ans
( tableau 5)
A signaler par ailleurs la sensibilisation plus importante des femmes de 30 à 40 ans à la rééducation
périnéale où ¼ ont fait uniquement la rééducation de plancher pelvien contre 17.74% des femmes de moins
de 30 ans plus concernées par la rééducation abdominale couplée à la rééducation périnéale( tableau 5).
Tableau 5 :
la rééducation du post-partum * : évolution des pratiques en fonction des générations
Moins 30 ans
(n = 62)
30 à 39ans
(n=271)
40 à 49ans
(n=360)
Ensemble
(n=836)
51.67%
Plus de
49ans
(n=143)
69.23%
Aucune rééducation
40.32%
32.47%
Rééducation abdominale
seule
14.52%
20.30%
25.56%
18.18%
21.77%
Rééducation abdominale et
périnéale
27.42%
22.51%
11.11%
3.50%
14.71%
Rééducation périnéale seule
17.74%
24.72%
11.67%
9.09%
15.91%
47.61%
* chez celles-ci ayant accouché au moins une fois par voie basse
Tableau 6 :
la rééducation du post-partum * en fonction des symptômes durant le post-partum (p<0.00001)
Aucune rééducation
Rééducation abdominale seule
Problèmes urinaires après l’accouchement
non
oui
312 (55.81%)
66 (27.73%)
135 (24.15%)
39 (16.39%)
Rééducation abdominale et périnéale
65 (11.63%)
54 (22.69%)
Rééducation périnéale seule
47 (8.41%)
79 (33.19%)
559 (70.14%)
238 (29.86%)
Total
* chez celles-ci ayant accouché au moins une fois par voie basse
parmi les femmes ayant eu des troubles urinaires en post-partum :
55.88% ont eu une rééducation abdomino-périnéale
33.19% ont eu une rééducation périnéale pure curative.
4
Remarquons l’évolution d’une prise de conscience de l’importance d’une prise en charge dans les postpartum récents.
Facteurs de risque professionnel :
Le personnel ouvrier, le personnel soignant et le personnel socio - éducatif semble plus à risque que le
personnel administratif. Ce résultat n’est cependant significatif que pour le personnel ouvrier.
Tableau 7: Incontinence urinaire d’effort en fonction de la profession
(Odds ratio avec intervalle de confiance à 95%)
Personnel administratif (n=204)
IUE
n (%)
80 (38.6%)
OR et IC 95%
Référence
Personnel socio-éducatif (n=123)
123 (49.6%)
1.52 [0.97-2.40]
Personnel soignant (n=668)
297 (43.7%)
1.24 [0.90-1.71]
Personnel ouvrier (n=155)
81 (51.3%)
1.70 [1.11-2.59]
TABLEAU 8 : COMPORTEMENT HYDRIQUE AU TRAVAIL.
Catégorie
professionnelle
Boisson
- de 0.5 l.
1l à 1.5 l
Plus de 2 l.
administratif
38.42%
55.67%
5.91%
ouvrier
38.10%
51.02%
10.88%
soignant
39.16%
52.56%
8.28%
Socio-éducatif
34.75%
59.32%
5.93%
Total
38.43%
53.62%
7.95%
40% des femmes hospitalières boivent peu (0.5 l) pendant leur journées de travail par
manque de temps (cadences),oubli, peur d’avoir envie d’uriner.
TABLEAU 9 : COMPORTEMENT HYDRIQUE AU REPOS
Catégorie
professionnelle
Boisson
- de 0.5 l.
1l à 1.5 l
Plus de 2 l.
administratif
21.84%
68.65%
9.71%
ouvrier
27.10%
58.06%
14.84%
5
soignant
8.46%
74.78%
16.77%
Socio-éducatif
12.40%
79.34%
8.26%
Total
13.75%
71.89%
14.36%
Le comportement hydrique s’améliore pendant les journées de repos (71.89% boivent 1l à 1.5 l ) sauf pour
la catégorie du personnel ouvrier qui modifie peu la prise de boisson.
