communiqué de presse

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communiqué de presse
Un beau mariage : l’enterrement de lits de Long Séjour.
De 1991 à 2010, j’étais le médecin du service de soins de longue durée (Long Séjour) du
Centre Hospitalier d’Albi. Une réduction sans précédent du nombre des lits est annoncée en
2012 : le tiers ou la moitié d’entre eux vont être supprimés. Cette razzia s’inscrit dans le
contexte plus général de restrictions des services publics. Comment en est-on arrivé là ?
Dans leur quasi-totalité hospitaliers publics, les services de Long Séjour ont l’audace de
représenter, au début des années 2000, plus de 17 % des lits d’hôpital en France, qu’ils
soient publics, privés ou relevant du secteur psychiatrique. Ils hébergent et soignent des
personnes le plus souvent âgées et présentant des maladies exigeant une surveillance
constante afin de limiter au maximum les souffrances liées à leur situation.
Les Longs Séjours sont moins mal lotis en personnel que les maisons de retraite
(établissements pour personnes âgées dépendantes = EHPAD) avec des ratios de
personnel allant généralement en 2003 du double au simple. Dans le Tarn comme ailleurs, la
permanence médicale y est assurée, une infirmière est présente la nuit et un plateau
technique se trouve à proximité.
Avant les études de terrain qui devaient contredire cette assertion, on leur reproche
d’héberger les mêmes résidents que les maisons de retraite. Puis ils sont débaptisés : unités
au lieu de services (Unités de Soins de Longue Durée = USLD). Certes une enquête montre
à l’évidence que les patients « hospitalo-requérants » existent bel et bien. Ils se trouvent mal
répartis entre une minorité de patients déjà présents en Long Séjour et une majorité
hébergée en maison de retraite. L’ensemble équivaut au nombre de lits existants en USLD
avant réduction. Il faudrait donc inciter les uns et les autres à rejoindre la structure la mieux
adaptée à leur dépendance et surtout à leur état de santé.
Que nenni. Dans un grand élan réducteur, le nombre de lits fond comme neige au soleil.
Plus grave : ce sont des services entiers qui disparaissent, donc un accès de proximité
devenu impossible. C’est le cas à Graulhet et à Gaillac au cours des années 2000.
Réputés onéreux, tous les moyens sont utilisés pour parvenir à les réduire : le mot
« humanisation » est insidieusement remplacé par « évaluation » devenu le seul audible.
Puis, par le biais de conventions, de coupes unilatérales, de seuils quantitatifs, de quotas, de
partitions et de « convergence », le démantèlement prend des formes variées mais
terriblement efficaces. Au point de ne laisser persister environ que 36 % des places au
niveau national.
Ainsi, le mariage entre les hôpitaux de Gaillac et d’Albi a des allures d’enterrement sur ordre.
La mariée y est en noir. Quelques 30 lits sont pris à Albi pour « habiller » Gaillac qui en
comptait 100 avant la « réforme ». Pourquoi, me direz-vous les avoir tous supprimés ? Nos
concitoyens les plus vulnérables ont besoin d’eux. Le bon sens à lui seul devrait commander
de les conserver et de les améliorer du fait des perspectives démographiques. Courteline et
Jaurès, au secours, revenez vite, ils sont devenus fous !
Dr Bernard Pradines, le 10 avril 2012