TABLEAU 10: COMPORTEMENT MICTIONNEL AU TRAVAIL
Catégorie
professionnelle
Miction
1 à 4 fois / jour
5 à 7 fois / jour
Plus de 7 fois/jour
administratif
57.56%
35.61%
6.83%
ouvrier
65.81%
23.23%
10.97%
soignant
74.14%
21.97%
3.89%
Socio-éducatif
63.41%
30.89%
5.69%
Total
68.92%
25.52%
5.56%
53 % des femmes estiment que les cadences de travail ne leur permettent pas toujours de se rendre aux
toilettes dès qu’elles en ressentent le besoin.
12.8% estiment que la localisation des toilettes les obligent à retarder la miction.
TABLEAU 11 : COMPORTEMENT MICTIONNEL AU REPOS
Catégorie
professionnelle
Miction
1 à 4 fois / jour
5 à 7 fois / jour
Plus de 7 fois/jour
administratif
35.00%
52.50%
12.50%
ouvrier
40.52%
46.41%
13.07%
soignant
29.99%
55.17%
14.84%
Socio-éducatif
36.36%
48.76%
14.88%
Total
32.95%
52.85%
14.20%
6
TABLEAU 12 : ACTIVITEE SPORTIVE
Catégorie
professionnelle
aerobic
Abdo
tennis
footing
administratif
8.69%
22.22%
1.93%
9.17%
ouvrières
4.43%
11.39%
2.53%
6.96%
soignants
7.95%
21.94%
6.62%
12.37%
Socio-éducatif
4.87%
16.26%
3.25%
15.44%
En ce qui concerne les activités sportives ( ont été pris en compte l’aérobic, le tennis , la course, la
gymnastique abdominale) :
70.04% du personnel administratif pratique une activité sportive
50.63% du personnel ouvrier
67.74% des soignantes
68.29% du personnel socio-éducatif
à facteurs de risques égaux, le sport n’en est pas un pour la catégorie professionnelle ouvrière.
TABLEAU 13 : PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE
Catégorie professionnelle
Pas de
rééducation
Abdo
Abdo
+périnée
périnée
administratif
57.14%
25.00%
8.93%
8.93%
ouvrières
67.69%
soignants
45.32%
Socio-éducatif
36.96%
13.08%
6.15%
13.08%
21.80%
16.44%
16.44%
28.26%
18.48%
16.30%
En analyse multivariée, à âge égal, période d’activité génitale identique, nombre d’accouchements par voie
basse égal, nombre de lésions périnéales égales, à facteur de risque sportif moindre, il existe pour le
personnel féminin ouvrier un risque plus important d’IUE ( sur-risque x par 2 par rapport au personnel
administratif) ( ODDS – ratio=2,12, intervalle de confiance 1,27-3,54)
De plus, cette catégorie professionnelle certainement par manque d’information, ne change guère de
comportement mictionnel et hydrique pendant les journées de repos. Seules 25% changent leur
comportement mictionnel et vont uriner plus souvent contre 45% des soignantes, 22% les administratives et
27% de socio – éducatives.
Quant à la prise en charge des troubles , 67.69% ne sollicitent aucune prise en charge thérapeutique (contre
45.32% des soignantes).
7
CONCLUSION :
Les situations délétères professionnelles suspectées étant les manutentions fréquentes, le personnel
soignant est lui aussi confronté à ce facteur de risque et présente 9% de moins d’IUE.
Ces dernières sont par contre plus vigilantes au comportement mictionnel et plus sensibilisées à la
prévention.
Il est donc intéressant de se poser la question de l’importance du rôle de l’information et de la connaissance
des moyens de prise en charge ainsi que des comportements nuisibles dans l’évolution de la pathologie au
sein de la catégorie professionnelle ouvrière.
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